La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/05/2023 | FRANCE | N°22/18771

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 25 mai 2023, 22/18771


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 25 MAI 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/18771 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGU4S



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 Octobre 2022 -Président du TJ de PARIS - RG n° 22/53278





APPELANTE



LA MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANC

E (MACIF), RCS de Niort sous le n°781 452 511, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 1]

[L...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 25 MAI 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/18771 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGU4S

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 05 Octobre 2022 -Président du TJ de PARIS - RG n° 22/53278

APPELANTE

LA MUTUELLE ASSURANCE DES COMMERCANTS ET INDUSTRIELS DE FRANCE (MACIF), RCS de Niort sous le n°781 452 511, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Jeanne BAECHLIN de la SCP SCP Jeanne BAECHLIN, avocat au barreau de PARIS, toque : L0034

Assistée à l'audience par Me Anne HILTZER-HUTTEAU, avocat au barreau de PARIS, toque : E1321

INTIMEE

S.A.S. LE PALAIS DE LAINA, RCS de Paris sous le n° 843 763 467, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et assistée par Me Michel BOHBOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B213

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 Avril 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, et Michèle CHOPIN, Conseillère.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Thomas RONDEAU, Conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé à effet au 1er octobre 2018, la société Le Palais de Laina a pris à bail des locaux situés [Adresse 2]), en vue de l'exploitation, à titre principal, d'une activité de salon de coiffure et institut de beauté.

La société Le Palais de Laina a assuré son activité auprès de la Compagnie d'assurance Macif, par un contrat d'assurance multigaranties activités professionnelles pour la période du 1er janvier 2019 au 31 mars 2021.

Dans la nuit du 25 au 26 février 2020, un incendie a détruit les locaux exploités par la société Le Palais de Laina. L'enquête pénale pour destruction par incendie a fait l'objet d'un classement sans suite le 18 août 2020, les investigations n'ayant pas permis d'identifier l'auteur ou les auteurs de l'infraction.

Par acte du 14 mars 2022, la société Le Palais de Laina a fait assigner la Compagnie d'assurance la Macif devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris, aux fins de solliciter sa condamnation à lui verser diverses sommes à titre de provision à valoir sur l'indemnisation de son préjudice.

La Macif s'est opposée aux demandes.

Par ordonnance contradictoire du 5 octobre 2022, le magistrat saisi a :

- condamné par provision la Compagnie d'assurance Macif à payer à la société Le Palais de Laina la somme de 34.840,48 euros au titre de la garantie incendie ;

- condamné par provision la Compagnie d'assurance Macif à payer à la société Le Palais de Laina la somme de 191.786 euros au titre de la 'garantie incendie' ;

- rejeté le surplus des demandes ;

- condamné par provision la Compagnie d'assurance Macif à payer à la société Le Palais de Laina la somme de 2.500 euros par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné par provision la Compagnie d'assurance Macif aux dépens de l'instance.

Par déclaration du 4 novembre 2022, la Compagnie d'assurance Macif a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 31 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la Compagnie d'assurance Macif demande à la cour, au visa de l'article 835 du code de procédure civile, de :

- infirmer l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions ;

- juger de l'existence de contestations sérieuses ;

- débouter la société le Palais de Laina de sa demande de provision ;

- débouter la société le Palais de Laina de sa demande de condamnation de la Compagnie d'assurance Macif au titre des frais irrépétibles ;

subsidiairement sur la demande de désignation d'expert judiciaire,

- juger la Compagnie d'assurance Macif recevable et bien fondée en ses plus expresses protestations et réserves et ce sans approbation aucune de garantie ;

- condamner la société Le Palais de Laina à la somme de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles ainsi qu'aux entiers dépens de première instance dont distraction au profit de Me Hiltzer-Hutteau et ceux d'appel au profit de Me Baechlin.

La société Macif fait en substance valoir que l'obligation de paiement est sérieusement contestable tant sur le principe de l'obligation que sur son étendue.

Dans ses conclusions remises et notifiées le 2 janvier 2023, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Le Palais de Laina demande à la cour, au visa de l'article 835 du code de procédure civile et de l'article 1103 du code civil, de :

- confirmer l'ordonnance rendue par le juge des référés tribunal judiciaire de Paris le 5 octobre 2022 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'elle a limité la provision allouée au titre de la garantie perte de la valeur vénale du fonds d'exploitation à 191.786 euros ;

- infirmer l'ordonnance de ce chef et condamner la Compagnie d'assurance Macif à verser à la société Le Palais de Laina une provision de 264.337,30 euros au titre de la garantie perte de la valeur vénale du fonds d'exploitation ;

subsidiairement,

- condamner la Compagnie d'assurance Macif à verser à la société Le Palais de Laina une provision de 191.786 euros au titre de la garantie perte de la valeur vénale du fonds d'exploitation et désigner un expert judiciaire avec mission habituelle pour l'évaluation de la valeur du fonds de commerce ;

- assortir les condamnations prononcées de l'intérêt au taux légal à compter de la mise en demeure du 9 novembre 2021, avec capitalisation annuelle conformément à l'article 1343-2 du code civil ;

- condamner la Compagnie d'assurance Macif à verser à la société Le Palais de Laina la somme de 3.000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la Compagnie d'assurance Macif aux entiers dépens.

La société Palais de Laina fait en substance valoir que les contestations élevées ne sont pas sérieuses, s'agissant tant de l'existence du bail que des conditions de la garantie, une expertise judiciaire étant sollicitée subsidiairement.

SUR CE LA COUR

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder en référé une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le montant de la provision en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

En l'espèce, il sera relevé :

- que, pour contester les sommes mises à sa charge par le premier juge, la société appelante fait d'abord état de ce que le bail aurait été résilié, de sorte qu'elle ne serait pas tenue au versement de la somme de 34.840,48 euros au titre des aménagements (accordée par le premier juge au titre de la garantie incendie), puisque le bail stipulait que les travaux réalisés par le preneur deviendront la propriété du bailleur sans indemnité à la fin du bail ;

- que, si un commandement de payer visant la clause résolutoire a en effet été délivré à la suite d'impayés, le 18 mars 2019, par le bailleur, donc antérieurement à l'incendie, une ordonnance de référé du 13 décembre 2019 a suspendu les effets de la clause résolutoire avec des délais de paiement, l'acquisition de la clause résolutoire étant donc conditionnée au défaut de paiement de la société preneuse et à l'envoi d'une mise en demeure par lettre recommandée par le propriétaire des locaux ;

- que la Macif fait état de ce que l'absence de versement du loyer après l'ordonnance et l'absence de saisine du juge de l'exécution permettraient d'établir la fin du bail ; que, cependant, en l'absence de production par l'intimée de toute mise en demeure du bailleur, l'acquisition de la clause résolutoire était toujours suspendue à la date de l'incendie, de sorte que l'indemnisation des aménagements réalisés était justifiée, peu important l'expulsion ultérieure, étant précisé qu'au surplus, le montant de la somme ainsi accordée au titre de la garantie incendie, soit 34.480,48 euros, n'est pas contesté ;

- que, s'agissant de la garantie perte de la valeur du fonds de commerce, l'article 19 du contrat stipule que la perte totale ou partielle du fonds consécutive à la destruction des bâtiments assurée est indemnisée à l'exception des actes de vandalisme ;

- que la Macif expose que l'incendie du 25 février 2020 est un incendie volontaire, donc un acte de vandalisme excluant sa garantie ;

- que, cependant, l'article 1 des conditions générales garantit spécifiquement l'incendie, précisément défini par le contrat comme la combustion avec flammes en dehors d'un foyer normal, survenu tant dans les bâtiments ou bien garanties que dans leur voisinage ; que le contrat ne distingue pas selon l'origine de l'incendie ; que, dès lors, les stipulations de l'article 19 ne sauraient faire échec à la garantie en cas d'incendie ;

- qu'au demeurant et en toute hypothèse, la seule circonstance qu'une plainte pénale ait été déposée n'établit pas le caractère criminel de l'incendie, le classement sans suite, même pour absence d'identification de l'auteur, ne constituant pas une démonstration du caractère volontaire de l'incendie ;

- que les contestations élevées sur ces points par l'assureur ne sont donc pas sérieuses ;

- que, sur le montant de la provision au titre de la garantie perte de la valeur du fonds d'exploitation, l'intimée sollicite la somme de 264.337,30 euros (état des pertes établi par le cabinet DR Experts pièce 8, ainsi décomposé : 34.480,48 euros au titre des dommages sur bâtiment, 211.741,52 euros au titre de la valeur vénale du fonds d'exploitation calculée sur 90 % du chiffre d'affaires de l'année 2019, 7.425 euros au titre du contenu, 10.330,30 euros au titre des honoraires du cabinet d'expertise), là où la Macif expose opposer plusieurs contestations sérieuses ;

- qu'au préalable, force est de constater que la somme de 34.480,48 euros est déjà indemnisée au titre de la garantie incendie ;

- que la somme de 7.425 euros réclamée au titre du contenu ne saurait être accordée, ayant donné lieu à une indemnisation qui a été saisie par le bailleur dans le cadre d'une saisie-attribution ;

- qu'il n'était pas établi devant le premier juge, et pas plus en appel, avec l'évidence requise en référé, que les honoraires du cabinet d'expertise devraient donner lieu à garantie par l'assureur ;

- que, pour la valeur vénale du fonds d'exploitation, la Macif fait en vain valoir que l'indemnisation du droit au bail est sérieusement contestable eu égard au fait que le bail était terminé au moment de l'incendie, ce qui n'est pourtant pas établi, pour les motifs rappelés ci-avant ;

- que le fait que la société était en voie d'expulsion est inopérante, étant rappelé que la clause résolutoire était en réalité suspendue au moment de l'incendie, la Macif ne versant enfin par ailleurs aucune pièce quant à son allégation selon laquelle la valeur du fonds en cause serait au surplus sérieusement contestable, ce alors que l'intimée a produit un rapport d'expert sur ladite valeur ;

- que, concernant la clientèle, il est constant que Mme [F], présidente de la société intimée, a à tout le moins cherché à continuer à exercer une activité d'esthéticienne, sous la forme d'une activité à domicile, à compter de février 2021, ce que cette dernière ne conteste pas ;

- que l'attestation fiscale versée aux débats sur ce point ne fait état d'aucun chiffre d'affaires, la Macif en déduisant que c'est en réalité la société qui aurait continué à proposer ses prestations ;

- qu'il faut en toute hypothèse rappeler qu'un message sur les réseaux sociaux démontre que Mme [F] a indiqué, précisément sur un compte intitulé 'Le Palais de Laina', le 16 mai 2021, reprendre les rendez-vous à domicile ;

- que le premier juge, dans ces circonstances, a à juste titre retenu que l'obligation de paiement de la société d'assurances se heurtait partiellement à une contestation sérieuse, liée à cette poursuite d'activité limitant la perte de clientèle alléguée, ce qui commande de fixer en référé le droit à indemnisation à hauteur de 70 % du chiffre d'affaires 2019 comme il a été retenu en première instance, l'obligation de la Macif étant non sérieusement contestable à cette hauteur.

Sans qu'il n'y ait lieu d'examiner les prétentions formées à titre subsidiaire, il y a donc lieu de confirmer l'ordonnance entreprise, sauf :

- à rectifier l'erreur du dispositif de la décision étant observé que la provision de 191.786 euros correspond bien à une indemnisation au titre de la garantie perte de la valeur du fonds d'exploitation (et non garantie incendie mentionnée deux fois dans le dispositif de l'ordonnance entreprise) ;

- à indiquer, conformément à la demande de l'intimée, que les sommes seront dues à compter de la mise en demeure du 9 novembre 2021 avec capitalisation annuelle conformément à l'article 1343-2 du code civil.

Le sort des frais et dépens de première instance a été exactement réglé par le premier juge.

A hauteur d'appel, la société appelante devra indemniser la société intimée pour les frais non répétibles exposés et sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise, sauf à préciser que la provision de 191.786 euros correspond à la garantie perte de la valeur du fonds d'exploitation et que les sommes dues portent intérêt au taux légal à compter du 9 novembre 2021 avec capitalisation annuelle en application de l'article 1343-2 du code civil ;

Y ajoutant,

Rejette les autres demandes des parties ;

Condamne la société Macif à verser à la société Le Palais de Laina la somme de 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure à hauteur d'appel ;

Condamne la société Macif aux dépens d'appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/18771
Date de la décision : 25/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-25;22.18771 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award