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31/05/2023 | FRANCE | N°21/01353

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 31 mai 2023, 21/01353


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 31 MAI 2023



(n° 2023/ , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01353 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDDR6



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - RG n° F20/00162





APPELANT



Monsieur [K] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3

]



Représenté par Me Sandra MORENO-FRAZAK, avocat au barreau d'ESSONNE





INTIMÉE



SAS QUALICONSULT

[Adresse 1]

[Localité 4]



Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES, avoca...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 31 MAI 2023

(n° 2023/ , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01353 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDDR6

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Octobre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire d'EVRY - RG n° F20/00162

APPELANT

Monsieur [K] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Sandra MORENO-FRAZAK, avocat au barreau d'ESSONNE

INTIMÉE

SAS QUALICONSULT

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Marie-Catherine VIGNES, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 avril 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nadège BOSSARD, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [K] [X] a été engagé par la société Qualiconsult selon contrat de travail à durée indéterminée à compter du 1er octobre 2007 en qualité de spécialiste sécurité incendie, au statut cadre, indice 2.2 coefficient 130 avec une rémunération de 3 100 euros mensuels sur 13 mois pour 218 jours de travail.

Il était affecté dans une agence à [Localité 8].

Au dernier état de la relation contractuelle, M. [K] [X] percevait un salaire fixe mensuel de 3 710 euros bruts sur 13 mois, soit un salaire mensuel de 4 019,17 euros, outre une prime de déplacement de 88,29 euros soit un salaire moyen de 4 107,46 euros.

Le 1er novembre 2016, M. [X] a été muté sur l'agence d'[Localité 6].

Le 20 octobre 2017, la société lui a notifié un blâme.

Le 22 mars 2018, il a été convoqué à un entretien préalable en vue d'une sanction disciplinaire pouvant aller jusqu'au licenciement.

L'entretien a été fixé au 5 avril 2018.

Le 24 avril 2018, la société a notifié à M. [X] son licenciement disciplinaire avec dispense d'exécution du préavis, par remise en main propre.

Aux termes de sa lettre de licenciement, il lui est reproché :

' En premier lieu, vous avez cru devoir maintenir cette attitude fautive, soit le non-respect des échéances et des délais fixés pour la restitution de vos prestations malgré les relances de votre hiérarchie ;

' En second lieu, maintien de votre pratique de passer en facturation des prestations non encore accomplies par vos soins ou de déclarer achevées des prestations non complètement accomplies,

' En troisième lieu, l'absence de production par vos soins des rapports ou des actualisations de ces derniers en vérification réglementaires après travaux ' RVRAT ' sur un certain nombre d'opération et en dernier lieu sur les opérations projets BM, GEP, BON MARCHE, Accueil Pizzeria et Labo qui a provoqué une réclamation lourde du client au bon marché

' En quatrième lieu, votre refus maintenu jusqu'à ce jour de justifier de vos absences en agence au motif que ces justifications ne vous étaient pas demandées dans votre précédent poste.

' En cinquième lieu, les anomalies sur deux dossiers-opérations révélées par les résultats de l'audit réalisé le 4 mars.

Le 21 juin 2018, M. [X] a saisi le conseil de prud'hommes d'Evry des demandes suivantes :

- dire et juger que le licenciement ne repose pas sur une cause réelle et sérieuse

- annuler le blâme du 20 octobre 2017

- condamner la Société aux sommes suivantes

- Dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire 10.000 €

- Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (équivalent à 24 mois) 100.000 €

- Dommages et intérêts pour exécution déloyale 10.000 €

- Remboursement frais professionnel 26.051,06 €

- Remboursement frais de mutuelle indûment prélevés 178,44 €

- Article 700 code de procédure civile 3.000 €

- Intérêts au taux légal

- Dépens.

Par jugement en date du 13 octobre 2020, le conseil de prud'hommes d'Evry a :

- dit que le licenciement de M. [X] pour faute est justifié,

- condamné la SASU Qualiconsult à la somme de 178,44 € au titre des prélèvements indus de la mutuelle,

- débouté M. [X] du surplus de ses demandes,

- condamné la société Qualiconsult aux dépens.

M. [X] a interjeté appel le 26 janvier 2021.

Selon ses dernières conclusions notifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 25 mars 2021 et remises au greffe le 29 mars 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens M. [X] demande de :

- infirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Evry en toutes ses dispositions et

Par voie de conséquence,

- annuler le blâme du 20 octobre 2017,

- dire et juger que le licenciement de M. [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse

- dire et juger que le licenciement de M. [X] a été prononcé dans des conditions brutales et vexatoires,

- condamner la société Qualiconsult à verser à M. [X] les sommes suivantes :

Dommages et intérêts pour licenciement brutal et vexatoire 10.000 €

Dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (équivalent à 24 mois) 100.000 €

Dommages et intérêts pour exécution déloyale 10.000 €

Remboursement de frais professionnels 26.051,06 €

Remboursement de frais de mutuelle indûment prélevés 178,44 €

Article 700 CPC 3.000 €

- ordonner la remise d'un bulletin de paie et attestation Pôle Emploi conforme sous astreinte de 50 € par jour de retard,

- assortir les condamnations pécuniaires à venir des intérêts au taux légal

- condamner aux entiers dépens.

Selon ses dernières conclusions notifiées via le réseau privé virtuel des avocats le 22 juin 2021 , auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société Qualiconsult demande la cour de :

- confirmer le jugement du conseil de prud'hommes d'Évry en ce qu'il a :

- dit que le licenciement pour faute de Monsieur [K] [X] était justifié,

- débouté M. [K] [X] du surplus de ses demandes.

- réformer le jugement du conseil de prud'hommes d'Évry en ce qui a :

- condamné la société Qualiconsult à verser à M. [K] [X] la somme de 178,44 euros au titre de prélèvements indus de cotisation de mutuelle,

- condamné la société Qualiconsult aux dépens.

Statuant à nouveau :

- débouter M. [K] [X] de ses demandes.

Y ajoutant,

- condamner M. [X] à payer à Qualiconsult la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [X] aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 février 2023.

MOTIFS :

Sur la demande d'annulation du blâme du 20 octobre 2017 :

Selon l'article L1331-1 du code du travail, en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction.

L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction.

Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

L'article L1333-2 dispose que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

La lettre de blâme du 20 octobre 2017 sanctionne M. [X] pour non respect des échéances fixées par absence de remise d'un rapport de vérification après travaux en vue d'une réunion de levée des réserves prévue le 20 septembre et qui a dû être reportée ce qui a conduit à ce que la rédaction du rapport soit confiée à un autre salarié.

M. [X] fait valoir qu'il ne lui était pas possible de respecter les délais de réalisation des rapports compte tenu de sa charge de travail. Il justifie avoir contesté cette sanction par lettre en date du 14 décembre 2017 par laquelle il indiquait avoir réalisé les rapports des phases 7 et 8 des travaux du Bon marché lesquels ont été validés sur e-rapports les 28 septembre et 3 et 4 octobre 2017 soit avant son départ en congés lesquels ont ensuite été 'dé validés' par un tiers et modifiés sans son accord.

L'employeur n'a pas répondu à cette lettre et ne formule aucun moyen en défense à cette demande d'annulation du blâme.

La charge de la preuve du bien fondé de la sanction pesant sur l'employeur, à défaut de démontrer que cette sanction était justifiée, il y a lieu d'annuler le blâme notifié le 20 octobre 2017.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur le licenciement :

En application des articles L1232-1 et L 1235-1 du code du travail dans leur rédaction applicable en l'espèce, l'administration de la preuve du caractère réel et donc existant des faits reprochés et de leur importance suffisante pour nuire au bon fonctionnement de l'entreprise et justifier le licenciement du salarié, n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et, au besoin, après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute persiste, il profite au salarié.

La lettre de licenciement reproche à M. [X] :

' le maintien d'une attitude fautive, soit le non-respect des échéances et des délais fixés pour la restitution de ses prestations malgré les relances de sa hiérarchie ;

' le maintien de sa pratique de passer en facturation des prestations non encore accomplies par ses soins ou de déclarer achevées des prestations non complètement accomplies,

' l'absence de production des rapports ou des actualisations de ces derniers en vérification réglementaires après travaux ' RVRAT ' sur un certain nombre d'opération et en dernier lieu sur les opérations projets BM, GEP, BON MARCHE, Accueil Pizzeria et Labo qui a provoqué une réclamation lourde du client au bon marché

' un refus maintenu jusqu'à ce jour de justifier de ses absences en agence au motif que ces justifications ne lui étaient pas demandées dans son précédent poste.

' des anomalies sur deux dossiers-opérations révélées par les résultats de l'audit réalisé le 4 mars.

Concernant le non respect fautif des échéances et des délais fixés, l'employeur vise quatre dossiers.

Le premier relatif à un diagnostic de sécurité incendie pour la ville d'[Localité 5] lui reproche de l'avoir réalisé un mois après la commande en date du 24 octobre 2017. Il résulte de échanges de courriels que M. [X] s'est déplacé sur site puis a confié à deux de ses collègues la réalisation du rapport ce dont il a informé son supérieur, invoquant un manque de temps pour y procéder lui-même. S'il est établi que M. [X] n'a pas réalisé ce diagnostic de manière urgente, aucune date butoir ne lui avait été notifiée avant que son employeur lui adresse un courriel le 11 décembre 2017 pour établir le rapport dans les plus brefs délais. Le caractère fautif du retard n'est pas démontré.

Le second dossier Esquisse, confié à M. [X] le 29 janvier 2018, avec demande de le traiter pour le lendemain en urgence puis pour le 5 février, n'était pas finalisé quinze jours plus tard malgré plusieurs relances de ses supérieurs. Le salarié soutient que sa charge de travail n'avait pas été prise en compte alors qu'il revenait d'un arrêt de travail ce qui constitue une justification au délai de traitement.

Le troisième dossier concerne un bâtiment du CEA 125. L'échange de courriels produit par l'employeur établit que le rapport a été finalisé un an après la commande tout en précisant que le client était 'conciliant' et le projet 'peu impactant' ce dont il résulte qu'il ne s'agissait pas d'un dossier prioritaire. Le caractère fautif de cette non priorisation du dossier n'est pas démontré.

Il en résulte que le non respect des délais et échéances n'est pas fautif.

Concernant la facturation de prestations non réalisées, l'employeur produit un courriel adressé par la responsable administrative d'agence au responsable de l'agence en date du 13 avril 2018 qui énumère 12 dossiers ' non faits ou facturés avant d'avoir été faits'. M. [X] quant à lui verse aux débats des états de facturation selon formulaires informatisés, imprimés et annotés qu'il soutient avoir transmis au service chargé de la facturation. Outre que l'employeur ne produit pas de procédure écrite applicable, il ne formule pas d'observations précises sur les rapports produits par M. [X] afin de démontrer qu'Il avait réalisées les prestations facturées. Le grief n'est dès lors pas suffisamment caractérisé.

S'agissant du grief d'absence de remise aux clients des rapports réglementaires de vérifications (et non de refus de remise), l'employeur produit un échange de courriels qui établit que M. [X] n'avait pas transmis les rapports RVRAT (rapport de vérifications réglementaires après travaux) demandés par le directeur des travaux du Bon marché en mars 2018 alors qu'ils avaient été demandés début février, lequel a exprimé son impatience auprès du supérieur hiérarchique de M. [X]. Le grief est caractérisé.

Concernant le refus de justifier de ses absences, l'employeur produit un courriel que M. [X] a adressé à son supérieur à la suite d'une entrevue au cours de laquelle ce dernier lui a demandé de justifier de ses absences à l'agence. M. [X] lui a demandé en réponse dans ce courriel de lui 'affirmer l'existence d'un note de service ou au sein du groupe relatif aux déplacements professionnels'. En l'absence de mise en demeure de justifier de ses absences, cette seule pièce, dont le sens est équivoque et ne permet pas de déterminer s'il est relatif à des absences au siège de l'agence à raison de déplacements ou d'absences par prise de congés non autorisées, est insuffisante à caractériser le grief. Celui-ci n'est donc pas établi.

Sur les carences relevées dans l'audit du 4 mars 2018, sur deux dossiers opérations, il ya lieu de constater que ledit audit n'est pas versé aux débats de sorte qu'aucune vérification de la matérialité des faits reprochés ne peut être effectuée. Le grief n'est pas établi.

En conséquence, le seul grief établi d'absence de remise à un client dans le délai attendu des rapports réglementaires de vérifications ne revêt pas une gravité suffisante pour justifier le licenciement notifié. Celui-ci est en conséquence dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a jugé que le licenciement était justifié.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

En vertu de l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés, pour une ancienneté de dix années entre 3 et 10 mois de salaire.

Le salarié demande à la cour d'écarter le plafonnement de l'indemnité considérant qu'il n'assure pas à M. [X] une réparation adéquate et appropriée de son préjudice au sens de l'article 10 de la convention 158 de l'OIT et de l'article 24 de la charte sociale européenne du 3 mai 1996, compte tenu de son âge de 61 ans et du délai qui lui a été nécessaire pour retrouver un emploi le 23 avril 2019 avec une perte de rémunération.

Toutefois, les dispositions de la Charte sociale européenne selon lesquelles les Etats contractants ont entendu reconnaître des principes et des objectifs poursuivis par tous les moyens utiles, dont la mise en oeuvre nécessite qu'ils prennent des actes complémentaires d'application et dont ils ont réservé le contrôle au seul système spécifique visé par la partie IV, ne sont pas d'effet direct en droit interne dans un litige entre particuliers.

L'invocation de son article 24 ne peut dès lors pas conduire à écarter l'application des dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017.

En outre, si les stipulations de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT), qui créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale de la convention, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire, sont d'effet direct en droit interne, les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi et assurent le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur, sont de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail (OIT).

Il en résulte que les dispositions de l'article L. 1235-3 du code du travail sont compatibles avec les stipulations de l'article 10 de la convention précitée.

Il appartient dès lors seulement au juge prud'homal d'apprécier la situation concrète du salarié pour déterminer le montant de l'indemnité due entre les montants minimaux et maximaux déterminés par l'article L. 1235-3 du code du travail.

Au regard de l'âge du salaire, de sa qualification, de son salaire des six derniers mois de et du délai qui lui a été nécessaire pour retrouver un emploi, le préjudice par lui subi sera réparé par l'allocation de la somme de 40 000 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les dommages-intérêts pour circonstances brutales et vexatoires :

Le salarié expose que le 23 avril 2018, vers 16H45, il a reçu un appel de son agence, qu'étant en visite de commission sécurité pour la vérification des travaux concernant l'hôtel du Carré à [Localité 7], il n'a pas pu répondre mais a rappelé l'agence vers 17H15. La responsable administrative d'agence n'étant pas joignable, M. [B], son collègue, lui a indiqué qu'il devait impérativement passer à l'agence lequel lui aurait dit « tu es viré par un licenciement immédiat » et de venir à l'agence pour rendre ses affaires.

Il soutient que ses accès professionnels ont été immédiatement coupés et qu'il ne pouvait plus se connecter à son ordinateur professionnel.

M. [X] a relaté lesdites circonstances dans un courriel adressé à la DIRECCTE le 23 avril 2018 à 23H57 et a sollicité des renseignements sur les modalités de notification d'un licenciement.

Au regard de ces éléments, le salarié caractérise des circonstances brutales et vexatoires de la rupture du contrat de travail lesquelles justifient de lui allouer 2 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les frais professionnels :

Selon l'article 7 du contrat de travail, ' les frais professionnels engagés par M. [X] [K] lui seront remboursés selon les modalités définies par notes de service. Pour ses déplacements professionnels, il est mis à la disposition de M. [X] [K] un véhicule de société de type Renault Clio Diesel 2 places société ou similaire dont l'entretien et le carburant sont pris en charge par la société.'

Il n'est pas contesté que M. [X] a utilisé son véhicule personnel.

M. [X] soutient ne pas avoir perçu la totalité des indemnités kilométriques dues et sollicite en outre le remboursement des pneumatiques et des dépenses de papeteries.

La note de service produite par la société, en vigueur à compter du 1er mai 2013, mentionne que le remboursement des frais se fera sur la base d'un barème kilométrique indicatif de l'URSSAF indépendant du kilométrage et dans la limite d'un plafond annuel de 4 500 euros dans lequel sont inclus l'entretien du véhicule et les pneus.

Le décompte établi par M. [X] se fonde sur un barème distinct de celui invoqué par l'employeur de sorte qu'il ne peut servir de base à l'indemnisation.

Par ailleurs, M. [X] ne démontre pas le coût réel de ses frais exposé pour son véhicule (carburant, entretien, pneus) et de papeterie ni le caractère disproportionné de l'indemnité forfaitaire de 4 500 euros annuels.

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

Le salarié fait valoir qu'il avait interpellé à plusieurs reprises sa direction et les représentants du personnel sur ses conditions de travail, et qu'aucune réponse ne lui a été véritablement apportée. Il invoque également l'irrégularité du blâme au soutien de sa demande.

L'absence de justification du blâme, annulé par la cour, caractérise une exécution déloyale du contrat de travail qui sera réparée par l'allocation de la somme de 2 000 euros.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur la demande de remboursement frais de mutuelle indûment prélevés 178,44 €

M. [X] fait grief à son employeur d'avoir prélevé 14,87 euros par mois de cotisation mutuelle sur son salaire en 2013 alors qu'il avait une mutuelle personnelle depuis son embauche, avant l'obligation faite à l'employeur de proposer une mutuelle à ses salariés.

L'employeur répond que le salarié a fait valoir tardivement qu'il remplissait les conditions pour ne pas être affilié à la mutuelle souscrite par l'entreprise.

M. [X] ne justifie que de 3 prélèvements de 14,87 euros au cours des mois de janvier, février et décembre 2013 et d'échanges de courriels avec le service des ressources humaines dont il résulte qu'il n'avait pas adhéré à la mutuelle d'entreprise.

Les prélèvements étant injustifiés, la société est condamné à lui payer la somme de 44,61 euros à titre de remboursement frais de mutuelle indûment prélevés .

Le jugement entrepris sera infirmé en son quantum.

Sur la remise des documents de rupture :

La société Qualiconsult est condamnée à remettre à M. [X] un bulletin de paie et une attestation destinée à Pôle emploi conformes au présent arrêt.

Les circonstances de la cause ne justifient pas le prononcé d'une astreinte.

Sur les intérêts :

Conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit le 17 juillet 2018 pour celles qui étaient exigibles au moment de sa saisine.

En vertu de l'article 1231-7 du code civil, les dommages et intérêts alloués sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société Qualiconsult est condamné aux dépens d'appel et au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de frais professionnels,

statuant à nouveau,

Annule le blâme notifié le 20 octobre 2017,

Juge que le licenciement de M. [K] [X] est dépourvu de cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Qualiconsult à payer à M. [K] [X] les sommes de :

- 40 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture brutale et vexatoire,

- 2 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 44,61 euros à titre de remboursement frais de mutuelle indûment prélevés,

Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 17 juillet 2018 et les créances indemnitaires produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt,

Condamne la société Qualiconsult à remettre à M. [X] un bulletin de paie et une attestation destinée à Pôle emploi conformes au présent arrêt, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt,

Rejette la demande d'astreinte,

Condamne la société Qualiconsult au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Qualiconsult aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/01353
Date de la décision : 31/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-31;21.01353 ?
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