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10/05/2023 | FRANCE | N°20/06069

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 10 mai 2023, 20/06069


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 10 MAI 2023



(n° , 19 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06069 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCMEL



Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Septembre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° 18/00504



APPELANT



Monsieur [Z] [U]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Denis DELCOURT POUDE

NX, avocat au barreau de PARIS, toque : R167



INTIMEE



S.A.S. FEU VERT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 327 359 980

Représentée par Me Pascal GEOFFRION, avocat au barreau d...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 10 MAI 2023

(n° , 19 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/06069 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCMEL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Septembre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de MEAUX - RG n° 18/00504

APPELANT

Monsieur [Z] [U]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Denis DELCOURT POUDENX, avocat au barreau de PARIS, toque : R167

INTIMEE

S.A.S. FEU VERT

[Adresse 1]

[Adresse 1]

N° SIRET : 327 359 980

Représentée par Me Pascal GEOFFRION, avocat au barreau de PARIS, toque : A0190

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 24 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre

Mme Anne-Gaël BLANC, Conseillère

Mme Florence MARQUES, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur [D] [P] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le groupe Feu Vert a pour activité le commerce de détail d'équipements d'automobiles

M. [Z] [U], né en 1976, a été engagé par la société Feu Vert, par contrat de travail à durée indéterminée à compter du 2 octobre 2001 en qualité de chef de centre stagiaire en formation puis confirmé à compter du 1er février 2002.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale du commerce et de la réparation de l'automobile, du cycle et du motocycle et des activités connexes, ainsi que du contrôle technique automobile (IDCC 1090).

M. [U] a été promu en tant que directeur de centre situé à [Localité 3] à compter du 1er juillet 2003, puis a été par la suite affecté à la tête de différents centres automobiles Feu vert situés en région parisienne.

Le 31 octobre 2015, les parties ont signé une convention de forfait annuel en jours, à raison de 218 jours de travail sur l'année à effet au 1er novembre 2015, moyennant une rémunération d'un montant de 3.400 euros brut outre une prime variable liée à des objectifs fixés selon des modalités annuelles.

Le 12 février 2016, M. [U] a été désigné comme représentant syndical au CHSCT central de Feu vert.

Par ailleurs, il était investi depuis 2014 de mandats de délégué du personnel et de membre élu au comité d'établissement Ile-de-France-Nord.

Le 27 juin 2019, il a été élu membre titulaire du CSE pour quatre ans.

Entretemps, il avait sollicité la rupture conventionnelle de son contrat de travail, ce à quoi la société Feu vert n'a pas répondu favorablement le 7 août 2017.

Par courrier du 22 février 2018, la société Feu vert a notifié à M. [U] un avertissement en raison de la mauvaise application de procédures internes à l'entreprise.

Le 14 mai 2018, la société Feu Vert a sollicité de M. [U] qu'il lui communique "les éléments relatifs aux actions correctives à mettre en place dans le cadre du Plan « Urgences» suite au constat de la dégradation des performances du centre automobile placé sous sa direction ".

M. [U] a saisi le 7 juin 2018 le conseil de prud'hommes de Meaux, aux fins de voir déclarer inopposable la convention de forfait jours, de fixer son salaire de référence à la somme de 5.898,85 euros, de faire annuler l'avertissement qui lui a été infligé le 22 février 2018, de voir prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts de l'employeur et d'obtenir la condamnation de celui-ci à lui payer les sommes suivantes :

- rappel de salaire au titre des heures supplémentaires : 109.126,33 euros,

- congés payés afférents : 10.912,63 euros,

- dommages-intérêts pour contrepartie obligatoire en repos : 64.352,91 euros,

- indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 35.393,10 euros,

- dommages et intérêts pour sanction injustifiée consistant dans l'avertissement annulé : 10.000 euros,

- dommages et intérêts pour modification unilatérale du contrat de travail : 11.797,70 euros,

- dommages-intérêts pour harcèlement moral et manquement à l'obligation de sécurité et plus subsidiairement pour exécution déloyale du contrat de travail : 30.000 euros,

- indemnité compensatrice de préavis : 11.797,70 euros,

- congés payés afférents : 1.179,77 euros,

- indemnité légale de licenciement : 30.477,38 euros,

- indemnité pour licenciement nul : 117.977 euros,

- dommages-intérêts pour violation du statut protecteur : 283.144,80 euros,

- article 700 du code de procédure civile : 5.000 euros,

- intérêts à compter de l'introduction de la demande, avec capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,

- exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile,

- entiers dépens.

La société Feu vert s'est opposée à ces prétentions et a sollicité la condamnation du demandeur à lui payer la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 10 septembre 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes a :

- annulé l'avertissement du 22 février 2018,

- condamné la société Feu vert à payer à M. [U] les sommes suivantes :

*90.788,53 euros au titre de rappel de salaires sur heures supplémentaires,

*9.078,85 euros au titre des congés payés y afférents,

- dit que ces sommes seraient assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de convocation devant le bureau de conciliation,

*13.563,80 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de repos compensateur,

*1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dit que ces deux dernières sommes porteraient intérêts au taux légal à compter du prononcé du présent jugement,

- ordonné l'exécution provisoire dans les limites fixées par l'article R.1454-28 du code du travail,

- débouté M. [U] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Feu vert de sa demande,

- condamné la société Feu vert aux entiers dépens y compris les frais éventuels d'exécution par voie d'huissier de justice du jugement.

Par déclaration du 25 septembre 2020, M. [U] a régulièrement interjeté appel de cette décision, notifiée le 22 septembre 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 janvier 2023, M. [U], appelant et intimé à titre incident, demande à la cour de :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 en ce qu'il a débouté M. [U] d'une partie de ses demandes,

Et, statuant à nouveau,

Sur l'exécution du contrat de travail :

- confirmer l'inopposabilité de la convention de forfait jours de M. [U],

- condamner la société Feu Vert à verser à M. [U] les sommes suivantes :

*rappel de salaire au titre des heures supplémentaires 2015 à 2018 : 90.788, 53 euros,

*congés payés y afférents : 9.078,85 euros,

*dommages-intérêts pour contrepartie obligatoire en repos : 29.868,98 euros,

*congés payés afférents : 2.986,89 euros,

*indemnité forfaitaire pour travail dissimulé : 35.393,10 euros,

*fixer le salaire de référence de M. [U] à 5.898,85 euros,

*rappel de salaire au titre des heures supplémentaires 2019 à 2021 : 38.480,63 euros brut,

*congés payés y afférents : 3.848,06 euros,

*dommages-intérêts pour contrepartie obligatoire en repos : 15.281,80 euros,

*congés payés afférents : 1.528,18 euros,

*prime annuelle 2021 : 2.300 euros brut,

Sur l'avertissement :

- confirmer l'annulation de l'avertissement du 22 février 2018

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 et condamner la société Feu Vert à verser à M. [U] 10.000 euros de dommages-intérêts pour sanction injustifiée,

Sur la modification unilatérale du contrat :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 et constater la modification unilatérale du contrat de M. [U],

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 et condamner la société Feu Vert à verser à Monsieur [U] 11.797,70 euros au titre de dommages-intérêts en réparation de la modification unilatérale du contrat de travail,

Sur le harcèlement moral, et le manquement à la sécurité :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 et reconnaître le harcèlement et le manquement à l'obligation de sécurité de la société Feu Vert,

- condamner la société Feu Vert à verser à M. [U] 30.000,00 euros de dommages-intérêts pour harcèlement moral et manquement à l'obligation de sécurité, absence d'enquête, et pour exécution déloyale du contrat de travail,

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail :

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 et prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail de Monsieur [U] aux torts de la société Feu Vert,

En conséquence,

- condamner la société Feu Vert à verser à M. [U] les sommes suivantes :

* indemnité compensatrice de préavis : 11.797,70 euros,

* congés payés y afférents : 1.179,77 euros,

*indemnité spéciale de licenciement : 72.752,46 euros, et subsidiairement indemnité légale de licenciement : 36.376,23 euros,

*indemnité pour licenciement nul, à défaut sans cause réelle et sérieuse : 117.977 euros,

*dommages-intérêts pour violation du statut protecteur : 70.786,20 euros,

- condamner société Feu vert à verser à M. [U] 7.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- dire que l'ensemble des condamnations à intervenir porteront intérêts depuis 2015 pour les créances salariales, et à compter de l'arrêt pour les créances indemnitaires, avec capitalisation annuelle des intérêts par application de l'article 1343-2 du code civil,

- condamner la société Feu Vert aux entiers dépens qui comprendront ceux éventuels d'exécution.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 6 janvier 2023, l'intimée demande à la cour de :

- juger irrecevables comme nouvelles les demandes de versement d'une indemnité spéciale de licenciement et d'une prime annelle au titre de l'année 2021,

- confirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 en ce qu'il a :

*débouté M. [U] de sa demande de résiliation judiciaire,

*rejeté ses prétentions relatives à l'indemnité compensatrice de préavis avec congés payés afférents, à l'indemnité de licenciement, aux dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse, aux dommages et intérêts pour harcèlement moral ou exécution déloyale du contrat, aux dommages et intérêts pour modification unilatérale du contrat de travail, à l'indemnité pour travail dissimulé, aux dommages et intérêts pour violation du statut protecteur et aux dommages et intérêts pour sanction injustifiée,

- infirmer le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Meaux le 10 septembre 2020 en ce qu'il a :

*annulé l'avertissement du 22 février 2018,

*jugé inopposable la convention de forfait en jours,

*condamné la société Feu Vert à payer : 90.788,53 euros au titre de rappel de salaires sur heures supplémentaires, 9.078,85 euros au titre des congés payés afférents, 13 563,80 euros à titre de dommages et intérêts du chef du repos compensateur et 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau,

- débouter M. [U] de l'ensemble de ses demandes d'indemnisation et de rappel de salaire formées au soutien de l'inopposabilité de la convention de forfait-jours,

- débouter M. [U] de sa demande d'annulation de l'avertissement du 22 février 2018 prononcé à son encontre,

- rejeter la demande de dommages et intérêts pour sanction injustifiée à hauteur de 10.000 euros,

- condamner M. [U] à 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens,

Subsidiairement, la Cour d'appel prononçait la nullité de la convention de forfait jours,

- débouter M. [U] de sa demande infondée de rappel d'heures supplémentaires injustifiée dans son principe et son quantum,

- ordonner le remboursement au titre de la répétition de l'indu par M. [U] à la société Feu vert du montant versé au titre des jours de repos, soit un montant de 9.433 euros brut,

Subsidiairement, si la Cour d'appel prononçait la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l'employeur et estimait que celle-ci devait produire les effets d'un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse :

- fixer la rémunération moyenne brute à la somme de 3.837,03 euros,

- limiter le montant de l'indemnité de licenciement à la somme de 22.382,67 euros,

- débouter M. [U] de sa demande d'indemnité spéciale de licenciement,

- limiter le montant des dommages et intérêts au plancher visé par l'article L. 1235-3 du Code du travail fixé à 3 mois de rémunération moyenne brute,

- débouter M. [U] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice spécifique en réparation d'un harcèlement moral et d'un manquement à l'obligation de sécurité formée à hauteur de 30.000 euros, également infondée dans son principe et dans son montant,

- le débouter de sa demande au titre de la violation du statut protecteur, le mandat dont pouvait se prévaloir M. [U] au moment de l'introduction de sa demande de résiliation judiciaire ayant déjà expiré.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2023 et l'affaire a été fixée à l'audience du 24 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS,

1 : Sur l'exécution du contrat de travail

1.1 : Sur la prime 2021

M. [Z] [U] sollicite l'allocation d'une prime annuelle pour l'année 2021 de 2 300 euros.

La société Feu Vert soulève l'irrecevabilité de cette prétention comme nouvelle.

Aux termes des articles 564 et suivants du code procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. Cependant, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

La demande en cause ne remplit aucune des conditions requises par ces textes et sera déclarée irrecevable.

1.2 : Sur le forfait jours

1.2.1 :Sur l'opposabilité du forfait

M. [Z] [U] soutient que le forfait jours lui est inopposable, faute d'être un salarié autonome. Il relève que d'abord, il lui était imposé d'assurer les ouvertures et fermetures du centre ainsi que sa présence dans les ateliers lors des fortes affluences de clients, qu'il ne faisait pas l'objet d'un contrôle du temps de travail par l'employeur, ni de sa charge de travail avant 2017, que le logiciel Optime autodéclaratif était rempli en réalité automatiquement ou lorsqu'il a été rempli effectivement par le salarié à compter de juin 2018, était modifié unilatéralement par l'employeur et que l'entretien annuel individuel prescrit par l'article L.3121-65 du Code du travail en faveur des salariés soumis au forfait n'a jamais eu lieu.

La société Feu Vert répond que l'ouverture et la fermeture du magasin étaient également faites par d'autres cadres, que les salariés étaient astreints à une obligation déclarative de leur temps de travail mensuelle des journées travaillées, que l'interface Optime dont il maîtrisait les données a été mise à leur disposition à partir de 2017, tandis que les entretiens professionnels d'évaluation annuels répondaient aussi aux obligations imposées par l'article précité.

Sur ce

Aux termes de l'article L. 3121-65 du Code du travail un entretien annuel individuel est organisé par l'employeur avec chaque salarié ayant conclu une convention de forfait en jours sur l'année. Il porte sur la charge de travail du salarié, l'organisation du travail dans l'entreprise, l'articulation entre l'activité professionnelle et la vie personne et familiale, ainsi que sur la rémunération du salarié.

Le projet de convention de forfait annuel en jours proposé par l'employeur et signé par lui le 2 janvier 2018 prévoit certes "chaque fin d'année, dans le cadre des entretiens individuels un document de suivi dématérialisé sur le portail carrière soumis au dispositif du forfait jours avec le supérieur hiérarchique". Outre que cet avenant n'a pas été signé par le salarié, sa lecture ne permet pas de retrouver les exigences légales et semble se limiter à un contrôle du temps de travail.

Les pièces invoquées par la société Feu Vert à savoir des entretiens d'évaluation ne permettent pas d'identifier un échange sur les points prévus par l'article L. 3121-65, ni a fortiori un entretien spécifique sur ces questions.

Par suite la convention de forfait est inopposable au salarié.

1.2.2 : Sur la rémunération des heures supplémentaires

Motif pris de cette inopposabilité, le salarié sollicite la condamnation de la partie adverse à lui verser un rappel de salaire au titre des heures supplémentaires effectuées de 2015 à 2018 au-delà de la 37ème heure qui est l'horaire hebdomadaire de l'entreprise, en se fondant sur un relevé quotidien accompagné d'un calcul hebdomadaire établis par lui, sur les plannings versés aux débats par la société et sur les états récapitulatifs établis lors de la fermeture des caisses.

La société Feu Vert oppose la prescription des demandes effectuées en première instance portant sur la période prescrite antérieure au 7 juin 2015, et objecte que M. [Z] [U] se prévaut d'une amplitude entre les heures d'ouverture et de fermeture de l'établissement, sans qu'il apparaisse qu'il ait travaillé pendant ce laps de temps, que le salarié s'appuie sur un document qu'il a rédigé lui-même, des feuilles de caisse correspondant à la fermeture de l'établissement qu'il a pu signer le lendemain de la fermeture, qu'il ne se fonde pas sur les véritables heures d'ouverture qui était 9 heures plutôt que 8 heures 30 comme il le dit et la fermeture qui était à 19 heures 25 au plus tard et non pas à 20 heures et qu'il ne tient pas compte des jours de RTT, ni de la bonification de 25% par rapport au salaire de base prévue par la convention collective et dont il bénéficie au titre de la convention de forfait jours, ni des 88,05 heures supplémentaires qui lui ont été payées au titre de 2021.

Sur ce

Aux termes de l'article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l'employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés.

Selon l'article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, l'employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d'enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu'en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l'appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu'il prétend avoir accomplies afin de permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l'ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l'une et l'autre des parties, dans l'hypothèse où il retient l'existence d'heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l'importance de celles-ci et fixe les créances salariales s'y rapportant.

Il est en outre constant qu'un tableau établi par le salarié durant la procédure prud'homale ou après celle-ci peut constituer un élément suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d'y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

L'intéressé a droit au vu de l'inopposabilité du forfait jours, au paiement de ses heures supplémentaires effectuées au-delà de la 37ème heure, selon la rémunération horaire découlant du salaire découlant de l'application de sa rémunération au 37 heures travaillées hebdomadairement dans l'entreprise et sous les majorations légales pour heures supplémentaires.

Le tableau établi en l'espèce par M. [Z] [U] constitue un élément suffisamment précis de nature à permettre à l'employeur d'y répondre. Ce document décompte les heures de travail effectuées et les heures supplémentaires effectivement payées et ne prend pas en compte les jours de RTT qui n'ont pas été travaillées.

L'extraction pour la période postérieure au 1er janvier 2017 du logiciel Octime n'est pas convaincant, puisqu'elle est en contradiction avec les états liquidatifs signés par le salarié au moment de la fermeture et dont il ne peut être considéré que la signature par M. [Z] [U] a été apposée a posteriori.

L'employeur objecte aussi des critiques des documents produits, mais n'apporte pas d'éléments de preuve.

Cependant la régularité parfaite des horaires de travail selon le tableau qui reprend chaque jour avec une parfaite régularité une prise de travail à 8 heures 30 et un départ à 20 heures est invraisemblable. Au demeurant, un courriel d'un futur franchisé que devait recevoir M. [Z] [U] rapporte que celui-ci était arrivé à son travail à 11 heures du matin car il avait dû amener sa voiture à la concession, ce qui révèle qu'il n'était pas présent du matin au soir sans jamais s'occuper de ses affaires personnelles comme il le prétend.

Au vu des pièces du dossier et compte tenu de la prescription triennale, la cour retient que l'intéressé a effectué des heures supplémentaires valant une rémunération de 45 000 euros s'agissant de la période comprise entre le 7 juin 2015 et 2018 et une rémunération de 15000 euros s'agissant de la période postérieure.

En conséquence ces sommes seront accordées à M. [Z] [U] outre 10% de celles-ci au titre des congés payés y afférents.

1.2.3 : Sur la contrepartie obligatoire en repos

M. [Z] [U] arguant du dépassement du contingent annuel de 220 heures par les heures supplémentaires effectuées pendant la période allant 2015 à 2018 sollicite le paiement de la somme de 29 868,98 euros de dommages-intérêts au titre de la contrepartie obligatoire en repos outre 296,89 euros d'indemnité de congés payés y afférents, et la somme de 15 281,80 euros au titre des années 2019 à 2021 outre 1 528,18 euros d'indemnité de congés payés y afférents.

La société Feu Vert soulève la prescription de la demande s'agissant des prétendus dépassements antérieurs au 7 juin 2015 et objecte que le dépassement n'est pas établi.

Sur ce

Malgré son caractère de dommages-intérêts, les demandes tendant au versement de sommes qui auraient dû être payées au titre de la contrepartie obligatoire en repos sont soumises à la prescription applicable aux actions en paiement du salaire de trois ans.

Ainsi qu'il l'a été relevé à propos des heures supplémentaires, la demande d'indemnité au titre de la contrepartie obligatoire en repos est prescrite s'agissant de la période antérieure au 7 juin 2015.

Aux termes de l'article L. 3121-1 du Code du travail des heures supplémentaires peuvent être accomplies dans la limite d'un contingent annuel défini par une convention ou un accord collectif d'entreprise ou d'établissement ou à défaut par une convention ou un accord de branche. A défaut d'un tel accord, aux termes de l'article D. 3121-24 d Code du travail le contingent annuel est fixé à deux-cent-vingt heures par salarié. Il est constant que c'est le contingent légal qui doit être appliqué.

Au vu des pièces du dossier, l'indemnité due à ce titre est fixée à 10 000 euros s'agissant de la période écoulée entre 2015 et 2018 et à 7 000 euros au titre de la période écoulée entre 2019 et 2021, outre 10% de chacune de ces sommes au titre des congés payés y afférents.

1.2.4 : Sur l'indemnité de travail dissimulé

M. [Z] [U] sollicite l'allocation de la somme de 35 393,10 euros d'indemnité de travail dissimulé, au motif que la société n'a pas mentionné les heures supplémentaires sur les bulletins de paie. Il soutient que l'élément intentionnel du délit ressort de l'attitude de l'employeur qui ne pouvait ignorer celles-ci et a tenté de les éluder en modifiant les entrées du salarié dans le logiciel Octime et en lui proposant la signature d'une convention de forfait antidatée et censée respecter à l'inverse de la précédente les prescriptions légales.

La société oppose que l'existence d'une convention de forfait jour exclut la mauvaise foi de l'employeur.

Sur ce

L'article L8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article 8223-1 du code du travail dispose quant à lui que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Tant que la question de la validité de la convention de forfait jours n'était pas tranchée judiciairement, il ne peut être présumé que l'employeur a cherché de mauvaise foi à contourner une obligation de mention d'heures supplémentaires sur les bulletins de paie.

Dans ces conditions, M. [Z] [U] sera débouté de cette prétention.

1.2.5 : Sur la demande de remboursement à la société Feu Vert des rémunérations des jours de RTT.

Reconventionnellement, pour le cas où la cour admettrait l'inopposabilité de la convention de forfait, la société Feu Vert demande la condamnation du salarié à lui rembourser la somme de 9 433 euros brut en répétition de l'indû en raison des jours de RTT rémunérés dans le cadre de la convention de forfait.

M. [Z] [U] oppose, à juste titre, que ces jours ont été considérés comme non travaillés et que leur rémunération est donc déduite de l'indemnité qu'il réclame au titre des heures supplémentaires.

Par suite, la demande reconventionnelle sera rejetée.

1.3 : Sur la modification unilatérale du contrat

M. [Z] [U] sollicite la condamnation de la société à lui payer la somme de 11 797,70 euros de dommages-intérêts en réparation de la modification illicite de son contrat de travail caractérisée par le retrait en avril 2017 de sa qualité de "référent", à laquelle il avait été promu en janvier 2017 moyennant une prime mensuelle de 100 euros, alors même qu'un simple changement de ses conditions de travail exigeait eu égard à sa qualité de salarié protégé son accord exprès.

L'employeur répond que, si le salarié a été pressenti pour être désigné directeur référent pour 2017 à l'instar d'autres directeurs du centre automobile, sa candidature n'a pas finalement pas été retenue.

Sur ce

Aucune modification de son contrat de travail, ni aucun changement de ses conditions de travail ne peuvent être imposés au salarié protégé.

L'employeur a indiqué de manière ambiguë au cours de l'entretien préalable avoir retiré au salarié sa qualité de référent, avant qu'il ne commence à en exercer la responsabilité, ce qui peut être une manière maladroite de dire que le projet de le nommer a finalement été abandonné. Cette interprétation est corroborée d'une part par l'absence de notification au salarié de sa désignation par une lettre de nomination décrivant la mission et précisant la rémunération y afférente, alors que les autres salariés effectivement nommés à ces fonctions ont reçu un tel document et d'autre part par le fait que l'intéressé n'a jamais commencé à exercer de telles fonctions. Le seul certificat de"référent" au nom de M. [Z] [U], dont on ne sait pas dans quelles conditions il a été divulgué, n'a pas de valeur contractuelle et peut ne traduire qu'un projet de nomination de ce dernier et non une nomination effective.

Il ressort de ces éléments qu'aucune modification des conditions de travail ou changement du contrat de travail ne peut être imputé à l'employeur. Par suite, le salarié ne peut arguer devant de telles ambiguïtés d'un retrait d'une fonction qui lui aurait été confiée.

La demande de dommages-intérêts sera par conséquent rejetée.

1.4 : L'avertissement du 22 mai 2018

L'employeur soutient que l'avertissement du 22 mai 2018 est justifié par les griefs suivants:

- de manière soudaine et arbitraire, concurremment à l'échec de la négociation financière sur sa demande de rupture conventionnelle, M. [Z] [U] a pris la décision de cesser de faire procéder par les collaborateurs du centre au nettoyage des jantes compris dans les prestations de pneumatiques pratiquées par l'enseigne, motif pris de l'invocation peu sérieuse d'une dangerosité du produit nettoyant et malgré un courrier de rappel à l'ordre du 26 octobre 2017 ;

- il a refusé d'établir une note de frais pour l'un de ses subordonnés ;

- il a accueilli de manière désinvolte une franchisé à son centre le 18 décembre 2017, alors qu'il entrait dans sa mission "tutorat 2" de le lui présenter ;

- le salarié s'est livré à une critique systématique de la politique et des procédures de l'entreprise dans le but de "monter" un dossier contre son employeur.

M. [Z] [U] oppose que :

- il avait prévenu la société du danger présenté par le nettoyage des jantes par lettres du 27 septembre 2017 et du 20 octobre 2017, ce en quoi il avait été conforté par l'inspection du travail et par le déclenchement par le CHSCT d'un droit d'alerte avec demande d'expertise en évoquant les plaintes de personnes confrontées à ce danger ;

- la note de frais qu'il lui était demandé d'établir était frauduleuse, puisqu'il s'agissait de contourner de contourner l'obligation de payer des cotisations sociales sur ce qui aurait dû être versé sous forme de prime ;

- il n'entrait pas dans ses attributions de recevoir un franchisé pour lui présenter son centre, alors qu'en tout état de cause, la personne en question a bien été accueillie par ses collaborateurs ;

- ses critiques de la politique de l'entreprise ne sont que la manifestation de sa liberté d'expression, notamment lorsqu'il lui a été demandé d'établir la note de frais fictive.

Sur ce

Selon les dispositions des articles L.1331-1 et suivants du code du travail, constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié considéré par l'employeur comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération. Aucune sanction ne peut être prise à l'encontre du salarié sans que celui-ci soit informé, dans le même temps et par écrit, des griefs retenus contre lui. En cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'homrnes les éléments retenus pour prendre la sanction. Le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

S'agissant de la note de frais, des courriers électroniques échangés en décembre 2017 entre M. [Z] [U] et la société établit que le salarié a refusé d'établir en faveur de l'un de ses subordonnés une note de frais pour ouvrir droit à une indemnité kilométrique que l'employeur lui demandait d'établir pour justifier le remboursement des frais de réparation de la voiture du subordonné en compensation de l'éloignement de celui-ci avec son lieu de travail. M. [U] justifiait son refus au motif qu'il s'agissait d'après lui d'un contournement de l'obligation pour l'employeur de payer une prime sans avoir à exposer des cotisations sociales.

Cette interprétation par le salarié du moyen qu'a utilisé la société pour indemniser ledit subordonné de ses frais de déplacement est certes discutable. Eu égard au doute existant dans l'esprit du salarié, une sanction disciplinaire était injustifiée, alors que d'autres personnes pouvaient établir cette note sans dommages pour l'entreprise.

S'agissant des critiques de la société reprochées au salarié, celui-ci jouit dans l'entreprise et en dehors de celle-ci de sa liberté d'expression, sauf utilisation abusive de celle-ci ou emploi d'un langage injurieux, diffamatoire ou excessif. Il ne peut être apporté à celle-ci que des restrictions justifiées par la nature de la tâche à accomplir et proportionnées au but recherché.

Les correspondances figurant au dossier établissent l'exercice légitime par le salarié de cette liberté.

S'agissant du refus de M. [Z] [U] de faire procéder comme il lui avait été ordonné au nettoyage des jantes des véhicules par un pistolet à air comprimé, il ressort d'un courrier de l'inspection du travail, des correspondances adressées par le salarié à sa direction et des comptes-rendus du CHSCT que : le 27 septembre 2016, M. [Z] [U] signalait à la société le danger présenté par ce mode de nettoyage pour la santé des salariés en raison des poussières émises à cette occasion provenant des garnitures de frein ; le 20 octobre il rappelait au responsable ressources humaines qu'il lui était demandé de procéder à de tels nettoyages, qu'il craignait la nocivité d'un tel procédé, que certains employés du CHSCT éprouvaient une gêne respiratoire, des irritations à la gorge et que cela pouvait toucher toutes les personnes qui passaient dans l'atelier ; cette analyse a été confirmée par un courrier électronique de la DIRECCTE du 25 octobre 2017 et par le déclenchement de son droit d'alerte par le CHSCT le 30 novembre 2017, rappelé encore par cet organisme le 23 janvier 2018.

Aux termes de l'article L. 4131-1 du code du travail "le travailleur alerte immédiatement l'employeur de toute situation de travail dont il a un motif raisonnable de penser qu'elle présente un danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection.

Il peut se retirer d'une telle situation.

L'employeur ne peut demander au travailleur qui a fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dans une situation de travail où persiste un danger grave et imminent résultant notamment d'une défectuosité du système de protection".

Aucune forme n'est imposée au salarié pour l'exercice de son droit d'alerte.

Aux termes de l'article L. 4131-2 du Code du travail, le représentant du personnel au comité social et économique, qui constate qu'il existe une cause de danger grave et imminent, notamment par l'intermédiaire d'un travailleur, en alerte immédiatement l'employeur selon la procédure prévue au premier alinéa de l'article L. 4132-2.

Aux termes de ce dernier article, lorsque le représentant du personnel au comité social et économique alerte l'employeur en application de l'article L. 4131-2, il consigne son avis par écrit dans des conditions déterminées par voie réglementaire.

L'article L. 4132-2 poursuit : l'employeur procède immédiatement à une enquête avec le représentant du comité social et économique qui lui a signalé le danger et prend les dispositions nécessaires pour y remédier.

Aux termes de l'article L. 4132-5 du Code du travail, l'employeur prend les mesures et donne les instructions nécessaires pour permettre aux travailleurs, en cas de danger grave et imminent, d'arrêter leur activité et de se mettre en sécurité en quittant immédiatement le lieu de travail.

En cas de divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser, notamment par arrêt du travail, de la machine ou de l'installation, le comité social et économique est réuni d'urgence, dans un délai n'excédant pas vingt-quatre heures.

L'employeur informe immédiatement l'agent de contrôle de l'inspection du travail mentionné à l'article L. 8112-1 et l'agent du service de prévention de la caisse régionale d'assurance maladie, qui peuvent assister à la réunion du comité social et économique.

Selon le compte-rendu de la réunion extraordinaire de L'ICCHSCT du 29 octobre 2018, un test a été fait, il a été constaté qu'aucun nuage de poussière ne se formait lors de la pulvérisation du produit sur les jantes, avec un pistolet à air comprimé réglé à la bonne pression, de même qu'avec un pistolet manuel, et une information a été envoyée à l'ensemble du réseau par le service pôle maintenance pour rappeler l'application stricte du mode opératoire liée à cette prestation de nettoyage des jantes et de la responsabilité des personnes chargées de l'atelier qui devait le faire respecter immédiatement.

Le point de vue donné par l'inspection du travail repose plutôt sur les dangers présentés par des réparations sur les garnitures de frein, plutôt que sur le nettoyage des jantes ce qui est assez différent et l'employeur a fait vérifier que le produit propulsé sur les jantes ne présentait pas de danger.

Aucune réunion du CHSCT ne s'est tenue à raison d'une divergence sur la réalité du danger ou la façon de le faire cesser.

Il ne ressort pas des pièces du dossier et notamment des procés-verbaux de réunion du CHSCT qu'il ait été décidé d'arrêter le nettoyage des jantes, seul M. [Z] [U] à titre personnel le souhaitant.

Le droit de retrait ne pouvait être exercé tout au long de cette procédure d'alerte que par les salariés procédant au nettoyage des jantes et exposés personnellement.

M. [Z] [U] n'avait donc aucun droit à refuser de donner instructions de procéder à ces nettoyages comme le demandait la société.

C'est donc à juste titre que la société lui a infligé un avertissement sur ce point.

S'agissant de l'accueil d'un franchisé pour lui présenter le fonctionnement de son centre, un courriel de ce dernier manifeste son mécontentement eu égard au fait qu'il n'a quasiment pas vu M. [U] sauf pour un bref salut. Ce dernier ne saurait arguer de ce que cette mission n'entrait pas dans ses fonctions, s'agissant d'une action ponctuelle et étroitement liée à son activité, d'autant plus que dans la justification de son attitude donnée à l'employeur.

L'indignation du franchisé, dont la position supposait qu'il fût accueilli avec un empressement suffisant pour répondre à ses attentes, révèle que M. [Z] [U] n'a pas manifesté à l'endroit de ce visiteur des égards nécessaires.

Dés lors l'avertissement était fondé et la demande de dommages-intérêts fondée sur la nullité de celui-ci sera rejetée.

1.5 : Sur le harcèlement moral et l'obligation de sécurité

M. [Z] [U] sollicite la condamnation de la société Feu Vert à lui verser la somme de 30 000 euros de dommages-intérêts en réparation du harcèlement moral dont il dit avoir été victime. Celui-ci serait caractérisé en substance par des pressions incessantes de sa hiérarchie pour qu'il poursuive la prestation de nettoyage des jantes malgré l'alerte déclenchée par le CHSCT sans procéder à une expertise sérieuse, ni adopter une nouvelle procédure de nettoyage, l'inflixion d'avertissements les 22 février 2018 et 14 mai 2018 injustifiés, la tenue de propos agressifs et violents dans ses échanges professionnels, un comportement humiliant lors de l'entretien préalable du 24 janvier 2018 en voulant le faire démissionner et en refusant de lui serrer la main. Il soutient que le harcèlement s'est poursuivi après le jugement du conseil des prud'hommes avec l'envoi de longs courriels et courriers recommandés avec accusé de réception dans le but de dégrader ses conditions de travail, lui faisant grief de se plaindre et lui reprochant d'effectuer des heures supplémentaires sans raison sérieuse avec demande de justification de l'intégralité de celles-ci. Enfin la société ne lui a pas accordé d'augmentation au mérite qui lui était due, ni ne lui a accordé la prime annuelle, à laquelle il avait droit. Il fait valoir que ces agissements l'ont amené à suivre un traitement anxiolytique. Il estime que l'employeur a manqué à son obligation de sécurité.

La société Feu Vert conteste le harcèlement, souligne que la lettre de recadrage du 14 mai 2018 n'est pas une sanction disciplinaire, qu'elle n'a jamais reçu de demande de test sur la question du nettoyage des jantes, que le document diffusé par l'inspection du travail sur le nettoyage des plaquettes de frein qui pose des problèmes sanitaires ne comporte aucune contre indication, s'agissant du nettoyage des jantes, tandis que le fournisseur du produit nettoyant certifiait l'absence de toxicité de celui-ci, ce qui est conforté par l'expertise technique réalisé le 27 mars 2018 et par le compte-rendu de l'IHSCT du 19 décembre 2018. L'employeur estime que les échanges avec le salarié ne font que traduire l'exercice du pouvoir de direction de la société sur l'un de ses cadres. L'absence de tout fait matériel de nature à asseoir le harcèlement moral explique qu'il n'y ait pas eu lieu à enquête sur ce point.

Sur ce

Aux termes de l'article L 1152-1 du Code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.

L'article L 1154-1 du même code prévoit qu'en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l'existence d'un harcèlement moral et il incombe alors à l'employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d'un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il convient donc d'examiner la matérialité des faits invoqués, de déterminer si pris isolément ou dans leur ensemble ils font présumer un harcèlement moral et si l'employeur justifie les agissements invoqués par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Il ressort des échanges de courriels entre le salarié et ses supérieurs que la société lui a demandé tout au long de 2017 de poursuivre le nettoyage des jantes.

L'avertissent du 22 février 2018 lui reprochant de n'avoir pas obtempéré était fondé.

La lettre du 14 mai 2018 fait un bilan de la situation et fixe des objectifs au salarié pour y remédier. Il ne s'agit pas d'un avertissement.

Les échanges de correspondances entre M. [Z] [U] et la société tout au long de la relation de travail à partir de 2017 témoigne d'une méfiance réciproque, à travers de longs messages du salarié auxquels ses supérieurs répondaient tout aussi longuement en manifestant l'exercice de leur pouvoir de direction à travers des mises au point et des directives. Le supérieur hiérachique du salarié se préoccupe légitimement de la limitation des heures supplémentaires du salarié et de son équipe. Il ne peut en être tiré la tenue de propos agressifs et violents, allant au-delà d'un dialogue ferme dans le cadre de l'exercice du pouvoir de direction.

Compte tenu de l'absence de toxicité du produit utilisé pour le nettoyage des jantes et des motifs développés plus haut au sujet de la demande d'annulation de l'avertissement, il ne peut être reproché à l'employeur d'avoir insisté pour qu'il soit procédé au nettoyage des jantes, dans le respect des règles de sécurité, notamment avec port d'un masque et de lunettes.

La cour a connaissance des échanges tendus au cours de l'entretien du 24 janvier 2018 préalable à l'avertissement du 22 février 2018, au cours duquel l'employeur a refusé de saluer M. [Z] [U], grâce à la description précise et probante qu'en a fait le conseiller du salarié.

Le salarié ne justifie pas de l'anomalie présentée par l'absence de progression de son salaire au cours des dernières années de son activité au sein de la société Feu Vert.

Il a été mis en arrêt maladie le 6 janvier 2022 pour anxiété réactionnelle. Toutefois, il n'est pas établi que cet état de santé soit lié à des agissements de harcèlement moral.

Le seul fait évoqué par le salarié susceptible de répondre à la définition du harcèlement moral est le refus de lui serrer la main à la fin d'un entretien tendu préalable à sanction disciplinaire.

Ce fait unique, qui est explicable par un moment de colère dans le cadre d'un entretien préalable à une sanction qui n'a pas été finalement qu'un avertissement, ne saurait caractériser le harcèlement moral.

Le harcèlement moral est donc écarté et la demande de dommages-intérêts correspondante sera rejetée.

En vertu de l'article L. 4121-1 du code du travail, l'employeur est tenu d'une obligation de sécurité en matière de protection de la santé physique et mentale de ses préposés. Il doit mettre en oeuvre des mesures nécessaires pour garantir la sécurité et protéger la santé physique et mentale des salariés, à savoir tant des actions de prévention que l'organisation de moyens adaptés et l'amélioration des situations existantes. Il doit assurer l'effectivité des mesures tendant à identifier, prévenir et gérer les situations pouvant avoir un impact négatif sur la santé du salarié.

L'article L.4121-2 prévoit que l'employeur met en oeuvre ces mesures sur le fondement des principes généraux de prévention suivants : éviter les risques, évaluer les risques qui ne peuvent pas être évités, combattre les risques à la source, adapter le travail à l'homme, en particulier en ce qui concerne la conception des postes de travail ainsi que le choix des équipements de travail et des méthodes de travail et de production, en vue notamment de limiter le travail monotone et le travail cadencé et de réduire les effets de ceux-ci sur la santé, tenir compte de l'état d'évolution de la technique, remplacer ce qui est dangereux par ce qui n'est pas dangereux ou par ce qui est moins dangereux, planifier la prévention en y intégrant, dans un ensemble cohérent, la technique, l'organisation du travail, les conditions de travail, les relations sociales et l'influence des facteurs ambiants, notamment les risques liés au harcèlement moral et au harcèlement sexuel, tels qu'ils sont définis aux articles L. 1152-1 et L. 1153-1, ainsi que ceux liés aux agissements sexistes définis à l'article L. 1142-2-1, rendre des mesures de protection collective en leur donnant la priorité sur les mesures de protection individuelle et donner les instructions appropriées aux travailleurs

L'employeur a exercé son pouvoir de direction en donnant des injonctions répétées au salarié, en le sanctionnant à bon escient, il a procédé à un test à la suite de l'alerte de M. [U] et a dialogué avec le CHSCT sans que celui-ci ne manifeste un désaccord sur la décision de la société de poursuivre le nettoyage de jantes. Il n'apparaît pas que l'état de santé du salarié puisse s'expliquer par les circonstances tel que la cour les analyse. En conséquence, en l'absence de risque pour la santé et la sécurité du salarié, l'employeur ne peut se voir imputer un manquement à une obligation de sécurité en l'espèce.

2 : Sur la résiliation du contrat de travail

2.1 : Sur le principe de la résiliation

M. [Z] [U] fonde sa demande de résiliation sur l'application par l'employeur d'une convention de forfait jours manifestement inopposable, sur le refus de rémunérer les heures supplémentaires, sur la modification unilatérale de son contrat de travail et sur le harcèlement moral.

La société Feu Vert conteste les griefs dans leur matérialité et observe que le salarié se réfère à des faits qui se poursuivent depuis de nombreuses années sans qu'il ne s'en soit plaint avant 2017.

Sur ce

Sur le fondement de l'article 1184 du code civil, l'inexécution de certaines des dispositions résultant d'un contrat synallagmatique justifie la résiliation lorsqu'elle présente une gravité suffisante pour en justifier la résiliation. La résiliation du contrat de travail à la demande du salarié est encourue lorsque l'employeur a commis des manquements ou des actes suffisamment graves pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

La cour dans ses précédents motifs a écarté le harcèlement moral et le prétendu retrait des fonctions de référent au salarié.

Il reste l'inopposabilité du forfait journalier et le droit subséquent au paiement d'heures supplémentaires.

Ce manquement a conduit le salarié a être soumis à un forfait jours pendant de longues années et se prolongeait encore au moment de la saisine du conseil des prud'hommes, sans que l'intéressé ne bénéficie des garanties attachées à ce régime au regard de la charge de travail et de l'équilibre entre la vie privée et familiale, ni obtenir de rémunération pour heures supplémentaires auquel il a finalement droit pour les motifs développés plus haut.

Ceci constitue un manquement suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

Selon une lettre adressée par la Fédération Nationale CFTC des syndicats de la métallurgie à la société Feu Vert, M. [Z] [U] avait été désigné le 12 février 2016 comme représentant syndical au CHSCT. Le procés verbal d'élection au CSCE du 19 juin 2019 révèle que le salarié a été élu à cette date membre titulaire de cet organisme.

Tant au moment de la saisine du conseil des prud'hommes le 7 juin 2018, qu'à ce jour, le salarié bénéficie du statut protecteur de salarié protégé.

Lorsque la résiliation judiciaire du contrat de travail d'un salarié titulaire d'un mandat électif ou de représentation est prononcée aux torts de l'employeur, la rupture produit les effets d'un licenciement nul pour violation du statut protecteur.

La résiliation produire donc les effets d'un licenciement nul.

2.2 : Sur les conséquences de la résiliation

2.2.1 : Sur l'indemnité de préavis

M. [Z] [U] sollicite l'équivalent de trois mois de salaire, sur la base d'un salaire calculée au vu des heures supplémentaires réclamées, soit la somme 11 797,70 euros outre celle de 1 179,77 euros au titre des congés payés y afférents, sur laquelle l'employeur n'oppose aucune objection quant à son quantum.

Compte tenu des heures supplémentaires retenues par la cour il sera fait droit à la demande de M. [Z] [U].

2.2.2 : Sur l'indemnité de licenciement et l'indemnité spéciale de licenciement

M. [Z] [U] sollicite une indemnité spéciale de licenciement égale au double de l'indemnité légale de licenciement en application de l'article L. 1226-15 du Code du travail, dès lors que la rupture est d'origine professionnelle. Il souligne que le médecin du travail a indiqué que l'intéressé pourrait occuper un poste équivalent dans un environnement de travail différent. Il prétend que cette demande d'indemnité n'est pas nouvelle par rapport au premier degré où seule une indemnité légale de licenciement avait été réclamée, puisque le fondement de l'indemnité spéciale de licenciement est l'avis d'inaptitude du 27 octobre 2022 rendu postérieurement au jugement par le médecin du travail et qu'en tout état de cause, elle tend aux mêmes fins que la demande d'indemnité de licenciement réclamée devant le conseil des prud'hommes

La société Feu Vert soulève l'irrecevabilté de la demande d'indemnité spéciale de licenciement en ce qu'il s'agit d'une prétention nouvelle en cause d'appel. Sur le fond elle oppose qu'aucun lien direct n'existe entre son arrêt maladie et l'inaptitude.

Sur ce

Dés lors que l'avis d'inaptitude est postérieur au jugement déféré et que la demande litigieuse se fonde sur ce fait, la demande est née de la survenance d'un fait nouveau et se trouve donc recevable.

Aux termes de l'article L. 1226-14 du Code du travail, la rupture du contrat de travail dans les cas prévus au deuxième alinéa de l'article L. 1226-12 ouvre droit, pour le salarié, à une indemnité compensatrice d'un montant égal à celui de l'indemnité compensatrice de préavis prévue à l'article L. 1234-5 ainsi qu'à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue par l'article L. 1234-9.

Il résulte de ce texte que la rupture du contrat de travail d'un salarié déclaré par le médecin du travail inapte à son emploi en conséquence d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle, ouvre droit pour le salarié non reclassé dans l'entreprise, que cette rupture prenne la forme d'un licenciement, prononcé en raison de l'impossibilité démontrée du reclassement du salarié ou en raison de son refus du poste de reclassement proposé, ou d'une résiliation judiciaire, à une indemnité spéciale de licenciement qui, sauf dispositions conventionnelles plus favorables, est égale au double de l'indemnité prévue à l'article L. 122-9 du Code du travail.

Toutefois, les développements qui précèdent et les pièces du dossier ne permettent pas de rattacher l'inaptitude du salarié, fût-ce pour partie, à une maladie professionnelle ou à un accident du travail.

M. [Z] [U] a seulement droit à une indemnité de licenciement.

Il en calcule le montant sur la base d'un salaire mensuel brut de 5 898,85 euros compte tenu des heures supplémentaires.

Aux termes de l'article R. 1234-4 du Code du travail, le salaire à prendre en considération pour le calcul de l'indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié :

1° Soit la moyenne mensuelle des douze derniers mois précédant le licenciement, ou lorsque la durée de service du salarié est inférieure à douze mois, la moyenne mensuelle de la rémunération de l'ensemble des mois précédant le licenciement ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n'est prise en compte que dans la limite d'un montant calculé à due proportion.

Le salaire mensuel brut à retenir au vu des heures supplémentaires retenues par la cour, qui est le même sur les trois derniers mois ou les six mois précédant l'arrêt maladie, est de 5137,03 euros.

Par suite, l'indemnité de licenciement, calculée, ainsi que le demande M. [Z] [U] sur la base de 21 ans d'ancienneté, est de :

(5 137,03 : 4) x 10 + (5 137,03 : 3) x 11 = 31 678,28 euros

2.2.3 : Sur les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

En application de l'article L. 1235-3-1 du Code du travail, le salarié a droit à une indemnité en réparation des conséquences de la rupture d'un montant minimal de six mois.

Compte tenu notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à M. [Z] [U], de son âge, de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu'ils résultent des pièces et des explications fournies, il ya lieu de lui allouer, en application de l'article L 1235-3 du Code du travail une somme de 31 000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

2.2.4 : Sur l'indemnité pour violation du statut protecteur

M. [Z] [U] sollicite la condamnation de l'employeur à lui verser les salaires couvrant la période écoulée entre la date de l'audience fixée au 24 janvier 2023 et l'expiration le 27 juin 2023 de son mandat de représentant syndical renouvelé le 12 février 2019, ainsi que sur les six mois suivants soit jusqu'au 27 janvier 2024, en application de l'article L. 2411-8 (sic) du Code du travail. Il demande donc l'allocation de la somme de 70 786,20 euros.

La société Feu Vert s'y oppose au motif le salarié protégé n'a droit qu'à une indemnité limitée à la rémunération qu'il aurait dû percevoir à compter du prononcé de la résiliation judiciaire jusqu'à l'expiration de la période de protection qui était en cours au jour de la demande, de sorte que son mandat précédant la saisine du conseil des prud'hommes remontant au 30 avril 2015, il expirait le 30 avril 2019, à quoi s'ajoute le délai de protection supplémentaire de six mois, ce qui mène au 30 octobre 2019. L'employeur conclut donc au rejeté de cette demande.

Sur ce

Le salarié protégé dont la demande de résiliation judiciaire est accueillie n'a droit, au titre de la violation de son statut protecteur, qu'au paiement d'une indemnité égale à la rémunération qu'il aurait dû percevoir jusqu'à l'expiration de la période de protection en cours au jour de sa demande en résiliation.

La période de protection attachée au mandat de membre du CSE qui a commencé en 2019 après la saisine du conseil des prud'hommes du 7 juin 2019 n'a pas lieu d'être prise en compte, au titre de l'indemnité pour violation du statut protecteur.

Le salarié avait saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire le 7 juin 2018, tandis que la période de protection attachée au mandat de représentant syndical au CSE en cours au moment de la demande, qui avait commencé le 30 avril 2015, est expiré le 30 octobre 2019 et n'était donc plus en cours au jour du présent arrêt, qui prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail. Par suite, le salarié ne peut prétendre à l'allocation d'une indemnité forfaitaire pour violation du statut protecteur.

M. [Z] [U] sera donc débouté de ce chef.

3 : Sur les intérêts, l'application de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens

Les sommes allouées de nature contractuelle, porteront intérêts au taux légal à compter de la convocation du salarié devant le bureau de conciliation du conseil des prud'hommes, soit 19 juillet 2018, les autres sommes de nature indemnitaire porteront intérêts à compter de la décision qui les a prononcées. Il sera ordonné la capitalisation des intérêts courus pour une année entière ainsi qu'il l'est demandé, dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil.

Il est équitable au regard de l'article 700 du code de procédure civile de condamner l'employeur qui succombe à payer à M. [Z] [U] la somme de 1 200 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d'appel.

Pour le même motif, la société Feu vert sera condamnée aux dépens.

Il convient de rejeter les demandes au titre des frais d'exécution et du droit de recouvrement de l'huissier qui ne relèvent pas des dépens.

PAR CES MOTIFS,

Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;

Infirme le jugement déféré uniquement sur les demandes de M. [Z] [U] en paiement de rappel de salaire pour heures supplémentaires, d'indemnité de congés payés y afférents, d'indemnité de repos compensateur, d'annulation de l'avertissement du 22 février 2018, de résiliation du contrat de travail, d'indemnité de préavis, d'indemnité de congés payés y afférents, d'indemnité de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

Statuant à nouveau ;

Rejette la demande d'annulation de l'avertissement du 22 février 2018.

Condamne la société Feu Vert à payer à M. [Z] [U] les sommes suivantes :

- 45 000 euros de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre de la période comprise entre le 7 juin 2015 et 2018 ;

- 4 500 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 10 000 euros d'indemnité de repos compensateur au titre de la période écoulée entre le 7 juin 2015 et 2018 ;

- 31 000 euros de dommages-intérêts pour licenciement nul ;

Les sommes allouées de nature contractuelle, porteront intérêts au taux légal à compter du 19 juillet 2018 et les autres sommes de nature indemnitaire à compter de la décision qui les a prononcées ;

Y ajoutant ;

Déclare irrecevable la demande nouvelle en paiement d'une prime annuelle au titre de l'année 2021 ;

Rejette la demande de M. [Z] [U] en paiement d'une indemnité spéciale de licenciement ;

Rejette la demande de la société Feu Vert en répétition de l'indû ;

Condamne la société Feu Vert à payer à M. [Z] [U] les sommes suivantes :

- 15 000 euros de rappel de salaire pour heures supplémentaires au titre des années 2019 à 2021 ;

- 1 500 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 7 000 euros d'indemnité de repos compensateur au titre de la période écoulée entre 2019 et 2021 ;

- 700 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;

- 1 000 euros d'indemnité de congés payés afférents à l'indemnité de repos compensateur due au titre de la période échue entre le 7 juin 2015 et 2018 ;

Dit que les créances de nature salariale portent intérêts au taux légal courent à compter du 19 juillet 2018 et les créances indemnitaires à compter du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts des intérêts alloués tant en première instance qu'en appel dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil ;

Condamne la société Feu Vert aux dépens d'appel ;

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/06069
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;20.06069 ?
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