Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 4
ARRET DU 19 AVRIL 2023
(n° , 5 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/05314 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B727P
Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Février 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° 16/02993
APPELANTE
Madame [Z] [N] [J] [B]
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Nicolas PEYRÉ, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 188
INTIMEE
Association IFAC - INSTITUT DE FORMATION D'ANIMATION ET DE CON SEIL
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Dominique THOLY, avocat au barreau de PARIS, toque : P0279
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre, chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M. Jean-François de CHANVILLE, président de chambre
Mme Anne-Gaël BLANC, conseillère
Mme Florence MARQUES, conseillère
Greffier, lors des débats : Mme Justine FOURNIER
ARRET :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, greffière, présente lors de la mise à disposition.
***
RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Mme [Z] [B] a été embauchée le 1er novembre 1985 comme animateur périscolaire à temps partiel par la Ville d'[Localité 5] en qualité d'agent non titulaire.
Par convention du 1er septembre 2015, la ville d'[Localité 5] a confié à l'association IFAC, la gestion des activités périscolaires, des centres de loisirs et des temps méridiens de la commune.
L'association IFAC a pour mission de favoriser l'apprentissage de la citoyenneté, le développement du lien social ainsi que l'épanouissement et la responsabilisation de l'individu, à travers une action de formation, d'animation et de conseil pour la petite enfance et les personnes du troisième âge.
Mme [Z] [B] ne s'est jamais présentée à son poste de travail pour se mettre au service de l'association IFAC.
Par courrier du 7 octobre 2015, la salariée écrivait à celle-ci en communiquant le contrat de travail la liant à la ville d'[Localité 5] à laquelle elle se disait toujours liée, en précisant qu'il ne lui appartenait pas dans ces conditions de justifier de ses absences auprès de cet interlocuteur.
Par lettre du 14 octobre 2015 l'association lui expliquait : 'Depuis le 1er septembre 2015, l'IFAC est chargée de la gestion des activités périscolaires, des centres de loisirs et des temps méridiens de la commune d'[Localité 5]. A ce titre, votre contrat de travail nous a été transféré et vous êtes désormais salariée des équipes d'animation de notre association'.
Suivant courrier du 5 février 2016, Mme [Z] [B] a été convoquée à un entretien préalable par l'IFAC, fixé le 11 février 2016 en vue d'en éventuel licenciement.
Suivant second courrier du 16 février 2016, elle a été à nouveau convoquée à un entretien préalable, fixé le 24 février 2016.
Son licenciement pour faute grave lui a notifié par lettre recommandée avec accusée de réception du 21 mars 2016 dans les termes suivants :
'Vous êtes en abandon de poste, sans autorisation préalable, ni justificatif depuis le mardi 1er septembre 2015 et, ce, malgré notre relance du 24 septembre 2015 et du 2 octobre 2015(...).
Ces faits constituent un manquement grave à vos obligations professionnelles et sont préjudiciables à la bonne marche de l'IFAC.
En conséquence, vous nous contraignez à rompre votre contrat de travail et à vous notifier par la présente votre licenciement pour faute grave'.
Contestant cette mesure et sollicitant la requalification de son contrat à temps partiel en contrat à temps complet, la salariée a saisi le conseil de prud'hommes de Bobigny le 4 juillet 2016 aux fins de voir condamner l'association IFAC au versement des sommes suivantes avec intérêts au taux légal :
- 3.455,04 euros d'indemnité compensatrice de préavis et 345,50 euros au titre des congés payés afférents ;
- 8 637,60 euros d'indemnité de licenciement ;
- 41 460,48 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
- 25 623,99 euros à titre de reconstitution de salaires afférents à la période écoulée entre juin 2012 et le 31mars 2016 dans le cadre de la requalification de son contrat de travail en contrat à temps plein et des salaires échus entre le 1er septembre 2015 et le 31 mars 2016, période pendant laquelle elle n'a pas été rémunérée ;
- 2.562,39 euros d'indemnité de congés payés y afférents ;
- 1.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle sollicitait de plus la remise des documents de fin de contrat sous astreinte de 50 euros par jour de retard.
Par jugement réputé contradictoire du 7 février 2019, les demandes de l'une et l'autre des parties ont été rejetées et Mme [Z] [B] a été condamnée aux dépens.
Celle-ci a interjeté appel, le 14 avril 2019.
Par conclusions déposées par réseau privé virtuel des avocats le 12 juillet 2019,Mme [Z] [B] demandait à la cour de juger qu'elle était liée à son employeur par un contrat de travail à temps plein, que son licenciement est abusif et de condamner l'intimée à lui verser les sommes demandées en première instance, sous réserve de l'élévation à la somme de 2 500 euros de l'indemnité sollicitée au titre de l'article 700 du code de procédure civile qu'elle entend voir élever à la somme de 2 500 euros.
Par conclusions déposées par réseau privé virtuel des avocats le 10 octobre 2019, l'association IFAC sollicitait de la cour la confirmation du jugement et la condamnation Mme [W] [R] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Par arrêt du 13 avril 2022, la cour a ordonné la réouverture des débats sur la question de la compétence matérielle du tribunal judiciaire, par opposition au tribunal administratif, au regard de l'article L. 1224-3-1 du Code du travail, pour se prononcer sur l'application dudit contrat de droit public et sur sa cessation et a renvoyé l'affaire à l'audience du 5 septembre 2022.
Par conclusions remises via le réseau privé virtuel des avocats le 2 septembre 2022, la salariée soutient que le contrat a bien été transféré, dès lors que Mme [Z] [B] n'a jamais expressément refusé le transfert et qu'elle a attrait le conseil des prud'hommes l'association IFAC devant le conseil des prud'hommes en tant qu'employeur.
Par conclusions remises via le réseau privé virtuel des avocats le 22 août 2022, l'association IFAC prie la cour de renvoyer l'instance à la mise en état et de faire injonction à la salariée de saisir le tribunal administratif de Paris afin que soient examinées la demande de rappel de salaire et celle de la poursuite du contrat de travail.
Pour plus ample exposé sur le litige, la cour se réfère aux conclusions des parties en application de l'article 455 du Code de procédure civile.
MOTIFS
Aux termes de l'article 76 du code de procédure civile, l'incompétence peut être prononcée d'office en cas de violation d'une règle de compétence d'attribution, lorsque cette règle est d'ordre public. Devant la cour d'appel, cette incompétence ne peut être relevée d'office que si l'affaire relève de la compétence d'une juridiction répressive ou administrative ou échappe à la connaissance d'une juridiction française.
La salariée sollicite la requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet et par suite le paiement de rappels de salaires au titre de l'époque à laquelle elle était liée par un contrat de droit public à la commune d'Asnières-sur-Seine et soutient que la poursuite du contrat de travail au-delà de la date à laquelle l'activité pour laquelle elle travaillait a été confiée à l'IFAC. Elle entend voir le licenciement notifié par celui-ci déclaré sans cause réelle et sérieuse et obtenir les indemnités subséquentes.
Aux termes de l'article L.1224-3-1 du code du travail, lorsque l'activité d'une personne morale de droit public employant des agents non titulaires de droit public est reprise par une personne morale de droit privé ou par un organisme de droit public gérant un service public industriel et commercial, cette personne morale ou cet organisme propose à ces agents un contrat régi par le code du travail.
Le contrat proposé reprend les clauses substantielles du contrat dont les agents sont titulaires, en particulier celles qui concernent la rémunération.
En cas de refus des agents d'accepter le contrat proposé, leur contrat prend fin de plein droit.
La personne morale ou l'organisme qui reprend l'activité applique les dispositions de droit public relatives aux agents licenciés.
Il est constant que la gestion des activités périscolaires, des centres de loisirs et des temps méridiens de la Ville d'[Localité 5] a été reprise le 1er septembre 2015 par l'association IFAC, qui est une association régie par la loi du 1er juillet 1901, c'est-à-dire une personne morale de droit privé.
Il résulte du projet d'avenant rédigé par l'association IFAC daté du 1er septembre 2015, d'une lettre de celle-ci datée du 16 septembre 2015 transmettant à la salariée ce document et de l'attestation de M. [P], directeur des ressources humaines de cette association, que l'association IFAC estimait que le contrat lui avait été tansmis de plein droit en application de l'article L 1224-1 du Code du travail et n'a donc pas demandé, ni même obtenu l'accord exprès de la salariée.
La portée du licenciement litigieux et le droit à rappel de salaire de la salariée sont subordonnés à la question de la requalification d'un contrat de droit public en contrat à temps complet, à l'expiration éventuelle de ce contrat de droit public ou à la poursuite dans le cas contraire d'une relation contractuelle entre l'intéressée et l'association IFAC, toutes questions qui supposent l'application des différents décrets relatifs à la situation des agents non titulaires de la fonction publique, soit en l'espèce en particulier le décret no 88-145 du 15 février 1988 régissant la fonction publique territoriale.
Ces points relèvent de la compétence d'ordre public des juridictions administratives.
Le jugement qui a statué au fond malgré l'incompétence du premier juge devra être infirmé.
Le tribunal administratif territorialement compétent est celui dans le ressort duquel a son siège l'autorité qui a pris la décision attaquée ou a signé le contrat litigieux, c'est-à-dire, en l'espèce, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise.
Aux termes de l'article 81 du code de procédure civile, lorsque le juge relève que l'affaire relève de la compétence d'une juridiction administrative, il renvoie seulement les parties à mieux se pourvoir.
Le renvoi à la mise en état sollicité par l'association ne saurait dés lors être ordonné.
Il est équitable au regard de l'article 700 du code de procédure civile de rejeter les demandes de l'une et l'autre des parties au titre des frais irrépétibles.
Chaque partie conservera la charge de ses propres dépens
PAR CES MOTIFS
Statuant contradictoirement, par mise à disposition au greffe et en dernier ressort ;
Se déclare incompétente ;
Renvoie les parties à mieux se pourvoir ;
Laisse à chaque partie la charge de ses propres dépens.
La greffière Le président