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11/05/2023 | FRANCE | N°22/06846

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 11 mai 2023, 22/06846


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 11 MAI 2023

(n° , 16 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06846 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSZX



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Février 2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 19/00314





APPELANTE

SOCIÉTÉ SEQUANO

[Adresse 16]

[Adresse 4]

[Localité 13]

représentée par Me Frédéric LEVY, av

ocat au barreau de PARIS, toque : T0700

substitué par Me François DAUCHY, avocat au barreau de PARIS





INTIMÉES

S.C.I. [Adresse 7]

[Adresse 11]

[Localité 18]

représentée par Me K...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 11 MAI 2023

(n° , 16 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06846 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFSZX

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 09 Février 2022 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 19/00314

APPELANTE

SOCIÉTÉ SEQUANO

[Adresse 16]

[Adresse 4]

[Localité 13]

représentée par Me Frédéric LEVY, avocat au barreau de PARIS, toque : T0700

substitué par Me François DAUCHY, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

S.C.I. [Adresse 7]

[Adresse 11]

[Localité 18]

représentée par Me Karine DESTARAC de la SELARL CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : K0080 substituée par Me Grégory VAYSSE, avocat au barreau de PARIS

DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SEINE SAINT DENIS - COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

[Adresse 15]

[Adresse 9]

[Localité 13]

représentée par Madame [O] [N], en vertu d'un pouvoir général

non comparante

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Madame Valérie MORLET, Conseillère

Madame Valérie GEORGET, Conseillère

Greffier : Madame Dorothée RABITA, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Par délibérations du conseil municipal de [Localité 19] des 26 septembre 2007 et 21 novembre 2007, la [Adresse 21] a été créée et a été dénommée la [Adresse 20].

La concession de l'aménagement de la ZAC a été confiée le 28 mai 2008 à la société SODEDAT 93 devenue la société SEQUANO AMENAGEMENT.

Par arrêté préfectoral n°2019-3178 du 28 novembre 2019, le périmètre du traitement de l'habitat dégradé sur le secteur [Localité 17] à [Localité 14] a fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique au profit de la société de requalification des quartiers anciens (SOREQA).

Par arrêté préfectoral n°2013-2160 du 18 juillet 2013, prorogé par arrêté du 27 juin 2018, la [Adresse 20] a fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique au profit de la société SEQUANO AMENAGEMENT.

Au terme d'un arrêté préfectoral du 28 août 2018, les parcelles et droits réels nécessaires à la réalisation de la [Adresse 20] et situés sur la ville de [Localité 14] ont été déclarés cessibles au profit de SEQUANO AMENAGEMENT, parmi lesquels les lots n°1, 2, 3 et 5 de la copropriété située au [Adresse 1] et [Adresse 3] (93), sur la parcelle cadastrée section D n°[Cadastre 8].

L'ordonnance d'expropriation a été rendue le 7 mai 2019, emportant transfert de propriété.

Est notamment concernée par l'opération la SCI du [Adresse 7], en tant que propriétaire des lots n°1, 2, 3 et 5 de la copropriété située au [Adresse 1] et [Adresse 3] (93), sur la parcelle cadastrée section D n°[Cadastre 8].

La société SEQUANO AMENAGEMENT a notifié ses offres d'indemnisation à la SCI [Adresse 7] par LRAR daté du 18 juin 2019.

Faute d'accord sur l'indemnisation, la SEQUANO AMENAGEMENT a saisi le juge de l'expropriation de Bobigny par un mémoire daté du 16 septembre 2019 et reçu par le greffe le 17 septembre 2018.

Par un jugement du 9 février 2022, après transport sur les lieux le 17 février 2021, le juge de l'expropriation de Bobigny a :

-Annexé à la décision le procès-verbal de transport du 17 février 2021 ;

-Fixé à 1.589.300 euros en valeur occupée, l'indemnité totale de dépossession due par la société SEQUANO AMENAGEMENT à la SCI du [Adresse 7] dans le cadre de l'opération d'expropriation des lots n° 1, 2, 3 et 5 de la copropriété située au [Adresse 1] et [Adresse 3] (93), sur la parcelle cadastrée section D n°[Cadastre 8] ;

-Dit que la somme arrondie de 1.589.300 euros se décompose de la manière suivante :

1.355.908 euros au titre de l'indemnité principale ;

136.590.80 euros au titre de l'indemnité de remploi ;

96.754 euros au titre de l'indemnité pour perte de revenus locatifs ;

-Condamné la la société SEQUANO AMENAGEMENT à payer à la SCI du [Adresse 7] la somme de 3.000 euros au titre des dépenses de l'article 700 du code de procédure civile ;

-Condamné la société SEQUANO AMENAGEMENT au paiement des dépens de la procédure d'appel.

La société SEQUANO AMENAGEMENT a interjeté appel du jugement le 12 avril 2022 en vue d'obtenir la réformation du jugement de première instance en ce qu'il a commis une erreur d'appréciation dans la détermination des superficies ainsi que de la valeur vénale de l'ensemble immobilier édifié [Adresse 1]/[Adresse 2], parcelle cadastrée D n°[Cadastre 8] et a omis de statuer sur la demande présentée à titre principal par la société SEQUANO AMENAGEMENT au titre de l'indemnité de remploi.

Pour l'exposé complets des faits, de la procédure, des prétentions des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ Déposées au greffe le 12 juillet 2022 par la société SEQUANO AMENAGEMENT, notifiées le 12 juillet 2022 (AR intimé le 13 juillet 2022 et AR CG le 13 juillet 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

-De dire et juger société SEQUANO AMENAGEMENT recevable et bien fondée en son appel ;

- Infirmer dans son ensemble le jugement du tribunal judiciaire de Bobigny, juge des expropriations, en date 9 février 2022 en ce qu'il a évalué distinctement les lots n° 1, 2, 3 et 5, parties communes générales et spéciales associées, de l'immeuble en copropriété sis [Adresse 1]/[Adresse 3] ;

En conséquence,

-Fixer l'indemnité principale due à au titre de l'expropriation à la somme arrondie de 872.400 euros en valeur occupée se décomposant comme suit :

Lot 1 : 466,75 m² x 343 m² x 0,15 = 518,20 m² x 920 euros = 476.744 euros ;

Lot 3 : 507,10 m² x 0,6 = 304,26 m² x 920 euros = 279.919,20 euros ;

Lots 2 et 5 : 68,05 m² + 57,70 m² = 125,75 m² x 920 euros = [Adresse 1].690 euros.

-Fixer l'indemnité accessoire de remploi à la somme de 88.240 euros ;

-Fixer l'indemnité pour perte de revenus locatifs à la somme de 96.754 euros.

2/ adressées au greffe le 10 octobre 2022 par la SCI du [Adresse 7], intimée, formant appel incident, notifiées le 12 octobre 2022 (AR appelant le 13 octobre 2022 et AR CG le 13 octobre 2022), aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

-Rejeter les conclusions de la société SEQUANO AMENAGEMENT ;

-Fixer à 2.314.650 euros le montant de l'indemnité principale ;

-Fixer à 235.465 euros le montant de l'indemnité de remploi ;

-Fixer à 96.754 euros le montant de l'indemnité pour perte de revenus locatifs ;

-Condamner la société SEQUANO AMENAGEMENT à payer à la société exposante la somme de 4.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le commissaire du gouvernement de [Localité 13] n'a ni adressé ni déposé de conclusions.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

La société SEQUANO AMENAGEMENT fait valoir que :

Concernant la description du bien exproprié, il s'agit des lots n°1, 2, 3 et 5 d'un ensemble immobilier soumis au statut de la copropriété sis [Adresse 1]/[Adresse 2] (93), parcelle cadastrée section D n°[Cadastre 8]. Le lot n°1 se situe dans le bâtiment A de l'ensemble immobilier d'une superficie de 466,75 m². Il comprend un local, un quai de déchargement, une cour ouverte sans fermeture sur l'avant à l'usage d'entrepôt, une cour privée donnant accès aux locaux depuis l'avenue [Adresse 3] et le volume de la totalité de l'atelier situé au premier étage et de l'armature métallique couvrant la cour privée. Ce lot est grevé d'une servitude de passage au profit des lots n° 2, 3 et 5. Il bénéficie d'une servitude de passage sur le lot n°7. Le lot n°2 se situe dans le bâtiment A et est accessible par le lot n°1 et comporte un bureau au rez-de-chaussée, un dégagement et deux bureaux au premier étage, ces deux étages communiquant par un escalier privatif. Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur le lot n°7 et est d'une superficie de 68,05 m². Le lot n°3 se situe dans le bâtiment A. Au rez-de-chaussée se trouve une rampe donnant accès au sous-sol depuis l'avenue [Adresse 3], au sous-sol se trouve un local de stockage. Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur les lots n°1 et 7 et est d'une superficie de 507,10 m². Le lot n°5 se situe dans le bâtiment B, au 1er étage, qui est accessible par le lot n°2, se trouve une cuisine, un WC, un cabinet de toilette, un dégagement et trois bureaux. Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur les lots n°1 et 7 et est d'une surface de 57,70 m².

Concernant la situation locative, les lots sont occupés par la SAS France Déménagement International suivant bail commercial du 22 juin 2016, le loyer annuel est de 96.754 euros.

Concernant l'évaluation du terrain, le principe d'une évaluation terrain intégré par comparaison a été validé par l'appelante. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Concernant les surfaces des lots, l'appelante valide les surfaces retenues par le juge de l'expropriation. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Concernant l'indemnité pour perte de loyers locatifs, l'appelante ne conteste pas le principe de cette indemnité, ni son quantum. Le jugement doit être confirmé sur ce point également.

Concernant l'évaluation du bien exproprié, le premier juge a évalué l'ensemble des lots de façon distincte selon leur usage. L'appelante demande une évaluation indistincte des lots à usage d'entrepôts et de bureaux. L'immeuble litigieux comporte essentiellement des locaux à usage d'entrepôt, pour une superficie de 822,46 m² et 125,75 m² de locaux à usage de bureaux, soit 13% de la surface totale. Les surfaces à usage de bureau ne comportent pas d'aménagement particulier pour les bureaux. Dans les termes de références produits par l'appelante, plusieurs immeubles sis dans la [Adresse 20] présentant les mêmes caractéristiques et les mêmes activités que l'immeuble exproprié ont fait l'objet d'une évaluation avec une valeur unique pour chaque composante par le juge de l'expropriation. Le jugement doit être infirmé en ce qu'il a affecté des valeurs distinctes aux locaux à usage d'entrepôt et de bureaux.

Concernant le principe de l'indemnité de remploi, il résulte de l'article R. 322-5 du code de l'expropriation, qu'il ne peut être alloué d'indemnité de remploi s'il est prévu que les biens étaient notoirement destinés à la vente, ou mis en vente par le propriétaire exproprié au cours de la période de six mois ayant précédé la déclaration d'utilité publique. L'exproprié a sollicité une indemnité de remploi alors qu'il ressort des pièces (pièce 11) que les lots litigieux ont fait l'objet d'une déclaration d'intention d'aliéner enregistrée en mairie de [Localité 19]

le 9 avril 2018, précédée de la signature d'une promesse synallagmatique de vente du 22 mars 2018. Le juge de l'expropriation a accordé une indemnité de remploi et n'a pas statué sur la demande en première instance d'écarter l'indemnité de remploi. Le jugement doit être infirmé sur ce point.

La SCI du [Adresse 7] rétorque que :

Concernant la description du bien exproprié, l'ensemble immobilier est composé d'un bâtiment A, B, C et D. Il ne comporte aucun lot à destination d'habitation. Les lots n° 1, 2, 3, et 5 sont constitués de la manière suivante :

Le lot n°1 : au rez-de-chaussée se trouve un local, un cabinet de toilettes, deux WC et une salle de réception, un quai de déchargement, une cour 2 couverte à usage d'entrepôt, une cour privée 1 donnant accès à des locaux, le volume de la totalité de l'atelier situé au premier étage par une armature métallique couvre la cour privée 2. Ce lot donne accès au lot 2 au premier étage. La superficie de la partie privative est de 466,75 m². La surface de la cour 1 est d'environ 177,60 m² et celle de la cour 2 de 343 m². Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur le lot 7 afin d'accéder aux locaux EDF et d'Eau. Il est également grevé d'une servitude de passage.

Le lot n°2 est composé d'un bureau au rez-de-chaussée et de deux bureaux et d'un dégagement au premier étage. Sa superficie est de 68,05 m². Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur le lot 7 afin d'accéder aux locaux EDF et d'eau et d'une servitude de passage sur le lot 1.

Le lot n°3 est constitué d'une rampe au rez-de-chaussée donnant accès au sous-sol et d'un sous sol. Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur le lot 7 afin d'accéder aux locaux EDF et d'Eau et d'une servitude de passage sur le lot 1. Il est d'une superficie de 507,10 m².

Le lot n°5 est composé au premier étage d'une cuisine, WC, cabinet de toilette un dégagement et de trois bureaux. Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur le lot 7 afin d'accéder aux locaux EDF et d'Eau et d'une servitude de passage sur les lots 1 et 2.

Concernant la situation locative, tous les lots sont loués par la société expropriée à la SAS France Déménagement International en vertu d'un bail conclu le 22 juin 2016. Les locaux sont en bon état et ne présentent aucun défaut susceptible d'en altérer leur usage.

Concernant la situation géographique, l'ensemble immobilier se trouve à 3km de [Localité 18] et se situe à environ 20 minutes à pied du centre ville de [Localité 19], à moins de 450 mètres d'un parc et à 5 minutes à pied d'une station de métro. Les commerces se trouvent à proximité immédiate de l'immeuble.L'ensemble immobilier est ancien, vétuste, vacant et en très mauvais état. La copropriété a fait l'objet de deux arrêtés d'insalubrité irrémédiable avec interdiction d'habiter en 1988 et 2013. La toiture et le plancher ont été arrachés, les fenêtres sont sans vitrage et les murs fissurés. L'accès à la copropriété est condamné. La surface utile totale du bien exproprié est de 33 m².

Concernant le calcul des indemnités, il est fait application de la méthode par comparaison, telle qu'elle est validée par l'ensemble des parties.

Concernant la superficie de la cour couverte deux, le premier juge a appliqué un coefficient de pondération à cette surface. Toutefois, cette cour est particulièrement utile pour l'activité de l'entrepôt car elle permet le déchargement dans de bonnes conditions et il existe un équipement particulier permettant grâce à une poulie le déchargement de marchandises lourdes. Cette cour couverte doit être valorisée dans l'évaluation.

Concernant l'évaluation distincte des lots, l'intimé produit des références de jurisprudence indiquant qu'en présence de destinations distinctes il n'y a pas lieu de mélanger les termes de comparaison. (Cass, 3e civ., 19 mars 2020, n° 19-11-463). L'intimé fait valoir que contrairement à ce que prétend l'appelante, l'arrêt de la cour d'appel de Paris du 25 mars 2021 fait bien application d'une méthode

analytique. Dans l'ensemble immobilier en cause, la destination des différents lots est clairement distincte et identifiée ce qui permet de faire application de la méthode analytique.

Concernant l'abattement pour occupation, il ressort de la jurisprudence et de la doctrine que cet abattement n'est pas automatique. (Cass, Civ. 3, 11 septembre 2013, pv n°12-21.742). Le taux d'abattement doit être justifié par l'examen du marché immobilier correspondant au secteur concerné. L'ensemble immobilier en cause est loué pour un loyer annuel de 108.654,28 euros hors taxe pour un moyenne de 96 754 euros/an en prenant en compte les indices de loyers commerciaux. Selon l'intimé, la valeur locative des locaux peut être évaluée à 90 euros/m² selon des références trouvées sur un site internet dans un rayon de 3 km autour du bien en cause. Ces références portent toutes sur des biens à destination d'activité. L'application de cette valeur locative à la surface louée donnerait un loyer annuel de 84 240 euros alors que le loyer est de 96 754 euros/an. Le bien exproprié est donc susceptible d'intéresser un investisseur et il n'existe aucun motif justifiant d'appliquer un abattement pour occupation.

Concernant la valeur vénale de l'ensemble immobilier, l'appelante a déterminé cette valeur à partir de termes de comparaison portant sur des locaux d'activités sans distinction selon les destinations. Il a été démontré que cette approche ne pouvait être appliquée en l'espèce. De plus, l'ensemble des termes de références fournis par l'appelante ne sont pas similaires à l'ensemble immobilier, soit parce qu'ils portent sur des mutations trop anciennes, soit sur des mutations pour lesquelles les immeubles sont d'une superficie bien inférieure ou bien supérieure à celle de l'ensemble immobilier. Le commissaire du gouvernement n'a pas communiqué aux expropriés certains des termes de références qui ont été retenus en première instance. Or, le principe du contradictoire s'applique au commissaire du gouvernement. (Cass 10 décembre 2015, n° 14-24462). L'intimé demande que ces termes de comparaison soient exclus.

Concernant la valeur des locaux d'activité pour les lots n° 1 et 3 il ressort des termes de références que le prix unitaire moyen est de 1.488 euros/m² qui sera porté à 1.500 euros/m² afin de tenir compte des éléments de valorisation.

Concernant la valeur des bureaux pour les lots n°2 et 5, la valeur libre est fixée selon les termes de référence à 2.685 euros/m², portée à 2.700 euros/m² pour tenir compte des facteurs de plus-values. Le total de l'indemnité principale s'élève à 2.314.650 euros.

Concernant l'indemnité de remploi, l'appelante prétend que celle-ci doit être écartée au motif que le bien était destiné à la vente en application de l'article R. 322-5 du code de l'expropriation. Cependant, le bien n'a jamais été mis en vente et le droit de préemption n'a pas été exercé dans les délais imposés par l'article. Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a retenu une indemnité de remploi de 232.465 euros.

Concernant l'indemnité pour perte de revenus locatifs, par une série de 17 arrêts du 2 juillet 2003, (Cass Civ 3, 2 juillet 2003, n°02-70.079, 02-70.080, 02-70.081, 02-70.082, 02-70.083, 02-70.087, 02-70.084, 02-70.085, 02-70.104, 02-70.105, 02-70.106, 02-70.107, 02-70.109, 02-70.110, 02-70.111, 02-70.112, 02-70.113, la Cour de cassation a estimé que le propriétaire exproprié pouvait réclamer une indemnité correspondant à la perte de revenus locatifs pendant la durée nécessaire à celui-ci, pour procéder au rachat et trouver un locataire. Cette jurisprudence est constante. Cette indemnité ne nécessite pas la preuve d'une faute de la part de l'expropriant. L'indemnité pour perte de loyers pour la période correspondant au temps nécessaire pour retrouver un bien équivalent doit être accordée dès à présent et l'indemnité doit être calculée sur une période de douze mois. Le loyer annuel étant de 96 754 euros, ce montant représente l'indemnité de revenus locatifs. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

SUR CE, LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1 septembre 2017, l'appel étant du 12 avril 2022, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de SEQUANO du 12 juillet 2022 et de la SCI du [Adresse 7] du 10 octobre 2022 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Aux termes de l'article L 321-3 du code de l'expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l'expropriant fait fixer l'indemnité avant le prononcé de l'ordonnance d'expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel de SEQUANO porte sur l'évaluation distincte des lots à usage d'entrepôts et de bureaux et sur l'absence de motivation de la demande présentée à titre principal tendant à écarter la fixation d'une indemnité de remploi.

Elle indique qu'elle ne remet pas en cause :

'principe d'une évaluation terrain intégrée par comparaison ;

'superficie et la pondération retenue pour l'évaluation des différents lots soit :

'lot 1:466,75 m²+ 343 m²X 0,15= 518,20 m² ;

'lot 2 : 68,05 m² ;

'lot 3:507,10 m²X 0,6= 304,26 m² ;

'lot 5:57,70 m².

'La valeur de 920 euros/m² occupé dans le cadre d'une évaluation indistincte des locaux qui ne sera 'infine' pas retenue ;

'Principe de l'indemnisation de la perte de loyers ainsi que le quantum de cette indemnité .

L'appel incident de la SCI du [Adresse 7] porte la prise en compte de la superficie de la cour ouverte (cour 2), sur l'absence d'abattement pour occupation et sur les valeurs unitaires à retenir.

S'agissant de la date de référence, le premier juge a retenu les possibilités offertes par les règles d'urbanisme définies par le PLUi Est Ensemble du 4 février 2020 plaçant les biens en zone UP.

Pour ce qui est de la nature des lots, de leur usage effectif et de leur consistance, il s'agit d'une copropriété, bâtie sur un terrain plat et rectangulaire, composée de 4 bâtiments :

'le bâtiment A, comprenant les lots numéro 1, 2 et 3 ;

'le bâtiment B, les lots numéro 4 et numéro 5 ;

'le bâtiment C, le lot numéro 6 ;

'le bâtiment D, le lot numéro 7.

La SCI du [Adresse 7] est propriétaire des lots :

'numéro 1 à numéro 3, situés dans bâtiment A, à usage entrepôts ;

'numéro 2 et 5, situés dans les bâtiments à et B, à usages locaux administratifs, bureaux, salle de réunion.

Ces lots sont tous accessibles de l'Avenue [Adresse 3].

Le lot numéro 1 est composé :

'd'un entrepôt, avec un déchargement, accessible à partir de la cour intérieure ;

'd'une structure métallique de type grand auvent à l'avant de l'entrepôt : le toit est en onduclair et les côtés sont partiellement fermés ; cette structure permet d'accéder au quai et d'abriter des camions de gros tonnages lors des opérations de chargement/déchargement et au besoin de stocker temporairement des marchandises ;

'd'une cour privée, permettant le stationnement de véhicules et camions, à l'avant ;

'd'une salle de réception/réunion ;

'de toilettes.

Ce lot bénéficie d'une servitude de passage au numéro 7 pour accéder aux locaux EDF et Eaux et grevée de servitude de passage profitant lot numéro 3, 2 et 5 qui appartenaient également à la SCI 44 Jean Jaurès.

Lot numéro 2 est composé :

'au rez-de-chaussée, d'un bureau ;

'au premier étage, d'un dégagement et de bureaux.

Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur les lots numéro 7 et 1.

Lot numéro 3 est composé :

'au rez-de-chaussée, une rampe d'accès au sous-sol ;

'au sous-sol, d'un espace à usage d'entrepôts.

Ce lot bénéficie d'une servitude de passage sur les lots numéro 7 et 1.

Le numéro 5 est composé, au premier étage :

'une cuisine ;

'de toilettes ;

'd'un dégagement ;

'de 3 bureaux.

Ce lot est accessible à partir d'une numéro 2 et bénéficie d'une servitude de passage sur les lots numéro 7 et numéro 1.

Le premier juge indique que l'ensemble immobilier est d'une construction ancienne, qu'il est toutefois dans un état d'entretien correct et que seule la structure métallique située à l'avant et couvrant les véhicules lors des opérations de chargement/déchargement apparaît vétuste.

Il ajoute que l'entrepôt du rez-de-chaussée dispose d'une grande hauteur, d'un quai de chargement/déchargement et d'une structure (métal/ onduclair) de type entrepôt ouvert à l'avant ; que celui du sous-sol dispose une rampe d'accès assez large, accessible par des véhicules ainsi que d'une bonne hauteur sous plafond pour une localisation en sous-sol, toutefois moindre que celle de l'entrepôt précédent et que l'un et l'autre sont équipés d'étagères à mi hauteur le long des murs de nature à supporter des box à usage de garde-meuble, qui sont sans autres aménagements, dans un état d'entretien correct et conforme à leur utilisation.

Il précise que la partie administrative est dans un état d'entretien moins homogène, que l'ensemble est dans un état usagé, toutefois correct, à l'exception de certains plafonds sur lesquels on peut remarquer les traces d'infiltrations d'eau et que seuls deux bureaux ont été rénovés récemment et sont de ce fait dans un bon état d'entretien.

Sur l'environnement des biens, l'avenue [Adresse 3] est une voie desservant une zone d'activités anciennes, en cours de transformation, les bâtiments d'activité étant remplacés par des immeubles neufs et par les équipements nécessaires à un quartier d'habitation.

La copropriété située [Adresse 1]/[Adresse 3], est desservie par:

'la route nationale 13, le bien étant à 3 km de [Localité 18] ;

'la station de métro [Localité 13]'Raymond Queneau de la ligne 5 ;

'lignes de bus 145 et 318

et elle est en outre bien située.

Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.

S'agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s'agit de celle du jugement de première instance conformément à l'article L322-2 du code de l'expropriation, soit le 9 février 2022.

- Sur l'indemnité principale

1° Sur les surfaces

SEQUANO ne conteste pas les surfaces retenues par le premier juge.

La SCI du 44 Jean Jaurès conteste uniquement le fait que le premier juge ait appliqué un coefficient de pondération pour la superficie de la cour couverte (cour 2) en indiquant que la présence de celle-ci est partie particulièrement utile pour l'activité d'entrepôts car elle permet le déchargement dans de bonnes conditions des marchandises et il existe dans cette cour un équipement spécifique comportant une poulie permettant le déchargement des marchandises lourdes ; elle ajoute que les coefficients retenus par la jurisprudence relative aux cours couvertes, lorsqu'il y a lieu d'appliquer un abattement, sont généralement bien moins défavorables aux expropriés.

S'agissant de cette cour couverte numéro 2, au vu des pièces produites aux débats par la SCI 44 Jean Jaurès (pièce numéro 13 : plan réalisé par un géomètre expert le 28 mars 2021 et pièce numéro 18 : attestation relative à la surface de la cour couverte), le premier juge a exactement retenu :

'809,75 m² pour le numéro un, soit 466,75 m² pour l'entrepôt du rez-de-chaussée et 343 m² pour la structure métallique ;

'507,10 m² pour le lot numéro 3, entrepôt situé au sous-sol ;

'125,75 m² pour les locaux administratifs situés en rez-de-chaussée au premier étage, lots numéro 2 et 5) avec un abattement habituel pour la prise en compte de la superficie de la cour couverte (cour 2).

Le jugement sera confirmé sur ce point.

2° Sur la situation locative

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété.

La fixation en valeur occupée du premier juge n'est pas contestée par les parties, les lots étant occupés par la SAS France Déménagement International selon bail conclu le 22 juin 2016.

Le jugement sera confirmé sur ce point

3° Sur la méthode

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

Le premier juge aprés examen des références de SEQUANO AMENAGEMENT, de la SCI du [Adresse 7] indique que l'indemnité de dépossession est de :

- 1 355 908 euros selon la méthode globale ;

- 1 327 192 euros selon la méthode analytique.

Il a retenu la méthode analytique comme étant celle qui permet une indemnisation de l'entier préjudice.

En l'espèce, comme en première instance, si les parties s'accordent sur l' utilisation de la méthode d'évaluation par comparaison, tantièmes des parties communes générales intégrées à la valeur des lots, elles s'opposent sur la méthode analytique et la méthode globale.

Le premier juge a en effet retenu une évaluation distincte des lots à usage d'entrepôts et de bureaux .

SEQUANO demande l'infirmation en indiquant que l'immeuble est composé essentiellement de locaux à usage d'entrepôts (lots 1 et 3) pour une surface cumulée de 822,46 m² avec des bureaux d'accompagnement (lots 2 et 5) d'une surface cumulée de 125,75 m², soit 13 % de la surface totale de l'immeuble.

Elle ajoute que les surfaces affectées à l'usage de bureaux ne présentent pas d'équipements ou d'aménagements propres à des locaux spécifiques de bureaux ; que dans le cadre de la [Adresse 20] plusieurs immeubles présentant les mêmes caractéristiques et affectés à usage (activité/entrepôts/bureau d'accompagnement) ont donné lieu à des fixations judiciaires dans le cadre desquels le principe de l'affectation d'une valeur unique à leurs différentes composantes a été systématiquement appliqué par le tribunal et confirmé par la cour. Elle demande donc de retenir une valeur de 920 euros/m² occupé.

La SCI du [Adresse 7] demande la confirmation sur la méthode analytique en indiquant que chaque bien doit être considéré au regard de ses caractéristiques propres et ne doit pas être assimilé à un bien qui ne sépare pas les destinations au sein de lots séparés et qu'en présence de destinations distinctes, il n'y a pas lieu de mélanger les termes de comparaison. Elle ajoute qu'en l'espèce, l'expropriation porte sur différents lots de copropriétés présentant chacun des caractéristiques physiques et juridiques propres, assortis de servitudes de passage.

La méthode analytique consiste à déterminer une valeur unitaire propre à chacun des lots, selon leur surface et en fonction de leur spécificité, tandis que la méthode globale consiste à valoriser globalement la surface totale de l'ensemble des lots au regard de leur destination générale en déterminant une valeur unitaire unique appliquée à l'intégrité de la surface, chacun des usages étant considéré comme complémentaire au service d'un même usage.

En l'espèce, l'expropriation porte sur différents lots de copropriétés présentant chacun des caractéristiques physiques et juridiques propres, assortis de servitude de passage, à savoir d'une part des entrepôts, lots numéro 1 numéro 3 et d'autre part des bureaux et locaux administratifs, lots numéro 2 et numéro 5.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement, qui après avoir examiné la méthode globale et la méthode analytique a exactement retenu cette dernière.

Il convient en conséquence d'examiner les références des parties.

A- Entrepôts, lots numéro un et numéro 3

a) Les références de SEQUANO

Elle ne propose des références que dans le cadre de la méthode globale, correspondant à de la jurisprudence :

'jugement du 19 décembre 2017 : cour d'appel de Paris, RG 15/347:[Adresse 1]/[Adresse 3], lots 4 bâtiments B : atelier en rez-de-chaussée et locaux sanitaires, 3 bureaux à l'étage, mot 7 bâtiment D : locaux à usage de bureaux, lot 6 bâtiment C : pavillon, 900 euros/m², libre ;

'jugement du TGI de Bobigny du 28 novembre 2017 et cour d'appel de Paris du 18 avril 2019 RG 18/02 275 : 48, avenue [Adresse 3] , pavillon R+1, 908,11 m², 810 euros/m², occupé ;

'jugement du TGI Bobigny du 28 novembre 2017 et cour d'appel de Paris du 18 avril 2019 RG 18/003 189,48/46, avenue [Adresse 3], locaux d'activités, 3687,50 m², 1010 euros/m², libre ;

'jugement du TGI Bobigny du 28 novembre 2017, cour d'appel de Paris du 18 avril 2019, 74 [Adresse 3], local d'activité, entrepôts, mezzanine, 690 m² et 70 m², 950 euros/m² en valeur libre.

Ces références correspondent uniquement à de la jurisprudence.

Le jugement du 19 décembre 2017 est trop ancien pour être retenu, et s'agissant de l'arrêt du 25 mai 2021, le bien a été évalué à la date du jugement.

Pour l'arrêt la cour d'appel de Paris du 8 avril 2019 RG/18/02 275, le bien est évalué à la date du jugement du 28 novembre 2017. Ce terme trop ancien doit donc être écarté.

Pour l'arrêt de la cour d'appel du 18 avril 2019 RG 18/00 389, le bien est évalué à la date du jugement du 28 novembre 2017. Ce terme trop ancien doit être écarté

Le jugement du 28 novembre 2017 et l'arrêt la cour d'appel de Paris 18 avril 2019 portent sur un bien situés [Adresse 10] correspond à un bien évalué à la date du 28 novembre 2017. Ce terme de comparaison trop ancien doit être écarté.

Le jugement du 6 juillet 2021 confirmé par un arrêt la cour d'appel de Paris du 23 juin 2022 porte sur un bien situé [Adresse 12] a été déterminée dans le cas de la méthode globale. Ce terme sera donc écarté.

b) Les références de la SCI du [Adresse 7]

Elle propose deux termes de comparaison correspondant à des cessions de biens libres (pièce numéro 15) avec les références de publication :

'30 janvier 2019 : [Localité 19], [Adresse 6],

J 125,300 m², 370'000 euros, 1233 euros/m², entrepôts/atelier et un bureau

'14 janvier 2019 : [Localité 19], [Adresse 5], AL 183,2 116,9 m², 378'000 euros, 1743 euros/m², local d'activité avec parkings.

Elle indique que le prix unitaire moyen est de 1488 euros/m², prix qui sera porté à 1500 euros/m² pour tenir compte des facteurs de valorisation.

Ces termes comparables en consistance et localisation, non critiqués par SEQUANO seront retenus.

Au regard de la consistance des biens, des éléments de plus value sont établis.

Cependant , s'agissant de deux entrepôts qui sont sans aménagement particulier, et dans un entretien uniquement correct conforme à leur utilisation, le premier juge a exactement retenu une valeur inférieure de 1300 euros/m².

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

B- Bureaux et locaux administratifs

1° références de SEQUANO

SEQUANO produit les mêmes termes déjà examinés dans le cadre de la méthode globale.

2° références de la SCI du [Adresse 7]

Elle propose deux termes portant sur des biens libres de bureaux avec les références de publication :

- 26/04/2018: 45, boulevard Henri Barbusse à [Localité 19] : AC 552, 100,05 m², 187'225 euros, 1799 euros/m²

-13 juillet 2018 : 6, rue Gabriel Husson à [Localité 19], Z 173, 400'000 euros, 3571 euros/m².

La SCI du 44 Jean Jaurès demande à partir de ce prix moyen de 2685 euros/m² de retenir une valeur de 2700 euros/m².

Ces termes de référence comparables en consistance et en localisation non critiquée par SEQUANO seront retenus.

Si la moyenne est de 2685 euros/m², il existe une grosse différence entre ces deux termes puisque le premier est de 1799 euros/m² et le deuxième de 3571 euros/m².

En outre, l'état d'entretien des bureaux est hétéroclite, certains ayant été rénovés récemment, et d'autres pas et l'ensemble est dans un état usagé, toutefois correct, à l'exception de certains plafonds sur lesquels le premier juge a remarqué des traces d'infiltrations d'eau ; seuls deux bureaux ont été rénovés récemment et sont de ce fait dans un bon état d'entretien.

En tenant compte de ces éléments de moins-value, le premier juge a exactement retenu une valeur inférieure de 2280 euros/m².

Le jugement sera confirmé en ce sens.

C- Abattement pour occupation

La SCI 44 Jean Jaurès demande de ne pas appliquer d'abattement pour occupation en indiquant qu'il ressort de la jurisprudence que celui-ci n'est pas systématique.

Elle se fonde sur le montant du loyer annuel de 108'654,28 euros hors-taxes et hors charge, sur une valeur locative du marché des locaux pouvant être évaluée à 90 euros/m² ce qui donnerait lieu un loyer annuel de : 936 m² X 90= 84'240 euros, pour indiquer que le bien exproprié est susceptible d'intéresser un investisseur et qu'il n'existe aucun motif pour appliquer un abattement pour occupation.

Elle indique qu'il n'y a pas lieu d'abattement en raison de la situation du lot numéro 3, puisqu'il n'est pas justifié par référence à une analyse du marché immobilier, que si une partie est en sous-sol comme espace de stockage, sa situation sous-sol est cohérente avec la fonction d'ensemble du bâtiment qui lui est attribué et que le bien présente une hauteur sous plafond particulièrement importante pour stocker les biens, ce qui constitue un facteur de plus-value important.

Lorsqu'un bien est occupé, il est de principe d'appliquer un abattement pour occupation ; si ce principe est susceptible de connaître des exceptions, au cas d'espèce, la SCI du 44 Jaurès ne démontre pas par la production de références en valeur libre et des références en valeur occupée, qu'un bien occupé a la même valeur qu'un bien libre et qu'il n'y a pas lieu d'appliquer un abattement habituel pour occupation.

Le jugement sera confirmé en ce sens.

- Sur les indemnités accessoires

1° Sur l'indemnité de remploi

Le premier juge a accordé selon le taux habituel une indemnité de remploi à la SCI du [Adresse 7] d'un montant de 136'590,80 euros.

SEQUANO a formé appel en indiquant que les lots ont fait l'objet d'une déclaration d'intention d'aliéner enregistrée en mairie de [Localité 19] 9 avril 2018, précédée de la signature d'une promesse synallagmatique de vente du 22 mars 2018 (pièce numéro 11) soit moins de 6 mois avant l'arrêté préfectoral du 27 juin 2018 emportant prorogation de la déclaration d'utilité publique ; qu'elle a donc demandé au premier juge d'écarter la demande d'indemnité de remploi, mais que celui-ci ayant fait droit la demande et n'a pas motivé le rejet de sa demande.

L'article R 322-5 du code de l'expropriation dispose que l'indemnité de remploi est calculée compte tenu des frais de tous ordres normalement exposés pour l'acquisition de biens de même nature moyennant un prix égal au montant de l'indemnité principale. Sont également pris en compte dans le calcul du montant d'indemnités les avantages fiscaux dont les expropriés sont appelés à bénéficier lors de l'acquisition de bien de remplacement.

Toutefois, il ne peut être prévu de remploi si les biens étaient notoirement destinés à la vente, ou mis en vente par le propriétaire exproprié au cours de la période de six mois ayant précédé la déclaration d'utilité publique.

En l'espèce, le cas où les biens étaient notamment destinés à la vente aux mises en vente doit être examiné à la date de l'ordonnance d'expropriation soit le 7 mai 2019 ; or, la vente susvisée a été abandonnée avant le 7 mai 2019 et au cours de la période de six mois ayant précédé la DUP, le bien n'a pas été mis en vente.

En outre , l'arrêté de DUP est du 18 juillet 2013, alors que la promesse de vente suvisée date du 22 mars 2028 ; or, l'arrêté du 27 juin n'a fait que proroger une fois les effets de la DUP en application de l'article L 121-5 du code de l'expropriation, mais ne constitue pas une nouvelle déclaration.

Il convient de confirmer le jugement qui a exactement accordé une indemnité de remploi à la SCI du [Adresse 7] dont les taux d'usage ne sont pas contestés par SEQUANO AMENAGEMENT d'un montant de 136590, 80 euros.

2° sur l'indemnité pour perte de revenus locatifs

SEQUANO AMENAGEMENT ne conteste pas dans ses conclusions l'indemnité accordée à la SCI [Adresse 7] d'un montant de 96754 euros et celle-ci n'a pas formé appel incident sur ce point.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement qui a fixé l'indemnité totale de dépossession due par SEQUANO AMENAGEMENT à la SCI du [Adresse 7] en valeur occupée dans la cadre de la méthode analytique à la somme de :

1 355 908 euros (indemnité principale) + 136590,80 euros+ 96754 euros (indemnité pour perte de revenus locatifs).

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné SEQUANO AMENAGEMENT à payer à la SCI du [Adresse 7] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de condamner SEQUANO AMENAGEMENT à payer la somme de 3000 euros à la SCI [Adresse 7] au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel.

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L 312-1 du code de l'expropriation.

SEQUANO AMENAGEMENT perdant le procès sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et en dernier ressort,

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Statuant dans la limite des appels ;

Confirme le jugement entrepris ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne SEQUANO AMENAGEMENT à payer la somme de 3000 euros à la SCI du [Adresse 7] au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne SEQUANO AMENAGEMENT aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 22/06846
Date de la décision : 11/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-11;22.06846 ?
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