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20/04/2023 | FRANCE | N°22/16353

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 10, 20 avril 2023, 22/16353


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 10



ARRÊT DU 20 AVRIL 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16353 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGNOM



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Septembre 2022 - Juge de la mise en état de Créteil RG n° 22/01361







APPELANTS



Monsieur [W], [R] [V]

né le 19 Août 1964 à [Localité 8]

[Adr

esse 1]

[Localité 5]





ET





Madame [K] [V]

née le 03 Mars 1967 à [Localité 8]

[Adresse 4]

[Localité 8]



Représentés par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistés à l'...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 10

ARRÊT DU 20 AVRIL 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16353 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGNOM

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Septembre 2022 - Juge de la mise en état de Créteil RG n° 22/01361

APPELANTS

Monsieur [W], [R] [V]

né le 19 Août 1964 à [Localité 8]

[Adresse 1]

[Localité 5]

ET

Madame [K] [V]

née le 03 Mars 1967 à [Localité 8]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentés par Me Edmond FROMANTIN, avocat au barreau de PARIS, toque : J151

Assistés à l'audience par Me Paul AKAR de la SCP d'Avocat Paul AKAR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0033

INTIMÉ

Monsieur [H] [T]

né le 24 Février 1945 à [Localité 9]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Maryline LUGOSI de la SELARL Selarl MOREAU GERVAIS GUILLOU VERNADE SIMON LUGOSI, avocat au barreau de PARIS, toque : P0073

Assisté à l'audience de Me Béatrice FAVAREL de la SELARL FAVAREL & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été plaidée le 07 Mars 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Florence PAPIN, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

M. Laurent NAJEM, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Laurent NAJEM dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Florence PAPIN, Présidente et par Catherine SILVAN, greffier, présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [W] [V] et Mme [K] [V] (« les consorts [V] »), ayants droit de M. [G] [V], décédé à [Localité 8] le 12 février 2018, soutiennent qu'il existait un contrat de dépôt de deux véhicules automobiles Porsche et Aston Martin, immatriculés [Immatriculation 7] et [Immatriculation 3] conclu entre leur père, M. [G] [V] et M. [H] [T].

Par acte d'huissier de justice en date du 3 mai 2021, les consorts [V] ont fait assigner ce dernier devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Créteil afin d'obtenir la remise matérielle des deux véhicules automobiles au motif que ces biens entreraient dans la succession du défunt.

Selon ordonnance de référé rendue le 2 novembre 2021, le juge des référés a débouté les consorts [V] de l'ensemble de leurs demandes, au vu de contestations sérieuses, et les a condamnés à payer la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

C'est dans ce contexte que les consorts [V] ont fait assigner M. [T] devant le tribunal judiciaire de Créteil, au fond, par acte d'huissier de justice du 17 février 2022, aux fins d'obtenir la restitution des véhicules, au visa des dispositions de l'article 1939 du code civil.

M. [T] a saisi le juge de la mise en état d'une fin de non-recevoir tirée d'une prescription.

Par ordonnance du 13 septembre 2022, le juge de la mise en état a :

- Déclaré prescrite l'action formée par les consorts [V] à l'encontre de M. [H] [T],

- Déclaré en conséquence irrecevables les demandes des consorts [V] dirigées contre M. [H] [T],

- Condamné in solidum les consorts [V] à payer M. [H] [T] la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamné in solidum les consorts [V] aux dépens.

Par déclaration du 20 septembre 2022, les consorts [V] ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 07 décembre 2022, les consorts [V] demandent à la cour de :

- Infirmer l'ordonnance du juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Créteil en date du 13 septembre 2022 en toutes ses dispositions,

Statuant à nouveau,

- Déclarer M. [T] mal fondé en sa fin de non-recevoir et l'en débouter,

- Renvoyer le dossier pour qu'il soit examiné au fond devant la même 3ème chambre du tribunal judiciaire de Créteil,

- Condamner M. [H] [T] à payer aux consorts [V] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Le condamner enfin aux entiers dépens.

Ils font valoir que le juge de la mise en état se trompe sur la nature de la lettre de mandat et que la date du 27 avril 2009 ne peut pas servir de point de départ à la prescription dès lors qu'aucun terme n'a été fixé au dépôt des deux véhicules. Ils considèrent qu'ils n'ont pu agir qu'à partir du moment où ils ont eu connaissance de ce dépôt, donc pas avant 2018 et que M. [T] ne pourrait opposer une prescription que si le défunt avait lui-même sollicité une restitution plus de cinq ans avant qu'ils ne lui notifient leur assignation, ce qui n'est pas le cas.

Ils soulignent qu'ils n'ont découvert l'existence de la lettre de la société URBAINE DE PROTECTION ET DE CONTRÔLE qu'après le décès de leur père, en triant des papiers, ce qui constitue le point de départ du délai, interrompu par l'assignation en référé.

Ils allèguent que M. [T] a implicitement mais nécessairement rouvert un délai de prescription, lorsqu'il a indiqué que la remise des deux véhicules était la contrepartie d'une rémunération, puisqu'il a rendu compte et expliqué ce qu'il avait fait. Ils lui dénient toute bonne foi.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par voie électronique le 05 janvier 2023, M. [H] [T] demande à la cour de :

Vu les dispositions de l'article 789 du code de procédure civile,

Vu les dispositions de l'article 2224, et 2276 du code civil,

Vu les articles 132 et suivants, 287 et suivants, 299, et 788 du code de procédure civile,

Vu les pièces versées au débat et notamment la pièce adverse n°4,

Vu la jurisprudence.

A titre principal :

- Confirmer l'ordonnance du juge de la mise en état dont appel dans toutes ses dispositions,

- Débouter les consorts [V] de leurs demandes, fins et conclusions,

Y ajoutant,

- Condamner solidairement les consorts [V] au paiement d'une indemnité de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts,

- Condamner solidairement les consorts [V] au paiement d'une indemnité de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire la Cour devait déclarer recevable l'action introduite par les consorts [V] :

- Renvoyer le dossier devant le juge de la mise en état de la troisième chambre civile du tribunal judiciaire de Créteil pour qu'il soit statué sur la demande de production de l'original de la pièce n°4 adverse et l'incident de faux.

Il soutient que la déclaration du 27 avril 2009 aux termes duquel M. [G] [V] énonce que l'intimé refuse de restituer le véhicule, constitue le point de départ du délai de l'action car il caractérise le jour où le titulaire du droit s'est vu opposer un tel refus et a connu les faits lui permettant d'agir au sens de l'article 2224 du code civil. Il se prévaut d'une jurisprudence de la Cour de cassation qui retient comme point de départ le jour de la découverte effective de son préjudice par le titulaire du droit.

Il considère que le délai de prescription n'a pas été interrompu d'une quelconque manière.

A titre subsidiaire, il rappelle qu'il n'a jamais « possédé pour autrui », mais pour lui seul et à titre de propriétaire et qu'aucun contrat de dépôt n'a jamais existé et il souligne que les cartes grises sont insuffisantes pour démontrer un droit de propriété.

Il estime rapporter la preuve d'une possession paisible, ininterrompue et de bonne foi.

Il considère que cette procédure d'appel est abusive et source d'anxiété.

La clôture est intervenue par ordonnance du 1er février 2023.

MOTIFS DE L'ARRÊT

Sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription

Aux termes de l'article 122 du code de procédure civile :

« Constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l'adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d'agir, tel le défaut de qualité, le défaut d'intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. »

L'article 2224 du code civil dispose que les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.

L'action en restitution fondée sur un contrat de dépôt constitue une action mobilière distincte de l'action en revendication. Elle est soumise à la prescription civile de droit commun relative aux actions personnelles ou mobilières.

Les consorts [V] fondent leur action en restitution des deux véhicules sur l'existence d'un contrat « apparemment verbal » de dépôt.

Ils contestent le fait que l'acte du 27 avril 2009 (leur pièce 4) puisse servir de point de départ à la prescription, en l'absence de terme fixé et ils considèrent qu'ils n'ont pu agir qu'au moment où ils ont eu connaissance dudit dépôt.

Aux termes de cet acte unilatéral intitulé « POUVOIR », [G] [V] a exposé donner :

« tous pouvoirs à :

La S.A.R.L. URBAINE DE PROTECTION ET DE CONTROLE (')

A l'effet de récupérer les deux véhicules suivants :

- ASTON MARTIN immatriculée [Immatriculation 3]

- PORSCHE 959 X immatriculée [Immatriculation 7]

m'appartenant et que j'ai confiés, à titre gratuit, depuis plus de 10 ans à :

Monsieur [H] [T] (') et que ce dernier refuse de me restituer ».

Il s'en évince qu'au plus tard à la date de cet acte, [G] [V] avait une parfaite connaissance de ce que M. [T] refusait de lui restituer les véhicules dont ce dernier expose aussi être propriétaire, soit les faits au soutien de la présente instance.

Or, ni [G] [V] ni son mandataire n'ont introduit une action dans le délai de cinq ans courant depuis cette date.

Le premier juge a relevé à juste titre que la photocopie de carte grise au nom du défunt ne vaut pas titre de propriété s'agissant d'un simple titre de police et que les consorts [V] ne sont pas fondés à se prévaloir du caractère imprescriptible de la propriété, dès lors que conformément aux dispositions de l'article 2276 du code civil, la possession vaut titre. L'action en restitution qui fonde leur action, distincte de celle en revendication, est soumise à la prescription de droit commun de l'article 2224 du code civil.

Enfin, le point de départ d'un délai de prescription ne saurait dépendre des diligences ' ou le cas échéant de l'inertie - des héritiers dans l'inventaire des biens et des documents de leur auteur.

Les consorts [V] ne bénéficient en effet nullement d'un délai de prescription autonome de celui de leur père à raison de cet inventaire.

La prescription était par conséquent acquise lorsque la procédure de référé a été diligentée par les consorts [V] par acte d'huissier en date du 3 mai 2021, et a fortiori l'action de fond introduite par acte du 17 février 2022.

Par conséquent, c'est à bon droit que le premier juge a déclaré l'action des consorts [V] irrecevable comme prescrite.

Sur les dommages et intérêts pour procédure d'appel abusive

M. [T] considère que les consorts [V] sont de mauvaise foi et il soutient que l'acharnement procédural des appelants n'a fait qu'aggraver le préjudice d'anxiété lié au décès de son épouse, pendant le cours de la présente instance.

Cependant, la mauvaise appréciation qu'une partie a de ses droits n'est pas en elle-même constitutive d'un abus, même à hauteur d'appel. La mauvaise foi alléguée des consorts [V] n'est nullement établie.

M. [T] sera débouté de sa demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer les dispositions de l'ordonnance relatives aux frais répétibles et irrépétibles.

A hauteur d'appel, les consorts [V] seront in solidum condamnés aux dépens ainsi qu'à payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance de mise en état déférée ;

Y ajoutant,

Déboute M. [T] de sa demande de dommages et intérêts ;

Condamne in solidum M. [W] [V] et Mme [K] [V] à payer à M. [H] [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. [W] [V] et Mme [K] [V] aux dépens d'appel ;

Déboute les parties du surplus de leurs demandes ;

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 22/16353
Date de la décision : 20/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-20;22.16353 ?
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