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06/04/2023 | FRANCE | N°22/17623

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 06 avril 2023, 22/17623


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 06 AVRIL 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/17623 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGRLZ



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Octobre 2022 -Président du TJ de [Localité 6] - RG n° 22/00983





APPELANTE



S.C.I. CENTRE D'ACTIVITES D'EPINAY, RCS de Pontoise

sous le n°489 407 353, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]



Représentée par Me Charles-hubert OLIVIE...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 06 AVRIL 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/17623 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGRLZ

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 10 Octobre 2022 -Président du TJ de [Localité 6] - RG n° 22/00983

APPELANTE

S.C.I. CENTRE D'ACTIVITES D'EPINAY, RCS de Pontoise sous le n°489 407 353, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Charles-hubert OLIVIER de la SCP LAGOURGUE & OLIVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : L0029

Assistée à l'audience par Me Hervé ITTA, avocat au barreau de PARIS, toque : G655

INTIMEE

S.N.C. VEOLIA EAU D'ILE DE FRANCE, RCS de Nanterre sous le n°524 334 943 agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 8]

[Localité 4]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée à l'audience par Me Nicolas MAGNIN, avocat au barreau de PARIS, toque : C1908

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Mars 2023 en audience publique, devant Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et Michèle CHOPIN, Conseillère, conformément aux articles 804, 805 et 905 du CPC, les avocats ne s'y étant pas opposés.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

Qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Michèle CHOPIN, Conseillère, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Thomas RONDEAU, Conseiller, pour la Présidente de chambre empêchée et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

Le Syndicat des Eaux d'Ile-de-France assure la production et l'alimentation quotidienne en eau potable de 4.5 millions d'usagers, desservant 150 communes réparties sur sept départements d'Île-de-France, dont la commune d'[Localité 7] (93).

Par convention de délégation de service public du 9 juillet 2010, le Syndicat des Eaux d'Ile-de-France a délégué la gestion de ce service à la société Véolia Ile-de-France (la société VEDIF).

Sur la commune d'[Localité 7], la société Cedade est titulaire de deux contrats d'abonnement souscrits auprès de la société VEDIF pour l'alimentation en eau potable d'immeubles sis [Adresse 2] (contrats n°8028460 et n°8347967).

Par exploit du 17 novembre 2020, la société Cedade a assigné en référé la société Véolia Ile-de-France devant le tribunal judiciaire de Bobigny, statuant en référé, aux fins de la voir condamner à rétablir l'alimentation en eau d'un appartement. La société VEDIF a sollicité à titre reconventionnel le paiement par la société Cedade de ses factures d'eau impayées.

Par ordonnance de référé rendue le 16 avril 2021, le tribunal judiciaire de Bobigny a débouté la société Cedade de l'ensemble de ses demandes et l'a condamnée à verser à la société Véolia Ile-de-France une provision de 33.398,27 euros, représentant le montant de ses factures d'eau impayées au 9 novembre 2020, l'autorisant à s'acquitter du paiement de cette provision en neuf mensualités d'égal montant. La société Cedade a en outre été condamnée à procéder à la recherche d'une fuite dans ses locaux sis [Adresse 2], et ce dans un délai de quinze jours à compter de la signification de la présente ordonnance et, passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant un délai de 90 jours.

Par acte du 12 mai 2022, la société Véolia Ile-de-France a assigné la société Cedade devant le tribunal judiciaire de Bobigny, statuant en référé, aux fins de voir :

- dire et juger que le fait de laisser perdurer des fuites peut provoquer d'importants désordres sur la structure des immeubles de la société Cedade et à terme, provoquer un sinistre qui pourrait causer de graves dommages à ses occupants ;

- ordonner à la société Cedade de faire réparer les fuites dans ses locaux situés [Adresse 2], à [Localité 7] (93), sous astreinte, le juge des référés s'en réservant la liquidation ;

- condamner à titre provisionnel la société Cedade à lui verser les sommes suivantes :

' au titre du contrat n° 8028460 : 59.898,19 euros correspondant aux factures impayées du 7 décembre 2020 au 10 mars 2022, outre intérêts au taux de trois fois l'intérêt légal à compter de l'assignation et 6.544 ,10 euros, au titre de la majoration de la redevance assainissement avec intérêts au taux légal,

' au titre du contrat n° 8347967 : 9.103,57 euros correspondant aux factures impayées au 9 novembre 2020, outre intérêts au taux de trois fois l'intérêt légal à compter de l'assignation et 751,10 euros au titre de la majoration de la redevance assainissement avec intérêts au taux légal,

- ordonner la capitalisation des intérêts ;

- condamner la société Cedade à lui payer la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 10 octobre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny a :

- condamné la société Cedade à faire, à ses frais, diligenter une recherche de fuite par une entreprise spécialisée, et, le cas échéant, procéder aux réparations nécessaires, dans le délai d'un mois à compter de la signification de la décision et passé ce délai, sous astreinte de 50 euros par jour de retard pendant un délai de 90 jours ;

- réservé la liquidation de l'astreinte ;

- condamné la société Cedade à verser à la société Véolia Ile-de-France à titre provisionnel la somme totale de 84.813,84 euros soit :

' au titre du contrat n° 8028460 : 59.898,19 euros correspondant aux factures impayées du 7 décembre 2020 au 10 mars 2022, outre intérêts au taux de trois fois l'intérêt légal à compter de l'assignation et 6.544 ,10 euros, au titre de la majoration de la redevance assainissement avec intérêts au taux légal,

' au titre du contrat n° 8347967: 9.103,57 euros correspondant aux factures impayées au 9 novembre 2020, outre intérêts au taux de trois fois l'intérêt légal à compter de l'assignation et 751,10 euros au titre de la majoration de la redevance assainissement avec intérêts au taux légal,

- dit que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la délivrance de l'assignation ;

- rejeté la demande de capitalisation des intérêts ;

- condamné la société Cedade à verser à la société Véolia Ile-de-France la somme de 1.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Cedade aux dépens.

Par déclaration du 13 octobre 2022, la société Cedade a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 20 février 2023, elle demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance du juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny du 10 octobre 2022 en toutes ses dispositions après avoir constaté que les demandes se heurtent à des contestations sérieuses ou comme irrecevables et mal fondées ;

- débouter la société Véolia Ile-de-France de toutes ses demandes anciennes ou nouvelles ;

- condamner la société Véolia Ile-de-France au paiement de la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 20 février 2023, la société Véolia Ile-de-France demande à la cour de :

- débouter la société Cedade de l'ensemble de ses demandes et de son appel ;

- confirmer l'ordonnance rendue par le Président du tribunal judiciaire de Bobigny le 10 octobre 2022 en toutes ses dispositions et y ajoutant,

- condamner la société Cedade, en sa qualité d'abonné et de propriétaire, à procéder à la réparation des fuites dans ses locaux situés au [Adresse 2] (93), et ce sous astreinte définitive de 300 euros par jour de retard à compter du prononcé de l'arrêt ;

- condamner la société Cedade à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens, qui comprendront notamment l'ensemble des frais d'exécution, dont l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article 10 du décret n°96-1080 du 12 décembre 1996.

Pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

En application de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Il est constant que la société Cedade, en exécution de l'ordonnance de référé du 16 avril 2021, a fait réaliser des réparations dont il est justifié par la production de cinq factures d'un artisan plombier pour un montant total de 1.512 euros, qui ont été adressées à la société Véolia le 12 août 2021.

Il est aussi constant que ces réparations se sont révélées insuffisantes, la société Véolia justifiant notamment par la production de graphiques de la consommation d'eau de la société Cedade et d'un courrier officiel de son conseil adressé à celui de la société Cedade le 19 août 2021, que si concernant le contrat d'abonnement n°8347967 (afférent au 215 route de [Localité 9]), il semble qu'il n'y ait plus d'écoulement permanent depuis le 20 juillet 2021, s'agissant en revanche du contrat d'abonnement n° 8028460 (afférent au 209 route de [Localité 9]), il persiste un écoulement permanent d'environ 100 litres par heure.

Or, selon les dispositions du Règlement du service public de l'eau adopté par délibération du syndicat des eaux d'Ile de France n°2019-36 en date du 26 décembre 2019, la société Cedade, en tant qu'abonnée, a la charge de la surveillance et de l'entretien de l'installation de distribution de l'eau au-delà de son compteur, que selon l'article 3, "l'abonné doit signaler au plus tôt toute fuite ou désordre constaté sur la partie publique et privative du branchement", que selon l'article 30 c), "l'abonné doit prendre toutes les dispositions nécessaires pour rechercher et réparer la fuite éventuelle, en tout état de cause dans un délai d'un mois après l'alerte fournie par le délégataire, afin de bénéficier de la remise suite à fuite définie ci-dessous".

La société Cedade ne peut donc sérieusemement prétendre avoir suffisamment rempli son obligation de recherche de fuite et de réparation par la production des cinq factures évoquées plus haut, ni soutenir à titre de contestation sérieuse que l'origine de la fuite n'est pas déterminée et qu'il n'est pas prouvé qu'elle relève d'un segment du réseau inclu dans le périmètre du bien lui appartenant, alors que le Règlement l'oblige précisément à rechercher la fuite éventuelle et à la réparer, ce dont il n'est pas suffisamment justifié en l'espèce dès lors qu'une fuite perdure à tout le moins sur le réseau desservant le 215 route de [Localité 9] et que l'intervention d'un artisan plombier s'est révélée insuffisante, la société Cedade ne justifiant pas avoir fait opérer une recherche de fuite par l'une des sociétés spécialisées dont les noms lui ont été communiqués par courrier du 23 août 2021 de la société Véolia, laquelle lui a en outre rappelé qu'elle n'est pas habilitée à intervenir en partie privative.

Il n'est donc pas sérieusement contestable que l'obligation de recherche de fuite et de réparation qui pèse sur la société Cedade demeure inachevée.

C'est donc à bon droit que le premier juge l'a à nouveau condamnée sous astreinte à faire diligenter à ses frais une recherche de fuite par une entreprise spécialisée et, le cas échéant, à procéder aux réparations nécessaires. Le prononcé d'une astreinte définitive, sollicitée par l'intimée, n'apparaît pas nécessaire.

Sur la demande en paiement formée à titre provisionnel au titre des factures de consommation d'eau non réglées, il n'est pas discuté qu'il reste dû par l'abonnée, en principal :

- la somme de 67.054,94 euros au titre du contrat n° 8028460 (factures impayées du 7 décembre 2020 au 16 juin 2022),

- la somme de 9.602,64 euros au titre du contrat n° 8347967 (factures impayées au 16 juin 2022), montants retenus par le premier juge.

La société Cedade se prévaut toutefois d'une contestation sérieuse en ce qu'elle devrait bénéficier du dégrèvement prévu à l'article L 2224-12-4 III bis du code général des collectivités territoriales.

Ce dégrèvement n'est cependant possible que pour les locaux d'habitation, or il résulte notamment d'un procés verbal de constat d'huissier de justice établi par la société Veolia le 20 novembre 2020 que les locaux du [Adresse 2] sont à usage commercial. En tout état de cause, et s'agissant de la maison d'habitation du [Adresse 2], le dégrèvement est conditionné à la production par l'abonné d'une attestation d'une entreprise de plomberie dans un délai d'un mois après avoir été informé de sa consommation anormale par le délégataire. Or, cette condition n'est pas remplie en l'espèce comme l'a relevé le premier juge, la recherche de fuite n'ayant pas été diligentée dans ce délai par la société Cedade.

Les factures impayées sont donc dues par la société Cedade dans leur intégralité, à titre provisonnel ; l'ordonnance sera confirmée de ce chef.

Sont également dues, en application de l'article R 2224-19-9 du code général des collectivités territoriales, les majorations de 25% de la redevance, qui ont été exactement chiffrées aux sommes provisionnelles de 7.345,69 eros et 810 euros par le premier juge. Ces majorations présentant un caractère réglementaire, elles ne peuvent s'analyser en une clause pénale contractuelle susceptible d'être révisée par le juge du fond. La contestation soulevée de ce chef n'est pas sérieuse.

L'ordonnance entreprise sera ainsi confirmée en toutes ses dispositions, sauf à modifier le point de départ de l'astreinte prononcée, y compris en ses dispositions relatives aux dépens et à l'article 700 du code de procédure civile, dont il a été faite une juste appréciation.

Perdant en appel, la société Cedade sera condamnée aux entiers dépens de cette instance, déboutée de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à ce titre à la société Véolia la somme de 2000 euros.

PAR CES MOTIFS

Confirme en toutes ses dispositions l'ordonnance entreprise, sauf à préciser que l'astreinte ne courra qu'un mois après la signification du présent arrêt ;

Y ajoutant,

Condamne la société Cedade aux entiers dépens de la présente instance,

La déboute de sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile et la condamne à payer à ce titre à la société Véolia Eau d'Ile de France la somme de 2.000 euros.

LA GREFFIÈRE POUR LA PRESIDENTE

DE CHAMBRE EMPÊCHÉE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/17623
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;22.17623 ?
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