REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 5
ARRET DU 05 AVRIL 2023
(n° /2023, 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/17092 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CATOR
Décision déférée à la Cour : jugement du 21 mai 2019 - tribunal d'instance de CRETEIL RG n° 2018F00707
APPELANTE
SASU SR ELECTROTECHNIQUE 'SRE' prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège sis
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Laurence TARQUINY CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D0542
INTIMEE
SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège sis
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Saïd MELLA, avocat au barreau de PARIS, toque : A0289
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 29 novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre
Mme Alexandra PELIER-TETREAU, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère
Madame Elise THEVENIN-SCOTT, conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Elise THEVENIN-SCOTT dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD
ARRET :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre et par Manon CARON, greffière, présente lors de la mise à disposition.
EXPOSE DU LITIGE
La SAS SR ELECTROTECHNIQUE a confié à la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE la mise en 'uvre d'un enrobé de bitume sur ses parkings à [Localité 3] (Val de Marne), selon devis accepté du 2 juin 2017.
Les travaux n'ont pas été réceptionnés.
Arguant de désordres, la SAS SR ELECTROTECHNIQUE a saisi le juge des référés du tribunal de commerce d'EVRY d'une demande d'expertise. Monsieur [Y] [C] a été désigné en par ordonnance du 18 octobre 2017.
L'expert judiciaire a déposé son rapport le 23 avril 2018.
Au vu de ce rapport et faute de solution amiable, la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE a, par acte du 29 juin 2018, assigné en paiement du solde de son marché, la SAS SR ELECTROTECHNIQUE devant le tribunal de commerce d'EVRY.
Par jugement du 21 mai 2019, le tribunal a fixé la date de réception au 29 juin 2017, ce point, non repris au dispositif du jugement, n'étant plus contesté en cause d'appel. Pour le surplus, il a :
CONDAMNÉ la société SR ELECTROTECHNIQUE à payer à l'entreprise Jean LEFEBVRE la somme de 17 890 euros avec intérêts au taux légal de la banque centrale européenne majoré de 10 points à compter du 28 juillet 2017,
DÉBOUTÉ la société SR ELECTROTECHNIQUE de ses demandes :
de remboursement d'acompte de 12Â 500 euros,
de condamnation de l'entreprise Jean LEFEBVRE au paiement de la somme de 8 236,80 euros TTC à titre de dommages et intérêts pour réfection de l'enrobé devant le portail d'entrée,
de sa demande de dommages et intérêts de 22 006,56 euros pour l'enrobé du parking n°2,
de sa demande de 1 428 euros à titre de dommages et intérêts pour absence de marquage au sol,
CONDAMNÉ la société SR ELECTROTECHNIQUE aux dépens, incluant les frais d'expertise.
La SAS SR ELECTROTECHNIQUE a interjeté appel de ce jugement par déclaration au greffe en date du 23 août 2019.
Par dernières conclusions signifiées par voie électronique le 22 novembre 2019, la société SR ELECTRONIQUE demande à la cour, au visa des articles 1103 et 1231 du code civil, de :
INFIRMER le jugement rendu par le tribunal de commerce de CRETEIL en date du 21 mai 2019
En conséquence,
FIXER le solde de la créance de la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE France à 16 510, 80 euros TTC, se décomposant comme suit :
La somme de 2 550 euros au titre de la TVA due sur l'acompte initialement versé par la société SR ELECTROTECHNIQUE ;
La somme de 15 300 euros TTC au titre du solde de son marché déduction faite de la prestation de l'accrochage non réalisée estimée à 1 116 euros HT soit 1 339,20 euros TTC
DIRE n'y avoir lieu à l'indemnité de recouvrement de 40 euros, compte tenu du contexte du litige
DIRE que les travaux réalisés par la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE ne sont pas conformes et à l'origine des désordres relevés
En conséquence,
CONDAMNER la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FFRANCE à la société SR ELECTROTECHNIQUE les sommes suivantes :
8 236,80 euros TTC à titre de dommages-intérêts pour la réfection de l'enrobé devant les portails d'entrée,
22 006,56 euros à titre de dommages-intérêts, correspondant au coût de reprise de l'enrobé du parking 2, afin d'en faire installer un conformément à ses attentes,
1 428 euros, pour la reprise du marquage pour le parking 2,
ORDONNER la compensation judiciaire des sommes dues entre les parties,
REFORMER le jugement déféré en ce qu'il a majoré les sommes dues à la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE, à compter du 28 juillet 2017, selon le taux légal de la Banque Européenne majoré de 10 points, et ce d'autant que le solde revenant à la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE, est consigné entre les mains de Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de l'Essonne et ce depuis l'ordonnance ayant ordonné l'expertise judiciaire
DIRE que dans un souci d'équilibre du contrat, les sommes en principal seront majorées des intérêts au taux légal, à compter de la signification de l'arrêt à intervenir, déboutant les parties du surplus de leurs demandes formées à ce titre,
CONDAMNER la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE aux entiers dépens d'instance de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise, que Maître TARQUINY CHARPENTIER, Avocat, pourra recouvrer, sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile,
CONDAMNER la société ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE à payer la société SR ELECTROTECHNIQUE la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de procédure civile.
La société SR ELECTROTECHNIQUE a signifié le 2 mars 2020 des conclusions d'incident sur le fondement de l'article 909 du code de procédure civile. Par ordonnance du 1er septembre 2020, le conseiller de la mise en état a fait droit à l'incident et déclarées irrecevables les conclusions signifiées par l'intimé au-delà du délai de trois mois, tant au fond qu'en réponse à l'incident, ainsi que toutes les prétentions contenues dans celles-ci.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 15 novembre 2022 et l'audience de plaidoirie s'est tenue le 22 novembre 2022.
MOTIVATION
Il convient, à titre liminaire, de rappeler que les conclusions au fond de la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE ont été déclarée irrecevables comme tardives, et qu'en conséquence ni ces écritures, ni les pièces produites ne seront prises en compte.
Sur le solde du marché
La SAS SR ELECTROTECHNIQUE reconnaît rester débitrice de sommes au titre du marché de travaux de la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE mais les limite à 16 510,80 euros TTC demandant à la cour de déduire de la somme de 17 890 euros TTC les sommes suivantes :
1 339,20 euros TTC au titre de la prestation d'installation de la couche d'accrochage que la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE aurait admis ne pas avoir réalisée lors des opérations d'expertise.
40 euros au titre de l'indemnité de recouvrement.
Elle demande, en outre, que les intérêts dus sur le solde soient limités aux intérêts au taux légal.
Réponse de la cour :
En application des articles 1103 et 1104 du code civil dans leur rédaction issue de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 applicable aux faits d'espèce, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.
Ils doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d'ordre public.
Par ailleurs, il ressort de l'article 1353 du même code que celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation.
Enfin, tout retard de paiement entre professionnels donne obligatoirement lieu à une indemnité forfaitaire pour frais de recouvrement d'un montant de 40 euros, par application des articles L. 441-6 et D. 441-5 du Code de commerce.
En l'espèce, la relation contractuelle ayant existé entre la SAS SR ELECTROTECHNIQUE et la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE est fondée sur un devis MTE 24, accepté le 2 juin 2017, pour un coût total de travaux de 30 600 euros TTC comprenant les prestations suivantes :
Amenée et repliement du matériel
Balayage des surfaces extérieures
Fourniture et mise en 'uvre mécanique d'enrobé noir 0/6 sur 0,05 m d'épaisseur, y compris couche d'accrochage à émulsion de bitume sur trois zones : zone privée extérieure, zone publique extérieure et sous-sol.
Ce devis est complété par des conditions générales dont il ressort à l'article VIII ' Retard ou défaut de paiement : « Le non-respect d'une des échéances convenues entrainera l'application 1/ des pénalités pour retard de paiement calculées au taux directeur de refinancement de la BCE (taux refi) majoré de 10 points de pourcentage, à compter de la date d'exigibilité du paiement, et 2/ d'une indemnité forfaitaire de compensation de frais de recouvrement de 40 euros. », clause reprenant la formulation exacte de l'article L.441-6 du code de commerce.
La SAS SR ELECTROTECHNIQUE ne conteste pas devoir des sommes à la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE au titre du marché de travaux.
L'expert, dans son rapport, a procédé à une analyse du solde restant dû à la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE dont il ressort un montant total de 17 850 euros TTC. La SAS SR ELECTROTECHNIQUE ne démontre pas, contrairement à ce qu'elle affirme, qu'une partie des prestations n'auraient pas été réalisées, produisant, au contraire, un procès-verbal de réception établi et signé par elle dans lequel il est précisé que les travaux commandés à la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE ont été exécutés. Ce solde sera donc retenu.
S'agissant de la somme forfaitaire de 40 euros, il s'agit d'une indemnité due de plein droit, n'étant pas modulable et sur laquelle le juge ne peut se prononcer quant à son caractère proportionné ou pas. Le jugement ayant condamné la SAS SR ELECTROTECHNIQUE au paiement de cette somme doit donc être confirmé.
Enfin, c'est à juste titre que le jugement a appliqué aux sommes restant dues les intérêts contractuellement prévus à l'article VII des conditions générales dont la SAS SR ELECTROTECHNIQUE ne conteste pas avoir eu connaissance et les avoir acceptées. Ce point sera donc confirmé.
Sur les désordres, leur origine et leur qualification
Il est constant que les travaux réalisés par la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE ont été réceptionnés avec des réserves tenant à  :
Des raccords des enrobés visibles au sous-sol
La stagnation de l'eau au niveau du petit et du grand portail
Le nettoyage du bas du grand portail
La hauteur des enrobés en zone sous-sol
L'expert considère, aux termes de son rapport, que :
Après réfection du revêtement du parking 2 situé en sous-sol, les camionnettes équipées d'une galerie de toit et chargées d'une échelle 3 plans bloquent sous les poutres du plancher haut. Les investigations sur le revêtement ont montré une surépaisseur de celui-ci mais aussi une cote du support plus élevée à celle prévue initialement. La surépaisseur et la cote plus élevée pont pour effet de réduire la hauteur sous poutre de quelques centimètres et d'empêcher le passage des camionnettes.
Pour rendre accessible le parking 2, le revêtement doit être refait en respectant une hauteur maximale de 5 cm.
Sur les abords du portail de l'entrée principale, l'affaissement doit être supprimé en créant une grille ou en reprenant les enrobés pour respecter les niveaux et les pentes pour évacuer les eaux de pluie.
Sur la rampe d'accès, les surépaisseurs de revêtement créent un profil en long inadapté pour le franchissement du seuil de la porte d'entrée du parking 2 par les camionnettes.
L'enrobé de la rampe doit être repris.
L'expert note, sur les causes des désordres, s'agissant des parties extérieures, l'absence de raccordement des revêtements sur les ouvrages existant. Sur la partie intérieure (sous-sol), il précise que « l'entreprise n'a pas pris la précaution de contrôler que la hauteur sous poutre devait être de 2.20 m pour être conforme au projet. L'entreprise a dérogé aux règles de l'art, c'est-à -dire réceptionner le support avant toute intervention sur celui-ci ».
Enfin, répondant à la mission confiée, il émet l'avis suivant sur les imputabilités :
Les désordres constatés sur les parties extérieures incombent à l'entreprise (la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE)
Le désordre lié à l'inaccessibilité du parking 2 aux camionnettes résulte à la fois du client qui a préparé le support sans s'assurer que la hauteur sous poutre était conforme à celle figurant sur le plan de masse ; et de l'entreprise qui a négligé de le (le support) réceptionner et de contrôler l'épaisseur de la couche en enrobé à sa mise en 'uvre. À ce titre, il propose un partage de responsabilité en laissant 20% à la charge de la SAS SR ELECTROTECHNIQUE.
Sur les responsabilités
Le jugement a fait droit à la demande d'indemnisation de la SAS SR ELECTROTECHNIQUE au titre des travaux sur les zones extérieures, à hauteur de 5 652 euros mais l'a déboutée de celles relatives au parking situé en sous-sol au motif qu'elle ne rapportait pas la preuve que la hauteur sous plafond et l'utilisation par des camionnettes équipées de galeries étaient des prescriptions contractuelles connues de l'entreprise.
La SAS SR ELECTROTECHNIQUE sollicite la condamnation de la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE à l'indemniser dans les proportions suivantes :
Réfection de l'enrobé devant l'entrée (zone extérieure) : 8 236,80 euros TTC demandant que soit retenu le devis de la société ASTEN qu'elle produit (reprise complète de l'enrobé) et non celui établi par la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE, moins disant retenu par le tribunal de commerce (pose d'une grille devant le bloc moteur).
Reprise du revêtement de la rampe d'accès et du parking situé en sous-sol, outre le marquage des places : 22 006,56 euros + 5 116,50 euros + 1 428 euros = 28 551,06 euros TTC
Réponse de la cour :
En application de l'article 1792 du code civil, « Tout constructeur d'un ouvrage est responsable de plein droit, envers le maître ou l'acquéreur de l'ouvrage, des dommages, même résultant d'un vice du sol, qui compromettent la solidité de l'ouvrage ou qui, l'affectant dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendent impropre à sa destination.
Une telle responsabilité n'a point lieu si le constructeur prouve que les dommages proviennent d'une cause étrangère. »
La garantie légale des articles 1792 et suivants du code civil n'est due que par l'architecte, les entrepreneurs qui participent directement à la construction de l'ouvrage et qui sont liés au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage, à la différence des sous - traitants exclus de la garantie décennale. Sont bénéficiaires de cette garantie, le maître de l'ouvrage, propriétaire du bien, les acquéreurs de l'ouvrage. Toutefois, la garantie légale suppose que soient remplies les conditions suivantes pour pouvoir être actionnée : un ouvrage, une réception, un dommage survenu après cette réception et qui compromet la solidité de l'ouvrage ou l'affecte dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendant impropre à sa destination.
La réception est définie par l'article 1792-6 du code civil comme suit : « La réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. »
En l'espèce, il est constant que la réception a été faite avec des réserves portant précisément sur les désordres objets du litige. En conséquence, la garantie légale ne peut être mise en 'uvre.
À défaut de possible mise en 'uvre de la garantie légale, il doit être fait application, selon les hypothèses, de la responsabilité contractuelle ou délictuelle.
Il existe des relations contractuelles de nature à engager une responsabilité sur le fondement des articles 1231 et suivants du code civil entre la SAS SR ELECTROTECHNIQUE et la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE.
Les entrepreneurs sont tenus à une obligation de résultat dans le cadre de leurs rapports avec le maître de l'ouvrage se définissant comme l'obligation de livrer des travaux conformes à la destination convenue, exécutés en respectant les règles de l'art et les normes en vigueur au jour de leur intervention. Ils ne peuvent s'exonérer de leur responsabilité qu'en établissant l'existence d'une cause étrangère ou d'un cas de force majeure.
En l'espèce, il ressort des constatations du rapport d'expertise que la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE est seule responsable des désordres affectant les zones extérieures et se traduisant par un défaut de pente entraînant un stockage d'eau devant les portails.
Le jugement ayant retenu la responsabilité de la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE sera confirmé.
S'agissant du sous-sol, l'expert propose un partage de responsabilité. Toutefois, la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE, professionnel de la construction, quand bien même son intervention se fondait sur un relevé établi par le client, devait vérifier les cotes fournies, ce que note d'ailleurs l'expert, et devait, au besoin, conseiller au maître d'ouvrage les solutions adéquates permettant à ce dernier d'utiliser les lieux selon l'usage escompté. Enfin, l'expert pointe que l'impossibilité d'utiliser le parking pour les camionnettes tient tout autant à l'erreur de cote, qu'il incombait à l'entreprise de vérifier, qu'à une épaisseur de l'enrobé supérieure au 5 cm nécessaire.
Il n'y a pas lieu de retenir un partage de responsabilité avec le maître d'ouvrage, contrairement à ce que propose l'expert, dès lors qu'il n'existe pas d'élément permettant d'affirmer que la SAS SR ELECTRONIQUE est notoirement compétente dans le domaine de la construction permettant de considérer que ses relevés de hauteur constituent une immixtion exonératoire.
En conséquence, le jugement ayant écarté la responsabilité de la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE au titre des désordres du parking 2 en sous-sol sera infirmé.
Sur les préjudices
S'agissant de l'indemnisation des préjudices de la SAS SR ELECTROTECHNIQUE, il ne pourra être fait droit aux demandes qu'à la condition que soit rapportée la preuve par elle de la réalité du préjudice, ainsi que du lien de causalité direct avec les désordres constatés.
Par ailleurs, en vertu du principe de la réparation intégrale sans perte ni profit pour la victime, la réparation du préjudice doit correspondre à ce dernier et ne saurait être appréciée de manière forfaitaire.
En l'espèce, les éléments produits au dossier et plus particulièrement le devis de la société ASTEN du 17 janvier 2018, permettent d'évaluer comme suit le préjudice de la SAS SR ELECTROTECHNIQUE :
Réfection de l'enrobé devant l'entrée (zone extérieure) : 8 236,80 euros TTC
Reprise du revêtement de la rampe d'accès et du parking situé en sous-sol, en ce compris le marquage des places : 28 551,06 euros TTC
Total : 36 787,86 euros TTC
Le jugement sera infirmé sur l'évaluation des préjudices retenue et la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE condamnée au paiement de 36 787,86 euros TTC.
Sur la compensation :
La SAS SR ELECTROTECHNIQUE sollicite que soit ordonnée la compensation.
Le tribunal de commerce n'a pas répondu à cette demande en première instance.
Réponse de la cour :
Les créances de la SAS SR ELECTROTECHNIQUE et la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE étant connexes comme provenant du même contrat, il y a lieu de les compenser en application des articles 1347 et suivants du code civil dans leur rédaction postérieure à l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.
Sur les autres demandes :
Le sens de l'arrêt conduit à infirmer le jugement en ce qu'il avait retenu un partage des dépens. Les dépens de première instance et d'appel, y compris les frais d'expertise, seront mis à la seule charge de la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE qui succombe.
Enfin, si le jugement sera confirmé sur les dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile, la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE sera condamnée à verser à la SAS SR ELECTROTECHNIQUE la somme de 3 000 euros au titre de ses frais irrépétibles d'appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME le jugement du tribunal de commerce de CRETEIL en ce qu'il a :
Fixé la date de réception au 29 juin 2017
Condamné la SAS SR ELECTROTECHNIQUE au paiement du solde du marché de travaux, en ce compris la somme de 40 euros à titre d'indemnité forfaitaire de compensation de frais de recouvrement, soit la somme totale de 17 890 euros ;
Dit que les sommes dues au titre du solde du marché de travaux porteraient intérêt au taux contractuellement prévu égal au taux directeur de refinancement de la BCE (taux refi) majoré de 10 points de pourcentage, à compter du 28 juillet 2017, date de la mise en demeure.
Débouté la SAS SR ELECTROTECHNIQUE de sa demande de restitution de l'acompte initial versé au titre du marché de travaux ;
Débouté les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile
L'INFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau,
DIT la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE seule responsable de l'ensemble des désordres ;
CONDAMNE, en conséquence, la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE à payer à la SAS SR ELECTROTECHNIQUE la somme de 36 787,86 euros TTC à titre de dommages-intérêts ;
ORDONNE la compensation des sommes dues de part et d'autre,
CONDAMNE la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise ;
ADMET les avocats qui peuvent y prétendre et en ont fait la demande au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile.
CONDAMNE la SAS ENTREPRISE JEAN LEFEBVRE ILE DE FRANCE à payer à la SAS SR ELECTROTECHNIQUE la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,