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24/05/2023 | FRANCE | N°19/11078

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 3, 24 mai 2023, 19/11078


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3



ARRET DU 24 MAI 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/11078 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA43D



Décision déférée à la Cour : Décision du 19 Septembre 2019 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES - RG n° 18/00433





APPELANT



Monsieur [I] [X]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par

Me Philippe ACHACHE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque: PC 238



INTIMEES



SAS AXXIS ONEPI ORLY

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Vincent DE LA SEIGLIERE, avoca...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 3

ARRET DU 24 MAI 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/11078 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CA43D

Décision déférée à la Cour : Décision du 19 Septembre 2019 - Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES - RG n° 18/00433

APPELANT

Monsieur [I] [X]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Philippe ACHACHE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque: PC 238

INTIMEES

SAS AXXIS ONEPI ORLY

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Vincent DE LA SEIGLIERE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1261

SAS ONET AIRPORT SERVICES PARIS venant aux droits de l'entreprise H. REINIER ORLY SERVICES

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentée par Me Virginie MONTEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0071

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 22 mars 2023, en audience publique, les avocats ne s'étant pas opposés à la composition non collégiale de la formation, devant Madame Véronique MARMORAT, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Véronique MARMORAT, présidente

Madame Fabienne ROUGE, présidente

Madame Anne MENARD, présidente

Lors des débats : Madame Figen HOKE, greffière

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Véronique MARMORAT, présidente et par Madame Sarah SEBBAK, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [I] [X], né le 10 août 1972, a travaillé, selon des contrats de travail à durée déterminée successifs, avec la société Axxis Onepi Orly, entreprise de travail temporaire, à compter du 28 avril 2014 et a été mis au service de la société H. Reinier Orly Services en qualité de conducteur de transport en commun et plus précisément de navette sur l'aéroport d'[Localité 5]. Cette relation de travail s'est rompue le 9 août 2015.

Le 27 juillet 2017, le salarié a saisi en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée et en diverses demandes salariales et indemnitaires le Conseil des prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges lequel par jugement du 19 septembre 2019, a déclaré irrecevable la demande de prescription soulevée par la société Axxis Onepi Orly, a débouté monsieur [X] de toutes ses demandes, la société Axxis Onepi Orly de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et condamné le salarié aux dépens.

Monsieur [X] a interjeté appel de cette décision le 8 novembre 2019.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 4 février 2020, auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, monsieur [X] demande à la cour d'infirmer le jugement entrepris et, statuant de nouveau, de

Requalifier les contrats de mission en contrat à durée indéterminée

Condamner in solidum les sociétés Axxis Onepi Orly et Reinier Orly Services aux dépens et à lui verser les sommes suivantes :

titre

montant en euros

indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

21 075

indemnité de préavis

congés payés

1 756, 31

175

indemnité de licenciement

468,34

rappel de salaire intermissions

congés payés

4 441,10

444

délit de marchandage et prêt de main d''uvre illicite

8 000

article 700 du code de procédure civile

2 000

Condamner in solidum les sociétés Axxis Onepi Orly et Reinier Orly Services à lui remettre les bulletins de paie, l'attestation Pôle Emploi et le certificat de travail conformes sous astreinte de 15 euros par jour et par document

Condamner la société Axxis Onepi Orly aux dépens et à lui verser la somme de 15 268,93 euros au titre de l'indemnité de requalification, celle de 2 049,02 euros au titre de prime annuelle ainsi que celle de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 12 juillet 2020 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Axxis Onepi Orly demande à la cour, à titre principal de dire que la cour n'est pas saisie faute d'effet dévolutif de l'appel, à titre subsidiaire de confirmer le jugement entrepris, statuant de nouveau, débouter monsieur [X] de toutes ses demandes, de la condamner aux dépens et à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions signifiées par voie électronique le 12 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter en ce qui concerne ses moyens, la société Onet Airport Services Paris venant aux droits de la société H. Reinier Orly Services demande à la cour, à titre principal de dire que la cour n'est pas saisie faute d'effet dévolutif de l'appel, à titre subsidiaire de confirmer le jugement entrepris, de rejeter les demandes de monsieur [X] et à titre infiniment subsidiaire de réduire à de plus justes proportions sa condamnation au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse éventuellement allouée à monsieur [X] et en tout état de cause de condamner ce dernier aux dépens.

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel.

MOTIFS

Sur l'effet dévolutif de l'appel

Principe de droit applicable

Il résulte des articles 4 et 5 du code de procédure civile que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties et que le juge ne doit se prononcer que sur ce qui lui est demandé.

Aux termes de l'article 542 du code de procédure civile, l'appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d'appel.

Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Enfin, selon l'article 901 du même code, la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :( ..) 4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Application en l'espèce

Les sociétés Axxis Onepi et H. Reinier Orly Services soutiennent que l'effet dévolutif de la déclaration d'appel du salarié n'a pas opéré en ce que la déclaration ne mentionne pas les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité alors que ce dernier ne tend pas à l'annulation du jugement et que l'objet du litige n'est pas indivisible. Ces sociétés expliquent qu'aucune régularisation par le biais d'une nouvelle déclaration d'appel n'est survenue dans le délai de trois mois imparti à l'appelant pour conclure au fond et demandent à la cour d'en tirer toutes conséquences.

La déclaration d'appel formée par monsieur [X] porte la mention suivante : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués : à l'encontre des 2 intimés : , Objet/Portée de l'appel : requalification des contrats intérims en contrat à durée indéterminée, Indemnité pour licenciement abusif 21075 euros, 1756 euros de préavis et congés payés 175 euros, 468 d'IL, 4441 euros de rappel de salaire, et congés payés de 444 euros, 8000 euros de dommages et intérêts pour délit de marchandage et prêt de main d'oeuvre illicite et 2000 euros article 700 contre H Reinier seulement indemnité de requalification de 1526 euros, 2049 euros prime annuelle. Cette mention énumère de manière suffisamment claire et précise les chefs du jugement critiqués pour que la cour puisse appréhender la portée de l'appel.

En conséquence, il convient de rejeter cette exception.

Sur l'irrecevabilité tirée de la prescription

Principe de droit applicable

Selon l'article 1471-1 du même code dans sa version applicable en l'espèce, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer son droit.

Le premier alinéa n'est toutefois pas applicable aux actions en réparation d'un dommage corporel causé à l'occasion de l'exécution du contrat de travail, aux actions en paiement ou en répétition du salaire et aux actions exercées en application des articles L. 1132-1, L. 1152-1 et L. 1153-1. Elles ne font obstacle ni aux délais de prescription plus courts prévus par le présent code et notamment ceux prévus aux articles L. 1233-67, L. 1234-20, L. 1235-7 et L. 1237-14, ni à l'application du dernier alinéa de l'article L. 1134-5.

La demande de requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, est une demande, prévue en tant que telle par le code du travail, liée à l'exécution du contrat de travail. Le délai de prescription est biennal. Il convient de distinguer si le motif invoqué à l'appui de la demande est un vice de forme ou de fond. La demande de requalification fondée sur un vice de forme court à compter de la conclusion du contrat à durée déterminée irrégulier. En revanche, le point de départ du délai de prescription de l'action en requalification fondée sur un motif de fond est le terme du dernier contrat à durée indéterminée concerné.

Application en l'espèce

La société Axxis Onepi explique que les derniers contrats de travail temporaire remontant à juillet 2015 les demandes de monsieur [X] sont prescrites, celui-ci ayant saisi le Conseil des prud'hommes le 29 juin 2018 et soutient que même si le salarié cherchait à faire remonter le point de départ à la première saisine du 26 juillet 2017, celle-ci a été radiée le 19 octobre 2019 sans qu'aucune diligence ne soit formulée pour interrompre la prescription. De même, si la prescription doit être appréciée à compter du 27 juillet 2017, la société Axxis Onepi soutient que le salarié n'évoque aucun manquement à ses obligations pour la période non prescrite.

S'agissant des demandes d'indemnisation au titre d'un marchandage ou d'un prêt de main-d''uvre illicite, la société Axxis Onepi considère également que les prétentions sont prescrites depuis le 20 décembre 2016 puisque le salarié affirme que dès le 20 décembre 2014 ses contrats de travail présentaient un motif d'illicéité.

Il résulte des pièces de la procédure que monsieur [X] a introduit l'instance par requête du 27 juillet 2017, soit moins de deux ans après la fin de la relation contractuelle intervenue le 9 août 2015, terme du dernier contrat de travail temporaire. Le fait que l'affaire enrôlée devant le Conseil des prud'hommes de Villeneuve-Saint-Georges ait été radiée par ordonnance du 19 octobre 2017 ne fait pas perdre au demandeur l'effet suspensif créé par la saisine, à l'inverse de la caducité, de sorte qu'il convient de rejeter l'exception tirée de la prescription soulevée par la société Axxis Onepi Orly.

Sur la demande de requalification

Principe de droit applicable

Selon l'article L 1251-40 du code du travail, dans sa version applicable, lorsqu'une entreprise utilisatrice a recours à un salarié d'une entreprise de travail temporaire en méconnaissance des dispositions des articles L. 1251-5 à L. 1251-7, L. 1251-10 à L. 1251-12, L. 1251-30 et L. 1251-35, ce salarié peut faire valoir auprès de l'entreprise utilisatrice les droits correspondant à un contrat de travail à durée indéterminée prenant effet au premier jour de sa mission.

Application en l'espèce

Monsieur [X] explique que les emplois qu'il occupait au sein de la société utilisatrice étaient liés à une activité normale et permanente de l'entreprise, qu'aucun élément ne permet de démontrer un accroissement temporaire d'activité et que le recours à l'intérim pour le remplacement des salariés absents répond à un besoin structurel de main d''uvre de la société utilisatrice dans le but de palier à des absences normales et prévisibles. Les motifs de recours sont selon lui abusifs.

Le salarié affirme que ses relevés de carrière font apparaître des contrats successifs, sur le même poste de travail, sans que le délai de carence n'ait été respecté. De plus, il explique que l'exercice de la fonction nécessitait l'obtention d'un badge, valable sur plusieurs mois, montrant la nécessité d'une embauche sur du long terme.

En premier lieu, la cour souligne le fait que l'article L 1251-40 du code du travail relatif au délai de carence ne figure pas dans les articles permettant la requalification en contrat à durée indéterminée sollicitée par monsieur [X]. En conséquence, il n'y a lieu d'examiner ce point.

En second lieu, selon les autres articles visés et évoqués par le salarié, le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice. Il peut être utilisé notamment en cas de remplacement d'un salarié ou d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise.

Ce sont ces deux motifs qui sont évoqués dans les quelques contrats produits par le salarié.

La société Onet Airport Services Paris venant aux droits de la société H. Reinier verse aux débats le contrat qui la lie avec la société Air France, les navettes conduites par monsieur [X] transportant les salariés de cette société. Ce contrat prévoit la clause de variabilité suivante : " En cas de variation significative en cours de saison iata pour d'autres motifs que ceux exposés dans l'accord, les parties conviennent de se rencontrer pour ajuster en fonction de la variation observée. La flexibilité est fixée a +/- 10 % par rapport à cette référence de 23 000 missions moyennes par mois." Ainsi, le recours à des missions des salariés de la société Axxis Onepi s'effectuait dans le cadre de cette flexibilité traduisant d'un accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise ou en cas d'absence de salarié.

Enfin, il est établi et non contesté que monsieur [X] n'a pas été appelé pour exécuter de telles missions sur les 16 mois qu'a duré sa relation de travail, pour les deux périodes suivantes :

du 22 mai 2014 au 28 juillet 2014

du 12 septembre 2014 au 6 octobre 2014.

Il résulte de ce qui précède que la demande de requalification des contrats de travail temporaire en contrat à durée indéterminée et toutes les autres demandes subséquentes, y compris celles relatives au marchandage et au prêt de main d'oeuvre sont rejetées.

Le jugement du Conseil des prud'hommes est confirmé sur ces points.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues par l'article 450 du code de procédure civile,

REJETTE les exceptions tirées de l'effet dévolutif de l'appel et de la prescription.

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions.

Vu l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE monsieur [X] à verser à la société Onepi la somme de 400 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes.

CONDAMNE monsieur [X] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 3
Numéro d'arrêt : 19/11078
Date de la décision : 24/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-24;19.11078 ?
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