RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 12
ARRÊT DU 19 Mai 2023
(n° , 18 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 17/09643 - N° Portalis 35L7-V-B7B-B3Y2V
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 24 Janvier 2012 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de Melun RG n° 09-00870
APPELANTE
Me [Y] [K] ( SCP Philippe ANGEL - Denis HAZANE - [Y] [K]) - Mandataire liquidateur de Société [7]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
non comparante, dispensée de comparaître à l'audience
INTIMES
Monsieur [F] [N]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
comparant en personne, assisté de Me Gilles PARUELLE, avocat au barreau de VAL D'OISE
CPAM DU [Localité 12]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
représentée par Mme [R] [T] en vertu d'un pouvoir général
SARL [N]
[Adresse 2]
[Adresse 2]
non comparante, non représentée
[11]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
représentée par Me Thomas HUMBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : L0305
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 09 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. Raoul CARBONARO, Président de chambre
M. Gilles BUFFET, Conseiller
Mme Bathilde CHEVALIER, Conseillère
qui en ont délibéré
Greffier : Mme Alisson POISSON, lors des débats
ARRÊT :
- RÉPUTÉ CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M. Raoul CARBONARO, Président de chambre et Mme Claire BECCAVIN, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
M. [F] [N], salarié de la S.A.R.L. [N], a sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de la S.A.R.L. [7] en sa qualité d'entreprise utilisatrice, à l'origine d'un accident du travail survenu le11 juillet 2006 ; que le 8 décembre 2009, il a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun à cette fin.
Par jugement en date du 24 janvier 2012, le tribunal a
- écarté des débats les deux télécopies adressées au secrétariat de la juridiction respectivement le 15 novembre 2011 et le 2 décembre 2011 ;
- rejeté les moyens tirés de la prescription et de l'irrecevabilité de l'action opposés par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] et la S.A.R.L. [7] ;
- dit que la S.A.R.L. [7], entreprise utilisatrice, a commis une faute inexcusable à l'égard de M. [F] [N] au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale, en ce qui concerne l'accident du travail du 17 juillet 2006 ;
- dit que la S.A.R.L. [N], entreprise prêteuse, en sa qualité d'employeur est tenus des obligations prévues par les articles L.452-1 à L.452-4 du code de la sécurité sociale, telles qu'elles résultent de la faute inexcusable de la S.A.R.L. [7], en application de l'article L.412-6 du code de la sécurité sociale ;
- constaté que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] dispose du droit de récupérer les sommes éventuellement versées au titre de la faute inexcusable auprès de M. [F] [N] ;
- dit que la S.A.R.L. [7] devra garantir la S.A.R.L. [N] pour moitié des sommes susceptibles d'être réclamées à celle-ci au titre de la faute inexcusable, en application des articles L.241-5-1 et L.412-6 du code de la sécurité sociale ;
- ordonné la majoration de l'indemnité de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale à son taux maximal ;
- dit que cette majoration suivra l'éventuelle évolution du taux d'incapacité permanente partielle ;
- ordonné avant dire-droit une expertise médicale ;
- dit que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] versera une indemnité provisionnelle de 5 000 euros à M. [F] [N] ;
- dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- ordonné l'exécution provisoire ;
- rejeté le surplus des demandes.
Pour statuer ainsi, le tribunal a relevé que le tribunal correctionnel de Melun avait condamné la S.A.R.L. [7] pour blessures involontaires par jugement du 16 avril 2008, ce qui avait fait courir le délai de deux ans à compter de cette date, de telle sorte que la demande n'était pas prescrite. Il a ajouté que la S.A.R.L. [N] avait été mise en cause dans la procédure, ce qui rendait l'action recevable. Il a reconnu la faute inexcusable du fait de la condamnation de la S.A.R.L. [7], entreprise utilisatrice, par le tribunal correctionnel pour les faits de blessures involontaires survenus lors de l'accident. Il a retenu que la S.A.R.L. [N] restait tenue des obligations prévues par les articles L.452-1 à L.452-4 du code de la sécurité sociale mais qu'elle bénéficiait d'une action récursoire. Sur l'action récursoire de l'entreprise prêteuse à l'encontre de l'entreprise utilisatrice, le tribunal a retenu que la S.A.R.L. [N] n'avait confié aucun moyen de protection spécifique à son salarié alors qu'il travaillait en hauteur. La société ne pouvait donc ignorer les conditions de travail de la victime.
Par arrêt du 11 juin 2015, la cour a déclaré l'appel de la S.A.R.L. [7] recevable et :
- réformé le jugement en ce qu'il a dit que la S.A.R.L. [7] devait garantir la S.A.R.L. [N] pour moitié des sommes susceptibles d'être réclamées à celle-ci en conséquence de la faute inexcusable qui lui est imputable ;
- dit que la S.A.R.L. [7] devait garantir la S.A.R.L. [N] à hauteur de la totalité des sommes susceptibles d'être réclamées à celle-ci en conséquence de la faute inexcusable qui lui est imputable ;
- confirmé le jugement pour le surplus de ses dispositions ;
- ordonné la réouverture des débats afin que les parties présentent leurs observations sur la liquidation des préjudices complémentaires demandés par M. [F] [N] ;
- condamné la S.A.R.L. [7] à régler à M. [F] [N] une indemnité de 3 500 euros au titre des frais irrépétibles.
Pour statuer ainsi, la cour a notamment considéré qu'il existait une confusion avérée entre la S.A.R.L. [7] et la S.A.R.L. [N], cette dernière n'ayant d'activité qu'au travers de la première qui s'est substituée à la S.A.R.L. [N] dans la direction de M. [F] [N] sur le chantier au cours duquel l'accident a eu lieu. Elle a ajouté que la S.A.R.L. [7] s'était substituée à la S.A.R.L. [N] dans la direction du salarié alors qu'elle lui avait donné des consignes.
Par arrêt du 9 février 2017, la cour de cassation a cassé et annulé l'arrêt sauf en ce qu'il a déclaré recevable l'appel de la S.A.R.L. [7] et renvoyé devant la cour d'appel de Paris autrement composée. La cour de cassation a considéré que la cour d'appel n'avait pas caractérisé par les motifs adoptés la qualité d'employeur de la S.A.R.L. [7].
Le 7 juin 2017, la S.A.R.L. [7] a sollicité la remise au rôle de l'affaire. La société a été placée en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Meaux le 21 avril 2022 et la S.C.P. Angel - Hazane - [K], en la personne de Me [K] a été nommée en qualité de liquidateur.
Le 9 décembre 2022, le liquidateur a demandé une dispense de comparution et a signalé l'absence de toute déclaration de créance.
Par acte d'huissier en date du 14 avril 2021, M. [F] [N] a assigné la S.A.R.L. [N] et lui a notifié ses conclusions.
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, M. [F] [N] demande à la cour de :
- déclarer l'appel de la S.A.R.L. [7] recevable mais le dire partiellement infondé ;
- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il :
- dit que la S.A.R.L. [N], entreprise prêteuse, en sa qualité d'employeur, est tenue des obligations prévues par les articles L. 452-1 à L. 452-4 du Code de la sécurité sociale ;
- dit que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] dispose du droit de récupérer les sommes éventuellement versées au titre de la faute inexcusable auprès de la S.A.R.L. [N] ;
- ordonné la majoration de l'indemnité de l'article L. 452-2 du Code de la sécurité sociale a son taux maximal ;
statuant à nouveau :
- fixer l'indemnisation de ses préjudices de la manière suivante :
- perte de gains professionnels : 48 870 euros ;
- incidence professionnelle : 182 400 euros ;
- aide d'une tierce personne : 261 375 euros ;
- dépenses liées à la réduction d'autonomie : 355 407,67 euros ;
- déficit fonctionnel temporaire : 37 880 euros ;
- déficit fonctionnel permanent : 272 250 euros ;
- souffrances endurées : 35 000 euros ;
- préjudice esthétique : 10 000 euros ;
- préjudice d'agrément : 10 000 euros ;
- préjudice sexuel : 90 000 euros ;
- préjudice d'établissement : 20 000 euros ;
- soit au total 1 323 182,31 euros ;
- condamner solidairement la S.A.R.L. [N] et la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] à lui payer la somme de 1 323 182,31 euros ;
- dire que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] lui paiera ladite somme et pourra en récupérer la totalité auprès de la S.A.R.L. [N] ;
- condamner la S.A.R.L. [N] à lui payer la somme de 3 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner la S.A.R.L. [N] aux dépens.
Par acte d'huissier en date du 27 janvier 2023, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] a assigné la [11].
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] demande à la cour de :
à titre principal,
- constater que l'accident du travail dont a été victime M. [F] [N] le 11 juillet 2006 a été déclaré par la S.A.R.L. [N] en sa qualité d'employeur de celui-ci et qu'elle est seule tenue des obligations résultant de la faute inexcusable ;
- constater que cet accident pris en charge par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] au titre de la législation professionnelle a été imputé par Caisse Régionale d'Assurance Maladie d'[Localité 9] sur le compte de la S.A.R.L. [N] ;
- dire que la S.A.R.L. [N], en sa qualité d'employeur est tenue des obligations prévues par les articles L.452-1 et L.452-4 du code de la sécurité sociale ;
- constater qu'elle dispose du droit de récupérer les sommes versées au titre de la faute inexcusable contre la S.A.R.L. [N] ;
- constater que l'action en faute inexcusable de M. [F] [N] a été engagée à l'encontre de la S.A.R.L. [7] le 8 décembre 2009 ;
- constater la mise en cause tardive de la S.A.R.L. [N] au 8 septembre 2011 ;
en conséquence,
- infirmer le jugement entrepris,
- déclarer irrecevable l'action en faute inexcusable de M. [F] [N] engagée à l'encontre de la S.A.R.L. [7] le 8 décembre 2009 ;
- constater la prescription au 27 avril 2010 de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de la S.A.R.L. [N] ;
- condamner M. [F] [N] à lui rembourser la provision de 5000 euros versée par celle-ci en exécution du jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun le 24 janvier 2012 ainsi que les sommes perçues au titre de la rente majorée ;
à titre subsidiaire,
dans l'hypothèse, où la Cour confirmerait la recevabilité du recours de M. [F] [N] et l'existence d'une faute inexcusable,
- dire que la S.A.R.L. [7], en tant que société utilisatrice dans le cadre d'un prêt de main d'oeuvre, est l'auteur de la faute inexcusable ;
- dire que la S.A.R.L. [7] et Me [K] en sa qualité de liquidateur, devront garantir la S.A.R.L. [N] de l'intégralité des sommes susceptibles d'être réclamées à celle-ci en conséquence de la faute inexcusable qui lui est imputable ;
- condamner in solidum, la S.A.R.L. [N], Me [K] en sa qualité de liquidateur de la S.A.R.L. [7] et la [11], assureur de la S.A.R.L. [7], auteur de la faute inexcusable, à rembourser à la caisse l'ensemble des sommes avancées par elle au titre de la faute inexcusable conformément aux dispositions des articles L.452-2 et L.452-3 du Code de la Sécurité Sociale (y compris la provision de 5 000 euros et la majoration de la rente en exécution du jugement du 24 janvier 2012) ;
- débouter M. [F] [N] de ses demandes d'indemnisation au titre des préjudices suivants :
- perte de gains professionnels
- incidence professionnelle
- aide d'une tierce personne après consolidation
- dépenses consécutives à la réduction d'autonomie
- frais de véhicule adapté
- dépense d'appareillage
- déficit fonctionnel permanent
- limiter l'indemnisation des préjudices suivants :
- au titre du déficit fonctionnel temporaire à 29 602,50 euros ;
- souffrances endurées à 25 000 euros ;
- préjudice sexuel à 50 000 euros ;
- Prendre acte du rapport à justice concernant les préjudices suivants :
- aide d'une tierce personne avant consolidation : 40 959 euros ;
- préjudice esthétique temporaire : 2000 euros ;
- préjudice esthétique permanent : 8000 euros ;
- préjudice d'agrément : 10 000 euros ;
- préjudice d'établissement : 20 000 euros ;
- condamner in solidum la S.A.R.L. [N], la S.A.R.L. [7], Me [K] en sa qualité de liquidateur de la S.A.R.L. [7] et la [11], assureur de la S.A.R.L. [7], auteur de la faute inexcusable, au règlement des frais d'expertise et aux entiers dépens de la procédure ;
- déclarer l'arrêt commun et opposable à Me [K], liquidateur de la S.A.R.L. [7], et à la [11].
Par conclusions écrites visées et développées oralement à l'audience par son avocat, la [11] demande à la cour de :
à titre principal,
- déclarer la demande de mise en cause de la [11] par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] irrecevable pour cause de prescription ;
à titre subsidiaire,
mettre hors de cause la société [11], ès qualité d'assureur de la S.A.R.L. [7] ;
à titre infiniment subsidiaire,
- donner acte à la société [11] de ce qu'elle s'en remet aux arguments développés par la S.A.R.L. [7] et qu'elle s'en remet à l'appréciation de la Cour sur le fait de voir l'arrêt à intervenir lui être déclaré commun et opposable, sous les plus expresses réserves eu égard aux procédures en cours.
Elle fait donc siennes les conclusions de la S.A.R.L. [7] qui n'ont pas été développées qi demandaient à la cour de :
- réformer le jugement du 24 janvier 2012 en toutes ses dispositions,
statuant à nouveau,
- dire et juger que la S.A.R.L. [N] était employeur de M. [F] [N] lors de l'accident du 11 juillet 2006 et que la S.A.R.L. [N] est seule tenue des obligations résultant d'une éventuelle faute inexcusable ;
sur la prescription :
- dire et juger que l'action en reconnaissance de faute inexcusable engagée par M. [F] [N] est prescrite,
sur la recevabilité des demandes contre la S.A.R.L. [7] :
- déclarer irrecevable la demande de M. [F] [N] en reconnaissance de faute inexcusable dirigée contre la S.A.R.L. [7] ;
- mettre hors de cause la S.A.R.L. [7] ;
sur le fond,
- dire et juger que M. [F] [N] ne justifie pas de ses demandes à l'encontre de la S.A.R.L. [7] ;
- dire et juger que les conditions de la garantie par la S.A.R.L. [7] de la S.A.R.L. [N] ne sont pas réunies ;
- débouter M. [F] [N] de ses demandes ;
en toutes hypothèses,
- condamner M. [F] [N] à payer à la S.A.R.L. [7] la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile,
- condamner M. [F] [N] aux dépens
La S.A.R.L. [N], régulièrement assignée par remise de l'acte au dernier siège social connu, n'a pas comparu.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, et en application de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 9 mars 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
SUR CE,
Sur la recevabilité des demandes dirigées contre la S.A.R.L. [7]
La [11] expose que l'employeur est seul tenu des obligations résultant de la faute inexcusable quelque soit l'auteur de la faute ; qu'en effet, en application de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale l'employeur demeure tenu des obligations résultant de la faute inexcusable dans tous les cas de prêt de main-d''uvre, qu'ils soient licites ou illicites (Cass. Soc. 6 juillet 2000 n°98-20054) ; qu'en conséquence, toute demande de reconnaissance d'une faute inexcusable dirigée à l'encontre d'une entreprise ayant bénéficié d'un prêt de main d''uvre par l'employeur, est irrecevable ; que la S.A.R.L. [N] est l'employeur de M. [F] [N] au moment de l'accident du travail ; que M. [F] [N] n'a formulé dans ses écritures d'avril 2011 aucune demande contre la S.A.R.L. [N] et n'a d'ailleurs pas demandé que soit reconnue la faute inexcusable de cette dernière ; qu'à l'occasion du premier examen de l'affaire par la Cour d'appel, M. [F] [N] n'a pas inclus la S.A.R.L. [N] dans ses conclusions et n'a formulé aucune demande à son encontre ; qu'il a même indiqué qu'elle n'était jamais intervenue aux débats.
M. [F] [N] ne réplique pas mais renonce à plaider que la S.A.R.L. [7] est son employeur.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] expose que d'une jurisprudence constante, la victime d'un accident du travail ou ses ayants droits ne peuvent agir en reconnaissance de faute inexcusable que contre l'employeur de la victime, quel que soit l'auteur de la faute, la Caisse n'ayant de recours que contre la personne ayant la qualité juridique d'employeur ; que la Cour de cassation considère que l'employeur demeure tenu des obligations résultant de la faute inexcusable dans tous les cas de prêt de main d''uvre, qu'ils soient licites ou illicites ; que l'action en faute inexcusable a été engagée par M. [F] [N] à l'encontre de la S.A.R.L. [7], celle-ci devait donc être déclaré irrecevable ; qu'en cas de prêt de main d'oeuvre illicite, elle peut exercer son recours subrogatoire directement à l'encontre de la société utilisatrice.
Il résulte de l'article L. 452-1 du code la sécurité sociale, auquel l'article L. 412-6 du même code ne déroge pas, que l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ne peut être engagée qu'à l'encontre de l'employeur de la victime. L'employeur demeure tenu des obligations résultant de la faute inexcusable dans tous les cas de prêt de main-d'oeuvre, qu'ils soient licites ou illicites (Soc., 6 juillet 2000, n° 98-20.054). Il dispose d'une action récursoire contre l'entreprise utilisatrice.
Dès lors, M. [F] [N] n'est pas recevable à agir directement contre la S.A.R.L. [7] en reconnaissance d'une faute inexcusable.
L'action récursoire de l'employeur à l'encontre de l'entreprise utilisatrice d'un salarié victime d'un accident du travail trouve son fondement dans l'éventuelle faute de celle-ci, ayant concouru à la réalisation du dommage, et non dans l'action en reconnaissance de faute inexcusable intentée par la suite par le salarié victime (2e Civ., 11 octobre 2006, pourvoi n° 04-30.694). Toutefois, la S.A.R.L. [N] ne sollicite pas la condamnation de la S.A.R.L. [7] à la garantir des condamnations prononcées à son encontre. Dès lors, la Caisse, subrogée dans les droits de la victime, ne dispose pas de plus de droits à l'encontre de cette dernière et n'est donc pas en droit d'exercer son action à l'encontre de la S.A.R.L. [7] représentée par son liquidateur.
Les demandes dirigées contre la S.A.R.L. [7] représentée par son liquidateur sont donc irrecevables et le jugement déféré sera infirmé sur ce point.
Toutefois, cette société ne sera pas mise hors de cause, dès lors qu'en application des articles 330 et 331 du code de procédure civile, tant la victime que la caisse ont intérêt à ce qu'elle intervienne pour défendre sur la faute inexcusable.
Sur l'action en garantie dirigée contre la [11]
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] soutient qu'elle bénéficie d'une action directe en application de l'article L 124-3 du code des assurances à l'encontre de l'assureur de l'entreprise utilisatrice auteure de la faute inexcusable.
La [11] réplique que la demande est atteinte de prescription, les demandes à son encontre ayant été formées plus de cinq ans après l'accident et, au fond, que l'action contre un tiers n'est pas recevable devant les juridictions de sécurité sociale.
En application des articles L. 124-3 du code des assurances et L. 452-3, alinéa 3, du code de la sécurité sociale, après versement de l'indemnité complémentaire à la victime d'un accident du travail causé par la faute inexcusable de son employeur, la caisse, subrogée dans les droits du salarié, peut agir par voie d'action directe à l'encontre de l'assureur des conséquences financières de la faute inexcusable, sans être tenue de se soumettre à la procédure de vérification de sa créance. L'assureur visé est celui de l'employeur.
En l'absence de texte spécifique, l'action récursoire que les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale réservent à la caisse primaire d'assurance maladie à l'encontre de l'employeur, auteur d'une faute inexcusable, pour la récupération des compléments de rente et indemnités qu'elle a versés à la victime, se prescrit par cinq ans en application de l'article 2224 du code civil, et l'action directe dont elle dispose, en vertu de l'article L.124-3 du code des assurances, à l'encontre de l' assureur de cet employeur, se prescrit par le même délai.
Il a été jugé qu'il en résulte que l'action en remboursement des compléments de rente et indemnités versés à la caisse que l' assureur d'une entreprise de travail temporaire peut, en vertu de l'article L. 412-6 du code de la sécurité sociale, exercer contre l'entreprise utilisatrice, auteur de la faute inexcusable, que l'article L. 452-4, alinéa 3, autorise à s'assurer contre les conséquences financières de cette faute, est soumise à ce même délai de cinq ans, prévu à l'article 2224 du code civil, de même que son action directe à l'encontre de l' assureur de cette entreprise, qui ne peut être exercée contre celui-ci, au-delà de ce délai, que tant qu'il reste exposé au recours de son assuré (2e Civ., 21 avril 2022, pourvoi n° 20-20.976).
Dès lors, la prescription ne court qu'à compter du paiement par la Caisse des indemnités dues à la victime et, pour les rentes, du versement de chaque complément de rente. En conséquence, les demandes tendant au remboursement des rentes échues comprises dans le délai de cinq ans avant l'assignation, de la capitalisation de la rente à échoir et des indemnités versées à la victime ne sont pas prescrites.
Toutefois, la [11] n'est pas l'assureur de l'employeur de la victime et la Caisse qui n'est subrogée que dans les droits de la victime ne dispose pas d'une action directe à son égard.
Cependant, la S.A.R.L. [7] n'étant pas mise hors de cause, elle a intérêt à être dans la cause au même titre pour défendre son assurée sur la faute inexcusable et ses conséquences. Le présent arrêt lui sera déclaré commun.
Sur la prescription de l'action en reconnaissance de faute inexcusable
La [11], reprenant les arguments de la S.A.R.L. [7], expose que la cour de Cassation a précisé que l'action du salarié pour faute inexcusable peut, outre les cas mentionnés dans l'article précité, avoir pour point de départ la date de la reconnaissance du caractère professionnel de l'accident (Cass. 2ème civ.3 avril 2003 n°01-20.872) ; qu'en l'espèce, l'accident de M. [F] [N] est intervenu le 11 juillet 2006 ; que le caractère professionnel de l'accident a été établi le 23 avril 2007 ; que l'action pénale engagée par le demandeur a donné lieu à un jugement prononcé le 16 avril 2008 ; que ce jugement n'a fait l'objet d'aucun recours ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale a estimé que l'action ne serait pas prescrite dès lors que M. [F] [N] avait introduit son recours le 8 décembre 2009 ; que cependant, l'action introduite en décembre 2009 ne visait pas la S.A.R.L. [N], employeur, qui n'a été mise dans la cause que bien plus tard ainsi que le reconnaît le tribunal des affaires de sécurité sociale qui indique que cette mise en cause aurait été effectuée à la diligence du greffe en décembre 2011 ; que M. [F] [N] n'a visé la S.A.R.L. [N] dans ses écritures qu'en avril 2011 soit toujours bien après l'expiration du délai de deux ans qui a recommencé à courir au jour de l'expiration des voies de recours contre le jugement pénal ; qu'enfin, M. [F] [N] invoque sa faute inexcusable dans ses écritures et non pas celle de la S.A.R.L. [N].
M. [F] [N] réplique qu'en l'espèce, l'accident de travail dont il a été victime a eu lieu le 11 juillet 2006 puis il y a eu une action pénale engagée pour les mêmes faits qui a pris fin par le jugement tendu par le Tribunal correctionnel de Melun en date du 16 avril 2008 condamnant l'auteur de ces faits, qualifiés de blessures involontaires, ce qui a eu pour effet de faire courir un nouveau délai de 2 ans à compter de cette date, lequel délai devait expirer deux ans après la signification de ce jugement à sa personne ; qu'en conséquence, le recours introduit devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun le 08 décembre 2009 ne saurait être regardé comme prescrit ; qu'en tout état de cause, même à supposer qu'il y ait eu prescription, il convient de rappeler que celle-ci ne saurait bénéficier à la S.A.R.L. [N] qui n'a pas soulevé ce moyen ; qu'il convient en effet de rappeler que la jurisprudence considère qu'il s'agit d'une violation de l'article 2223 du Code civil en vertu duquel les juges ne peuvent pas suppléer d'office le moyen résultant de la prescription.
Il ajoute verbalement que l'action intentée contre la S.A.R.L. [N] l'a été dans les deux ans de la cessation du versement des indemnités journalières.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] expose que le jugement pénal du 16 avril 2008 est devenu définitif le 27 avril 2008, l'action en faute inexcusable était donc prescrite au 27 avril 2010 ; que lors de la mise en cause de la S.A.R.L. [N], le 8 septembre 2011, l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur était donc prescrite.
L'article L. 431-2 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige énonce que : « Les droits de la victime ou de ses ayants droit aux prestations et indemnités prévues par le présent livre se prescrivent par deux ans à dater :
1°) du jour de l'accident ou de la cessation du paiement de l'indemnité journalière ;
2°) dans les cas prévus respectivement au premier alinéa de l'article L. 443-1 et à l'article L. 443-2, de la date de la première constatation par le médecin traitant de la modification survenue dans l'état de la victime, sous réserve, en cas de contestation, de l'avis émis par l'expert ou de la date de cessation du paiement de l'indemnité journalière allouée en raison de la rechute ;
3°) du jour du décès de la victime en ce qui concerne la demande en révision prévue au troisième alinéa de l'article L. 443-1 ;
4°) de la date de la guérison ou de la consolidation de la blessure pour un détenu exécutant un travail pénal ou un pupille de l'éducation surveillée dans le cas où la victime n'a pas droit aux indemnités journalières.
L'action des praticiens, pharmaciens, auxiliaires médicaux, fournisseurs et établissements pour les prestations mentionnées à l'article L. 431-1 se prescrit par deux ans à compter soit de l'exécution de l'acte, soit de la délivrance de la fourniture, soit de la date à laquelle la victime a quitté l'établissement.
Cette prescription est également applicable, à compter du paiement des prestations entre les mains du bénéficiaire, à l'action intentée par un organisme payeur en recouvrement des prestations indûment payées, sauf en cas de fraude ou de fausse déclaration.
Les prescriptions prévues aux trois alinéas précédents sont soumises aux règles de droit commun.
Toutefois, en cas d'accident susceptible d'entraîner la reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur, ou de ceux qu'il s'est substitués dans la direction, la prescription de deux ans opposable aux demandes d'indemnisation complémentaire visée aux articles L. 452-1 et suivants est interrompue par l'exercice de l'action pénale engagée pour les mêmes faits ou de l'action en reconnaissance du caractère professionnel de l'accident ».
Dès lors que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] doit faire l'avance des indemnisations fixées dans le cadre de la procédure de reconnaissance de faute inexcusable, elle a qualité à soulever la prescription qui constitue une fin de non recevoir.
Il résulte de ce texte que l'interruption du cours de la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable ne peut survenir que si le délai a commencé à courir.
En l'espèce, la victime a été consolidée le 30 novembre 2009, date de cessation du versement des indemnités journalières.
Dès lors, à la date du jugement statuant sur la responsabilité pénale du gérant de la S.A.R.L. [7] prononcé contradictoirement à l'égard de M. [F] [N] le 16 avril 2008 par le tribunal correctionnel de Melun, la prescription de l'action en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur de celui-ci n'avait pas commencé à courir, son point de départ étant le 30 novembre 2009.
La demande de reconnaissance de la faute inexcusable a été dirigée le 7 décembre 2009 à l'encontre de l'appelante, exclusivement, qualifié par la victime d'employeur. La requête ne nomme pas son employeur légal. L'appelante n'est pas débitrice, même à titre solidaire à l'égard de M. [F] [N] d'une quelconque obligation. La requête n'a donc pas interrompu la prescription, dès lors que l'appelante n'est pas l'employeur de la victime.
Toutefois, la demande de reconnaissance de la faute inexcusable de la S.A.R.L. [N] a été formulée que dans les écritures de la victime qui lui ont été notifiées le 29 avril 2011, soit antérieurement à l'expiration du délai de prescription.
Les demandes de M. [F] [N] sont donc recevables.
Sur la faute inexcusable
M. [F] [N] expose qu'il a travaillé en hauteur sur un toit sans être équipé du matériel de sécurité nécessaire ; qu'il a chuté à travers un trou correspondant à l'endroit ou des plaques de tôle ondulées avaient été enlevées ; que l'entreprise utilisatrice ne pouvait ignorer le danger existant.
La [11] demande sa mise hors de cause, faute d'être l'employeur de la victime et reprend l'argumentation de la S.A.R.L. [7] selon laquelle, celle-ci n'étant pas l'employeur ne peut être l'auteur d'une faute inexcusable, que seul son dirigeant a été condamné et que la faute inexcusable et la faute non intentionnelle ne se confondent pas.
L'employeur est tenu envers son salarié d'une obligation légale de sécurité et de protection de la santé, notamment en cas d'accident du travail ou de maladie professionnelle. Il a, en particulier, l'obligation de veiller à l'adaptation des mesures de sécurité pour tenir compte des circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. Il doit éviter les risques et évaluer ceux qui ne peuvent pas l'être, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail, planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions du travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants. Les articles R.4121-1 et R.4121-2 du code du travail lui font obligation de transcrire et de mettre à jour au moins chaque année, dans un document unique les résultats de l'évaluation des risques pour la santé et la sécurité des travailleurs.
Le manquement à cette obligation de sécurité a le caractère d'une faute inexcusable, au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié, et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été l'origine déterminante de l'accident du travail subi par le salarié, mais il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée, alors même que d'autres fautes y compris la faute d'imprudence de la victime, auraient concouru au dommage.
Il incombe au salarié de prouver que son employeur, qui devait ou qui aurait dû avoir conscience du danger auquel il était exposé, n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, étant rappelé que la simple exposition au risque ne suffit pas à caractériser la faute inexcusable de l'employeur ; aucune faute ne peut être établie lorsque l'employeur a pris toutes les mesures en son pouvoir pour éviter l'apparition de la lésion compte tenu de la conscience du danger qu'il pouvait avoir.
La conscience du danger, dont la preuve incombe à la victime, ne vise pas une connaissance effective du danger que devait en avoir son auteur. Elle s'apprécie in abstracto par rapport à ce que doit savoir, dans son secteur d'activité, un employeur conscient de ses devoirs et obligations.
L'article L. 412-6 du code de la sécurité sociale, relatif aux entreprises utilisatrices, dispose que : « Pour l'application des articles L. 452-1 à L. 452-4, l'utilisateur, le chef de l'entreprise utilisatrice ou ceux qu'ils se sont substitués dans la direction sont regardés comme substitués dans la direction, au sens desdits articles, à l'employeur. Ce dernier demeure tenu des obligations prévues audit article sans préjudice de l'action en remboursement qu'il peut exercer contre l'auteur de la faute inexcusable ».
Il résulte du procès-verbal établi le 11 juillet 2006 qu'un accident est survenu rue du presbytère à [Localité 10] sur un chantier de rénovation de bâtiment. Selon le témoignage du gérant de la société employant la victime, cette dernière se trouvait sur le toit du bâtiment lorsque qu'elle a chuté sur le sol du premier étage après être passée au travers d'une tôle en fibre de verre. La victime se trouvait sur le toit sans protection en l'absence de matériel de sécurité adapté. Selon le gérant de la société employeur, elle était sous-traitante de la S.A.R.L. [7]. Il précise que ni lui, ni son salarié, n'étaient porteurs d'un casque et d'un harnais de sécurité. Les policiers constataient la présence d'une échelle d'une hauteur de 4 m fixés au toit par une simple cordelette. Les policiers constataient en outre la présence à côté de la victime d'une tôle carrée en fibre de verre de 1,50 m de côté. Le témoignage du gérant était confirmé par d'autres personnes présentes sur le site.
S'agissant des relations contractuelles entre la société donneur d'ordre et la société sous-traitante, l'enquête révélait qu'après l'accident, la société donneur d'ordre avait fait signer deux documents concernant d'une part l'attestation selon laquelle la sécurité du chantier incombait à la société sous-traitante et d'autre part la régularité de la situation de la sous-traitante envers ses assureurs. Le témoignage reçu des enquêteurs de la responsable de la société [8] en charge de la comptabilité et de la gestion de la société sous-traitante portait en outre sur le fait que les documents avaient été volontairement antidatés. Ce témoignage était confirmé par le gérant de la société sous-traitante qui précisait en outre que la société donneur d'ordre avait fourni l'ensemble du matériel et l'outillage utilisé à l'exception de l'échelle et des bastings qui avaient été installés sur le toit.
Le gérant de la société donneur d'ordre indiquait qu'il avait préparé des documents contractuels avant que la société sous-traitante ne rentre sur le chantier afin que la situation contractuelle soit clairement établie et que le gérant n'avait pas voulu signer. Il ajoutait qu'il devait apporter un échafaudage roulant pour pouvoir démonter les plaques du faux plafond translucide et que le gérant de la société avait contrevenu à leur accord en commençant le chantier avant qu'il n'ait apporté le matériel. À la fin de son audition, le gérant soutenait que l'entreprise sous-traitante devait fournir l'échafaudage et l'installer avant de commencer les travaux, contrairement ce qu'il avait antérieurement déclaré.
L'enquêteur relevait cependant que le contrat de sous-traitance, déposé aux débats, contrairement aux assertions du gérant de la société donneur d'ordre, prévoyait que le changement des plaques devait s'opérer en façade et non en sous face. Il était en outre noté que l'attestation URSSAF de la sous-traitante avait été rédigée sur un papier à en-tête de la société donneur d'ordre. L'enquête mettait en outre en évidence que les prix convenus des contrats de sous-traitance précédemment signés et de celui en cause, ne correspondaient qu'au paiement des salaires, qu'aucune durée du chantier ne figurait dans les contrats et que; pour le contrat en cause, la société donneur d'ordre devait assurer la sécurité du chantier selon le PPSPS.
L'audition de la victime précisait que la société sous-traitante avait demandé la fourniture de harnais de sécurité au donneur d'ordre et que ce dernier avait refusé en l'absence d'utilité. Il ajoutait que l'échelle posée appartenait à son donneur d'ordre et qu'il n'avait jamais été question que soit fourni un échafaudage. Il précisait que les plaques de tôle ne pouvaient s'enlever que par l'extérieur. Tant la victime que son employeur ont indiqué que plusieurs épaisseurs de tôle étaient superposées et que l'accident était survenu après la dépose d'une première épaisseur de tôle alors qu'il était nécessaire de dévisser les tôles situées en dessous.
Le procès-verbal de l'inspection du travail rapporte que le propriétaire du bâtiment n'était pas au courant de l'existence d'un contrat de sous-traitance, la société donneur d'ordre ayant compétence pour travailler sur le toit et réaliser le changement des plaques de tôle, s'agissant de son activité principale. Il relate que le gérant de la société donneur d'ordre avait maintenu que les travaux pouvaient s'effectuer en sous face moyennant l'utilisation de harnais qui devaient être fixés sur une ligne de vie qui était inexistante. La lecture du PPSPS confirmait que le donneur d'ordre était responsable de la fourniture des moyens de protection. La lecture de contrats antérieurs révélait en outre l'absence de détails sur la durée du chantier et sur le nombre d'ouvriers intervenants, l'absence de précision sur le descriptif détaillé du chantier et le fait que le donneur d'ordre mettait gratuitement à disposition la visserie et le matériel nécessaire au bon déroulement des travaux et de la sécurité.
L'inspection du travail en a conclu que le contrat de sous-traitance dissimulait un prêt de main-d''uvre à but lucratif.
En application des articles L.8231-1, L.8241-1 et L. 8243-1 du code du travail, le prêt de main d'oeuvre illicite est caractérisé si la convention a pour objet la fourniture de main d'oeuvre moyennant rémunération pour faire exécuter une tâche permanente de l'entreprise utilisatrice sans transmission d'un savoir-faire ou mise en oeuvre d'une technicité qui relève de la spécificité propre de l'entreprise prêteuse.
En l'espèce, la société donneur d'ordre était spécialisée dans les travaux de toiture et de bardage. Le contrat avec la société qualifiée de sous-traitante a été conclu suite à une démarche de son gérant pour trouver du travail sans qu'il apparaisse que les qualifications particulières de celle-ci relèvent d'une technicité spécifique qui lui soit propre. La lecture de la convention de sous-traitance, qui n'a été signée que postérieurement à l'accident et antidatée, met en évidence l'absolue dépendance économique de la société sous-traitante qui ne facture que le montant de la main-d''uvre, l'ensemble du matériel de sécurité et du petit matériel étant, selon les déclarations mêmes des personnes en cause, mis à disposition par le donneur d'ordre. Ce contrat, confiant une mission spécifique de pose de bardage en façade, n'était en outre pas conforme aux travaux confiés, de telle sorte qu'il ne saurait à lui seul qualifier la relation entre les deux sociétés.
L'économie du contrat, au regard des témoignages reçus et des pièces opposables, à savoir notamment le PPPSPS, démontre que celui-ci n'avait pour objet que de fournir de la main-d''uvre à la société donneur d'ordre moyennant le remboursement des salaires versés, ce qui caractérise le prêt de main-d''uvre. Dès lors, le donneur d'ordre doit être considéré comme l'entreprise utilisatrice du salarié de son « sous-traitant ».
Le PPSPS du chantier précisait que les travaux du faux plafond en sous-face et de dépose des plaques translucides devaient s'opérer à l'aide d'un échafaudage conforme à la réglementation de sécurité avec port du harnais si la hauteur était supérieure à 2,5 m, que la pose des plaques translucides devait s'opérer par l'intérieur du bâtiment à l'aide du même échafaudage et que s'il était nécessaire de monter en toiture, une ligne de vie et un platelage couvrazed devaient être posés le port du harnais étant obligatoire. Les moyens de sécurité devaient être fournis par l'entreprise et posés par le « sous-traitant ».
Il résulte du procès-verbal établi par l'inspection du travail ainsi que du procès-verbal établi par la police après l'accident que tant l'employeur de la victime que celui qu'il s'était substitué, la société donneur d'ordre, ne pouvaient ignorer le danger résultant d'un travail en hauteur nécessitant de passer au moins ponctuellement sur la toiture. Le PPSPS établi par le donneur d'ordre et communiqué rappelait les mesures nécessaires pour être conforme à la législation sur le travail en hauteur. Les deux sociétés, professionnelles des travaux en toiture, ne pouvaient donc ignorer le danger auquel elles exposaient la victime.
Aucune de ces sociétés n'a pris de mesures pour prévenir la chute de la victime. L'employeur reconnaît qu'aucun matériel de sécurité n'a été donné aux salariés et l'audition du gérant de l'entreprise utilisatrice démontre l'absence de ligne de vie et donc de points de fixation possibles pour un harnais de sécurité.
La faute inexcusable de l'employeur de la victime, tant pour sa propre faute que du fait de la société utilisatrice, bénéficiaire du prêt illicite de main-d''uvre, est donc établie.
Le jugement déféré sera donc confirmé en ce qu'il a :
- rejeté les moyens tirés de la prescription et de l'irrecevabilité de l'action opposés par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] et la S.A.R.L. [7] ;
- dit que la S.A.R.L. [7], entreprise utilisatrice, a commis une faute inexcusable à l'égard de M. [F] [N] au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale, en ce qui concerne l'accident du travail du 17 juillet 2006 ;
- dit que la S.A.R.L. [N], entreprise prêteuse, en sa qualité d'employeur est tenus des obligations prévues par les articles L.452-1 à L.452-4 du code de la sécurité sociale, telles qu'elles résultent de la faute inexcusable de la S.A.R.L. [7], en application de l'article L.412-6 du code de la sécurité sociale ;
- ordonné la majoration de l'indemnité de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale à son taux maximal ;
- dit que cette majoration suivra l'éventuelle évolution du taux d'incapacité permanente partielle ;
- ordonné avant dire-droit une expertise médicale ;
- dit que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] versera une indemnité provisionnelle de 5 000 euros à M. [F] [N].
Il sera complété en ce que la S.A.R.L. [N] a commis une faute inexcusable à l'origine de l'accident du travail.
Il sera infirmé en ce qu'il a dit que la S.A.R.L. [7] devra garantir la S.A.R.L. [N] pour moitié des sommes susceptibles d'être réclamées à celle-ci au titre de la faute inexcusable, en application des articles L.241-5-1 et L.412-6 du code de la sécurité sociale.
Sur l'indemnisation des préjudices
Au regard des demandes conjointes des parties, la cour évoquera l'indemnisation du préjudice.
Les conclusions du rapport d'expertise du docteur [L], médecin expert commis par le jugement déféré sont les suivantes :
- déficit fonctionnel temporaire total du 11 juillet 2006 au 25 février 2007 ;
- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 75 % du 26 février 2007 au 30 novembre 2009 ;
- déficit fonctionnel permanent de 50 % ;
- souffrances endurées : 5/7 ;
- préjudice esthétique temporaire sur deux ans : 4/7 ;
- préjudice esthétique permanent : 3,5/7 ;
- existence d'un préjudice d'agrément ;
- existence d'un préjudice sexuel et d'un préjudice d'établissement ;
- nécessité d'une assistance par tierce personne à raison de deux heures par jour ;
- existence de pertes de gains professionnels avant et après consolidation et d'un retentissement professionnel.
L'article L452-3 du code de la sécurité sociale dispose que :
« Indépendamment de la majoration de rente qu'elle reçoit en vertu de l'article précédent, la victime a le droit de demander à l'employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d'agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Si la victime est atteinte d'un taux d'incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation ».
« La réparation de ces préjudices est versée directement aux bénéficiaires par la caisse qui en récupère le montant auprès de l'employeur ».
Il résulte, par ailleurs, des articles L. 434-1, L. 434-2 et L. 452-2 du même code que la rente versée à la victime d'un accident du travail et sa majoration en cas de faute inexcusable de l'employeur indemnisent, d'une part, les pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité, mais pas le déficit fonctionnel permanent (Ass. plén., 20 janvier 2023, pourvoi n° 20-23.673).
Dès lors, sont indemnisables au titre de la réparation des conséquences de la faute inexcusable de l'employeur les postes de préjudice suivants :
- le déficit fonctionnel temporaire ;
- les souffrances endurées ;
- le préjudice esthétique temporaire ;
- l'assistance par tierce personne avant la consolidation ;
- le déficit fonctionnel permanent ;
- le préjudice esthétique permanent ;
- le préjudice d'agrément ;
- la perte de chance de promotion professionnelle ;
- le préjudice sexuel ;
- le préjudice d'établissement ;
- les frais d'aménagement de logement et de véhicule.
En conséquence, les demandes formées par la victime tendant à l'indemnisation de pertes de gains professionnels avant et après consolidation, de l'incidence professionnelle, indemnisées au titre du Livre IV par le versement de la rente, seront rejetées.
Sur le déficit fonctionnel temporaire
Ce chef d'indemnisation porte sur la compensation financière de l'invalidité subie par la victime dans sa vie courante antérieurement à la consolidation, notamment sa perte de qualité de vie et des joies usuelles de l'existence.
Au regard de la durée du déficit fonctionnel temporaire total de 230 jours, il sera accordé une indemnisation de 6 900 euros sur la base journalière de 30 euros. Au regard de la durée du déficit fonctionnel temporaire partiel de 1009 jours, il sera accordé une indemnisation de 22 702,50 euros sur la même base journalière.
Le montant total de ce poste de préjudice sera donc évalué à la somme de 29 602,50 euros.
Sur les souffrances endurées
Ce poste indemnise les souffrances physiques et psychiques ainsi que les troubles associés que la victime a enduré du jour de l'apparition du traumatisme jusqu'à sa consolidation.
En l'espèce, le médecin a tenu compte de l'accident, des hospitalisations, de l'ostéosynthèse dorsolombaire, des séjours prolongés en rééducation, de la rééducation fonctionnelle, du retentissement psychologique, de l'apprentissage de la réadaptation périnéale urinaire et anale (auto-sondages, évacuation manuelle des selles), de l'apprentissage à la fonction locomotrice, en fauteuil roulant, avec béquillage, apprentissage de la conduite automobile, éléments douloureux jusqu'à la consolidation, pour le qualifié d'assez important et le coter à 5 sur une échelle de 7.
Au regard de ces éléments, il sera fait une juste évaluation du préjudice en l'évaluant à la somme de 35 000 euros.
Sur le préjudice esthétique temporaire
Ce poste indemnise les altérations de l'apparence physique de la victime antérieurement à la consolidation et qui ont pu présenter, malgré leur caractère temporaire, un retentissement dans la vie de cette dernière.
L'expert évalue ce chef de préjudice à 4/7 en le qualifiant de moyen au regard des abords chirurgicaux et du fauteuil roulant avec une réadaptation progressive à la fonction locomotrice, sur une période de deux ans.
Ce chef de préjudice sera justement évalué à la somme de 2 000 euros, conformément à la demande.
Sur l'assistance par une tierce personne avant la consolidation
L'expert a relevé que la victime requérait de son retour au domicile jusqu'à la date de consolidation la présence d'une tierce personne au rythme moyen de deux heures par jour pour l'aide à l'habillage, le déshabillage, la toilette, la préparation des repas, l'aide aux déplacements et à l'entretien domestique.
Au regard de la situation de la victime, il sera retenu un taux horaire de 20,50 heures, sur la base de 1009 jours à raison de deux heures par jour. La victime ayant limité sa demande par un calcul opéré que 999 jours, il y sera fait droit pour la somme de 40 959 euros.
Sur le déficit fonctionnel permanent
Ce chef d'indemnisation porte sur la compensation financière de l'invalidité subie par la victime dans sa vie courante postérieurement à la consolidation, telles les séquelles physiologiques, la douleur permanente, sa perte de qualité de vie et des joies usuelles de l'existence. Il n'est pas indemnisé par la rente.
L'expert relève une paraplégie flasque de niveau L3, ASIA A avec troubles urinaires et anal majeurs et détermine un taux de 50 %.
Au regard de l'âge de la victime à la date de consolidation (22 ans), il lui sera attribué une somme de 250 950 euros.
Sur le préjudice esthétique permanent
Ce poste indemnise les altérations de l'apparence physique de la victime postérieurement à la consolidation.
L'expert relève la déambulation possible avec l'aide de cannes anglaises, avec démarche de paraplégique de niveau L3 bilatéral et une cicatrice d'abord chirurgical dorsolombaire pour l'ostéosynthèse axiale, qualifiant ce chef de préjudice de modéré coté à 3,5/7.
Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en l'indemnisant à concurrence de 8 000 euros.
Sur le préjudice d'agrément
Ce poste indemnise le préjudice lié à l'impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisir.
En l'espèce, l'expert note que la victime pratiquait la boxe anglaise et le football, ce qu'elle ne peut plus faire, ne pouvant plus qu'avoir quelques activité de musculation des membres supérieurs.
La caisse ne s'oppose pas à l'indemnisation sollicitée pour la somme de 10 000 euros, demande à laquelle il sera fait droit, la victime produisant une attestation du [6] du 12 mars 2007 relatant des entraînements réguliers sur plusieurs années.
Sur la perte de chance de promotion professionnelle
Si la victime subi une incidence professionnelle certaine, celle-ci est indemnisée dans le cadre du versement de la rente. Elle ne démontre pas que ses qualifications à la date de l'accident et sa situation dans l'entreprise lui ouvraient droit à une promotion professionnelle à moyenne échéance, de telle sorte que cette demande sera rejetée.
Sur le préjudice sexuel
Ce poste indemnise les préjudices touchant à la sphère sexuelle, incluant les atteintes aux organes sexuels, le préjudice lié à l'acte sexuel, comme la perte de plaisir ou de libido, et le préjudice lié à l'impossibilité de procréer.
L'expert note que l'acte sexuel plein et entier n'est pas possible et que la victime doit avoir recours à des médicaments permettant des érections sans sensibilité et partielles, l'éjaculation n'étant guère possible. La procréation ne pourra être envisagée que dans le cadre d'une PMA.
Au regard de l'âge de la victime, ce préjudice sera évalué à 70 000 euros.
Sur le préjudice d'établissement
Ce poste indemnise la perte d'espoir, de chance ou de toute possibilité de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap permanent dont la victime reste atteinte après sa consolidation. Il s'agit plus particulièrement d'indemniser les bouleversements des projets de vie l'obligeant à renoncer à ses objectifs sur le plan familial.
L'expert relève que si la victime conserve des capacités à pouvoir nouer des relations affectives qui puissent s'inscrire dans une certaine durée, celles-ci sont altérées et réduites, la procréation nécessitant une aide médicale.
Il en résulte un préjudice qui sera justement indemnisé par la somme de 20 000 euros.
Sur les frais d'aménagement et les frais divers d'appareillage
Il résulte de l'article L.431-1 du code de la sécurité sociale figurant au chapitre I du titre III du livre IV de ce code qu'en cas d'accident du travail, les frais médicaux, chirurgicaux, pharmaceutiques et accessoires, les frais de transport et d'une façon générale, les frais nécessités par le traitement, la réadaptation fonctionnelle, la rééducation professionnelle et le reclassement de la victime sont pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie, de sorte qu'ils figurent parmi les chefs de préjudices expressément couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale dont la victime ne peut demander réparation à l'employeur en application de l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale, tel qu'interprété à la lumière de la décision n°2010-8 QPC du Conseil constitutionnel du 18 juin 2010 (2e Civ., 19 septembre 2013, pourvoi n° 12-18.074, Bull. 2013, II, n° 170).
Dès lors, les dépenses de santé sollicitées correspondent à l'acquisition et au renouvellement des petits et grands appareillages nécessités par l'état pathologique de la victime sont déjà indemnisées au titre du Livre IV et ne peuvent faire l'objet d'une nouvelle indemnisation.
Ne peuvent donc être prises en charge que les dépenses liées à l'adaptation d'un véhicule.
Le juge du fond ne peut exiger la production de factures pour évaluer l'indemnisation, puisque le principe de la réparation intégrale n'implique aucun contrôle de l'utilisation des fonds dont la victime conserve la libre utilisation (Civ. 2, 7 juillet 2011, n°10-20.373). L'indemnisation doit s'opérer en procédant à la capitalisation des frais en déterminant le coût des appareillages nécessaires ainsi que la périodicité de renouvellement (Crim., 9 mars 2021, pourvoi n° 20-81.107).
En l'espèce, la victime dépose la copie de son permis de conduire obtenir le 4 juillet 2017, avec des codes 10, 15, 40, 32, 35. Elle justifie donc de l'utilité de pourvoir à ses déplacements par l'achat d'un véhicule autonome et de la nécessité de procéder à son adaptation.
La victime justifie par la production de deux devis des frais d'adaptation d'un véhicule, à savoir les frais d'adaptation d'un accélérateur et du frein à main droite et les frais de fourniture d'une boule multifonction pour l'activation des commandes par comodos d'origine, soit respectivement pour 3 259,95 euros et 1 730,20 euros, hors participation commerciale, par deux devis correspondant à l'achat d'une Mercedes Classe B, représentant un coût global de 4 990,15 euros. L'achat d'un véhicule nouveau doit être envisagé tous les dix ans, soit une dépense annuelle de 499,01 euros.
Le prix de l'euro de rente viagère pour un homme âgé de 35 ans au jour de la liquidation de son préjudice est de 31,433, soit un préjudice de 15 685,38 euros.
Le préjudice de la victime sera donc fixé à 482 196,88 euros de laquelle la provision de 5 000 euros déjà versée sera déduite.
La Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] en fera l'avance et bénéficiera de son action subrogatoire à l'encontre de l'employeur, la S.A.R.L. [N], dont la radiation du registre du commerce et des sociétés n'a pas emporté la liquidation ni la disparition de sa personnalité morale.
La S.A.R.L. [N], qui succombe, sera condamnée aux dépens ainsi qu'au paiement au profit de M. [F] [N] d'une somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Le présent arrêt sera déclaré opposable à la S.A.R.L. [7], représentée par son liquidateur, Me [K] et à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12].
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
DÉCLARE recevable l'appel de la S.A.R.L. [7] ;
CONFIRME le jugement rendu le 24 janvier 2012 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun en ce qu'il a :
- rejeté les moyens tirés de la prescription et de l'irrecevabilité de l'action opposés par la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] et la S.A.R.L. [7] ;
- dit que la S.A.R.L. [7], entreprise utilisatrice, a commis une faute inexcusable à l'égard de M. [F] [N] au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale, en ce qui concerne l'accident du travail du 17 juillet 2006 ;
- dit que la S.A.R.L. [N], entreprise prêteuse, en sa qualité d'employeur est tenus des obligations prévues par les articles L.452-1 à L.452-4 du code de la sécurité sociale, telles qu'elles résultent de la faute inexcusable de la S.A.R.L. [7], en application de l'article L.412-6 du code de la sécurité sociale ;
- ordonné la majoration de l'indemnité de l'article L.452-2 du code de la sécurité sociale à son taux maximal ;
- dit que cette majoration suivra l'éventuelle évolution du taux d'incapacité permanente partielle.
- ordonné avant dire-droit une expertise médicale ;
- dit que la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] versera une indemnité provisionnelle de 5 000 euros à M. [F] [N] ;
Y ajoutant ;
DIT que la S.A.R.L. [N] a commis une faute inexcusable à l'origine de l'accident dont a été victime M. [F] [N] ;
L'INFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau ;
DÉCLARE irrecevables les demandes dirigées contre Me [Y] [K] prise en sa qualité de liquidateur de la S.A.R.L. [7] ;
Y ajoutant ;
FIXE les préjudices de M. [F] [N] de la manière suivante :
- déficit fonctionnel temporaire : 29 602,50 euros ;
- souffrances endurées : 35 000 euros ;
- préjudice esthétique temporaire : 2 000 euros ;
- assistance par tierce personne avant la consolidation : 40 959 euros ;
- déficit fonctionnel permanent : 250 950 euros ;
- préjudice esthétique permanent : 8 000 euros ;
- préjudice d'agrément : 10 000 euros ;
- préjudice sexuel : 70 000 euros ;
- préjudice d'établissement : 20 000 euros ;
- frais d'aménagement de véhicule : 15 685,38 euros ;
soit un préjudice total de 482 196,88 euros dont à déduire la provision de 5 000 euros ;
DÉBOUTE M. [F] [N] du surplus de ses demandes indemnitaires ;
CONDAMNE la S.A.R.L. [N] à rembourser à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] toutes les sommes dont cette dernière sera tenu de faire l'avance à M. [F] [N] en application des articles L.452-2 et L.452-3 du code de la sécurité sociale, ainsi que le coût de l'expertise ;
CONDAMNE la S.A.R.L. [N] à payer à M. [F] [N] la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la S.A.R.L. [N] aux dépens d'appel ;
DÉCLARE le présent arrêt opposable à Me [Y] [K] prise en sa qualité de liquidateur de la S.A.R.L. [7] et à la Caisse Primaire d'Assurance Maladie du [Localité 12] et commun à la S.A.R.L. [7].
La greffière Le président