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19/04/2023 | FRANCE | N°20/03434

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 19 avril 2023, 20/03434


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 19 AVRIL 2023



(n° 2023/ , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03434 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB4CL



Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Février 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F/1702809





APPELANTE



S.A.S. ICTS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]



R

eprésentée par Me Marine LATARCHE, avocat au barreau de PARIS





INTIME



Monsieur [C] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]



Représenté par Me Roland ZERAH, avocat au barreau de PARIS, toque : D0164


...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 19 AVRIL 2023

(n° 2023/ , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03434 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB4CL

Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Février 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° F/1702809

APPELANTE

S.A.S. ICTS FRANCE

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Marine LATARCHE, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [C] [L]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Roland ZERAH, avocat au barreau de PARIS, toque : D0164

INTERVENANTE

Organisme POLE EMPLOI

[Adresse 7]

[Localité 5]

Représenté par Me Véronique DAGONET, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 3

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 06 mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Nadège BOSSARD, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [C] [L] a été engagé par la société ICTS France selon contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel à raison de 86 heures par mois à compter du 7 avril 1995 en qualité d'agent de sécurité.

Le 1er juin 2006, M. [L] a été promu au poste de superviseur au sein de l'aéroport [6], statut cadre, coefficient 300 avec une rémunération de 2 769,23 euros bruts.

Par avenant en date du 22 octobre 2007, M. [L] a été nommé responsable de site adjoint, coefficient 300, avec effet rétroactif à compter du 1er janvier 2007. Son salaire a été porté à 2 931,53 euros bruts.

Selon nouvel avenant en date du 3 mars 2008, M. [L] a été promu responsable de site à effet du 15 février 2008.

Par avenant en date du 20 novembre 2015, la rémunération de M. [L] a été porté à 3 625 euros par intégration de la treizième mensualité qu'il percevait au titre de la prime PASA lorsqu'il était affecté à une mission de sûreté aéroportuaire.

La convention collective applicable était celle des entreprises de prévention et de sécurité

Le 25 août 2016, M. [L] a été convoqué à un entretien préalable concernant une sanction disciplinaire. Il a été sanctionné le 30 septembre 2016 par une mise à pied disciplinaire de 3 jours, les 11, 12 et 13 octobre 2016.

Le 3 février 2017, M. [L] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement et mis à pied à titre conservatoire.

Le même jour, M. [L] a été placé en arrêt de travail pour maladie.

Par courrier du 17 février 2017, la société ICTS France a reporté l'entretien au 28 février 2017.

Le 6 mars 2017, la société ICTS lui a notifié son licenciement pour faute grave.

Le 13 septembre 2017, M. [L] a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny afin de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Par jugement en date du 27 février 2020, le conseil de prud'hommes de Bobigny a :

- dit que le licenciement de M. [L] était dénué de cause réelle et sérieuse,

- condamné la société ICTS à lui verser les sommes suivantes :

- 10.983,75 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.098,37 € à titre de congés payés sur le préavis,

- 23.798,12 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 37.000,00 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse,

- 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté M. [L] du surplus de ses demandes,

- débouté la société ICTS de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société ICTS France aux dépens.

Le 11 juin 2020, la société ICTS a interjeté appel.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 25 février 2021, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des prétentions et moyens, la société ICTS France demande à la cour de :

- Déclarer la société ICTS France bien fondée en son appel ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :

dit que le licenciement de M. [C] [L] est dénué de cause réelle et sérieuse,

condamné la société ICTS France à verser à M. [C] [L] les sommes suivantes:

' 10.983,75 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

' 1.098,37 euros à titre de congés payés sur le préavis,

' 23.798,12 euros au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

' 37.000 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' 1.500 euros d'indemnité au titre de l'article 700 du Code de Procédure Civile,

condamné la société ICTS France aux entiers dépens.

- Confirmer le jugement en ce qu'il a débouté M. [L] de sa demande indemnitaire au titre du prétendu préjudice moral, de sa demande de rappel de salaire sur mise à pied du 30 septembre 2016 et de congés payés afférents ainsi que de sa demande de prime de fin d'année 2016.

- Et statuant à nouveau :

Débouter M. [L] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

Condamner M. [L] au paiement d'une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

Constater que Pôle Emploi n'apporte pas les éléments justifiant du versement d'allocations chômage et des périodes de versement de ces allocations à M. [L].

A titre principal,

Débouter Pôle Emploi de ses demandes

A titre subsidiaire,

Rapporter la somme due au titre du remboursement des allocations chômage à une plus juste valeur.

Selon ses dernières conclusions, remises au greffe notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 26 novembre 2020, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé du litige, M. [L] demande de :

Confirmer le jugement entreprise en ce qu'il a dit son licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse et lui a alloué les sommes de :

- 10.983,75 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 1.098,37 € à titre de congés payés sur le préavis,

- 23.798,12 € au titre de l'indemnité conventionnelle de licenciement,

- 1.500,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

L'infirmer pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Condamner la société ICTS à verser à M. [L] les sommes suivantes :

4.027,37 € à titre de rappel de salaire pour mise à pied du 30 septembre 2016,

402,73 € à titre de congés payés afférents,

80.000 € à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

20.000 € à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral,

3.500 € à titre de prime de fin d'année 2016,

3.000 € au titre de l'article 700 du CPC dans le cadre de la présente procédure d'appel.

Par conclusions remises au greffe, notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 8 mars 2021, auxquelles la cour se réfère expressément, Pôle emploi demande de;

- Dire et juger Pôle Emploi recevable et bien fondée en sa demande,

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il qualifie le licenciement de dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

- Condamner la société à lui verser la somme de 12.681,76 euros en remboursement des allocations chômage versées au salarié.

- Condamner la société à lui verser la somme de 500,00 euros au titre de l'article 700 du N.C.P.C.

L'ordonnance de clôture a été prononcée le 10 janvier 2023.

MOTIFS :

Sur le licenciement :

La lettre de licenciement reproche à M. [L] des manquements fautifs en terme de gestion opérationnelle, financière et de la relation client.

Afin de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse, M. [L] conteste les griefs qui sont formulés à son encontre et soutient que s'ils étaient démontrés, ils ne caractériseraient qu'une insuffisance professionnelle et non une faute grave.

Sur le 1er grief relatif à la gestion opérationnelle :

a - Concernant le suivi des audits interne et APM menés en janvier 2016 par les départements qualité ICTS France et ICTS Europe :

Il est reproché à M. [L] dans la lettre de licenciement :

« Concernant le suivi des audits interne et APM menés en janvier 2016 par les départements qualité ICTS France et ICTS Europe, un point vous incombant, reste non clôturé : « Evaluation

des chefs d'équipe par le REX ». Ainsi, malgré la connaissance de cette action à mener via la communication des plans d'action, les rappels en réunions et la sanction du mois de septembre 2016, aucune évaluation des chefs d'équipe n'a été faite.

Compte tenu du nombre de nos échanges à ce propos, il est inconcevable que ces évaluations n'aient pas eu lieu. »

L'employeur établit par la production du suivi du plan d'action mis en oeuvre à la suite de l'audit de janvier 2016 que le 13 octobre 2016 et après la notification d'une mise à pied disciplinaire à M. [L] le 30 septembre 216 que ce dernier n'avait pas réalisé l'intégralité des actions correctives identifiées à sa charge et notamment deux d'entre elles à savoir l'évaluation des chefs d'équipe aux fins de certification et la réalisation de 'role plays' par les agents APM.

C'est vainement que le salarié répond que cette mission ne lui incombait pas au motif qu'il était responsable de site et non responsable d'exploitation dans la mesure où le responsable de site et le responsable d'exploitation avaient les mêmes fonctions comme cela résulte de leurs fiches de poste et que l'intitulé 'responsable de site' est l'ancienne dénomination de responsable d'exploitation.

Quant aux évaluations renseignées de manière manuscrite, qu'il verse aux débats, elles ne mentionnent pas de date précise mais uniquement un mois et une année, décembre 2016 et janvier 2017, sans qu'il soit démontré que ces documents répondaient aux attentes de l'audit et aient été transmis à sa hiérarchie.

Le grief est donc caractérisé.

b. Sur l'absence de management de ses équipes :

' L'absence de réunions mensuelles :

Il est reproché à M. [L] dans la lettre de licenciement :

« Egalement, nous avions regretté lors de l'entretien du mois de septembre 2016, l'absence de management de vos équipes notamment via l'absence de réunions mensuelles avec vos chefs d'équipe, pourtant expressément demandées dès janvier 2016. Vous persistez à ne pas appliquer, sciemment, les consignes qui vous sont données.

Nous constatons une nouvelle fois que vous vous désengagez de votre rôle de manager, fuyant les responsabilités et les prises de décisions. »

La société établit qu'au cours d'une réunion du 1er février 2016 instruction avait été donné aux responsables de site d'organiser deux réunions par mois pour les chefs d'équipe et coordinateurs.

Malgré une première sanction en septembre 2016, M. [L] n'a pas par la suite organisé les réunions qu'il était tenu de mettre en place deux fois par mois.

Les comptes rendus de réunion que le salarié verse aux débats concernent des réunions auxquelles il a assisté et non des réunions de chefs d'équipe qu'il aurait organisées.

Le grief est donc établi.

' La non-utilisation des CPM (tablette permettant de scanner le passeport) par les chefs d'équipe relevant de M. [L] :

La lettre de licenciement indique concernant l'absence de management des équipes :

« Pour illustrer ces propos, lors de mon passage sur les opérations du 2E avec [V] [D] [K], Directeur Général, le 2 janvier dernier, nous avons pu constater que les 4 chefs d'équipe présents n'utilisaient pas leur CPM pour screener, ce qui par conséquent induit une absence de swipe des documents passagers (scan des passeports).

Pourtant, il s'agit d'une directive de la Direction Générale car cela relève d'un engagement que nous avons pris vis-à-vis de notre client DELTA.

Vous n'avez pris aucune mesure pour remédier à cette situation malgré mes multiples relances à ce sujet. »

Le courriel adressé le 10 janvier 2017 par M. [Y], directeur des marchés aviation, à M. [L] établit que les chefs d'équipe sous la responsabilité de ce dernier n'appliquaient pas la procédure relative aux CPM c'est-à-dire ne les utilisaient pas.

Ce grief est caractérisé.

' L'absence injustifiée d'un collaborateur, M. [E] :

Il est reproché à M. [L] de ne pas avoir pris de mesure concernant un salarié, M. [E], coordinateur, qui était en absence injustifiée depuis le 20 décembre 2016.

La fiche de poste de M. [L], annexé à l'avenant à son contrat de travail du 3 mars 2008 mentionne qu'il doit assurer le suivi disciplinaire sans autre précision. L'employeur ne produit pas de pièce établissant la réalité du grief, les deux attestations produites ne mentionnant pas ce grief et les échanges de courriels n'y faisant pas plus référence.

Ce grief n'est pas établi.

c. Sur le mauvais suivi des plans de prévention de l'aviation et l'absence de diffusion

des notes de service :

' concernant le suivi des plans de prévention de l'aviation :

Il est reproché à M. [L] de ne pas avoir assuré le suivi des plans de prévention aviation.

Le procès-verbal du CHSCT en date du 22 décembre 2016 mentionne que les plans de prévention des sociétés utilisatrices transmis ne sont pas actualisés. Parmi ces plans, figurent ceux que M. [L] avait mission de transmettre, actualisés, à sa hiérarchie. C'est vainement qu'il invoque une question de compétence pour finaliser ou signer ces documents. Ce n'est pas ce qui lui est reproché. Le grief concerne l'absence de transmission de plans établis par les compagnies aériennes clientes de ICTS, actualisées par celles-ci que M. [L] devait uniquement sollicités. Ce grief est caractérisé.

' concernant l'absence de diffusion des notes de service :

Il résulte des échanges de courriels versés aux débats que les supérieurs hiérarchiques de M. [L] ont constaté le 3 mars 2017 que les notes de services n'étaient pas affichées au sein du terminal 2E sous la responsabilité de M. [L]. Ce grief est caractérisé.

d. Sur l'absence de distribution de boissons chaudes le 13 janvier 2017, :

Concernant l'absence de distribution de boissons chaudes le 13 janvier 2017, ce grief n'est pas suffisamment établi par le courriel produit, rédigé en termes généraux le 28 novembre 2016 relatif à la consigne et non à son non respect.

e. Sur le laxisme généralisé de M. [L] et le désordre dans son bureau :

Les clichés photographiques versés aux débats établissent que le bureau occupé par M. [L] était désordonné avec des piles de papier non rigoureusement rangées et des cartons empilés de manière déséquilibrée.

Le salarié fait observer qu'il ne s'agissait pas de son bureau personnel mais de celui du Rex en arrêt de maladie et qu'il avait été transformé en local de fournitures et matériel. Au regard des procès-verbaux de réunions, il apparaît qu'il servait également de lieux de réunions.

Ce grief est donc caractérisé.

2ème grief : Sur la gestion financière du site du 2 E Aviation :

a. L'absence de saisie des prêts de main d''uvre et les erreurs de saisie, générant un impact financier négatif pour la société :

Il est reproché à M. [L] de nombreuses erreurs de saisie concernant les éléments de paie du personnel placé sous sa responsabilité :

- des erreurs dans les déclarations des heures de délégation prises par des représentants du personnel,

- une absence de saisie des heures passées en réunion,

- l'absence de prise en compte des bons de délégation par M. [L].

Il est établi par les échanges de courriels versées aux débats que plus de dix erreurs ont été effectuées par M. [L] dans la déclaration des heures travaillés ou de délégation des salariés sous sa responsabilité lesquels ont dû être signalées au service des ressources humaines.

Le grief est établi.

b. L'absence de transmissions aux régulateurs de la liste des faisant fonction « lead avion» :

La lettre de licenciement reproche à M. [L] les faits suivants :

« De la même façon, dans notre courrier de sanction du 30 septembre 2016, nous vous reprochions l'absence de transmission aux régulateurs de la liste des faisant fonction « lead avion ». Cette liste était nécessaire à l'affectation sur les vols en priorité, en cas de manquants « lead avion », des agents identifiés comme pouvant remplir ces fonctions.

Pour rappel, le « lead avion » a pour mission de garantir la bonne application des procédures de sûreté des agents affectés sur la vérification des vols. Il est donc nécessaire que les personnes dévolues à ces missions aient reçu notre approbation.

Pourtant, depuis que cela vous a été rappelé par courrier du 30 septembre 2016, aucune liste n'a été transmise à la régulation. Les régulateurs positionnent encore sur des vols, des agents comme faisant fonction de « lead avion » sans qu'ils soient des salariés désignés par la Direction de site comme étant aptes à occuper ce poste. Cette situation met potentiellement à mal notre entreprise puisque si un incident intervenait au cours d'une prestation, quelle position pourrions-nous avoir vis-à-vis de notre client ' »

Il n'est pas établi par l'attestation de M. [Y] versé aux débats que ce grief, déjà sanctionné par la mise à pied disciplinaire du 30 septembre 2016, ait persisté. Il n'est donc pas caractérisé.

c. Le non paiement de primes des agents faisant fonction de 'lead avion' :

Ce grief n'est pas caractérisé par l'échange de courriel produit par l'employeur à son soutien, les courriels n'imputant pas de manquement à M. [L].

d. Les erreurs sur les données transmises par M. [L] à ICTS Europe :

Il est fait grief à M. [L] d'avoir adressé au siège du groupe des données provenant de son propre suivi et non celles renseignées dans les outils de gestion. Ce grief est établi par l'échange de courriels entre M. [L] et M. [Y] du 27 janvier 2017.

3ème grief : Sur les griefs relatifs à la gestion de la relation client :

a. Les erreurs de facturation de M. [L] :

La lettre de licenciement fait grief à M. [L] d'avoir multiplié les erreurs de facturation concernant différents clients, et notamment les clients Korean AIR et JAL, lesquels se sont plaints en décembre 2016 d'erreurs sur la facturation.

M. [L] soutient qu'il ne peut introduire dans la facturation que les documents qui lui sont remis par les responsables de vols, coordinateurs et chefs d'équipe.

Les deux courriels émanant des sociétés clientes versés aux débats et les réponses apportées par la société ne permettent pas d'imputer celle-ci à faute à M. [L].

b. L'absence de remise des cadeaux aux clients :

Il est reproché à M. [L] de ne pas avoir procédé à la remise de cadeaux destinés aux clients de ICTS France (cadeaux destinés à Flybe, Tahiti Nui, Vietnam Airlines, Rossiya Airlines') et d'avoir laissé ces cadeaux dans son bureau. Ce grief n'est toutefois pas démontré par les pièces produites.

Il résulte de l'ensemble de ces éléments que M. [L] n'a pas procédé à l'évaluation des chefs d'équipe aux fins de certification ni à la réalisation de 'role plays' par les agents APM, n'a pas organisé les réunions de chefs d'équipe deux fois par mois, n'a pas veillé à ce que les chefs d'équipe sous la responsabilité de ce dernier appliquent la procédure relative aux CPM, n'a pas transmis de plans de prévention actualisés par les compagnies aériennes clientes de ICTS, n'a pas affiché les notes de service, n'a pas rangé son bureau de manière soignée, adressé au siège du groupe des données provenant de son propre suivi et non celles renseignées dans les outils de gestion.

Il a transmis des déclaration d'heures travaillés ou de délégation des salariés erronées concernant des salariés sous sa responsabilité.

Ces faits caractérisent un manque d'implication dans ses fonctions de la part de M. [L] lequel, en l'absence de preuve d'une exécution volontairement défectueuse du travail relève de l'insuffisance professionnelle et non de la faute grave.

Le licenciement notifié pour faute grave est dès lors dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur l'indemnité compensatrice de préavis :

En vertu de l'article L1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n'est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit :

1° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus inférieure à six mois, à un préavis dont la durée est déterminée par la loi, la convention ou l'accord collectif de travail ou, à défaut, par les usages pratiqués dans la localité et la profession ;

2° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus comprise entre six mois et moins de deux ans, à un préavis d'un mois ;

3° S'il justifie chez le même employeur d'une ancienneté de services continus d'au moins deux ans, à un préavis de deux mois.

Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l'accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d'ancienneté de services plus favorable pour le salarié.

La société ICTS ne conteste que le principe de l'indemnité compensatrice de préavis considérant que le licenciement est justifié par une faute grave mais ne conteste pas le montant alloué par le conseil de prud'hommes.

Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société ICTS à payer à M. [L] la somme de 10 983,75 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et celle de 1 098,37 euros de congés payés y afférents.

Sur l'indemnité de licenciement :

La société ICTS ne conteste que le principe de l'indemnité de licenciement considérant que le licenciement est justifié par une faute grave mais ne conteste pas le montant alloué par le conseil de prud'hommes.

Le licenciement étant sans cause réelle et sérieuse, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a condamné la société ICTS à payer à M. [L] la somme de 23 798,12 euros à ce titre.

Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse :

En vertu de l'article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant est compris entre les montants minimaux et maximaux compris entre 3 et 16,5 mois de salaire.

M. [L] demande à la cour de lui allouer une indemnité représentant 22 mois de salaire considérant que les dispositions de l'article L1235-3 ne sont pas conformes aux articles 24 de la Charte sociale européenne.

 es dispositions de l'article 24 de la Charte sociale européenne n'étant toutefois pas d'effet direct dans les relations entre personnes privées, la cour est tenu d'appliquer les dispositions de l'article L1235-3 du code du travail.

M. [L] justifie être demeuré 2 ans et demi sans emploi, période pendant laquelle il a perçu des allocations de Pôle emploi.

Au regard de son âge, de son salaire des six derniers mois de 3 661 euros, de sa qualification, de sa capacité à retrouver un emploi équivalent, le préjudice subi par M. [L] sera réparé par l'allocation de la somme de 37 000 euros. Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur le rappel de salaire sur mise à pied disciplinaire prononcée le 30 septembre 2016:

Le conseil de prud'hommes a omis de statuer dans son dispositif sur cette demande.

La demande de rappel de salaire est relative à une sanction disciplinaire dont M. [L] ne sollicite pas l'annulation. Il ne peut donc être fait droit à la demande de rappel de salaire. Celle-ci est rejetée. Il sera ajouté au jugement de ce chef.

Sur la demande de dommages-intérêts pour préjudice moral :

M. [L] invoque avoir subi un préjudice moral du fait de sa convocation à entretien préalable, de sa mise à pied à titre conservatoire et du délai d'un mois avant son licenciement. Il ne démontre pas avoir subi un préjudice distinct de celui réparé par l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le rappel de prime de fin d'année 2016 :

M. [L] soutient ne pas avoir perçu de prime de fin d'année 2016 et sollicite 3 500 euros à ce titre.

Outre que les bulletins de paie produits ne mentionnent pas le paiement d'une telle prime, M. [L] ne précise pas le fondement, contractuel, conventionnel ou d'usage, de nature à justifier sa demande. Celle-ci est en conséquence rejetée. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le remboursement des allocations servies par Pôle emploi :

En application des dispositions de l'article L1235-4 du code du travail, la société ICTS est condamnée à rembourser à Pôle emploi les allocations servies par celle-ci à M. [L] dans la limite de trois mois.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile :

La société ICTS est condamnée aux dépens d'appel et au paiement de la somme de 1 500 euros à M. [L] et celle de 300 euros à Pôle emploi sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour

CONFIRME le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

REJETTE la demande de rappel de salaire sur mise à pied du 30 septembre 2016,

CONDAMNE la société ICTS France à rembourser à Pôle emploi les allocations servies à M. [L] dans la limite de trois mois,

CONDAMNE la société ICTS France à payer la somme de 1 500 euros à M. [C] [L] et la somme de 300 euros à Pôle emploi sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société ICTS France aux dépens d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 20/03434
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;20.03434 ?
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