RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 13
ARRÊT DU 21 Avril 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 16/15217 - N° Portalis 35L7-V-B7A-B2FD6
Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 31 Octobre 2016 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de PARIS RG n° 16-02905
APPELANTE
SAS [3] venant aux droits de [4]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
représentée par Me Philippe PACOTTE, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513, substitué par Me Solène BOROCCO, avocat au barreau de PARIS, toque : P0513
INTIMEE
CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DES [Localité 2]
[Adresse 8]
[Adresse 8]
représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901, substituée par Me Amy TABOURE, avocat au barreau de PARIS
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 945-1 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 21 Février 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre
Monsieur Raoul CARBONARO, Président de chambre
Madame Bathilde CHEVALIER, Conseillère
Greffier : Madame Joanna FABBY, lors des débats
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- prononcé
par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
-signé par Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre, et par Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
La cour statue sur l'appel interjeté par la SAS [4] aux droits de laquelle vient la SAS [3] (la société) d'un jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris dans un litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie des [Localité 2] (la caisse).
FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Les faits de la cause ont été exactement exposés dans la décision déféré à laquelle il est fait expressément référence à cet égard.
Il suffit de rappeler que M. [T] [B], salarié de la société en qualité d'agent de propreté a formé le 3 août 2015 une déclaration de maladie professionnelle, pour 'rupture tendon sus épineux épaule droite'.
Etait joint à cette déclaration un certificat médical initial du 22 juin 2015, du docteur [D] faisant mention d'une ' rupture complète tendon supra épineux épaule droite responsable douleurs de l'épaule-limitation fonctionnelle des amplitudes de mouvements'.
La caisse a procédé à l'instruction du dossier, et en a informé la société par lettre datée du 20 août 2015. Elle a fait savoir à la société, par lettre du 8 octobre 2015, que la condition relative à la liste limitative des travaux fixée au tableau des maladies professionnelles n'étant pas remplie, le dossier allait être transmis au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en application de l'article L.461-1 3ème alinéa du code de la sécurité sociale et qu'elle pouvait venir consulter les pièces du dossier jusqu'au 28 octobre 2015.
Par lettre du 4 novembre 2015, la caisse a notifié à la société qu'elle avait recours à un délai complémentaire d'instruction.
Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] a le 13 janvier 2016 retenu un lien direct entre la pathologie déclarée et la profession exercée.
Par lettre datée du 18 janvier 2016, la caisse a notifié à la société la prise en charge de la pathologie déclarée par M. [B] au titre du tableau n°57 des maladies professionnelles.
La société a saisi la commission de recours amiable pour contester la prise en charge, puis par lettre du 2 juin 2016, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Paris, sur la base d'une décision implicite de rejet de son recours. Le 21 juin 2016, la commission de recours amiable a rejeté explicitement le recours.
Par jugement en date du 31 octobre 2016, le tribunal a débouté la société de l'ensemble de ses demandes et dit que la décision de prise en charge de la maladie déclarée par M. [T] [B] au titre du tableau n°57 A restera opposable à la société.
La société à laquelle le jugement a été notifié le 24 novembre 2016, en a interjeté appel le 1er décembre 2016.
Par arrêt en date du 21 février 2020, auquel il est renvoyé pour un plus ample exposé du litige, la cour a :
- confirmé le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de la société en inopposabilité de la décision de prise en charge de la caisse ;
- dit que l'avis rendu le 13 janvier 2016 par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles est irrégulier ;
- avant dire droit sur la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [T] [B] au titre du tableau n° 57 A des maladies professionnelles, enjoint à la caisse de saisir une autre comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles que celui de [Localité 6] aux fins de procéder à l'examen du dossier, à charge pour lui de donner un avis motivé sur la question de savoir si la maladie dont souffre M. [B] a été directement causée par son travail habituel ;
- enjoint aux parties de communiquer les documents médicaux en leur possession en vue de la constitution du dossier prévu à l'article D.461-29 du code de la sécurité sociale ;
- sursis à statuer sur les autres demandes ;
- réservé les frais et dépens.
Par arrêt en date du 26 juin 2020, la cour a désigné le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région [Localité 5].
Le 13 octobre 2020 le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région de [Localité 7] [Localité 5] a rendu un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée.
Par ses conclusions écrites n°3 soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, la société demande à la cour, par voie d'infirmation du jugement déféré, de :
A titre principal,
- déclarer que la maladie de M. [B] ne remplit pas les critères du tableau 57 ;
- déclarer que la maladie de M. [B] n'a pas été directement causée par son travail habituel ;
Ce faisant,
- déclarer inopposable à la société la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle, de la pathologie déclarée par l'assuré en date du 22 juin 2015, avec toutes suites et conséquences de droit ;
A titre subsidiaire,
- constater que la caisse n'a pas respecté son obligation d'information à son égard dans le cadre de la procédure de reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée par M. [B] le 22 juin 2015 ;
- constater que l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] a été rendu en l'absence de l'avis motivé du médecin du travail
Ce faisant,
- déclarer inopposable à son égard la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie déclarée par l'assuré social en date du 22 juin 2015, avec toutes suites et conséquences de droit ;
A titre plus subsidiaire,
- déclarer que la condition relative à la liste limitative des travaux fixée par le tableau 57 A des maladies professionnelles n'est pas remplie ;
- déclarer que la société contestait et conteste la condition relative à la liste limitative des travaux fixée par le tableau 57 A des maladies professionnelles ;
- déclarer que la caisse a transmis le dossier au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] pour avis ;
- déclarer que le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] a considéré qu'il existait un lien direct entre la maladie et le travail habituel de M. [B];
- déclarer que l'avis rendu par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] l'a été en l'absence de l'un de ses membres ;
Ce faisant,
- juger l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] non valide ;
- débouter la caisse de sa demande de désignation d'un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles
A titre encore plus subsidiaire,
- constater que M. [B] a été exposé au risque au sein de plusieurs sociétés au cours de sa carrière ;
- admettre qu'il n'est pas possible de déterminer chez quel employeur, M. [B] a été exposé au risque ayant entraîné la maladie du 22 juin 2015 ;
Ce faisant,
- juger imputable au compte spécial les conséquences financières de l'affection dont a déclaré être atteint M. [B] en date du 22 juin 2015, avec toutes les suites et conséquences de droit ;
- rejeter l'exception d'incompétence formulée par la caisse ;
Y ajoutant,
- condamner la caisse au paiement de la somme de 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par ses conclusions écrites n°2 soutenues oralement et déposées à l'audience par son conseil, la caisse demande à la cour de :
A titre principal,
- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de la société en inopposabilité de la décision de prise en charge par la caisse de la maladie professionnelle pour on respect du contradictoire ;
- désigner un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en l'état de l'irrégularité de celui de [Localité 6] ;
A titre subsidiaire,
- constater que ni la commission de recours amiable, ni la cour n'ont compétence pour se prononcer sur la demande d'inscription au compte spécial des dépenses afférentes à la maladie professionnelle du 22 juin 2015 de M. [B] ;
- déclarer irrecevable la demande d'inscription au compte spécial, de la société des dépenses afférentes à la maladie professionnelle du 22 juin 2015 de M. [B] ;
- débouter la société de ses demandes.
Pour un exposé complet des prétentions et moyens des parties, la cour renvoie à leurs conclusions écrites visées par le greffe à l'audience du 21 février 2023 qu'elles ont respectivement soutenues oralement.
SUR CE :
Il convient de retenir qu'il est constant que la condition tenant à la liste limitative des travaux fixée au tableau n° 57 des maladies professionnelles n'étant pas remplie, le dossier de M. [B] au titre de la maladie 'rupture de la coiffe des rotateurs de l'épaule droite' du 22 juin 2015 a été soumis par la caisse au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région de [Localité 6], en application des dispositions de l'article L.461-1 du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige.
Par avis du 13 janvier 2016, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6] a retenu un lien direct entre la pathologie déclarée et la profession exercée.
Force est de constater que par arrêt en date du 21 février 2020, la cour d'appel a dit que l'avis rendu le 13 janvier 2016 par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles était irrégulier, le comité étant irrégulièrement constitué, et a enjoint à la caisse de saisir un autre comité ; que la cour a désigné sur requête en omission de statuer, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région [Localité 5], par arrêt en date du 26 juin 2020, sur le fondement de l'article R.142-24-2 du code de la sécurité sociale qui disposait que :
' Lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l'origine professionnelle d'une maladie dans les conditions prévues aux troisième et quatrième alinéas de l'article L. 461-1, le tribunal recueille préalablement l'avis d'un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du cinquième alinéa de l'article L. 461-1.
Le tribunal désigne alors le comité d'une des régions les plus proches.'
Il convient de relever que ce faisant la cour a désigné un autre comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles à savoir celui de la région de [Localité 7] [Localité 5], par arrêt du 26 juin 2020.
Le 13 octobre 2020, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 7] [Localité 5] a donné un avis défavorable à la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie déclarée au motif que ' les éléments de l'enquête argumentent dans le sens d'un niveau d'exposition aux hyper sollicitations des membres supérieurs inférieur aux critères du tableau 57 depuis 2012. Aucune contrainte professionnelle supplémentaire ne permet d'expliquer la genèse de la pathologie déclarée. Compte tenu de l'ensemble des informations médico-techniques, obtenues de façon contradictoire, et portées à sa connaissance, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 7] considère que la maladie ' rupture complète tendon supra épineux épaule droite' n'a pas été directement causée par le travail habituel de M. [B] [T]' ( pièce n° 10 des productions de la société et n° 2 des productions de la caisse).
Contrairement à ce que soutient la caisse il ne saurait être retenu que l'on se trouve en présence d'un premier avis au travers de celui rendu par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 7] et que la cour serait tenue de désigner un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles en application des dispositions de l'article R.142-17-2 du code de la sécurité sociale, dès lors que la cour qui a dit que l'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 6], désigné par la caisse, était irrégulier, a saisi un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles par application des dispositions de l'article R.142-24-2 du code de la sécurité sociale, en désignant le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région de [Localité 7] [Localité 5], lequel a émis un avis régulier le 13 octobre 2020, n'est pas tenue de recueillir l'avis d'un autre comité régional ( 2e Civ., 21 juin 2018, pourvoi n° 17-20.623).
L'avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 7] est clair, précis et dénué d'ambiguïté et il convient de l'entériner.
Par suite, à défaut de lien direct entre la maladie déclarée et le travail habituel de M. [T] [B], il y a lieu de déclarer inopposable à la société la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle de la pathologie de M. [B] en date du 22 juin 2015, avec toutes les suites et conséquences de droit.
Succombant en appel, la caisse sera tenue aux dépens.
Aucune circonstance particulière ne commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile au profit de la société.
PAR CES MOTIFS :
LA COUR,
VU l'arrêt en date du 21 février 2020 et l'arrêt en date du 26 juin 2020,
INFIRME le jugement déféré ;
Statuant à nouveau,
DÉCLARE inopposable à la SAS [3] la décision de prise en charge au titre de la législation professionnelle de la pathologie déclarée par M. [B] en date du 22 juin 2015, avec toutes suites et conséquences de droit ;
DÉBOUTE la SAS [3] de sa demande au titre des frais irrépétibles ;
CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie des [Localité 2] aux dépens d'appel.
La greffière La présidente