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12/05/2023 | FRANCE | N°18/11802

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 12 mai 2023, 18/11802


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 12 MAI 2023



(n° 320, 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/11802 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6TEY



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 18-00757





APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901





INTIMÉE

Madame [H] [Z] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 12 MAI 2023

(n° 320, 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/11802 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B6TEY

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 septembre 2018 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 18-00757

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE LA SEINE SAINT DENIS

[Adresse 2]

[Adresse 2]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIMÉE

Madame [H] [Z] [T]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

comparante en personne, assistée de Mme [K] [S] (Fille)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 07 février 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre

Madame Bathilde CHEVALIER, conseillère

Monsieur Gilles BUFFET, conseiller

Greffier : Madame Alice BLOYET, lors des débats

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, initialement prévu le 07 avril 2023 et prorogé au 12 mai 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Laurence LE QUELLEC, présidente de chambre et par Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La cour statue sur l'appel interjeté par la caisse primaire d'assurance maladie de la Seine-Saint-Denis (la caisse) d'un jugement rendu le 18 septembre 2018 par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny dans un litige l'opposant à Mme [H] [Z] [T].

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que le 8 janvier 2017, Mme [T] a souscrit une déclaration de maladie professionnelle, sur la base d'un certificat médical initial en date du 30 mai 2016 constatant une « tendinopathie épaule gauche » et prescrivant des soins ; que le 14 avril 2017, la caisse a informé Mme [T] de la nécessité d'un délai complémentaire d'instruction ; que le 10 juillet 2017, la caisse l'a informée d'une décision de refus de prise en charge, en raison de la non réception de l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que le 15 novembre 2017, la caisse l'a informée d'une décision de refus de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie après avis défavorable du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ; que le 14 février 2018, la commission de recours amiable saisie par Mme [T] a confirmé la décision de rejet de prise en charge ; que le 21 avril 2018, Mme [T] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny de sa contestation.

Par jugement du 18 septembre 2018, le tribunal a :

- dit l'action de Mme [T] recevable et bien-fondée ;

- constaté une reconnaissance implicite de la maladie déclarée « tendinopathie épaule gauche » par Mme [T] le 8 janvier 2017, au titre de la législation professionnelle ;

- condamné la caisse à prendre en charge au titre de la législation sur les risques professionnels la maladie déclarée « tendinopathie épaule gauche » par Mme [T] le 8 janvier 2017 ;

- renvoyé la caisse à liquider Mme [T] de ses droits ;

- rejeté toutes conclusions plus amples ou contraires ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement, en toutes ses dispositions.

Pour statuer ainsi le tribunal a retenu que c'est à la caisse de prouver à quelle date, elle a réceptionné la déclaration de maladie professionnelle et le certificat médical initial, pour pouvoir se prévaloir des délais d'instruction ; qu'en l'espèce, il convient de retenir la date du 8 janvier 2017 ; que le premier délai de trois mois expirait donc le 8 janvier 2017 ; que la caisse produit un courrier daté du 14 avril 2017, réceptionné le 20 avril 2017, soit après l'expiration du premier délai, de sorte que la reconnaissance implicite doit être constatée.

La caisse à laquelle le jugement a été notifié le 24 septembre 2018, en a interjeté appel le 22 octobre 2018.

Par arrêt en date du 26 mars 2021, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé du litige, la cour de ce siège a :

- infirmé le jugement déféré en ses dispositions relatives à la reconnaissance implicite de la maladie professionnelle ;

Statuant à nouveau ;

- avant dire droit, désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles d'Orléans Centre, Direction Régionale du service médical, secrétariat comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, [Adresse 3], pour qu'il donne un avis motivé sur la question de savoir si la maladie dont souffre Mme [T], constatée médicalement le 30 mai 2016, a été directement causée par le travail habituel de la victime ;

- dit que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis le saisira dans les meilleurs délais ;

- invité les parties à communiquer les documents médicaux en leur possession en vue de la constitution du dossier prévu à l'article D.461-29 du code de la sécurité sociale ;

- dit que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles devait transmettre son avis dans les quatre mois de sa saisine par la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis ;

- sursis à statuer sur les autres demandes ;

- renvoyé l'affaire à une audience ultérieure pour que l'affaire suive son cours après l'avis du comité régional ;

- dit que la notification de la présente décision valait convocation des parties à cette audience.

Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Centre-Val de Loire a rendu son avis le 08 juillet 2021.

Par ses conclusions écrites " d'appelante n°2" soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, la caisse demande à la cour, de :

- entériner l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Centre-Val de Loire du 8 juillet 2021;

en conséquence,

- débouter Mme [T] de l'ensemble de ses demandes ;

- condamner Mme [T] aux entiers dépens.

La caisse soutient en substance que dans son avis du 8 juillet 2021, et après analyse de l'ensemble des éléments médicaux du dossier, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles conclut à l'absence de lien direct entre la pathologie déclarée et l'activité professionnelle de Mme [T] ; qu'elle fait sienne la motivation du comité et demande à la cour d'entériner son avis. Elle conclut que Mme Guerreiro doit être déboutée de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de l'affection médicalement constatée le 30 mai 2016.

A l'audience, la caisse ajoute que Mme [T] ne justifie pas d'une première constatation médicale antérieure à celle fixée par le médecin conseil correspondant à une IRM.

Par ses écritures et explications orales développées à l'audience, Mme [T], assistée de sa fille Mme [S], demande à la cour de reconnaître le caractère professionnel de la pathologie déclarée, de débouter la caisse de l'ensemble de ses demandes et de la condamner aux entiers dépens.

Elle réplique en substance que :

- elle est en désaccord sur le calcul du délai de prise en charge de la pathologie ; la date de première constatation médicale de la pathologie est celle du 30 mai 2016 telle que portée sur le certificat médical initial et non celle du 23 novembre 2015 ; elle avait repris son travail au mois de décembre 2015 jusqu'au mois de mai 2016 ; ces éléments remettent en cause le calcul du délai de prise en charge ;

- par ailleurs, le délai de prise en charge qui correspond à une tendinopathie de l'épaule avec partielle fissuration est d'un an ; le 14 mars 2019, est intervenue une seconde IRM qui mentionne une fissuration partielle du tendon supra-épineux ;

- elle conteste l'absence de lien direct entre la pathologie et son activité professionnelle habituelle au regard de son activité de femme de ménage depuis plus de 35 ans qui comporte des gestes répétitifs engendrant des troubles musculo-squelettiques ;

- si la caisse souhaite prendre en compte les images effectuées lors d'un contrôle et non lors d'un constat médical pour calculer le délai de prise en charge, il faut prendre en compte la première image qui a été réalisée en avril 2011, à une époque où elle était en activité.

Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 07 février 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.

SUR CE :

En application de l'alinéa 2 de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale applicable

« Est présumée d'origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. »

En application de l'alinéa 3 de cet article « Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d'exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu'elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d'origine professionnelle lorsqu'il est établi qu'elle est directement causée par le travail habituel de la victime. »

En application de l'alinéa 4 de cet article « Peut être également reconnue d'origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau de maladies professionnelles lorsqu'il est établi qu'elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu'elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d'un taux évalué dans les conditions mentionnées à l'article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage déterminé. » Ce pourcentage est de 25%.

Le dernier alinéa de cet article précise : « Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l'origine professionnelle de la maladie après avis motivé d'un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.(...)'.

En application de l'article R. 142-24-2 du même code devenu l'article R.142-17-2 , le différend portant sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L.461-1, nécessite de recueillir préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse.

Il convient de rappeler que par arrêt en date du 26 mars 2021, la cour a infirmé le jugement en ses dispositions relatives à la reconnaissance implicite de la maladie professionnelle.

Il résulte des pièces versées aux débats que Mme [T] a présenté une

« tendinopathie épaule gauche » selon certificat médical initial du 30 mai 2016, relevant du tableau n°57A des maladies professionnelles, lequel pour la ' Tendinopathie chronique non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM" fait mention d'un délai de prise en charge de '6 mois (sous réserve d'une durée d'exposition de 6 mois)'.

Mme [T] n'établit pas que la pathologie déclarée à savoir la 'tendinopathie de l'épaule gauche' correspondait à une 'Rupture partielle ou transfixiante de la coiffe des rotateurs objectivée par IRM' visée au tableau qui prévoit alors un délai de prise en charge de '1 an (sous réserve d'une durée d'exposition d'un an)', aucune fissuration n'étant objectivée avant l'IRM du 14 mars 2019 (pièce n° 8 des productions de Mme [T]), l'IRM de l'épaule gauche du 23 novembre 2015 produite par la caisse, ne faisant mention que d'un 'double épanchement' et d'une ' possible fissuration du tendon qui est très aminci mais qui n'apparaît pas rétracté'.

La première constatation médicale de la pathologie de Mme [T] a été fixée à la date du 23 novembre 2015 par le médecin conseil de la caisse , comme correspondant à une IRM (pièce n° 7 des productions de la caisse), IRM de l'épaule gauche du 23 novembre 2015 qui est produite par la caisse (pièce n° 8 de ses productions). En conséquence, la première constatation médicale de la pathologie ne peut être fixée ni au 30 mai 2016, date du certificat médical initial, ni au 12 avril 2011 qui correspond à une échographie et non à une IRM, contrairement à ce que soutient Mme [T].

Mme [T] a cessé d'être exposée au risque le 20 novembre 2014, ainsi qu'il résulte des conclusions de l'enquête (pièce n°6 des productions de la caisse).

La condition relative au délai de prise en charge fixée au tableau pour une date de première constatation médicale au 23 novembre 2015 n'est donc pas respectée, peu important que Mme [T] ait repris le travail durant la période de décembre 2015 à mai 2016.

Le dossier a dès lors été transmis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles pour avis.

Le 2 octobre 2017, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de Paris Ile de France a donné un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée au motif que : « l'importance du délai par rapport à la fin de l'exposition professionnelle (1 ans) ne permet pas de retenir un lien direct entre le travail habituel et la maladie déclarée par certificat médical du 30/05/2016 ».

Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Centre-Val de Loire saisi du dossier de Mme [T] à la suite de l'arrêt de la cour du 26 mars 2021 a rendu son avis le 08 juillet 2021. Ce comité a également émis un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée, en mentionnant que :

« le dossier est soumis au C RRMP pour le non-respect du délai de prise en charge (1 an et 2 jours pour 6 mois prévus au tableau).

Compte-tenu des éléments médico-administratifs présents au dossier,

Après avoir pris connaissance des rapports de l'employeur et de l'assurée.

Le non-respect du délai de prise en charge constitue un obstacle à la reconnaissance en maladie professionnelle de la pathologie déclarée.

Le Comité ne retient pas l'existence d'un lien de causalité direct avec les activités professionnelles exercées par l'assurée ».

Il sera relevé que l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Centre-Val de Loire est parfaitement motivé et a été rendu au regard des rapports de l'employeur et de l'assurée.

Mme [T] ne rapporte pas d'éléments probants permettant d'établir le lien direct entre sa pathologie et son travail habituel.

Par suite, au regard de l'avis motivé du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Centre Val de Loire du 08 juillet 2021 qui rejoint celui émis par le 02 octobre 2017 par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles région de Paris Ile de France, il convient de débouter Mme [T] de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie du 30 mai 2016.

Succombant en appel, Mme [T] sera tenue aux dépens.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

VU l'arrêt en date du 26 mars 2021 ;

ENTÉRINE l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Centre-Val de Loire du 08 juillet 2021 ;

DÉBOUTE Mme [H] [Z] [T] de sa demande de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie constatée le 30 mai 2016 ;

CONDAMNE Mme [H] [Z] [T] aux dépens d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 18/11802
Date de la décision : 12/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-12;18.11802 ?
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