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10/05/2023 | FRANCE | N°21/03221

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 10 mai 2023, 21/03221


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 10 MAI 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03221 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDO3O



Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Février 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° F19/00328



APPELANTE



S.A.R.L. AB CLEAR'NET

[Adresse 2]

[Localité 4]

Re

présentée par Me Nathalie BENCHIMOL GUEZ, avocat au barreau de PARIS



INTIME



Monsieur [Z] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Sophie HUMBERT, avocat au barreau ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 10 MAI 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/03221 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDO3O

Décision déférée à la Cour : Jugement du 08 Février 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° F19/00328

APPELANTE

S.A.R.L. AB CLEAR'NET

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Nathalie BENCHIMOL GUEZ, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [Z] [H]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté par Me Sophie HUMBERT, avocat au barreau de PARIS, toque : D0950

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme MARQUES Florence, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. de CHANVILLE Jean-François, président de chambre

Mme BLANC Anne-Gaël, conseillère

Mme MARQUES Florence, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Justine FOURNIER

ARRET :

- Contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La société AB clear'net est une société dont l'activité est les services à la personne, aux particuliers et tous services de proximité (entretien de la maison et travaux ménagers).

Suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 16 mai 2009, M. [Z] [H] a été engagé par la société AB clear'net, en qualité de jardinier.

La convention collective applicable est celle des Organismes d'Aide à domicile .

La société emploie moins de 11 salariés.

M. [H] a fait l'objet, après convocation et mise à pied conservatoire du 7 septembre 2015 et entretien préalable fixé au 14 septembre 2015, d'un licenciement pour faute grave le 30 septembre 2015.

M. [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Créteil, le 11 février 2016, aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, et condamner la société AB clear'net à lui verser diverses sommes.

L'affaire a été radiée le 29 octobre 2018 puis rétablie le 11 mars 2019. Dans le dernier état de ses prétentions, le salarié a sollicité, en sus de ces demandes initiales, la condamnation de la société à lui payer la somme de 15000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcélement moral, manquement à l'obligation de sécurité de résultat et exécution déloyale du contrat de travail.

Par jugement en date du 8 février 2021, le conseil de prud'hommes de Créteil a :

- requalifié la rutpure du contrat de travail de M. [H] en licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- condamné la société AB clear'net à payer à M. [H] ;

* 3.000 euros au titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral et manquement à l'obligation de sécurité et exécution déloyale du contrat,

* 1.401 euros au titre de rappel de salaire pour mise à pied conservatoire et 140 euros d'indemnité de congés payés afférents,

* 2.209 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

* 3.234 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 323 euros au titre des congés payés afférents,

* 9.700 euros au titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

*1.300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté la société AB clear'net de sa demande d'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société AB clear'net aux entiers dépens.

Par déclaration au greffe en date du 23 mars 2021, la société AB clear'net a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 mai 2021, la société AB clear'net demande à la Cour de :

- réformer la décision dont appel en date du 8 février 2021,

- rejeter purement et simplement, les demandes totalement infondées de M. [H], comme injustes et mal fondées,

- condamner M. [H] à la somme de 2.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens du procès.

Par ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 14 décembre 2022, M. [Z] [H] demande à la Cour de :

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société AB clear'net à payer à M. [H] les sommes suivantes :

* 1.401 euros à titre de rappel de salaire pour la mise à pied,

* 140 euros à titre de congés payés afférents,

* 3.234 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 323 euros au titre des congés payés afférents,

* 2.209 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 1.300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- infirmer le jugement en ce qu'il requalifié le licenciement de M. [H] en licenciement sans cause réelle et sérieuse et statuant à nouveau :

- requalifier le licenciement de M. [H] en licenciement nul,

- condamner la société AB Clear'net à régler à M. [H] la somme suivante :

* 50.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement nul,

A titre subsidiaire sur ce point,

- confirmer le jugement en ce qu'il requalifié le licenciement de M. [H] en licenciement sans cause réelle et sérieuse ; l'infirmant sur le quantum et statuant à nouveau,

- condamner la société AB clear'net à régler à M. [H] la somme suivante :

* 50.000 euros à titre de dommages intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ni faute grave,

- confirmer le jugement en ce qu'il a retenu le harcèlement moral et l'infirmant sur le quantum,

- condamner la société AB clear'net à régler à M. [H] la somme suivante :

* 25.000 euros à titre de dommages intérêts pour harcèlement moral, discrimination, manquement à l'obligation de sécurité de résultat et exécution déloyale du contrat,

- condamner la société AB clear'net à régler à M. [H] la somme suivante :

* 3.500 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile (appel).

L'ordonnance de clôture est intervenue le 7 février 2023. Le conseiller de la mise en état a rejeté une demande de révocation de l'ordonnance de clôture formulée par la société AB Clear'Net le 10 février 2023, suite à la plainte pour diffamation et escroquerie au jugement déposée contre X auprès de M. Le procureur de la république de Créteil, le 24 janvier 2023.

En application de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties pour un exposé complet du litige.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur la demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral discrimination, manquement à l'obligation de sécurité de résultat et exécution déloyale du contrat

Le salarié fonde sa demande unique de dommages et intérêts sur les mêmes faits.

1-1 Sur le harcèlement moral

Aux termes de l'article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L.1154-1 du même code prévoit, dans sa version applicable à la cause, qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il convient donc d'examiner la matérialité des faits invoqués, de déterminer si pris isolément ou dans leur ensemble ils font présumer un harcèlement moral et si l'employeur justifie les agissements invoqués par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l'espèce, le salarié soutient avoir été victime de harcèlement moral de son employeur caractérisés par :

- un comportement virulent, menaçant et insultant (propos racistes) de M. [I] [B], gérant de la société,

-des propos humiliants tenus à son encontre par M. [I] [B],

A l'appui de ses affirmations, le salarié produit des attestations dont deux d'anciens salariés ( Mme [Y] , M. [N]) lesquels sont en conflits prud'hommal avec la société, une attestation de la belle-fille de Mme [Y], une attestation de M. [C], auto-entrepreneur jardinier avec lequel M. [B] a un conflit commercial et celle d'un voisin ( M. [S]) avec qui M. [B] a eu un différend personnel.

Le salarié verse également aux débats un courrier de dénonciation des faits en date du 18 septembre 2015, soit postérieurement à l'entretien préalable.

Il s'en déduit que le salarié ne justifie pas du comportement et des propos insultants et racistes qu'il prétend avoir subis de la part de son employeur, les attestations produites émanant toutes de personnes en conflit avec le gérant de la société, ce qui met à mal leur objectivité.

Il résulte de ce qui précède que le harcèlement moral invoqué par M. [Z] [H] n'est pas caractérisé.

Dès lors sa demande de dommages-intérêts de ce chef est rejetée et le jugement infirmé sur ce point.

1-2-Sur la demande de dommages et intérêts pour discrimination et manquement par la société à son obligation de sécurité de résultat

Il a été dit plus haut que le salarié ne rapporte pas la preuve du comportement raciste prêté à M. [B] .

Le salarié est en conséquence débouté de sa demande de dommages et intérêts pour discrimination et manquement à son obligation de sécurité.

Le jugement est infirmé de ce chef.

2- sur la rupture du contrat de travail

Compte tenu de ce qui a été jugé plus haut, le salarié est débouté de sa demande de voir juger nul son licenciement.

Il sera ajouté au jugement de ce chef.

3- Sur le licenciement pour faute grave

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Il résulte par ailleurs des dispositions combinées des articles L 1232-1, L 1232-6, L 1234-1 et L 1235-1 du code du travail que devant le juge, saisi d'un litige dont la lettre de licenciement fixe les limites, il incombe à l'employeur qui a licencié un salarié pour faute grave, d'une part d'établir l'exactitude des faits imputés à celui-ci dans la lettre, d'autre part de démontrer que ces faits constituent une violation des obligations découlant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien de ce salarié dans l'entreprise.

En l'espèce, aux termes de la lettre de rupture du 30 septembre 2015, il est reproché les éléments suivants " :

"Vous êtes revenu le 7 septembre 2015 de congés étant absent depuis le 16 juillet 2015 au soir c'est-à-dire après sept semaines et demi de congés et cela sans aucune autorisation de votre hiérarchie, lui faisant même croire que vous seriez de retour avant la fin du mois d'août, ce qui ne fut pas le cas et sans aucun justificatif de votre part. De plus, vous vous êtes absenté le vendredi 17 juillet en nous prévenant que la veille au soir et en ne tenant pas compte des besoins de service de la société. Un tel agissement est préjudiciable au bon fonctionnement de l'entreprise AB CLEAR NET et étant considéré comme un abandon de poste ce qui d'ailleurs n'était pas la première fois ».

Le salarié soutient que son employeur avait donné son accord pour ses congés du 17 juillet 2015 jusqu'en septembre 2015.

La cour constate que depuis le début du contrat de travail, l'employeur accepte que son salarié prenne ses congés, sans que ne soit respectée la procédure de demande de congés mise en oeuvre uniquement pour l'année 2011, et surtout prenne en plus de ses congés légaux des congés sans solde.

En ce qui concerne précisément les congés 2015, le bulletin de salaire de juillet 2015 mentionne " congés payés à compter du 16 au soir ", celui d'août 2015 " congés du 17 juillet au 30 août 2015 ; congé sans solde le 31 août 2015" et celui de septembre 2015 " congé sans solde du 1 au 8 septembre 2015" .

L'employeur était ainsi parfaitement informé et d'accord pour que son salarié soit à compter du 16 juillet 2015 , d'abord en congés annuels puis en congés sans solde.

Aucune mise en demeure d'avoir à reprendre son poste n'a d'ailleurs été envoyée au salarié.

Il résulte de ces éléments que l'abandon de poste reproché au salarié n'est en rien établit.

Le licenciement de M. [Z] [H] est sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement est confirmé de ce chef et sur les montants alloués au titre du rappel de salaire durant la mise à pied conservatoire et les congés payés afférents, l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents et l'indemnité de licenciement, justement calculés.

L'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, justement appréciée compte tenu de l'ancienneté du salarié ( 6 ans et 7 mois) et de son âge au moment du licenciement ( 60 ans) est également confirmée.

4-Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la SARL AB CLEAR'NET est condamnée aux dépens d'appel.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de M. [Z] [H] ainsi qu'il sera dit au dispositif.

La SARL AB CLEAR'NET est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a condamné la SARL AB CLEAR'NET à payer à M. [Z] [H] la somme de 3000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et discrimination, manquement à l'obligation de sécurité de résultat et exécution déloyale du contrat,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant,

Déboute M. [Z] [H] de sa demande de dommages et intérêts pour harcèlement moral discrimination, manquement à l'obligation de sécurité de résultat et exécution déloyale du contrat,

Condamne la SARL AB CLEAR'NET à payer à M. [Z] [H] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute la SARL AB CLEAR'NET de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Condamne la SARL AB CLEAR'NET aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 21/03221
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;21.03221 ?
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