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31/05/2023 | FRANCE | N°21/01321

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 31 mai 2023, 21/01321


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 31 MAI 2023



(n° 2023/ , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01321 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDDN2



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Octobre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/06719





APPELANTE



Madame [E] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 4]
>

Représentée par Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 629





INTIMÉE



S.A.S.U. REFLEXE MULTIMEDIA & SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 31 MAI 2023

(n° 2023/ , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/01321 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDDN2

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Octobre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/06719

APPELANTE

Madame [E] [Y]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT, avocat au barreau de VERSAILLES, toque : 629

INTIMÉE

S.A.S.U. REFLEXE MULTIMEDIA & SERVICES

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Géraldine CHICAL, avocat au barreau de PARIS, toque : R026

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 03 avril 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nadège BOSSARD, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Mme [E] [Y] a été engagée par la société Reflexe Multimedia et Services selon contrat de travail à durée indéterminée en date du 27 septembre 2017, avec effet à compter du 2 octobre 2017, en qualité de chargée de recrutement, statut non cadre, position 2.2, coefficient 310, avec une rémunération mensuelle brute de 2.000 euros pour 151,67 heures et une commission sur la marge nette (revenus bruts - coûts) générée par les candidats recrutés et placés chez les clients de l'entreprise, versée chaque mois suite aux règlements clients et d'une rémunération fixée à 17% de la marge nette mensuelle, réparties comme suit : générée sur les candidats recrutés et/ou suivi (10%), candidats positionnés (7%) versée pendant une durée de 6 mois maximum.

La société emploie plus de dix salariés.

La convention collective applicable est la convention collective nationale des bureaux d'études techniques (dite Syntec).

Mme [Y] a été placée en arrêt de travail à compter du 4 mai 2018 lequel a été prolongé jusqu'au 10 septembre 2018.

Le 4 septembre 2018, Mme [Y] a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Par courrier du 8 octobre 2018, elle a pris acte de la rupture de son contrat de travail.

Par jugement en date du 27 octobre 2020, le conseil de prud'hommes a :

- jugé que la prise d'acte produisait les effets d'une démission,

- a condamné Mme [Y] à verser à la société Reflexe Multimedia et Services la somme de 30 98 € à titre d'indemnité de préavis,

- rejeté les autres demandes de Mme [Y],

- rejeté les demandes reconventionnelles de la société.

Mme [Y] a interjeté appel le 26 janvier 2021.

Selon ses dernières conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 14 avril 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, Mme [Y] demande à la cour de :

Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Paris le 27 octobre 2020 sauf en ce qu'il a débouté la société Reflexe Multimedia de ses demandes reconventionnelles.

En conséquence

Prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mademoiselle [Y] aux torts de la société Reflex Multimedia Services

En conséquence,

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme 839,02 € au titre de l'indemnité légale de licenciement.

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme de 3098 € au titre du préavis et 309 €, au titre des congés payés afférents.

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme de 3098 € à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme de 9 000 € à titre de rappel de salaire , et 900 € au titre des congés payés afférents, à parfaire au jour du jugement.

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme de 492 € à titre de rappel de salaire et 49 € relatifs aux congés payés y afférents compte tenu de la retenue abusive opérée sur le solde de tout compte de [U] [Y] ,

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme de 12 392 € pour manquement de l'employeur à son obligation de loyauté

Ordonner la capitalisation des intérêts sur ces sommes, sur le fondement de l'article 1154 du Code civil ;

Condamner la société Reflex Multimedia Services au paiement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.

Condamner la société Reflex Multimedia Services aux dépens.

Rappeler que les intérêts au taux légal courent de plein droit à compter de la saisine du conseil de prud'hommes sur les créances de nature salariale, en vertu de l'article 1153 du code civil et les faire courir à compter de cette date sur les créances de nature indemnitaire par application de l'article 1153-1 du code civil.

Ordonner la capitalisation des intérêts,

Débouter la société Reflex Multimedia Services de l'ensemble de ses demandes, plus amples ou contraires.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 17 juin 2021, la société Reflexe Multimedia et Services demande de :

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que la prise d'acte de Mme [E] [Y] devait s'analyser en une démission ;

Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il condamné Mme [E] [Y] au paiement de la somme de 3.098 € à titre d'indemnité de préavis ;

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Reflexe de sa demande reconventionnelle relative à la condamnation de Mme [E] [Y] au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la société Reflexe de sa demande reconventionnelle relative à la condamnation de Mme [E] [Y] au paiement de la somme de 2.000 € de dommages et intérêts pour restitution tardive du matériel à la société Reflexe;

En conséquence,

Débouter Mme [E] [Y] de l'intégralité de ses demandes ;

Condamner Mme [E] [Y] au paiement de la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;

Condamner Mme [E] [Y] au paiement de la somme de 2.000 € de dommages et intérêts pour restitution tardive du matériel à la société Reflexe ;

Condamner Mme [E] [Y] au paiement de la somme de 5.000 € en application de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 7 février 2023.

MOTIFS :

Sur le rappel de rémunération variable :

La rémunération variable d'un montant de 17% de la marge nette mensuelle générée par les candidats recrutés et placés chez les clients de l'entreprise se décompose en :

- 10% générée sur les candidats recrutés et/ou suivis

- 7% pour les candidats positionnés versée pendant une durée de 6 mois maximum.

Mme [Y] expose concernant ces deux types de rémunération variable que l'une était relative aux embauches en contrat de travail à durée indéterminée qu'elle percevait en une seule foi, que l'autre était relative aux contrats de travail à durée indéterminée de chantiers qu'elle percevait pendant six mois.

Elle sollicite la somme de 9 000 euros au titre de cette rémunération variable pour la période de novembre 2017 à avril 2018.

Cette rémunération variable étant fonction des recrutements opérés par Mme [Y], elle était acquise par la salariée pour chaque recrutement, fait générateur du droit. Le fait que Mme [Y] ait été en arrêt de travail au jour du versement de cette rémunération variable ne saurait être privatif de cette rémunération qui était acquise au jour du recrutement même si son versement mensuel était conditionné aux règlements des clients.

Si l'un des critères de cette rémunération était le suivi des personnes recrutés, mission qu'elle ne pouvait assurer au cours de son arrêt de travail, ce critère ne pouvait conduire au plus qu'à une réduction de sa rémunération variable et non à sa suppression. Mme [Y] considère que le terme 'suivi' recouvrait une augmentation du taux de rémunération variable au fur et mesure que le contrat du salarié recruté se poursuivait et ne consistait pas en des actions précises de suivi.

Le bulletin de paie de novembre 2017 mentionne une prime de recrutement de 61,20 euros, et le bulletin de paie de décembre 2017 une prime de recrutement de 102 euros et une régularisation pour novembre 2017 de 102 euros également.

L'employeur soutient qu'il s'agissait d'avances qui ont rempli la salariée de ses droits.

Mme [Y] produit un tableau de calcul des rémunérations variables qu'elle revendique, établi par un cabinet comptable sur la base des contrats de recrutements auxquels elle avait procédé. Cette étude conclut à une créance de 6 512,41 euros sur la période de mars à août 2018.

L'employeur conteste le calcul effectué par le comptable mandaté par Mme [Y] exposant qu'il ne disposait pas des éléments nécessaires pour effectuer une étude réaliste et sincère et produit les certificats de travail de quatre des neuf salariés recrutés par Mme [Y] pour établir que leurs contrats ont pris fin de manière anticipée le 31 mai pour trois d'entre eux et le 27 avril pour le quatrième.

Mme [Y] ayant été en arrêt de travail du 4 mai 2018 lequel a été prolongé jusqu'au 27 août 2018, elle n'a pas pu procéder à de nouveaux recrutements au cours de cette période. Seuls les contrats en cours lui ouvraient droit à une rémunération variable.

Au regard de l'ensemble de ces éléments, la rémunération variable due à Mme [Y] s'élève à 4 500 euros outre 450 euros de congés payés y afférents.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur la prise d'acte :

La prise d'acte de la rupture produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse lorsque les manquements de l'employeur invoqués par le salarié sont établis et suffisamment graves pour justifier la rupture. A défaut, elle produit les effets d'une démission.

La salariée fait valoir qu'elle a subi un harcèlement moral et sexuel de la part de son employeur, qu'elle n'a pas bénéficié de visite médicale alors qu'elle justifiait d'un état de santé dégradé dans le cadre de l'exécution de son contrat de travail et qu'elle percevait une rémunération dont les modalités de calcul particulièrement obscures ne lui ont jamais été révélées malgré ses demandes répétées.

Il résulte des éléments sus énoncés que l'employeur n'a pas communiqué à sa salariée les éléments précis de calcul de la rémunération variable prévue par le contrat de travail.

Concernant l'absence de visite médicale d'embauche, elle n'est pas de nature à justifier la rupture du contrat de travail, s'agissant d'un emploi tertiaire qui n'exposait pas l'a salariée à un risque direct et immédiat pour sa santé.

S'agissant du harcèlement moral et sexuel invoqué par la salariée, en vertu de l'article L1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

Selon l'article L1153-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir des faits :

1° Soit de harcèlement sexuel, constitué par des propos ou comportements à connotation sexuelle répétés qui soit portent atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile ou offensante ;

2° Soit assimilés au harcèlement sexuel, consistant en toute forme de pression grave, même non répétée, exercée dans le but réel ou apparent d'obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci soit recherché au profit de l'auteur des faits ou au profit d'un tiers.

L'article L1154-1 prévoit que lorsque survient un litige relatif à l'application des articles L. 1152-1 à L. 1152-3 et L. 1153-1 à L. 1153-4, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l'existence d'un harcèlement.

Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles.

Mme [Y] produit l'attestation de sa mère laquelle témoigne qu'au cours de la période pendant laquelle sa fille travaillait à son domicile, elle a entendu les conversations de sa fille avec son employeur et que ce dernier n'avait pas un vocabulaire adapté à un responsable d'entreprise vis-à-vis de sa fille, qu'il utilisait des mots très familiers et faisant de nombreuses réflexions désagréables à [E] [Y] telles que ' je ne sais pas à quoi tu sers dans cette société', 'tu es une incapable', que l'employeur utilisait un 'ton très odieux', lui raccrochait au nez, lui 'hurlait dessus'. Elle précise avoir vu l'état de sa fille se dégrader, perdre du poids et avoir un moral 'au plus bas'.

Les faits ainsi relatés, pris dans leur ensemble, font présumer l'existence d'un harcèlement moral.

En revanche, les échanges de courriels versés aux débats ne comportent aucun propos et ne se réfèrent à aucun fait susceptible de faire présumer un harcèlement sexuel.

L'employeur verse aux débats un courriel du 7 février 2018 aux termes duquel Mme [Y] écrivait 'je n'ai pas à me plaindre' en réponse à son employeur qui lui indiquait 'l'espoir ne fait pas tout, la preuve, tu espérais avoir un patron sympa...'. Compte tenu du lien de subordination qui limite la possibilité pour un salarié de dénoncer auprès de son employeur l'attitude de ce dernier à son égard, ce seul élément n'est pas de nature à apporter une justification objective étrangère à tout harcèlement, aux excès de langage de ce dernier envers sa salariée.

La présence de la mère de Mme [Y] à une soirée d'entreprise en décembre 2017 soit trois mois après l'embauche de sa fille et neuf mois avant la prise d'acte n'est pas plus de nature à apporter une telle justification.

La cour a dès la conviction que Mme [Y] a subi une situation de harcèlement moral laquelle en sus de l'absence d'information quant à la base de calcul de la rémunération variable et du non paiement de celle-ci en son intégralité justifie la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur.

La prise d'acte de la rupture, justifiée par un harcèlement moral, produit les effets d'un licenciement nul. Toutefois, Mme [Y] sollicite qu'il produise les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse. La cour, statuant dans les limites de la demande, juge en conséquence que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a jugé que la prise d'acte produisait les effets d'une démission et en ce qu'il a condamné Mme [Y] à payer la somme de 3 098 euros à titre d'indemnité de préavis.

Sur le manquement à l'obligation de loyauté :

Mme [Y] sollicite réparation pour avoir subi au cours de l'exécution du contrat de travail des agissements de harcèlement moral et sexuel de son employeur, pour ne pas avoir bénéficié de la moindre visite médicale et avoir été arrêtée pendant plusieurs mois tant son état de santé avait été altéré par son quotidien professionnel et pour ne pas avoir reçu, malgré ses multiples relances, de retour de l'employeur au sujet de ses problématiques de paie.

L'absence de visite médicale non contestée, l'absence d'information quant aux modalités de calcul de la rémunération variable et le harcèlement moral subi caractérisent un manquement à l'obligation de loyauté de l'employeur qui ont causé un préjudice moral à Mme [Y] lequel sera réparé par l'allocation de la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur l'indemnité légale de licenciement :

En vertu de l'article L1234-9, le salarié titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu'il compte 8 mois d'ancienneté ininterrompus au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.

Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.

L'article R1234-2 prévoit que l'indemnité de licenciement ne peut être inférieure aux montants suivants :

1° Un quart de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années jusqu'à dix ans ;

2° Un tiers de mois de salaire par année d'ancienneté pour les années à partir de dix ans.

Au regard de l'ancienneté de Mme [Y] de douze mois, délai de préavis inclus, l'employeur est condamné à lui payer la somme 839,02 euros à titre d'indemnité de licenciement.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur l'indemnité de préavis :

La prise d'acte produisant les effets d'un licenciement nul, la salariée a droit à une indemnité compensatrice de préavis.

En vertu de l'article 15 de la convention collective la durée du préavis est d'un mois.

La société Reflex Multimedia Services est en conséquence condamnée à payer à Mme [Y] la somme de 3 098 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 309 euros de congés payés y afférents.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

Selon l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés pour une ancienneté d'un an entre un et deux mois de salaire.

Au regard de sa qualification, de son âge, 29 ans au jour de la rupture du contrat, et du court délai qui lui a été nécessaire pour retrouver un emploi, le préjudice subi par Mme [Y] sera réparé par l'allocation de la somme de 3 500 euros.

Le jugement sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour restitution tardive du matériel :

Le 19 octobre 2018, la société Reflexe Multimedia et Services a sollicité auprès de Mme [Y], par courrier recommandé avec accusé réception, la restitution du matériel appartenant à l'entreprise, sous 48 heures.

Puis, le 27 octobre 2018, la société a mis en demeure Mme [Y] de restituer le matériel dans un nouveau délai de 48 heures.

Les 12 et 28 novembre 2018, le conseil de la société Reflexe Multimedia et Services a sollicité la restitution du matériel, par mail, auprès du conseil de Mme [Y].

Le 13 décembre 2018, le jour de l'audience devant le bureau de conciliation et d'orientation du conseil de prud'hommes de Paris, Mme [Y] a expédié l'ensemble du matériel par voie postale soit un mois et demi après la mise ne demeure.

Ce délai est raisonnable et ne justifie pas l'allocation de dommages-intérêts. Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

En vertu de l'article 32-1 du code de procédure civile, 'celui qui agit en justice de manière dilatoire ou abusive peut être condamné à une amende civile d'un maximum de 10.000 euros, sans préjudice des dommages et intérêts qui seraient réclamés'.

La cour infirmant le jugement ayant débouté Mme [Y] de ses demandes, c'est vainement que l'employeur soutient que la procédure engagée par Mme [Y] à l'encontre de la société Reflexe Multimedia et Services est nécessairement abusive au motif que les faits qui sont reprochés à la société Reflexe Multimedia et Services ne reposeraient sur aucun élément probant et seraient mal fondés, que les faits reprochés par Mme [Y] à l'encontre du directeur de la société, M. [Z], seraient mensongers et caractériseraient le délit de dénonciation calomnieuse.

La demande de dommages-intérêts pour procédure abusive est en conséquence rejetée. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur la demande de restitution de la somme retenue sur le solde de tout compte :

Le bulletin de paie d'octobre 2018 et le solde de tout compte mentionne une reprise sur avance de commission de 489 euros - en non 492 euros sollicités - dont l'employeur ne démontre pas le bien fondé en l'absence de production d'un décompte précis des commissions dues et payées.

La société Reflexe Multimedia et Services est en conséquence condamnée à payer à Mme [Y] la somme de 489 euros en restitution d'une retenue injustifiée et 48,90 euros de congés payés y afférents.

Le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a rejeté cette demande.

Sur les intérêts et leur capitalisation :

Conformément aux dispositions de l'article 1231-6 du code civil, les créances salariales sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la réception par la société de la convocation à comparaître devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes soit le 17 septembre 2018 pour celles qui étaient exigibles au moment de sa saisine.

En vertu de l'article 1231-7 du code civil, les dommages et intérêts alloués sont assorties d'intérêts au taux légal à compter de la présente décision.

La demande en étant judiciairement formée, il y a lieu d'ordonner la capitalisation des intérêts échus sur une année entière.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société Reflexe Multimedia et Services est condamnée aux dépens de première instance et d'appel et au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu'il a rejeté la demande de dommages-intérêts pour restitution tardive du matériel informatique et la demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

Le confirme de ces chefs,

Statuant sur les chefs infirmés et dans les limites des demandes,

Juge que la prise d'acte produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Condamne la société Reflexe Multimedia et Services à payer à Mme [Y] les sommes de :

- 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

- 839,02 euros à titre d'indemnité de licenciement,

- 3 098 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 309 euros de congés payés y afférents,

- 3 500 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 489 euros en restitution d'une retenue injustifiée et 48,90 euros de congés payés y afférents

Dit que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter du 17 septembre 2018 et les créances indemnitaires produiront intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent arrêt,

Ordonne la capitalisation des intérêts échus sur une année entière,

Rejette la demande d'indemnité compensatrice de préavis formée par la société Reflexe Multimedia et Services,

Condamne la société Reflexe Multimedia et Services au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Reflexe Multimedia et Services aux dépens de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/01321
Date de la décision : 31/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-31;21.01321 ?
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