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24/05/2023 | FRANCE | N°22/16064

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 15, 24 mai 2023, 22/16064


Grosses délivrées aux parties le :



RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS









COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15



ORDONNANCE DU 24 MAI 2023



(n°19, 9 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : 22/16064 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGMUH



Décision déférée : Ordonnance rendue le 13 Septembre 2022 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de PARIS n°27/2022



Nature de la décision : Co

ntradictoire



Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L...

Grosses délivrées aux parties le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 15

ORDONNANCE DU 24 MAI 2023

(n°19, 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 22/16064 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGMUH

Décision déférée : Ordonnance rendue le 13 Septembre 2022 par le Juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de PARIS n°27/2022

Nature de la décision : Contradictoire

Nous, Elisabeth IENNE-BERTHELOT, Conseillère à la Cour d'appel de PARIS, déléguée par le Premier Président de ladite Cour pour exercer les attributions résultant de l'article L16B du Livre des procédures fiscales, modifié par l'article 164 de la loi n°2008-776 du 04 août 2008 ;

Assistée de Véronique COUVET, greffier lors des débats et de la mise à disposition ;

Après avoir appelé à l'audience publique du 12 avril 2023 :

S.A.R.L. SILEH FINANCE, société de droit luxembourgeois

Prise en la personne de Messieurs [A] [R] et [C] [W]

Elisant domicile au cabinet de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU

[Adresse 5]

[Localité 11]

Représentée par Me Anne GRAPPOTTE-BENETREAU de la SCP GRAPPOTTE BENETREAU, avocats associés, avocat au barreau de PARIS, toque : K0111

Assistée de Me Eloi CHAN substituant Me Christophe AYELA de l'AARPI SZPINER TOBY AYELA SEMERDJIAN, avocat au barreau de PARIS, toque : R049

APPELANTE

et

LA DIRECTION NATIONALE D'ENQUETES FISCALES

[Adresse 8]

[Localité 12]

Représentée par Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

Assistée de Me Nicolas NEZONDET substituant Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137

INTIMÉE

Et après avoir entendu publiquement, à notre audience du 12 avril 2023, l'avocat de l'appelante et l'avocat de l'intimée ;

Les débats ayant été clôturés avec l'indication que l'affaire était mise en délibéré au 24 Mai 2023 pour mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile.

Avons rendu l'ordonnance ci-après :

Le 13 septembre 2022, le juge des libertés et de la détention (ci-après JLD) du Tribunal judiciaire (ci-après TJ) de PARIS a rendu, en application de l'article L.16B du livre des procédures fiscales (ci-après LPF), une ordonnance (27/2022) à l'encontre de :

- La société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL, représentée par M. [C] [W] ou M. [A] [R], dont le siège est situé sis [Adresse 1] [Localité 15] - LUXEMBOURG, et dont l'objet social comprend l'exécution de toutes opérations de conseil, d'assistance dans le domaine économique ; la prestation de services administratifs ; la possibilité de prendre des participations sous quelque forme que ce soit, dans d'autres sociétés luxembourgeoises ou étrangères, ainsi que la gestion, le contrôle et la mise en valeur de ces participations; la gestion et la mise en valeur de son propre patrimoine immobilier ; la possibilité d'acquérir par voie d'apport, de souscription, d'option, d'achat et de toute autre manière des valeurs mobilières de toutes espèces et les réaliser par voie de vente, de cession, d'échange ou autrement; la possibilité d'acquérir et mettre en valeur tous brevets et autres droits se rattachant à ces brevets ou pouvant les compléter; la possibilité de garantir, accorder des prêts à ou assister autrement des sociétés dans lesquelles elle détiendra une participation directe ou indirecte ou les sociétés et les personnes physiques qui feront partie du même groupe de societés que la société ; la société aura tous pouvoirs nécessaires à l'accomplissement ou au développement de son objet, dans le cadre de toutes activités permises à une Société de Participations Financières, et pourra en général faire toutes opérations commerciales connexes, industrielles, financières. mobilières ou immobilières, se rattachant directement ou indirectement à son objet social similaire ou susceptible d'en favoriser l'exploitation et le développement.

L'ordonnance autorisait des opérations de visite et saisie dans les lieux suivants:

- locaux et dépendances sis [Adresse 4], susceptibles d'être occupés par [C] [W], et/ou son épouse [V] [J] [G], et/ou [H] [G] [W], et/ou [S] [G] et/ou [T] [G]/et/ou [I] [D] [J] et/ou la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL ;

- locaux et dépendances sis [Adresse 7], [Localité 10], susceptibles d'être occupés par la SAS HELIS et/ou la SAS SIMSTREAM, et/ou la SARL TOFINO France et/ou la SAS SOLARIS et/ou SAS THAL& ROSE et/ou TOFINO et/ou la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL ;

- locaux et dépendances sis [Adresse 6] [Localité 9], susceptibles d'être occupés par l'entreprise individuelle [W] [C] et/ou la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL ;

L'autorisation de visite et de saisie des lieux susmentionnés était délivrée aux motifs que la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL est présumée exercer en FRANCE une activité d''opérations de conseil, d'assistance dans le domaine économique: prestation de services, prise de participation, gestion de valeurs mobilières et de prêts', sans souscrire les déclarations fiscales en matière d'impôt sur les sociétés et de TVA, et ainsi ne procéderait pas à la passation en FRANCE des écritures comptables y afférentes.

Et ainsi, est présumée s'être soustraire et/ou se soustraire à l'établissement et au paiement des Impôts sur les bénéfices ou des Taxes sur le Chiffre d'Affaires, en se livrant à des achats ou des ventes sans facture, en utilisant ou en délivrant des factures ou des documents ne se rapportant pas à des opérations réelles ou en omettant sciemment de passer ou de faire passer des écritures inexactes ou fictives dans des documents comptables dont la tenue est imposée par le Code Général des Impôts (article 54 et 209-I pour l'IS, 286 pour la TVA).

L'ordonnance était accompagnée de 31 pièces annexées à la requête.

La société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL a été constituée le 1er mars 2013, à sa création son M [C] [W], en sa qualité d'associé unique a décidé de fixer le siège social de la société au [Adresse 1] [Localité 15] - et a nommé en tant que gérant unique M. [X] [U], demeurant professionellement à la même adresse, qui constitue toujours le siège social de la société SILEH FINANCE SARL.

Il ressortait de la consultation des bases de données que l'adresse sise [Adresse 1] [Localité 15] - LUXEMBOURG, à laquelle la société SILEH FINANCE SARL dispose de son siège social est commune à celle de sièges sociaux d'un nombre important d'autres sociétés. Il serait établi que la société SILEH FINANCE SARL est cliente des sociétés AXIOME AUDIT et COMPTAXIOME, qui se sont succédé auprès de ladite société des services de domiciliation et de gestion administrative. Il était indiqué que la société SILEH FINANCE SARL ne disposait d'aucune immobilisation corporelle ni de salarié jusqu'en 2020. Selon les investigations, la société ne disposait pas de coordonnées téléphoniques propres. Dès lors, au vu de ces éléments, il pouvait être présumé que la société SILEH FINANCE SARL ne dispose pas d'infrastructure au LUXEMBOURG et est sise au sein de la société AXIOME AUDIT SARL, puis de la société COMPTAXIOME, au 10 bis rue des Mérovingiens- L8070 BERTRANGE.

En outre, il ressortait des éléments du dossier que la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL est entièrement détenue par M. [C] [W], né le [Date naissance 3]/1969, qui en assure la gérance conjointement avec M. [A] [R] depuis le 28/05/2015.

Il était indiqué que M. [C] [W], né en [Date naissance 13] 1968, était actionnaire et président de la société de droit français la SAS HELIS, constituée le 1er janvier 2004, dont il est actionnaire à hauteur de 35%. Il ressortait que la SAS HELIS est une société de conseils informatiques présente dans quatre métropoles françaises, employant plus de 40 personnes pour un chiffre d'affaires de plus de 14 millions d'euros à destination d'une clientèle française. Il était indiqué que M. [W] occupe des fonctions de président « s'impliquant au quotidien dans le développement » de la société HELIS et dispose également des fonctions de dirigeants dans trois autres entités sises également à [Localité 16]. En outre, il avait été retenu que Monsieur [W], résidant fiscal de FRANCE, dispose comme seule source de revenus déclarés ses salaires de président de la SAS HELIS et dispose à [Localité 16] de sa résidence familiale, celui-ci ayant également indiqué aux autorités luxembourgeoises une adresse à [Localité 16]. Au vu de ces éléments, il pouvait dès lors être présumé que [C] [W] dispose à [Localité 16] de ses centres d'intérêts personnels, professionnels, économiques et financiers et y réside depuis 2013.

Il avait été relevé que M. [W], en apportant les titres HELIS qu'il détenait à la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL dont il est l'associé unique, a transferé au LUXEMBOURG une partie de son patrimoine évalué à 4 625 000 euros.

Il était indiqué, d'autre part, que M. [A] [R], co-gérant de la société SILEH FINANCE SARL avait antérieurement eu les fonctions successives de directeur au sein de la société VICTORY ASSET MANAGEMENT et la fonction de directeur général au sein de la société ALPHA PATRIMOINE. Il avait été relevé que les adresses professionnelles de M. [A] [R] sises [Adresse 2] [Localité 14] étaient identiques à celle des sociétés VICTORIA ASSET MANAGEMENT et ALPHA PATRIMOINE. Parallèlement à sa nomination à la fonction de co-gérant de la société SILEH FINANCE par M. [C] [W] en date du 28/05/2015, il pouvait ainsi être présumé que M. [A] [R] travaillait au sein de la société VICTORY ASSET MANAGEMENT puis au sein de la société ALPHA PATRIMOINE jusqu'en novembre 2021 et que M. [A] [R] conseille M. [C] [W] dans le cadre de la gestion de son patrimoine.

Au vu de ces éléments, il pouvait dès lors être présumé que [A] [R] n'exerce pas un réel pouvoir décisionnel au sein de la société SILEH FINANCE SARL, lequel est exercé par [C] [W], en tant qu'associé unique et gérant de cette dernière.

Dès lors, il pouvait être présumé que [C] [W], gérant et unique bénéficiaire économique de la société SILEH FINANCE SARL, exerce son pouvoir décisionnel en tant que dirigeant effectif et associé unique au sein de la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL, depuis [Localité 16].

Ainsi, la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL était présumée réaliser, conformément à son objet social, des opérations de conseil, d'assistance dans le domaine économique, ou des prestations de services à destination principalement de sociétés dirigées par [C] [W] et détenues partiellement ou totalement par elle.

Il s'en déduit que, la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL qui est sise au Luxembourg au sein d'une société offrant des services de domiciliation commerciale, n'a pas de coordonnées téléphoniques propres, ni d'immobilisation corporelle, ne verse des salaires qu'à compter de l'exercice clos en 2020, dispose de son centre décisionnel en la personne de [C] [W], était présumée exercer, depuis la FRANCE, une activité de conseil, assistance dans le domaine économique, prestations de services, prise de participations, gestion de valeurs mobilières et de prêts et ce, sans souscrire les déclarations fiscales y afférentes, et ainsi omettre de passer, en France, les écritures comptables correspondantes.

Eu égard à sa qualité d'associé unique et de dirigeant de la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL, il a été retenu que [C] [W] était susceptible de détenir dans les locaux qu'il occupe des documents et/ou supports d'information relatifs à la fraude présumée.

Eu égard aux liens capitalistiques la liant à la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL, il a été retenu que l'entreprise individuelle [W] [C] était susceptible de détenir dans les locaux qu'elle occupe des documents et/ou supports d'information relatifs fraude présumée.

Dès lors, l'entreprise individuelle [W] [C] et la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE Sarl étaient susceptibles d'occuper tout ou partie des locaux communs sis [Adresse 6] [Localité 9].

Au vu de l'ensemble de ces éléments, le JLD a autorisé la visite domiciliaire dans les lieux susvisés.

Les opérations de visite et saisie se sont déroulées le 14 septembre 2022 :

- dans les locaux et dépendances sis [Adresse 4], susceptibles d'être occupés par [C] [W], et/ou son épouse [V] [J] [G], et/ou [H] [G] [W], et/ou [S] [G] et/ou [T] [G]/et/ou [I] [D] [J] et/ou la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL

- dans les locaux et dépendances sis [Adresse 7], [Localité 10], susceptibles d'être occupés par la SAS HELIS et/ou la SAS SIMSTREAM, et/ou la SARL TOFINO France et/ou la SAS SOLARIS et/ou SAS THAL& ROSE et/ou TOFINO et/ou la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL.

Le 26 septembre 2022, la SARL SILEH FINANCE a interjeté appel de l'ordonnance du JLD (RG 22/16064).

L'affaire a été audiencée pour être plaidée le 12 avril 2023.

La société appelante a déposé au greffe de la Cour d'appel de Paris des conclusions au soutien de son appel à l'encontre de l'ordonnance rendue par le JLD, en date du 22 décembre 2022 et des conclusions n°2 en date du 6 avril 2023.

L'Administration fiscale a déposé des conclusions en date du 16 mars 2023.

Dans ses conclusions, la partie appelante fait une présentation de la société HELIS et de son actionnaire minoritaire la société SILEH FINANCE, et rappelle le contenu de la convention de prestation de service entre SILEH FINANCE et HELIS. Elle demande au Premier Président de la Cour d'appel de Paris d'infirmer l'ordonnance du JLD au motif que le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée et qu'en l'espèce la DNEF fonde ses présomptions de fraude sur deux présomptions non justifiées (absence de moyens de SILEH FINANCE à l'adresse du siège social, résidence officielle du dirigeant M [W] présenté comme l'unique animateur de SILEH FINANCE en France), elle produit un constat d'huissier (pièce 27).

Par ces motifs, il est demandé au Premier Président de la Cour d'Appel de PARIS de :

- infirmer l'ordonnance dont appel;
- rejeter la requête du Directeur Général des Finances Publiques, représenté par le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales tendant à voir autoriser des visites et des saisies à l'encontre de la société de droit luxembourgeois SILEH FINANCE SARL, tant au domicile de monsieur [C] [W], qu'au siège social de la société HELIS ;
- annuler en conséquence les saisies subséquentes ;

- ordonner la restitution de l'ensemble des documents saisis et de tous supports les contenant ;

- ordonner la destruction de toute copie des documents saisis ;- condamner le Directeur Général des Finances Publiques, représenté par le Chef des Services Fiscaux chargé de la Direction Nationale des Enquêtes Fiscales à payer à la société SILEH FINANCE la somme de 5.000 € par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

Dans ses écritures, l'Administration fiscale conclut au rejet des moyens soulevés par la partie appelante en ce que les présomptions de fraude à l'encontre de la société SILEH FINANCE sont fondées.

Par ces motifs, l'Aministration fiscale demande de :

- confirmer l'ordonnance du Juge des libertés et de la détention de Paris du 13 septembre 2022,
- rejeter toutes demandes, fins et conclusions,
- condamner l'appelante au paiement de la somme de 2 000 € au titre de l'article 700 du
code de procédure civile.

La Cour renvoie, pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, à la décision déférée et aux écritures susvisées, en application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

Après avoir entendu à l'audience publique du 12 avril 2023, le conseil de la société  SILEH FINANCE SARL et le conseil de l'Administration fiscale, la Cour d'appel a mis l'affaire en délibéré au 24 mai 2023.

SUR CE

Sur le moyen selon lequel le juge doit vérifier de manière concrète que la demande d'autorisation qui lui est soumise est bien fondée et que cette demande doit comporter tous les éléments d'information en possession de l'Administration de nature à justifier la visite.

Il résulte de la lecture attentive de l'ordonnance rendue le 13 septembre 2022, que le JLD a motivé sa décision en s'appuyant sur les pièces communiquées par l'Administration fiscale à l'appui de sa requête qui sont au nombre de 31, que l'appelante n'apporte aucune critique envers les pièces produites, qu'aucun élément ne permet d'affirmer que le JLD n'a pas effectué un contrôle in concreto de la requête et des pièces soumises à son appréciation, qu'il convient de rappeler qu'il résulte d'une jurisprudence constante que le juge est réputé avoir rendu l'ordonnance qu'il a signée même lorsqu'il s'agit d'une ordonnance prérédigée, qu'en signant l'ordonnance dont il s'est approprié la motivation, le JLD n'a pas méconnu son office, que l'ordonnance contestée répond aux exigences de l'article L 16B du LPF.

Ce moyen sera rejeté.

Sur le détournement de procédure.

La partie appelante dans ses conclusions (page 8) évoque un 'détournement de procédure' de façon très succincte sans développer en quoi l'ordonnance du JLD du 13 septembre 2022 accordant des opérations de visites domiciliaires et de saisies constituerait un détournement de procédure. L'Administration fiscale a répondu à juste titre qu'il est permis à l'Administration de solliciter l'application de l'article L. 16B du LPF après qu'une vérification de comptabilité ait été effectuée ou simultanément, la procédure tendant à la répression des agissements frauduleux étant distincte de celle tendant à l'établissement des impôts dus par le contribuable selon la jurisprudence (Cass. Com., 4 septembre 2022, n°00-30.228).

Ce moyen sera rejeté.

Sur le moyen selon lequel la DNEF fonde ses présomptions de fraude sur une présomption non justifiée : l'absence de moyens de SILEH FINANCE à l'adresse de son siège social.

La société appelante argue que la société SILEH FINANCE dispose au LUXEMBOURG d'une autorisation dite d'établissement qui ne peut être octroyée que si l'entreprise dispose d'un lieu d'exploitation fixe au LUXEMBOURG, d'un numéro d'identification à la TVA et d'un contrat de location de mise à disposition d'une infrastructure administrative et informatique datée du 16 mai 2014 prévoyant notamment la mise à disposition d'un bureau de 14m ainsi qu'à diverses prestations (standard téléphonique). Son dirigeant opérationnel est M. [A] [R], résident luxembourgeois de nationalité belge et spécialiste reconnu en stratégie d'entreprise et en gestion des investissements, celui-ci exerce son mandat depuis le bureau mentionné supra, qui est parfaitement équipé pour effectuer les prestations prévues par la convention signée entre HELIS et SILEH FINANCE, un constat d'huissier produit en appel( pièce 27) démontre que cette infrastructure est réelle, ces éléments mettant à mal l'hypothèse de la DNEF selon laquelle il n'exercerait pas 'un réel pouvoir décisionnel au sein de la société SILEH FINANCE'. Ainsi selon la partie appelante la société SILEH FINANCE dispose de moyens matériels, juridiques et humains concrets et vérifiables au LUXEMBOURG, lui permettant d'exercer une activité conforme à son objet social.

Il convient de relever qu'il résulte des pièces communiquées par l'Administration fiscale à l'appui de sa requête et retenues par le JLD dans sa décision que celui-ci , en l'espèce, a pu suffisamment caractériser l'agissement de fraude présumée d'exercice d'une activité professionnelle sans respecter des obligations déclaratives fiscales et comptables en FRANCE.

En effet, le JLD dans sa décision a pu retenir un certain nombre d'éléments fondant les présomptions de fraude visant la société SILEH FINANCE :

- la société SILEH FINANCE a son siège social à l'adresse des sociétés AXIOME AUDIT et COMPTAXIOME où plus de 400 autres sociétés disposent également de leurs sièges sociaux. -Les sociétés AXIOME AUDIT et COMPTAXIOME ont tenu la comptabilité de la société SILEH FINANCE et ont agi successivement en tant que prestataires de services de domiciliation et de gestion administrative auprès de cette société.

- M. [X] [U], premier gérant depuis 2013 de lasociété SILEH FINANCE et gérant de la société AXIOME AUDIT entre 2003 et 2005 a signé un courrier au nom d'Axiome Audit le 25 janvier 2013.

- Le numéro de téléphone de la société SILEH FINANCE est attribué à 17 autres sociétés.

- Aucune immobilisation n'est comptabilisée par SILEH FINANCE et elle n'a commencé à exposer des frais de personnel qu'à compter de l'exercice clos en 2020.

-La société SILEH FINANCE a pour unique actionnaire M. [C] [W] demeurant à [Localité 16], nommé gérant supplémentaire de SILEH FINANCE, celui-ci contrôle la société SILEH FINANCE en raison de sa qualité d'associé unique et détient la qualité de gérant avec une capacité d'engager la société par sa seule signature.

-M [C] [W] est désigné comme bénéficiaire effectif de la société SILEH FINANCE dont l'activité consiste principalement en prestations de services à des sociétés détenues par elle.

Il convient de rappeler que ces éléments relevés par le JLD ne sont pas sérieusement contestés par la société appelante, que le 'contrat de mise à disposition d'une infrastructure administrative et informatique' produit par l'appelante (pièce n°10) s'apparente à un contrat de domiciliation, si bien que la société SILEH FINANCE ne semble avoit aucune consistance réelle, que la pièce n° 27 (procès-verbal de constat) concernant l'occupation d'un bureau par de la société SILEH FINANCE ne suffit pas à apporter la preuve d'une consistance réelle de la société, que le dépôt de comptes sociaux et de déclarations fiscales au LUXEMBOURG ne préjuge pas du respect des obligations fiscales de SILEH FINANCE en FRANCE, dans la mesure où SILEH FINANCE est présumé disposer de son centre décisionnel en FRANCE en la personne de M. [W].

Ainsi, ces éléments démontrent , d'une part, une insuffisance de moyens humains et matériels de la société SILEH FINANCE au LUXEMBOURG puisqu'elle a recours à des prestations de domiciliation et d'autre part, l'existence du centre décisionnel de la société en FRANCE, au lieu de résidence de celui qui dispose du contrôle de la société SILEH FINANCE, Monsieur [W], et sont suffisants pour permettre au JLD de présumer que la société luxembourgeoise SILEH FINANCE manque à ses obligations fiscales en FRANCE.

Ces éléments permettent de caractériser l'agissement de fraude présumé d'exercice d'une activité professionnelle sans respecter des obligations déclaratives fiscales et comptables en FRANCE.

Ce moyen sera rejeté.

Sur le moyen selon lequel la DNEF fonde ses présomptions de fraude sur une présomption non justifiée : la résidence officielle de son dirigeant, Monsieur [C] [W], présenté comme l'unique animateur de SILEH FINANCE, en France.

Selon la partie appelante, le dirigeant opérationnel de la SARL SILEH FINANCE est M. [A] [R], résident luxembourgeois de nationalité belge et spécialiste reconnu en stratégie d'entreprise et en gestion des investissements , elle conteste l'hypothèse de la DNEF selon laquelle il n'exercerait pas 'un réel pouvoir décisionnel au sein de la société SILEH FINANCE'.

La partie appelante argue que la société SILEH FINANCE dispose de moyens matériels, juridiques et humains concrets et vérifiables au LUXEMBOURG, lui permettant d'exercer une activité conforme à son objet social et que son centre décisionnel se trouve au LUXEMBOURG, en la personne de M. [A] [R].

Il convient de préciser que dans sa décision, le JLD a relevé que Monsieur [C] [W] a représenté la société SARL SILEH FINANCE aux décisions de l'associé unique de la SAS HELIS du 2 février 2015 (pièce 6), qu'il a agi au nom et pour le compte de la société SARL SILEH FINANCE pour la souscription d'actions de préférences par la SAS Cour Carrée Bailleul le 30 janvier 2017 et a signé une convention de compte à ce titre (pièce 12-21), qu'il apparaît comme le représentant désigné de la SARL SILEH FINANCE en tant que co-gérant de la société Tofino (pièce 21), que dans le cadre d'une procédure de contrôle sur pièces de son dossier fiscal Monsieur [C] [W] a écrit 'contrôler la société Sileh Finance' (pièce 12), que celui-ci approuve les comptes annuels au siège de la société (pièce 1), qu'il en résulte que le JLD a pu ainsi présumer que [A] [R] n'exerçait pas un réel pouvoir décisionnel mais que celui-ci était exercé par Monsieur [C] [W] en tant qu'associé unique et gérant de cette dernière, que les pièces produites par la DNEF à l'appui de ces présomptions ne sont pas réellement contestées par la partie appelante.

Il résulte des différentes pièces de l'Administration fiscale que Monsieur [C] [W] est résident fiscal de France, qu'il dispose à [Localité 16] de ses centres d'intérêts personnels, professionnels , économiques et financiers où il réside depuis 2013, qu'il est désigné comme bénéficiaire effectif de la société SILEH FINANCE SARL. Ainsi il résulte de l'ensemble de ces éléments que le JLD a pu dans sa décision présumer que Monsieur [C] [W], exerce son pouvoir décisionnel en tant que dirigeant effectif et associé unique au sein de la société, depuis [Localité 16] (pièce 1).

Ce moyen sera rejeté.

Ainsi, l'ordonnance n° 27/2022 rendue le 13 septembre 2022 par le JLD du Tribunal judiciaire de Paris sera confirmée.

Les circonstances de l'instance justifient l'application de l'article 700 du code de procédure civile au bénéfice de la DNEF.

PAR CES MOTIFS

Statuant contradictoirement et en dernier ressort:

- Déclarons régulière et confirmons en toutes ses dispositions l'ordonnance 27/2022 rendue par le juge des libertés et de la détention du Tribunal judiciaire de PARIS en date du 13 septembre 2022 ;

- Rejetons toute autre demande ;

-Disons qu'il convient d'accorder à la DNEF la somme de 500 euros (cinq cents euros) en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Disons que la charge des dépens sera supportée par la partie appelante.

LE GREFFIER

Véronique COUVET

LE DÉLÉGUÉ DU PREMIER PRESIDENT

Elisabeth IENNE-BERTHELOT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 15
Numéro d'arrêt : 22/16064
Date de la décision : 24/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-24;22.16064 ?
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