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10/05/2023 | FRANCE | N°20/03992

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 10 mai 2023, 20/03992


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 10 MAI 2023



(n° 2023/ , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03992 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB7KG



Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/06778





APPELANTE



Madame [N] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 6]



Représenté

e par Me Sarah BACHELET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 280





INTIMÉES



S.A. SANOFI AVENTIS GROUPE

[Adresse 3]

[Localité 4]



Représentée par Me Marc BORTEN, avocat au barreau de P...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 10 MAI 2023

(n° 2023/ , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03992 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB7KG

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Janvier 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/06778

APPELANTE

Madame [N] [Z]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Sarah BACHELET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : 280

INTIMÉES

S.A. SANOFI AVENTIS GROUPE

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Marc BORTEN, avocat au barreau de PARIS, toque : R271

S.A.S. MANPOWER FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Florence FARABET ROUVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0628

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane THERME conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Mme [Z] a exercé au sein de la société Sanofi Aventis Groupe du 1er août 2017 au 28 août 2018, dans le cadre d'un contrat d'apprentissage.

Mme [Z] a conclu un contrat de travail à durée indéterminée intérimaire avec la société Manpower France le 3 septembre 2018, pour des emplois de contrôleur de gestion, analyste financier et auditeur financier.

Mme [Z] a été mise à la disposition de la société Sanofi Aventis Groupe, par la société Manpower France. Une lettre de mission a été conclue du 3 septembre 2018 au 30 juin 2020 pour un emploi d'analyste financier.

Le 28 mars 2019 Mme [Z] a été informée par la société Manpower France de la fin de sa mission à compter du lendemain, et de son placement en situation d'intermission.

Le 12 avril 2019 Mme [Z] a adressé à la société Manpower France un courrier de prise d'acte de la rupture de son contrat de travail.

Mme [Z] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris par requête parvenue au greffe le 24 juillet 2019 aux fins de demander la requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée, des indemnités de rupture, indemnités et rappels de salaire.

Par jugement du 28 janvier 2020, le conseil de prud'hommes a :

Mis hors de cause la société Sanofi Aventis Groupe,

Débouté Mme [Z] de ses demandes et l'a condamnée aux dépens,

Débouté les sociétés Sanofi Aventis Groupe et Manpower de leurs demandes reconventionnelles.

Mme [Z] a formé appel par acte du 03 juillet 2020.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 26 septembre 2020, auxquelles la cour fait expressément référence, Mme [Z] demande à la cour d'infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris rendu le 28 janvier 2020 :

- en ce qu'il a débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes,

- en ce qu'il a omis de statuer sur les demandes relatives à la requalification de son contrat de mission,

Statuant à nouveau de faire droit au demandes suivantes :

Requalifier le contrat de mission de Mme [Z] en contrat de travail à durée indéterminée ;

Et en conséquence :

Dire et juger que la rupture du contrat de travail intervenue le 29 mars 2019 est imputable à la société Sanofi Aventis Groupe et doit ainsi s'analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Fixer l'ancienneté de Mme [Z] au 29 aout 2016,

Fixer le salaire mensuel moyen de Mme [Z] à la somme de 3 750 euros bruts,

Condamner la société Sanofi Aventis Groupe au paiement des sommes suivantes :

3 750 euros bruts à titre d'indemnité de requalification correspondant à un mois de salaire à temps plein,

15 000 euros bruts à titre d'indemnité conventionnelle de préavis,

1 500 euros au titre des congés payés afférents,

3 187,5 euros bruts au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

3 750 euros à titre d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement,

33 750 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 9 mois de salaire,

22 500 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé correspondant à 6 mois de salaire,

- Condamner in solidum les sociétés Sanofi Aventis Groupe et Manpower au paiement de la somme de 22 500 à titre de dommages-intérêts pour délit de marchandage,

- Condamner la société Sanofi Aventis Groupe au paiement d'un rappel de salaire d'un montant de 4 180 euros correspondant à l'intéressement et à la participation outre la somme de 418 euros au titre des congés payés afférents,

- Ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir sous astreinte de 15 euros par jour de retard à compter du prononcé de la décision ;

- Dire et juger que l'ensemble des indemnités versées porteront intérêts au taux légal à compter de la saisine,

- Condamner la société au versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamner la société aux dépens,

- Ordonner l'exécution provisoire du jugement à intervenir, sur l'ensemble de ses dispositions.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 10 décembre 2020, auxquelles la cour fait expressément référence, la société Sanofi Aventis Groupe demande à la cour de :

A titre principal, confirmer le jugement du conseil des prud'hommes de Paris du 28 janvier 2020 en toutes ses dispositions en ce qu'il a mis hors de cause la société Sanofi Aventis Groupe et débouté Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes.

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour venait à requalifier le contrat de travail intérimaire à durée indéterminée en contrat de travail à durée indéterminée au préjudice de la société Sanofi Aventis Groupe, limiter à un mois de salaire maximum, l'indemnisation globale de la salariée eu égard à son ancienneté.

En tout état de cause, condamner Mme [Z] à verser à la société Sanofi Aventis Groupe une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 02 décembre 2020, auxquelles la cour fait expressément référence, la société Manpower France demande à la cour de :

Confirmer le jugement rendu le 28 janvier 2020 par le conseil de prud'hommes de Paris en ce qu'il a débouté intégralement Mme [Z] de ses demandes,

En tout état de cause :

Dire et juger qu'aucune situation de délit de marchandage n'est caractérisée,

Dire et juger que Mme [Z] ne rapporte pas la preuve des préjudices qu'elle revendique et qu'elle ne verse aucun élément de preuve relatif au préjudice qu'elle prétend avoir subi ;

En conséquence :

Débouter Mme [Z] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner Mme [Z] au paiement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2023.

MOTIFS

Sur la requalification du contrat de mission

Mme [Z] demande la requalification en contrat de travail à durée indéterminée du contrat de mission avec la société Sanofi Aventis Groupe, faisant valoir que son activité s'est poursuivie au delà du terme de sa mission et que le contrat a eu pour objet de pourvoir durablement un emploi permanent.

L'article L. 1251-39 du code du travail dispose que 'Lorsque l'entreprise utilisatrice continue de faire travailler un salarié temporaire après la fin de sa mission sans avoir conclu avec lui un contrat de travail ou sans nouveau contrat de mise à disposition, ce salarié est réputé lié à l'entreprise utilisatrice par un contrat de travail à durée indéterminée.'

L'article L. 1251-5 du code du travail dispose que 'Le contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.'

La société Sanofi Aventis Groupe fait justement valoir que le terme du contrat de mission était le 30 juin 2020 et qu'ainsi Mme [Z] n'a pas travaillé à son profit après la date de fin de sa mission, le dernier jour étant le 29 mars 2019.

La société Sanofi Aventis Groupe justifie par un compte rendu de son comité d'entreprise, un compte rendu du comité économique et social et par des documents internes d'organisation de ses activités qu'elle a mis en oeuvre un projet de standardisation de ses activités mondiales, dénommé Shift, qui a été décliné en France et dont la mise en oeuvre était prévue de la fin de l'été 2018 à l'été 2020. Le contrat de mission a été conclu avec la société Manpower France dans le cadre de l'accroissement temporaire d'activité qui en résultait, ce qui est indiqué sur le document.

Le projet Shift pour lequel le contrat de mission a été conclu a été gelé au mois de janvier 2019, des améliorations étant d'abord nécessaires, motif pour lequel l'entreprise a mis un terme au contrat de mission. La société Sanofi Aventis Groupe justifie qu'une équipe restreinte a été maintenue pour préserver le travail qui avait été accompli, afin de le reprendre ultérieurement, que Mme [Z] est demeurée dans celle-ci et qu'elle a continué à travailler sur le projet Shift, ce qui résulte des différents mails qu'elle a échangés avec la personne qui en était responsable.

Mme [Z] a toujours exercé au sein de la société Sanofi Aventis Groupe dans le cadre du projet Shift, qui était une activité ponctuelle de l'entreprise, et son contrat n'a pas eu pour effet ou pour objet de pourvoir un emploi lié à l'activité durable et permanente de celle-ci.

Mme [Z] doit être déboutée de ses demandes de requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée avec la société Sanofi Aventis Groupe et de l'indemnité de requalification.

Il sera ajouté au jugement entrepris, le conseil de prud'hommes n'ayant pas statué sur ces demandes.

Sur les demandes financières à l'égard de la société Sanofi Aventis Groupe

Mme [Z] demande la condamnation de la société Sanofi Aventis Groupe à payer des sommes au titre de l'indemnité de préavis et les congés payés afférents, l'indemnité conventionnelle de licenciement, l'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi qu'à la remise sous astreinte des documents de rupture.

La demande de requalification du contrat de mission en contrat de travail avec la société Sanofi Aventis Groupe étant rejetée, elle doit être déboutée de ces demandes.

Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Mme [Z] forme une demande de rappel de participation et d'intéressement pour la période d'exécution de son contrat de mission. En l'absence de requalification en contrat de travail elle doit en être déboutée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Mme [Z] a exercé au sein de la société Sanofi Aventis Groupe dans le cadre d'un contrat de mission régulier. Le travail dissimulé n'étant pas caractérisé, elle doit être déboutée de sa demande d'indemnité formée à ce titre.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts pour délit de marchandage

L'article L. 8231-1 du code du travail dispose que 'Le marchandage, défini comme toute opération à but lucratif de fourniture de main-d'oeuvre qui a pour effet de causer un préjudice au salarié qu'elle concerne ou d'éluder l'application de dispositions légales ou de stipulations d'une convention ou d'un accord collectif de travail, est interdit.'

Pour demander la condamnation in solidum des sociétés Sanofi Aventis Groupe et Manpower France, Mme [Z] expose que la conclusion d'un contrat de travail à durée indéterminée intérimaire au lieu et place d'un contrat au sein de sa société a eu pour effet d'éluder l'application des dispositions légales, sans articuler son propos.

Mme [Z] a été embauchée dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée intérimaire avec la société Manpower qui prévoyait une garantie minimale mensuelle de rémunération de 1 873,09 euros. Le contrat de mission prévoyait quant à lui un salaire de base de 3 750 euros, la prise en charge d'une partie des frais de transport, l'accès au restaurant d'entreprise, la majoration des heures supplémentaires susceptibles d'être effectuées, le bénéfice de journées de repos dites JRTT mises en oeuvre dans l'entreprise utilisatrice.

La preuve du délit de marchandage n'est pas rapportée et Mme [Z] doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Mme [Z] qui succombe supportera les dépens et sera condamnée à verser à chacune des sociétés Sanofi Aventis Groupe et Manpower France la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Ajoutant au jugement entrepris,

DÉBOUTE Mme [Z] de sa demande de requalification du contrat de mission en contrat de travail à durée indéterminée,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions,

CONDAMNE Mme [Z] aux dépens,

CONDAMNE Mme [Z] à payer à la société Sanofi Aventis Groupe la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [Z] à payer à la société Manpower France la somme de 800 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 20/03992
Date de la décision : 10/05/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-05-10;20.03992 ?
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