Copies exécutoires République française
délivrées aux parties le : Au nom du peuple français
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 1 - Chambre 5
ORDONNANCE DU 20 AVRIL 2023
(n° /2023)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/20754 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CG2ZC
Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Septembre 2022 du Tribunal de Commerce de MELUN - RG n° 2022F00128
Nature de la décision : Contradictoire
NOUS, Thomas RONDEAU, Conseiller, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assisté de Cécilie MARTEL, Greffière.
Vu l'assignation en référé délivrée à la requête de :
DEMANDEUR
Madame [Y] [L]
[Adresse 3]
[Adresse 3]
Représentée par Me Justine BESSON substituant Me Thierry JOVE DEJAIFFE de la SELARL JOVE-LANGAGNE-BOISSAVY-AVOCATS, avocat au barreau de MELUN
à
DÉFENDEURS
Monsieur [E] [P]
[Adresse 1]
[Adresse 1]
S.A.S. DEEP CODE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentés par Me Camille HUMEAU substituant Me Sandrine GARDEL de l'AARPI OPLEO AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : G0285
Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 14 Mars 2023 :
Par jugement du 5 septembre 2022, le tribunal de commerce de Melun a :
- ordonnée l'exécution forcée en nature de la promesse de vente n°1 sur les 6.541 actions OVH Groupe pour un prix de cession de 31.249,80 euros ;
- ordonné l'exécution forcée en nature de la promesse de vente n°2 sur les 14.179 actions gratuites pour un prix de cession de 1 euros ;
- dit que la vente des 6.541 actions OVH Groupe et que le transfert de propriété des 6.541 actions OVH Groupe sont réalisés à la date de prononcé du présent jugement ;
- dit que la vente des 14.179 actions gratuites et que le transfert de propriété des 14.179 actions gratuites sont réalisés à la date de prononcé du présent jugement ;
- ordonné à Mme [L] de délivrer au conseil de M. [P] en la personne de Me [R] [U], sous un délai de 8 jours calendaires à compter de la notification du présent jugement, le relevé d'identité bancaire du compte sur lequel devra lui être versé le prix de cession de 31.249,80 euros et les ordres de mouvements et formulaires CERFA dûment signés par
Mme [L], sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
- ordonné à Mme [L] de délivrer au conseil de la société Deep Code et de M. [P], en la personne de Me [R] [U], sous un délai de 8 jours calendaires à compter de la notification du présent jugement, le relevé d'identité bancaire du compte sur lequel devra lui être versé le prix de cession de 31.249,80 euros et les ordres de mouvements et formulaires CERFA dûment signés par Mme [L], sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
- dit que le paiement du prix de cession par M. [P] au profit de Mme [L] interviendra dans un délai maximum de 15 jours calendaires suivant la réception du relevé d'identité bancaire du compte de Mme [L] sur lequel devra être versé le prix de cession ;
- dit que le paiement du prix de cession par la société Deep Code au profit de Mme [L] interviendra dans un délai maximum de 15 jours calendaires suivant la réception du
relevé d'identité bancaire du compte de Mme [L] sur lequel devra être versé le prix de cession ;
- rappelé que l'exécution provisoire est de droit ;
- condamné Mme [L] à payer à M. [P] et à la société Deep Code la somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamné Mme [L] en tous les dépens, dont frais de greffe liquidés à la somme de 89,66 euros TTC ;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
Par déclaration du 29 septembre 2022, Mme [L] a relevé appel de la décision.
Par assignation en référé délivrée les 2 janvier et 3 février 2023, Mme [L] a saisi le premier président aux fins d'arrêt de l'exécution provisoire et demande, au visa de l'article 514-3 du code de procédure civile et de l'article 157 5°bis du code général des impôts, de :
- dire que l'exécution provisoire est arrêtée jusqu'à la date à laquelle il sera statué sur l'appel qu'elle a interjeté ;
- constaté que l'exécution provisoire du jugement emportent des conséquences manifestement excessives pour la débitrice ;
en conséquence,
- ordonné la suspension de l'exécution provisoire dont est assorti le jugement rendu ;
à titre subsidiaire,
- dire et juger que les titres seront l'objet d'une mention d'indisponibilité en marge des registres des titres de la société OVH Groupe ;
- condamner M. [P] et la société Deep Code au paiement d'une somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- statuer ce que de droit quant aux dépens.
Elle fait valoir que la traduction de pièces par le seul conseil des intimés n'est pas de nature à assurer la juridiction saisie de leur régularité et du sens et de l'esprit des contrats, que la rupture du lien contractuel principal a nécessairement porté atteinte à la validité des mandats délivrés, que les conséquences manifestement excessives sont établies tant sur le plan fiscal qu'au regard des astreintes figurant dans la décision.
Dans ses conclusions déposées à l'audience du 23 février 2023, M. [P] et la société Deep Code demandent, au visa des articles 16, 23, 514-3 et 956 du code de procédure civile, des articles 1186, 1984 et 2049 du code civil, de l'article 5.5 du règlement intérieur national relatif à la profession d'avocat, de l'article L. 221-32 du code monétaire et financier, de l'article 150-0 A II 2° du code général des impôts, de :
- constater l'absence de démonstration par Mme [L] de moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement, ainsi que de conséquences manifestement excessives postérieures au jugement rendu par le tribunal de commerce de Melun ;
- déclarer Mme [L] irrecevable dans toutes ses demandes, fins et prétentions au regard de la présente procédure de suspension de l'exécution provisoire ;
- rejeter la demande de Mme [L] relative au blocage des titres litigieux ;
à titre subsidiaire,
- constater l'absence de démonstration par Mme [L] de moyens sérieux d'annulation ou de réformation du jugement, ainsi que de conséquences manifestement excessives liées à l'exécution du jugement rendu par le tribunal de commerce de Melun ;
- constater l'absence de démonstration par Mme [L] du caractère urgent dans le cadre de sa demande de blocage des titres jusqu'au terme de la procédure d'appel ;
en conséquence,
- débouter Mme [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
en tout état de cause,
- condamner Mme [L] à payer à M. [P] et à la société Deep Code la somme de 5.000 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner Mme [L] aux entiers dépens.
Ils font valoir que la demanderesse n'a fait valoir aucune observation sur l'exécution provisoire en première instance, que les traductions libres sont parfaitement recevables, que le pouvoir donnée par Mme [L] à M. [J] était parfaitement valide, le protocole transactionnel en matière sociale étant sans incidence, que la cession des actions n'aura aucune conséquence sur son plan d'épargne en actions, que les conséquences financières pour la demanderesse ne sont établies, que l'urgence au sens de l'article 956 n'est pas établie.
L'affaire, initialement fixée à l'audience du 23 février 2023, a été renvoyée à l'audience du 14 mars 2023.
A l'audience du 14 mars 2023, les conseils des parties ont été entendus en leurs observations au soutien de leurs écritures.
SUR CE,
Il résulte de l'article 514-3 du code de procédure civile qu'en cas d'appel, le premier président peut être saisi afin d'arrêter l'exécution provisoire de la décision lorsqu'il existe un moyen sérieux d'annulation ou de réformation et que l'exécution risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives.
La demande de la partie qui a comparu en première instance sans faire valoir d'observations sur l'exécution provisoire n'est recevable que si, outre l'existence d'un moyen sérieux d'annulation ou de réformation, l'exécution provisoire risque d'entraîner des conséquences manifestement excessives qui se sont révélées postérieurement à la décision de première instance.
Un moyen sérieux d'annulation ou de réformation est un moyen qui, compte tenu de son caractère très pertinent, sera nécessairement pris en compte par la juridiction d'appel, avec des chances suffisamment raisonnables de succès.
Les conséquences manifestement excessives s'apprécient en ce qui concerne les condamnations pécuniaires par rapport aux facultés de paiement du débiteur et aux facultés de remboursement de la partie adverse en cas d'infirmation de la décision assortie de l'exécution provisoire.
Le risque de conséquences manifestement excessives suppose un préjudice irréparable et une situation irréversible en cas d'infirmation.
En l'espèce, agissant de la recevabilité de la demande en arrêt de l'exécution provisoire, il faut relever :
- que les parties défenderesses produisent les conclusions de Mme [L] devant le premier juge (pièce 23) ;
- que lesdites écritures ne comportent aucune observation sur l'exécution provisoire ;
- que Mme [L] doit donc démontrer, pour être recevable, que les conséquences manifestement excessives sont apparues postérieurement à la décision de première instance ;
- que, cependant, Mme [L] se limite sur ce point à faire état en substance des conséquences fiscales de la poursuite de l'exécution provisoire et de l'importance des astreintes prononcées contre elle ;
- qu'aucun de ces éléments n'apparaît s'être manifesté postérieurement à la décision dont appel, s'agissant simplement des conséquences des demandes formées devant le premier juge ;
- que, par ailleurs, Mme [L] ne justifie en rien que sa situation financière aurait été modifiée depuis la décision de première instance.
Sans examen des autres moyens, la demande en arrêt de l'exécution provisoire sera déclarée irrecevable.
Concernant la demande de voir porter une mention d'indisponibilité en marge des registres des titres, les défendeurs au présent litige observent valablement que cette demande, à la supposer fondée sur les dispositions de l'article 956 du code de procédure civile, est subordonnée à la démonstration d'une urgence, outre l'absence de contestation sérieuse ou la justification par l'existence d'un différend.
La demanderesse n'apporte pourtant aucun élément sur l'urgence à voir porter la mention d'indisponibilité réclamée, ce d'autant que les autres conditions de l'article 956 du code de procédure civile ne sont pas remplies, eu égard à l'important litige entre les parties et aux contestations sérieuses qui s'opposent à une telle mesure, mesure qui reviendrait purement et simplement à arrêter de fait l'exécution provisoire, le différend ne justifiant pas non plus une telle mesure dans l'attente de l'arrêt d'appel.
La demande sera rejetée.
Mme [L] devra indemniser M. [P] et la société Deep Code pour les frais non répétibles exposés et sera condamnée aux dépens.
PAR CES MOTIFS
Déclarons Mme [Y] [L] irrecevable en sa demande d'arrêt de l'exécution provisoire ;
Rejetons la demande de Mme [Y] [L] tendant à dire et juger que les titres seront l'objet d'une mention d'indisponibilité en marge des registres des titres de la société OVH Groupe ;
Condamnons Mme [Y] [L] à verser à M. [E] [P] et à la société Deep Code la somme de 1.500 euros chacun au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamnons Mme [Y] [L] aux dépens ;
ORDONNANCE rendue par M. Thomas RONDEAU, Conseiller, assisté de Mme Cécilie MARTEL, greffière présente lors de la mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
La Greffière, Le Conseiller