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12/04/2023 | FRANCE | N°20/03757

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 12 avril 2023, 20/03757


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 12 AVRIL 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03757 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB53X



Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Juin 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° f 19/00062



APPELANTE



S.A.S. IMPRO 2

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représenté

e par Me Christian COUVRAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0462



INTIMEE



Madame [F] [Z] épouse [B]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER,...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 12 AVRIL 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03757 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB53X

Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Juin 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° f 19/00062

APPELANTE

S.A.S. IMPRO 2

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Christian COUVRAT, avocat au barreau de PARIS, toque : E0462

INTIMEE

Madame [F] [Z] épouse [B]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Charles-Hubert OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 13 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme MARQUES Florence, conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François de CHANVILLE, président de chambre

Madame Anne-Gaël BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Justine FOURNIER

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [F] [Z] a été engagée par la société Impro 2, en qualité de responsable de la relation client, suivant contrat de travail à durée indéterminée en date du 28 juillet 2018 à effet au 5 novembre 2018, moyennant un salaire mensuel de 1963 euros, outre une rémunération variable. Le contrat prévoyait une période d'essai du 5 novembre 2018 au 4 février 2019 inclus. La salariée était soumise à une convention de forfait en jours de 157 jours.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des organismes de formation (IDCC 1516).

Par courrier en date du 7 novembre 2018, il a été mis fin à la période d'essai de la salariée.

Mme [F] [Z] a saisi le 3 janvier 2019 le conseil de prud'hommes de Paris aux fins de voir juger abusive la rupture de la période d'essai de son contrat de travail et condamner la société à lui payer diverses sommes .

Par jugement en date du 9 juin 2020 le conseil de prud'hommes de Paris a :

- dit la rupture de la période d'essai abusive,

- condamné la société Impro 2 à verser à Mme [Z] les sommes suivantes :

* 261,73 euros au titre du salaire des 11 et 18 septembre 2018,

* 26,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation, le 14 janvier 2019,

- rappelé qu'en vertu de l'article R.1454-28 du code du travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire,

- 5.000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral pour rupture abusive de la période d'essai,

- 5.889 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudices économiques,

avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

- 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [Y] du surplus de ses demandes,

- débouté la société Impro 2 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile et l'a condamnée aux dépens.

Par déclaration du 26 juin 2020, la société Impro 2 a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 31 août 2020, la société Impro 2 demande à la cour de :

- réformer le jugement rendu le 9 juin 2020 par le conseil des prud'hommes de Paris en ce qu'il a condamné la société Impro 2 à verser à Mme [Z] les sommes de :

* 5,000 euros de dommages-intérêts pour préjudice moral,

* 5.889 euros de dommages-intérêts pour préjudice économique,

* 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Et, statuant à nouveau,

- débouter Mme [Z] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions en ce qu'elles sont dirigées contre la société Impro 2,

- condamner Mme [Z] à verser à la société Impro 2 une somme de 2.000 euros sur le fondement de titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Dans ses uniques conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 12 octobre 2020, Mme [F] [Z] demande à la cour de :

- confirmer le jugement déféré en ce qu'il a :

* dit la rupture de la période d'essai abusive,

* condamné la société Impro 2 à :

$gt; verser à Mme [Z] une somme de 261,73 euros au titre des salaire des journes travaillées les 11/09/2018 et 18/09/2018, outre 26,17 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation le 14/01/2019,

$gt; verser à Mme [Z] une somme de 5.000 euros titre de dommages et intérêts pour préjudice moral pour rupture abusive de la période d'essai avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

$gt; verser à Mme [Z] une somme de 5.889 euros titre de dommages et intérêts pour préjudices économiques avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

$gt; au paiement d'une somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procdure civile ainsi qu'aux entiers dépens d'instance,

- infirmer le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau,

- condamner la société Impro 2 à verser à Mme [Z] :

* une somme complémentaire de 20.589 euros de dommages et intérêts pour préjudices économiques consécutifs à la rupture abusive de la période d'essai, avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement,

* une somme de 11.778 euros d'indemnité de travail dissimulé, au titre des journées travaillées non déclarées des 11 et 18 septembre 2018, avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation le 14/01/2019,

En tout état de cause,

- condamner la société Impro 2 à verser à Mme [Z] une somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner la société Impro 2 aux entiers dépens d'instance, dont distraction au profit de Maître Charles-Hubert OLIVIER, Avocat aux offres de droit.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 5 juillet 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 13 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur la demande de rappel de salaire pour les 11 et 18 juillet 2018

La cour rappelle qu'en application de l'article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n'examine les moyens au soutien de ces prétentions que s'ils sont invoqués dans la discussion.

Si, dans sa déclaration d'appel, la société a sollicité l'infirmation de sa condamnation à payer à Mme [F] [Z] la somme de 261,73 euros à titre de rappel de salaire pour les jours travaillés et non rémunérés des 11 et 18 juillet 2018, outre celle de 26,17 euros au titre des congés afférents, et demande au dispositif de ses conclusions de débouté la salariée de l'ensemble de ses demandes elle ne développe aucun moyen à l'appui de sa demande d'infirmation, si bien qu'il y a lieu de rejeter la demande d'infirmation du jugement de ces chefs.

Le jugement est confirmé de ce chef.

2-Sur la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé

L'article L.8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à la délivrance d'un bulletin de paie ou d'un document équivalent défini par voie réglementaire, ou de mentionner sur le bulletin de paie ou le document équivalent un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

L'article L.8223-1 du même code dispose quant à lui que, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

Au cas d'espèce, il n'est nullement rapportée la preuve du caractère intentionnel de l'employeur. La salariée est déboutée de ce chef.

Le jugement est confirmé de ce chef.

3-Sur la rupture de la période d'essai

Aux termes de l'article L 1220-20 du code du travail " La période d'essai permet à l'employeur d'évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d'apprécier si les fonctions occupées lui conviennent."

Chacune des parties, salarié ou employeur, peut mettre fin à la période d'essai sans motif.

Toutefois, le droit de l'employeur de mettre fin discrétionnairement au contrat de travail ne doit pas être abusif.

Est abusive la rupture qui intervient peu de temps après le début de la période d'essai, cette courte période n'ayant pas réellement permis à l'employeur d'apprécier les capacités professionnelles du salarié.

Au cas d'espèce, la rupture est intervenue le 7 novembre 2018 alors que la relation contractuelle avait commencé le 5 novembre 2018, soit deux jours plus tôt. Il ne peut qu'être constaté que ce délai extrêmement court, nonobstant les craintes managériales exprimées par Madame [G] [D], sur la capacité de la salariée à se conformer à son autorité, ne permettait pas à l'employeur de se faire une idée exacte des compétences et de la volonté de Mme [F] [Z] de s'adapter à son statut de salariée ( après un rappel de son état de subordination, par exemple ).

Dès lors la rupture de la période d'essai est abusive.

Le jugement est confirmé de ce chef.

4-Sur l'indemnisation des préjudices résultant de la rupture abusive de la période d'essai

4-1 Sur la demande au titre du préjudice financier

La cour rappelle que dès le 10 novembre 2018, la salariée était de nouveau libre de tout engagement et pouvait, à loisir, reprendre son activité de coaching. Par ailleurs, s'étant engagée sur un temps partiel (70%) avec la société Impro 2, elle conservait un volant d'heures pour son activité de coaching, si bien qu'elle ne peut imputer à la société son refus de prendre en charge, avant la rupture de son contrat de travail, Mmes [H] [X] et [S] [J].

Elle justifie néanmoins ne pas avoir donné suite à une proposition de CDI de la société American Express Carte France en août 2018, ayant déja signé son contrat de travail avec la société Impro 2.

Il est rappelé qu'il ne peut être question de percevoir les salaires qui auraient été perçus si la période d'essai était allée à son terme, pas plus qu'une indemnité compensatrice de congés payés.

La cour estime, eu égard aux éléments du dossier, qu'une somme de 5000 euros est à même de justement réparer le préjudice financier invoqué.

Le jugement est infirmé sur le quantum.

4-2-Sur la demande au titre du préjudice moral

La salariée justifie d'un préjudice moral en ce que l'enthousiasme ayant précédé son arrivée dans la société Impro 2 a été suivi d'une grande déception.

Une somme de 500 euros est de nature à réparer ce préjudice.

Le jugement est infirmé sur le quantum.

5-Sur les intérêts

Conformément aux dispositions de l'article 1231-6 et de l'article 1231-7 du code civil, les intérêts au taux légal courent sur les créances salariales à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud'hommes et à compter du jugement pour les créances indemnitaires.

6-Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Partie perdante, la SAS Impro 2 est condamnée aux dépens d'appel.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de Mme [F] [Z] ainsi qu'il sera dit au dispositif.

La SAS Impro 2 est déboutée de sa demande au titre des frais irrépétibles en cause d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Confirme le jugement déféré en ce qui concerne le rappel de salaire et les congés payés afférents, en ce qu'il a débouté Mme [F] [Z] de sa demande d'indemnité pour travail dissimulé, a dit abusive la rupture de la période d'essai, sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

Infirme le jugement déféré pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la SAS Impro 2 à payer à Mme [F] [Z] les sommes suivantes :

-5000 euros en réparation du préjudice financier,

-500 euros en réparation du préjudice moral,

Condamne la SAS Impro 2 à payer à Mme [F] [Z] la somme de 1500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Rappelle que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes portant intérêts au taux légal à compter du jugement,

Déboute la SAS Impro 2 de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Condamne la SAS Impro 2 aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03757
Date de la décision : 12/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-12;20.03757 ?
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