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06/04/2023 | FRANCE | N°21/04823

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 06 avril 2023, 21/04823


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 06 AVRIL 2023



(n° 2023/ , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04823 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYPN



Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Février 2021 -Conseil de l'ordre des avocats de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES - RG n° 2018/508





APPELANTE



Madame [G] [H] ép. [U]

[Adresse 2]

[Localité 4]

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Représentée par Me Philippe ACHACHE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 238





INTIMÉE



S.A.S.U. SN PERFECT EUROPEENNE DE NETTOYAGE

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me ...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 06 AVRIL 2023

(n° 2023/ , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04823 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYPN

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 Février 2021 -Conseil de l'ordre des avocats de VILLENEUVE-SAINT-GEORGES - RG n° 2018/508

APPELANTE

Madame [G] [H] ép. [U]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Philippe ACHACHE, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 238

INTIMÉE

S.A.S.U. SN PERFECT EUROPEENNE DE NETTOYAGE

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Jacques LAROUSSE, avocat au barreau de PARIS, toque : D1017

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 02 mars 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Madame Catherine BRUNET, présidente de chambre chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre,

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Philippine QUIL, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE

Madame [G] [H] épouse [U], a été engagée par la société Elior par contrat de travail à durée indéterminée à temps partiel du 23 septembre 2015 en qualité de femme de chambre.

A compter du 1er octobre 2017, la société SN Perfect (ci-après la société) a succédé à la société Elior pour assurer une prestation de nettoyage sur le site de l'hôtel B&B à [Adresse 5], auquel Mme [H] était affectée.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale des entreprises de propreté et services associés du 26 juillet 2011 et la société occupait à titre habituel au moins onze salariés lors de la rupture des relations contractuelles.

Mme [H] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 3 au 10 octobre 2017.

Elle a été convoquée par lettre du 30 octobre 2017 à un entretien préalable fixé au 15 novembre.

Par lettre du 21 novembre 2017, elle a été licenciée pour faute grave.

Considérant que son licenciement était dépourvu de cause réelle et sérieuse et qu'un rappel de salaire lui était dû pour les mois d'octobre et novembre 2017, Mme [H] a saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges qui, par jugement du 18 février 2021 auquel la cour renvoie pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a :

- dit que son licenciement repose sur une faute grave ;

- débouté Mme [G] [H] épouse [U] du surplus de ses demandes ;

- débouté la société SN Perfect, prise en la personne de son représentant légal, de sa demande reconventionnelle formulée en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné Mme [G] [H] épouse [U] aux entiers frais et éventuels dépens de l'instance.

Mme [H] a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 26 mai 2021.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 13 juillet 2021 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [H] demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau, de :

- condamner la société SN Perfect au paiement des sommes suivantes :

* 1 561,62 euros à titre de rappel des salaires des mois d'octobre 2017 et novembre 2017,

* 156 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés incidents au rappel de salaire des mois d'octobre et de novembre 2017,

* 1 735,14 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

* 173 euros à titre d'indemnité compensatrice de congés payés afférente à l'indemnité compensatrice de préavis,

* 469,92 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 10 410,84 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse correspondant à 12 mois de salaire,

* 2 000 euros à titre d'indemnité en application de l'article 36 de la loi de 1991,

* entiers dépens ;

- ordonner la remise d'un certificat de travail et de l'attestation Pôle emploi, des bulletins de paie conformes sous astreinte de 15 euros par jour de retard et par document ;

- déclarer la société SN Perfect mal fondée en ses demandes, fins et conclusions et l'en débouter purement et simplement ;

- rejeter tout appel incident de la société SN Perfect.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 11 octobre 2021 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société SN Perfect demande à la cour de confirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions et y ajoutant de :

- condamner Mme [U] à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 22 février 2023.

MOTIVATION

Sur le licenciement

La lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée :

' (...) Nous vous rappelons que nous avons repris sur le site de l'hôtel B&B à [Localité 6] à compter du 1er octobre 2017 dans le cadre de l'application de l'annexe 7 de la convention collective des entreprises de propreté. Vous avez travaillé pour notre entreprise le 1er octobre 2017 et vous avez rencontré ce jour M. [E] notre directeur lequel vous a remis les documents relatifs à votre reprise ainsi que sa carte de visite. A la même occasion vous lui avez remis votre carte de séjour. Le lundi 02 octobre 2017, vous vous êtes présentée sur le site de l'hôtel B&B mais vous avez refusé de travailler pour le compte de notre entreprise, et ce, en présence des témoins. Vous avez déclaré à M. [E] vouloir rester dans l'effectif de la société sortante Elior. Votre refus non prévu de reprendre votre poste de travail a engendré une désorganisation dans l'exécution de nos prestations et nous étions contraints de faire appel à notre équipe mobile pour réaliser vos prestations, sachant que tous les agents présents de la société sortante ont refusé de reprendre leurs postes. Par lettre recommandée avec AR (...) en date du 05 octobre 2017 que vous avez retirée, nous vous avons mis en demeure pour reprendre votre poste de travail. Mais vous n'avez pas daigné de nous donner de vos nouvelles. N'ayant pas de vos nouvelles, nous vous avons adressé une seconde mise en demeure en date du 10 octobre 2017 que vous avez retirée. A l'issue de celle-ci vous avez fini par nous adresser un arrêt de maladie établi par votre médecin le 03 octobre 2017 et reçu par nos services le 12 octobre 2017. Soit 9 jours après le début de votre maladie. Vous n'ignorez pas que votre absence doit être justifier à votre employeur dans un délai de 48 heures. Malheureusement, vous n'avez pas respecté ce délai. Votre arrêt de maladie étant expiré le 10 octobre 2017, vous devriez reprendre votre poste de travail le 11 octobre 2017 ou nous adresser une prolongation ou tout autre motif valable d'absence. En vain. Ainsi, nous vous avons adressé deux nouvelles mises en demeures en date respectivement du 17 et 24 octobre 2017 pour reprendre votre poste. Mais vous n'avez pas daigné de reprendre votre poste. Aussi, une nouvelle lettre RAR (...) vous a été adressée pour organiser votre réintégration dans notre effectif mais vous n'avez pas donner de vos nouvelles. Nous nous permettons à cet égard de vous rappeler que l'envoi tardif de votre maladie ne peut être considérée comme un justificatif valable d'absence. Au contraire il démontre une volonté de nuire au bon fonctionnement de notre entreprise et une manoeuvre à perturber nos prestations auprès de notre client, et ce, dans un objectif de nous discréditer vis-à-vis de notre nouveau client dès le début de notre arrivée sur le site. Par conséquent, force est de constater que votre absence, sans notre autorisation, de votre poste de travail n'est plus tolérable et constitue un abandon de poste caractérisé qui coïncide avec un acte d'insubordination et une volonté de nuire au bon fonctionnement de l'entreprise rendant impossible la poursuite de notre relation contractuelle. Vous n'êtes pas sans savoir que la forte désorganisation que vous avez volontairement provoquée, a nui à la dynamique de notre équipe de travail. En effet, dans une petite entreprise comme la notre, l'absence d'un salarié engendre de grosses difficultés dans la gestion et contraint le personnel à assumer des situations difficiles et physiquement éprouvantes. Par ailleurs, la désorganisation de notre équipe a également nui à notre clientèle et altéré notre image de marque. Nous ne pouvons, en tant que petite entreprise, accepter de tels comportements et le risque de perdre une clientèle que nous avons tant de difficultés à fidéliser. Nous nous voyons, en conséquence, dans l'obligation de vous notifier votre licenciement pour faute grave, privative des indemnités de rupture, et sans possibilité de préavis. (...) '.

Mme [H] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse en indiquant qu'elle a été placée en arrêt de travail pour la période du 3 au 10 octobre 2017 puis qu'elle a été empêchée de reprendre le travail par la société.

La société soutient que le licenciement est fondé sur une faute grave car la salariée n'a pas accepté le transfert de son contrat de travail, n'a pas signé l'avenant à celui-ci puis n'a justifié que tardivement de son arrêt de travail pour ensuite selon elle, ne pas se présenter sur son lieu de travail malgré plusieurs mises en demeure.

Il résulte des articles L. 1234-1 et L. 1234-9 du code du travail que la faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constituent une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise et nécessite son départ immédiat sans indemnité. L'employeur qui invoque une faute grave doit en rapporter la preuve.

A titre liminaire, la cour relève que les deux parties retiennent que le contrat de travail de Mme [H] a été transféré de la société Elior à la société SN Perfect dans le cadre de l'application de l'article 7 de la convention collective des entreprises de propreté applicable.

Il est établi par la production de l'arrêt de travail du 3 octobre 2010 que Mme [H] a été placée en arrêt de travail pour maladie du 3 au 10 octobre 2010. La société produit aux débats 3 mises en demeure qu'elle lui a adressées postérieurement les 17, 24 et 25 octobre. Il est établi et non contesté par la salariée, que malgré ces mises en demeure qu'elle a reçues, elle ne s'est pas présentée sur son lieu de travail.

Mme [H] produit une lettre adressée à la société par un délégué syndical le 16 octobre 2017 affirmant qu'elle a commencé à travailler le 10 octobre mais que la gouvernante lui a dit d'arrêter puis que le 11 octobre, la gouvernante lui a interdit de travailler et a fait intervenir les forces de l'ordre pour lui faire quitter les lieux. Elle verse également aux débats une attestation du 23 octobre 2019 établie par Mme [B], une ancienne collègue, qui affirme que la gouvernante a demandé à l'appelante d'arrêter de travailler. La cour relève que le courrier adressé par le délégué syndical reflète les propres dires de Mme [H] et n'est pas corroboré par des éléments objectifs alors qu'il aurait été aisé dans le cadre du présent litige de justifier de l'intervention des forces de l'ordre. En outre, Mme [H] verse aux débats une déclaration de main courante effectuée le 12 octobre 2017 qui ne reflète également que ses propres dires mais dans laquelle elle ne relate pas une interdiction de travailler au sein de l'hôtel le 11 octobre mais un renvoi vers les bureaux de la société. Enfin, l'attestation produite établie deux ans après les faits, n'est pas circonstanciée en ce que la date et le lieu des faits allégués ne sont pas indiqués.

En conséquence, la cour constate que malgré trois mises en demeure Mme [H] ne s'est pas présentée sur son lieu de travail et n'a pas justifié de son absence de sorte qu'elle a ainsi commis une faute rendant impossible son maintien dans l'entreprise et nécessitant son départ immédiat sans indemnité.

Dès lors, son licenciement est fondé sur une faute grave et elle sera déboutée de ses demandes relatives à un licenciement sans cause réelle et sérieuse (indemnité compensatrice de préavis, indemnité compensatrice de congés payés afférents, indemnité de licenciement, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse).

La décision des premiers juges sera confirmée sur ces chefs de demande.

Sur le rappel de salaire

Mme [H] soutient qu'ayant été empêchée de travailler par l'employeur alors qu'elle se trouvait à sa disposition, elle peut prétendre au paiement des salaires pour les mois d'octobre et novembre 2017.

La société ne conclut pas sur ce point.

La cour a retenu que l'absence de Mme [H] était injustifiée postérieurement à son arrêt de travail de sorte qu'elle ne peut pas valablement solliciter un rappel de salaire pour la période postérieure. Elle ne développe aucun moyen au soutien du paiement d'un rappel de salaire pour la période antérieure étant observé qu'elle ne soutient avoir été empêchée de travailler du fait de son employeur qu'à compter du 11 octobre.

En conséquence, Mme [H] sera déboutée de sa demande de rappel de salaire et de l'indemnité compensatrice de congés payés afférents.

La décision des premiers juges sera confirmée sur ces chefs de demande.

Sur la remise des documents

Eu égard à la solution du litige, Mme [H] sera déboutée de sa demande à ce titre.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Partie perdante, Mme [H] épouse [U] sera condamnée au paiement des dépens. Le jugement sera confirmé en ce qu'il a mis les dépens à sa charge.

Aucune circonstance de l'espèce ne conduit à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, la décision des premiers juges étant confirmée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

DIT n'y avoir lieu à faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE Mme [G] [H] épouse [U] aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/04823
Date de la décision : 06/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-06;21.04823 ?
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