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19/04/2023 | FRANCE | N°20/03397

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 19 avril 2023, 20/03397


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 19 AVRIL 2023



(n° 2023/ , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03397 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB354



Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 18/01342





APPELANTE



Madame [L] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 5]
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Représentée par Me Nicolas BORDACAHAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1833





INTIMÉES



S.A.R.L. 01 CONSEILS ET SERVICES INFORMATIQUES

[Adresse 2]

[Localité 7]



S.E.L...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 19 AVRIL 2023

(n° 2023/ , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03397 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB354

Décision déférée à la Cour : Jugement du 05 Mars 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de CRETEIL - RG n° 18/01342

APPELANTE

Madame [L] [Y]

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Nicolas BORDACAHAR, avocat au barreau de PARIS, toque : D1833

INTIMÉES

S.A.R.L. 01 CONSEILS ET SERVICES INFORMATIQUES

[Adresse 2]

[Localité 7]

S.E.L.A.R.L. FIDES prise en la personne de Me [B] [W] ès qualités de mandataire judiciaire de la société 01 Conseils et services informatiques

[Adresse 4]

[Localité 6]

S.E.L.A.S. BI & ASSOCIES prise en la personne de Me [R] [M] ès qualités d'administrateur de la société 01 Conseils et services informatiques

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentées par Me Carole VILLATA DUPRE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0063

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 27 février 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Monsieur Christophe BACONNIER, Président de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCEDURE ET MOYENS DES PARTIES

La société 01 Conseils et services informatiques a employé Mme [L] [Y], née en 1968, par contrat de travail à durée indéterminée de chantier à compter du 29 août 2016 en qualité de consultante monétique, statut cadre.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils (SYNTEC).

Sa rémunération mensuelle brute moyenne s'élevait en dernier lieu à la somme de 4 166,67 €.

Son contrat prévoyait une période d'essai d'une durée d'un mois, à savoir jusqu'au 28 septembre 2016.

Par courrier recommandée avec accusé de réception en date du 13 septembre 2016, la société 01 Conseils et services informatiques a indiqué à Mme [Y] qu'elle voulait renouveler cette période d'essai et lui demandait de lui retourner le courrier signé « bon pour accord ».

Mme [Y] n'ayant pas accepté le renouvellement de sa période d'essai, l'entreprise y a mis fin par lettre remise en main propre le 26 septembre 2016.

Les documents de fin de contrat ont été remis en main propre le 3 octobre 2016.

Par courrier recommandé du 17 octobre 2016, Mme [Y] a contesté cette rupture.

Mme [Y] a saisi le 19 septembre 2018 le conseil de prud'hommes de Créteil pour former les demandes suivantes :

« - constater l'impossibilité pour la société 01 CONSEILS de conclure un contrat à durée indéterminée de chantier, et en conséquence, de :

- constater l'absence de validité dudit contrat,

- constater l'inopposabilité de la clause relative à la période d'essai,

et de condamner la société 01 CONSEILS à lui verser les sommes suivantes :

- dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail : 8.333,34 €

- indemnité compensatrice de préavis : 12.500,01 €

- congés payés afférents : 1.250 €

- dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail :1.000 €

- article 700 du code de procédure civile : 2.500 € »

Par jugement du 5 mars 2020, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes a rendu la décision suivante :

« Requalifie le contrat de chantier en contrat à durée indéterminée,

Dit la période d'essai prévu au contrat valide

Condamne la société 01 Conseils à payer à Mme [L] [Y] :

- la somme de 500 euros pour inexécution de bonne foi du contrat de travail

- la somme de 1300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Déboute Mme [L] [Y] du surplus de ses demandes.

Laisse à la charge de chacune des parties ses propres dépens »

Mme [Y] a relevé appel de ce jugement par déclaration transmise par voie électronique le 10 juin 2020.

La constitution d'intimée de la société 01 Conseils et services informatiques a été transmise par voie électronique le 21 juillet 2020.

L'ordonnance de clôture a été rendue à la date du 21 février 2023.

L'affaire a été appelée à l'audience du 27 février 2023.

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 6 février 2023, Mme [Y] demande à la cour de :

« CONFIRMER le jugement en ce qu'il a constaté l'impossibilité pour la société 01

CONSEILS de conclure un contrat à durée indéterminée de chantier,

' CONFIRMER le jugement en ce qu'il a condamné la société 01 CONSEILS à verser à Madame [Y] des dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail mais l'INFIRMER sur son quantum,

' CONFIRMER le jugement en ce qu'il a condamné la société 01 CONSEILS à verser à Madame [Y] la somme de 1.300 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile,

' INFIRMER le jugement en ce qu'il a requalifié le contrat de chantier en contrat à durée indéterminée,

' INFIRMER le jugement en ce qu'il a dit que la période d'essai prévu au contrat de chantier était valide,

' INFIRMER le jugement en ce qu'il a débouté Madame [Y] de ses demandes de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, d'indemnité compensatrice de préavis et congés payés y afférents

Et statuant de nouveau,

' CONSTATER l'impossibilité pour la société 01 CONSEILS de conclure un contrat à durée indéterminée de chantier,

En conséquence,

' CONSTATER l'absence de validité dudit contrat,

' CONSTATER l'inopposabilité de la clause relative à la période d'essai,

En conséquence,

' CONDAMNER la société 01 CONSEILS à verser à Madame [Y] les sommes suivantes :

- Dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail : 8.333,34 €

- Indemnité compensatrice de préavis : 12.500,01 €

- Congés payés afférents : 1.250 €

- Dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail : 1.000 €

- Article 700 du Code de procédure civile : 2.500 €

Madame [Y] sollicite également que soient ordonnées :

- La remise d'un bulletin de salaire récapitulatif conforme à l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision,

- La prise en charge des dépens par la société intimée. »

Par conclusions communiquées par voie électronique en date du 17 février 2023, la société 01 Conseils et services informatiques demande à la cour de :

« A titre d'appel incident et à titre principal,

- Infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Créteil en date du 5 mars 2020 en ce qu'il a retenu que la société 01 CONSEILS ne pouvait conclure un contrat à durée indéterminée de chantier, et en ce qu'il l'a condamnée à verser à Madame [Y] des dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail outre la somme de 1.300 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et statuant à nouveau,

- Débouter Madame [Y] de l'ensemble de ses demandes fins et conclusions,

A titre d'appel incident et à titre subsidiaire, si la Cour devait considérer que la concluante ne pouvait conclure un contrat de chantier,

- Infirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser des dommages et intérêts pour inexécution de bonne foi du contrat de travail et un article 700,

- Le confirmer en ce qu'il a, dans cette hypothèse, requalifié le contrat de chantier en contrat de travail à durée indéterminée de droit commun et jugé valide la période d'essai prévue au contrat,

- Débouter Madame [Y] de toute demande contraires, fins et conclusions,

A titre très subsidiaire,

- Débouter Madame [Y] de sa demande de dommages et intérêts,

A titre principal et subsidiaire,

- Condamner Madame [Y] à verser à la société 01 CONSEILS la somme de 2500 euros au titre de l'article 700 du CPC. »

Lors de l'audience présidée selon la méthode dite de la présidence interactive, le conseiller rapporteur a fait un rapport et les conseils des parties ont ensuite plaidé par observations et s'en sont rapportés pour le surplus à leurs écritures ; l'affaire a alors été mise en délibéré à la date du 19 avril 2023 par mise à disposition de la décision au greffe (Art. 450 CPC)

MOTIFS

Vu le jugement du conseil de prud'hommes, les pièces régulièrement communiquées et les conclusions des parties auxquelles il convient de se référer pour plus ample information sur les faits, les positions et prétentions des parties.

Sur le contrat de fin de chantier

Mme [Y] soutient par confirmation du jugement que :

- pendant la relation contractuelle, la société 01 Conseils et services informatiques n'avait aucune activité dans le secteur de l'ingénierie, et ne pouvait donc recourir à un contrat de chantier ;

- ses bulletins de paie, les courriers de la société 01 Conseils et services informatiques et les documents de fin de contrat mentionnent que le code NAF de la société intimée était 70.22 Z (pièces n° 3, 4, 5, 7 et 9) ;

- le code NAF 70.22 correspond au secteur d'activité « Conseil pour les affaires et autres conseils de gestion » et il est d'ailleurs expressément prévu que ce code NAF ne comprend pas « les activités de conseil en ingénierie » ;

- la société 01 Conseils et services informatiques ne peut utilement invoquer la modification de son code NAF le 17 juillet 2017 dès lors que cette modification est postérieure à la relation de travail et de surcroît porte sur une « modification de l'activité principale de l'entreprise »

En défense, la société 01 Conseils et services informatiques soutient que :

- elle a une activité de conseil spécialisé dans le domaine de l'ingénierie bancaire, communément désignée ingénierie financière, et ce depuis l'origine (pièces 8, 10, 11 et 13) ;

- constatant en fin d'année 2016, dans le cadre de ses relations clients, que certains clients effectuaient nouvellement un premier tri des réponses à appel d'offre, en excluant sans examen particulier des réponses des sociétés dont le code NAF ne correspondait pas à l'ingénierie bancaire, et de ce fait que le code NAF qui lui avait été attribué à tort au moment de son immatriculation (NAF 70.22 secteur d'activité « Conseil pour les affaires et autres conseils de gestion ») ne correspondait pas à ses activités réelles spécialisées en ingénierie bancaire, elle a sollicité et obtenu le 26 juillet 2017 la modification de son code NAF ;

- il ne s'agit pas d'un changement d'activité comme voudrait le faire croire Mme [Y], l'entreprise ayant toujours eu comme démontré une activité dans le secteur de l'ingénierie depuis sa création, pour tous ses clients (pièces 8 et 11) dont la Société générale (pièce 13)

- d'ailleurs la mission confiée à Mme [Y] était une mission de suivi et d'accompagnement (pièce 12) d'un chantier de migration qui relevait de l'ingénierie bancaire « NOEMI ' MIGRATION MR » auprès de la Société générale.

L'avenant n°11 du 8 juillet 1993 de la convention collective SYNTEC prévoit que « le recours aux contrats de chantier, tant pour les missions en France qu'à l'étranger, constitue un usage reconnu et établi dans le secteur professionnel de l'ingénierie (entreprises référencées sous le code NAF 74 C2) ».

L'article 1 du même avenant à la convention collective dispose que « le contrat dit « de chantier » représente l'obligation faite à l'employeur de recruter les salariés nécessaires à la réalisation d'un travail commandé par un client, celui-ci étant juridiquement distinct de l'entreprise et ses filiales avec qui le salarié a conclu le contrat de travail dit « de chantier ». Le contrat de travail dit « de chantier » est nécessairement un contrat de travail à durée indéterminée ayant pour objet l'accompagnement d'un chantier ».

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que Mme [Y] est mal fondée à contester la validité de son contrat à durée indéterminée de chantier au motif d'une part que, depuis sa création, bien avant et pendant la relation contractuelle, même si son code NAF était erroné, la société 01 Conseils et services informatiques exerçait dans le secteur d'activité de l'ingénierie bancaire qui constitue son activité réelle depuis sa création et l'objet même de la mission confiée à Mme [Y], et qu'elle pouvait, en conséquence, recourir à un contrat de chantier à son égard et au motif d'autre part qu'il n'y a donc pas eu de changement d'activité de l'entreprise mais exclusivement une modification du code NAF pour qu'il corresponde à l'activité réelle d'ingénierie de la société 01 Conseils et services informatiques, peu important que le certificat obtenu mentionne une mise à jour, à savoir : « modification de l'activité principale de l'entreprise inscrite au répertoire SIRENE » puisque l'activité inscrite au niveau du SIRENE était erronée comme cela ressort du document de référencement auprès de la Société générale (pièce employeur n° 8) qui précise que le chiffre d'affaires de la société est à 100 % réalisé en ingénierie bancaire avec de multiples références de missions accomplies au profit d' établissements bancaires (Crédit Agricole, Banque de France, Carrefour Banque, BNP Paribas, Société générale), de la fiche société de la société 01 Conseils et services informatiques (pièce employeur n° 10) qui mentionne que depuis 12 ans la société 01 Conseils et services informatiques a une activité spécialisée dans le secteur d'activité de l'ingénierie, du référentiel des projets en ingénierie bancaire depuis l'origine de la société 01 Conseils et services informatiques (pièce employeur n° 11) et de la fiche projet SG (pièce employeur n° 13) qui détaille les prestations d'ingénierie bancaire de la société 01 Conseils et services informatiques pour la Société générale.

C'est donc en vain que Mme [Y] soutient que pendant la relation contractuelle, la société 01 Conseils et services informatiques n'avait aucune activité dans le secteur de l'ingénierie, et ne pouvait donc recourir à un contrat de chantier comme cela ressort de ses bulletins de paie, des courriers de la société 01 Conseils et services informatiques et des documents de fin de contrat qui mentionnent que le code NAF de la société intimée était 70.22 Z (pièces n° 3, 4, 5, 7 et 9) ; en effet, la cour retient que ces moyens sont mal fondés au motif que l'activité réelle de la société 01 Conseils et services informatiques, qui est une activité d'ingénierie bancaire comme elle l'a démontré (pièces employeur n° 8, 10, 11 et 13), prime les mentions formelles de son NAF qui étaient erronées et qui ont d'ailleurs été rectifiées ultérieurement pour être mises en conformité avec son activité réelle d'ingénierie bancaire.

C'est enfin en vain que Mme [Y] soutient que la société 01 Conseils et services informatiques ne peut utilement invoquer la modification de son code le 17 juillet 2017 dès lors que cette modification est postérieure à la relation de travail et de surcroît porte sur une « modification de l'activité principale de l'entreprise » ; en effet, la cour retient que ces moyens sont mal fondés au motif que la modification litigieuse est en réalité une rectification du code NAF de la société 01 Conseils et services informatiques qui opérait ainsi une mise en conformité du code NAF avec son activité réelle d'ingénierie bancaire.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a requalifié le contrat de chantier en contrat à durée indéterminée et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute Mme [Y] de sa demande relative au contrat de chantier.

Sur la rupture de la période d'essai

Mme [Y] soutient que :

- la société 01 Conseils et services informatiques ne pouvait recourir à un contrat de chantier ;

- par conséquent, le contrat n'étant pas valable, il doit être réputé comme n'avoir jamais existé ;

- aucun contrat écrit n'étant valable, la clause relative à la période d'essai ne lui est donc pas opposable (article L 1221-23 du code du travail)

- en l'espèce, aucun contrat écrit n'étant valable, aucune période d'essai ne pouvait donc lui être imposée ;

- la société 01 Conseils et services informatiques ne pouvait donc pas mettre fin à la période d'essai.

La société 01 Conseils et services informatiques s'oppose à ces moyens.

A l'examen des pièces produites et des moyens débattus, la cour retient que Mme [Y] est mal fondée à contester l'opposabilité de la période d'essai au motif que la cour a jugé que le contrat de chantier était valable.

Par ces motifs substitués à ceux des premiers juges le jugement déféré est confirmé en ce qu'il a jugé que la période d'essai est valide.

Par voie de conséquence le jugement déféré est donc confirmé en ce qu'il a débouté Mme [Y] de ses demandes relatives aux dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à l'indemnité compensatrice de préavis.

Sur les dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail

Mme [Y] demande par infirmation du jugement sur le quantum la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail ; la société 01 Conseils et services informatiques s'oppose à cette demande.

Mme [Y] formule le moyen suivant :

« (La société 01 Conseils et services informatiques) a souhaité, par un courrier non daté, renouveler la période d'essai de la salariée jusqu'au 28 octobre 2016, pour finalement la rompre dès le 26 septembre 2016, lorsque Madame [Y] a sollicité des explications, d'une part, sur la validité de son contrat de travail et, d'autre part, sur le non-respect du salaire minimum conventionnel.

Pièce n° 4

De plus, la société 01 CONSEILS n'a pas respecté les minimas conventionnels en matière de salaire à l'égard de Madame [Y], qui percevait une rémunération inférieure aux minimas fixés.

A ce titre, la société 01 CONSEILS a rapidement reconnu devoir un rappel de salaires à Madame [Y] à ce titre, mais ce n'est que lors de l'audience de jugement du 7 novembre 2019 devant le Conseil de prud'hommes de Créteil que la société intimée a remis le chèque à la salariée, soit de nombreux mois plus tard. »

En défense, la société 01 Conseils et services informatiques réplique le moyen suivant :

« Depuis sa création, son activité a bien été l'ingénierie bancaire et le conseil en ingénierie bancaire (pièces 8,10 à 13) et d'autre part, que la mission confiée correspondait bien à un chantier d'ingénierie bancaire, la migration ressortant de l'ingénierie (pièces 8 et 12).

Il ne peut donc pas lui être reproché d'avoir été de mauvaise foi dans la conclusion et l'exécution du contrat de travail, ni défaillante de quelque manière que ce soit vis-à-vis de la salariée. »

En application des dispositions de l'article 9 du code de procédure civile, il incombe à chaque partie de prouver les faits nécessaires au succès de sa prétention, en particulier l'existence d'un fait générateur de responsabilité, du préjudice en découlant et donc d'un lien de causalité entre le préjudice et la faute.

Il résulte de l'examen des pièces versées aux débats et des moyens débattus que Mme [Y] n'apporte pas suffisamment d'éléments de preuve pour établir l'exécution de mauvaise foi de son contrat de travail, alléguée à l'encontre de la société 01 Conseils et services informatiques ; en effet la seule pièce qui est invoquée à l'appui du moyen est la lettre de la société 01 Conseils et services informatiques lui indiquant qu'elle veut renouveler la période d'essai ; aucune autre pièce n'est invoquée à l'appui du moyen tiré de l'exécution de mauvaise foi de son contrat de travail alors que la mauvaise foi ne se présume pas et qu'elle doit être démontrée par la partie qui l'allègue ; de surcroît Mme [Y] n'articule dans ses conclusions aucun moyen permettant de caractériser le préjudice découlant, selon elle, de l'exécution de mauvaise foi de son contrat de travail, ni dans son principe, ni dans son quantum ; le moyen de ce chef est donc rejeté.

Le jugement déféré est donc infirmé en ce qu'il a condamné la société 01 Conseils et services informatiques à payer à Mme [Y] des dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail et statuant à nouveau de ce chef, la cour déboute Mme [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail.

Sur les autres demandes

La cour condamne Mme [Y] aux dépens de la procédure de première instance et de la procédure d'appel en application de l'article 696 du Code de procédure civile.

Le jugement déféré est infirmé en ce qui concerne l'application de l'article 700 du Code de procédure civile.

Il n'apparaît pas inéquitable, compte tenu des éléments soumis aux débats, de laisser à la charge de la société 01 Conseils et services informatiques les frais irrépétibles de la procédure.

L'ensemble des autres demandes plus amples ou contraires formées en demande ou en défense est rejeté, leur rejet découlant des motifs amplement développés dans tout l'arrêt.

PAR CES MOTIFS

La cour,

INFIRME le jugement mais seulement en ce qu'il a

- requalifié le contrat de chantier en contrat à durée indéterminée ;

- condamné la société 01 Conseils et services informatiques à payer à Mme [Y] la somme de 500 € à titre de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail ;

- condamné la société 01 Conseils et services informatiques à payer à Mme [Y] la somme de 1 300 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés:

DÉBOUTE Mme [Y] de sa demande relative au contrat de chantier ;

DÉBOUTE Mme [Y] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution de mauvaise foi du contrat de travail ;

DÉBOUTE Mme [Y] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

CONFIRME le jugement déféré pour le surplus ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE la société 01 Conseils et services informatiques de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples et contraires,

CONDAMNE Mme [Y] aux dépens de la procédure de première instance et d'appel.

LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 20/03397
Date de la décision : 19/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-19;20.03397 ?
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