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30/05/2023 | FRANCE | N°21/00325

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 9, 30 mai 2023, 21/00325


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 9



ORDONNANCE DU 12 MAI 2023

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2023 , 5 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00325 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD3MU





NOUS, Stéphanie GARGOULLAUD, Présidente de chambre, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cett

e Cour, assistée de Axelle MOYART, Greffière présente à l'audience et au prononcé de l'ordonnance.





Vu le recours formé par :





Madame [U] [E]

[Adresse 1]

[Loca...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 9

ORDONNANCE DU 12 MAI 2023

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2023 , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00325 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CD3MU

NOUS, Stéphanie GARGOULLAUD, Présidente de chambre, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Axelle MOYART, Greffière présente à l'audience et au prononcé de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Madame [U] [E]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Comparante en personne

Demandeur au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Maître [I] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non comparant non représenté-dispensé de comparaitre

Défendeur au recours,

Par décision réputée contradictoire, statuant par mise à disposition au greffe,

et après avoir entendu les parties présentes à notre audience publique du 13 Mars 2023 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

A cette date l'affaire a été prorogée et mise en délibéré au 30 mai 2023.

L'affaire a été mise en délibéré au 12 Mai 2023 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

****

Mme [E] a confié en 2014 à M. [X] (l'avocat) la défense de ses intérêts dans une affaire pénale relative à des faits de harcèlement imputés à Mme [Y]. Il est constant que l'avocat a préparé le dossier, procédé aux actes et citations, n'était pas présent aux audiences et que Mme [Y] a été relaxée.

Mme [E] avait également confié le 28 mai 2014 à M. [X] (l'avocat) la défense de ses intérêts dans le cadre d'une assignation contre la société Java Consulting. Une convention a été signée entre les parties à cette date prévoyant, à titre d'honoraires de diligences, la somme forfaitaire de 3 000 euros HT soit 3 600 euros TTC, couvrant " les correspondances, l'analyse juridique du dossier, les recherches juridiques, la rédaction de l'assignation et les conclusions et la plaidoirie ".

Un paiement a été effectué en trois règlements : 1 080 euros à la signature de la convention, cette somme ayant déjà été versée, 1 260 euros lors de la validation des conclusions en réplique et 1 260 euros 15 jours avant l'audience de plaidoirie Cette convention prévoyait que ces sommes ne comprenaient pas les frais d'huissier, les frais de timbres frais de greffe et hors incident de procédure et expertise.

Il était en outre prévu un honoraire de résultats de 8% des sommes versées par la société Java Consulting en cas de succès de l'action. La somme de 1 080 euros a immédiatement été payée.

Les 28 et 29 octobre, le 9 décembre 2014 et le 11 mai 2015, des factures ont ensuite été acquittées par Mme [E] pour un montant de 3 060 euros.

Faisant valoir qu'elle avait dessaisi son avocat à qui elle reprochait d'avoir abusivement perçu cette somme alors qu'elle pouvait bénéficier de l'aide juridictionnelle totale, Mme [E] a saisi le 7 octobre 2016 le bâtonnier de l'ordre des avocats de Paris d'une contestation d'honoraires aux fins de restitution des honoraires ainsi versés à M. [X].

A l'audience du 6 juin 2017, les parties, convoquées par lettres recommandées avec avis de réception du 12 mai 2017, n'ont pas comparu.

Par décision réputée contradictoire du 9 juin 2017, le bâtonnier a rejeté la requête de Mme [E] en ces termes :

" - Dit n'y avoir lieu à fixation d'honoraires qui n'ont pas été demandés pour l'appel de la décision JAVA CONSULTING,

-Déboute Mme [E] de sa demande en restitution d'honoraires,

-Déboute les parties de toute autre demande plus amples ou complémentaires ".

Mme [E] a formé un recours contre cette décision devant le premier président de la cour d'appel de Paris.

L'affaire a été renvoyée à l'audience du 5 novembre 2020, après réouverture des débats afin que le débat ait lieu avec les parties présentes. Mme [E] n'a pas comparu à l'audience des plaidoiries du 5 novembre 2020 et n'y était pas représentée.

Par ordonnance réputée contradictoire du 3 décembre 2020, le premier président de la cour d'appel de Paris a :

- dit le recours recevable ;

- confirmé la décision attaquée et, y ajoutant,

- constaté l'incompétence de la cour pour statuer sur une demande en dommages-intérêts relative au contexte du litige opposant les parties,

- condamné Mme [E] à verser à l'avocat la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- rejeté toute autre demande ;

- laissé les dépens à la charge de Mme [E].

Le 27 octobre 2022, la Cour de cassation, saisie d'un pourvoi en cassation formé par Mme [E] contre cette ordonnance, a rejeté le pourvoi (2e Civ., 27 octobre 2022, pourvoi n° 21-11.635).

Parallèlement Mme [E] avait le 8 juillet 2021, assigné M. [X] devant le tribunal de proximité de Montmorency en responsabilité aux fins de réparation des préjudices qu'elle en avait subis. Par jugement du 25 mars 2022, le tribunal a rejeté ses demandes.

Parallèlement encore, Mme [E] a saisi le Bâtonnier le 1er février 2021 pour obtenir le remboursement de la somme de 3 360 euros facturée par M. [X] et demandait en outre 2 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le délai qui était imparti au Bâtonnier pour statuer expirait donc le 1er juin à 24 heures.

En l'absence de réponse du Bâtonnier, Madame [E] a saisi la cour d'appel le 16 juin 2021.

Les parties ont été régulièrement convoquée à l'audience du 13 mars 2023.

Mme [E] a comparu en personne. Elle indique que dans ce dossier il y a une demande de révision en cours. Elle relève que n'ayant pas reçu de réponse du bâtonnier, dans un délai de 4 mois, elle est légitime à saisir le premier président de la cour d'appel, même si une révision est en cours, car l'affaire n'a jamais été terminée. Elle demande donc le remboursement des 3360 euros et précise qu'elle n'était pas présente à l'audience précédente du premier président de la cour d'appel sur ce point. Elle demande en outre le rejet des pièces 1,2,3,4 produites par Me [X] dans le présent dossier et 2900 euros d'article 700 qu'elle indique justifier.

En conséquence elle demande :

-Le remboursement des 3360 euros versés à Me [X] ;

-La condamnation de M. [X] à lui payer 900 euros de dommages-intérêts pour le préjudice subi dans le cadre de cette affaire ;

-La condamnation de M. [X] à lui payer 2 900 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.

A la demande de la présidente sur la recevabilité de sa demande, elle répond qu'elle a bien saisi la cour d'appel dans le délai d'un mois suivant sa requête, en application de l'article 176 du décret de 1991 et qu'elle considère que sa demande est recevable, en l'absence de réponse du Bâtonnier, même si une révision est en cours car cette affaire n'a jamais été purgée.

M. [X] a conclu par écrit par conclusions enregistrées au greffe le 9 mars 2023 et transmises à Mme [E] par lettre recommandée. Il a sollicité par courriel du 5 mars 2023 une dispense de se présenter à l'audience qui lui a été accordée par mention au dossier.

Il demande au premier président de :

-Déclarer irrecevable le recours de Mme [E],

-Rejeter les demandes de Madame [E],

-La condamner à lui payer 5 000 euros au titre de la procédure abusive, sur le fondement de l'article 1240 du code civil,

-La condamner à lui payer 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du CPC.

A l'audience, Mme [E] demande à nouveau la parole pour solliciter le rejet de l'ensemble de ces conclusions et maintient sa demande de déclarer irrecevables les quatre pièces produites (à savoir la notification de l'arrêt de la cour d'appel du 3 décembre 2020 (RG 17/00419) et l'arrêt lui-même (pièce 1), l'arrêt de la cour de cassation du 27 octobre 2022 pourvoi n° 21-11.635 (pièce 2), le jugement du tribunal de proximité de Montmorency (pièce 3) et l'ordonnance d'incident du 25 novembre 2022 du conseiller de la mise en état de la cour d'appel de Versailles (pièce 4)).

L'affaire a été mise en délibéré au 12 mai 2023 et le délibéré prorogé au 30 mai suivant.

SUR CE,

Sur la recevabilité de la requête de Mme [E] soulevée en défense.

1.Sur l'application des délais des recours à la requête de Mme [E] en l'absence de décision du Bâtonnier.

Il résulte de l'article 175 du décret n°91-1197 du 27 novembre 1991 organisant la profession d'avocat, d'une part, que les réclamations sont soumises au bâtonnier par toutes parties par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou remise contre récépissé et que le bâtonnier accuse réception de la réclamation et informe l'intéressé que, faute de décision dans le délai de quatre mois, il lui appartiendra de saisir le premier président de la cour d'appel dans le délai d'un mois.

L'article 176 du même décret prévoit que lorsque le bâtonnier n'a pas pris de décision dans les délais prévus à l'article 175, le premier président doit être saisi dans le mois qui suit.

En l'espèce, Mme [E] a saisi le Bâtonnier le 1er février 2021 pour obtenir le remboursement de la somme de 3 360 euros facturée par M. [X] et demandait en outre 2 900 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, le délai qui était imparti au Bâtonnier pour statuer expirait donc le 1er juin à 24 heures.

En l'absence de réponse du Bâtonnier, Mme [E] a saisi la cour d'appel le 16 juin 2021, soit dans le délai d'un mois imparti qui expirait le 1er juillet à 24 heures. A cet égard, la requête est conforme aux dispositions précitées.

2.Sur l'objet de la requête de Mme [E] et le champ de ses demandes.

Il est exact qu'une demande de restitution de sommes qui auraient été versées à tort par le client à l'avocat, demande formulée en réponse à la demande de fixation des honoraires présentée par l'avocat, entre dans le champ d'application des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 (2e Civ., 3 novembre 2011, pourvoi n° 10-25.245, Bull. 2011, II, n° 200).

Cependant, l'article 1355 du Code civil (art. 1351 ancien) énonce que " l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité ".

Cette autorité de chose jugée se distingue de la force de chose jugée qui, une fois toutes les voies de recours expirées, rend la décision de justice exécutoire. Elle est un attribut du jugement qui assure l'immutabilité aux décisions de justice, étant précisé que, lorsqu'une précédente ordonnance a dans son dispositif déclaré irrecevable la demande, l'autorité de la chose jugée attachée à cette décision interdit un nouvel examen de la même demande (2e Civ., 30 avril 2009, pourvoi n° 06-15.174).

En l'espèce, Mme [E] indique elle-même qu'elle ne soutient pas avoir versé à M. [X] d'autres sommes que la somme de 3060 qui a donné lieu à la décision du Bâtonnier du 9 juin 2017.

Le dispositif cette décision mentionne très clairement trois points qu'il convient de citer :

" - Dit n'y avoir lieu à fixation d'honoraires qui n'ont pas été demandés pour l'appel de la décision JAVA CONSULTING,

-Déboute Mme [E] de sa demande en restitution d'honoraires

-Déboute les parties de toute autre demande plus amples ou complémentaires "

Le premier président, saisi en appel par Mme [E], a confirmé cette décision et, y ajoutant, a constaté l'incompétence de la cour pour statuer sur une demande en dommages-intérêts relative au contexte du litige opposant les parties, puis condamné Mme [E] à verser à l'avocat la somme de 400 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, rejeté toute autre demande et laissé les dépens à la charge de Mme [E].

Le pourvoi contre cette ordonnance a été rejeté par un arrêt de la Cour de cassation du 27 octobre 2022, qui est cité dans les écritures de M. [X], dont l'existence n'est pas contestée et qui figurait aux nombre des pièces de la présente procédure mise à la disposition de l'intéressée.

Le différend qui oppose les parties, au regard des honoraires liés au dossier pénal relatif à des faits de harcèlement reprochés à Madame [Y], était donc inclus dans la saisine initiale du Bâtonnier qui a donné lieu aux trois décisions qui viennent d'être citées. Les honoraires liés à la mission de M. [X] dans cette affaire, au même titre notamment que ceux liés à sa mission dans l'affaire JAVA SCRIPT, ont donc donné lieu à une décision de justice revêtue de l'autorité de chose jugée.

Au demeurant, Mme [E] ne conteste pas ce point en relevant que, selon elle, une demande de révision est en cours de sorte que l'affaire n'est " pas purgée ".

Ainsi, la demande formée par Mme [E] devant le Bâtonnier le 1er février 2021, lequel n'a pas pris de décision dans le délai de quatre mois, puis devant le premier président de la cour d'appel, présente, ainsi qu'il résulte de l'exposé de la procédure et de la motivation développés ci-dessus, une triple identité de cause, d'objet et de parties avec le litige précédent.

En conséquence les demandes sont irrecevables et il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'irrecevabilité des pièces présentées par M. [X], qui sont sans incidence sur cette analyse.

Sur les demandes présentées par M. [X].

Selon l'article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

M. [X], ne caractérise aucun abus de procédure ou intention de nuire qui résulterait de la présente procédure lors de laquelle il n'est pas démontré que Mme [E] n'a pas utilisé de fausse adresse. Etant dispensé de se présenter à l'audience, il ne démontre pas davantage avoir subi un préjudice justifiant l'octroi de dommages et intérêts. Cette demande est donc rejetée.

La solution de l'affaire eu égard à l'équité ne commande pas d'accueillir les demandes présentées par les parties sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort, publiquement, par décision réputée contradictoire et par mise à disposition au greffe,

Déclare irrecevable la requête présentée par Mme [U] [E],

Rejette le surplus des demandes,

Laisse les dépens à la charge de Mme [E],

Dit qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'arrêt sera notifié aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 21/00325
Date de la décision : 30/05/2023
Sens de l'arrêt : Irrecevabilité

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-30;21.00325 ?
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