REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 10
ARRÊT DU 03 AVRIL 2023
(n° 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/20235 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CEWMM
Décision déférée à la Cour : Jugement du 09 Septembre 2021 -Tribunal judiciaire de PARIS 17 RG n° 20/02628
APPELANTE
S.A.S. STEF LOGISTIQUE [Localité 7]
agissant en la personne de ses représentants légaux domicili
és en cette qualité au siège
[Adresse 2]
[Adresse 2]
N° SIRET : 479 92 0 2 41
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477
INTIME
L'ETAT, MINISTERE DE L'ACTION ET DES COMPTES PUBLICS DIRECTION GENERALE DES DOUANES ET DROITS INDIRECTS,
représenté par Monsieur le Directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 6] OUEST
[Adresse 1]
[Adresse 1]
Représenté par Me Jean DI FRANCESCO de la SCP URBINO ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0137
Représenté par Me Nicolas NEZONDET Avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 16 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, présidente
Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur [R] [V] dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ
ARRÊT :
- contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Edouard LOOS,Président et par Sylvie MOLLÉ, Greffier présent lors du prononcé.
EXPOSÉ PRÉALABLE
La société Stef Logistique [Localité 7] exerce une activité de stockage, congélation et décongélation sous températures dirigées. Elle produit sur sites l'air réfrigéré nécessaire à son activité d'entreposage sous températures dirigées.
Considérant qu'elle exploitait ainsi une installation industrielle électro-intensive au sens de l'article 266 quinquies C du code des douanes sur ses sites de [Localité 3], [Localité 4] Nord, [Localité 7] 1 et [Localité 7] 2, lui ouvrant droit au bénéfice d'un taux réduit pour la taxe intérieure sur la consommation finale d'électricité (TICFE) prévu par cet article, la société Stef Logistique [Localité 7] a, le 13 mars 2018, transmis à son fournisseur d'électricité quatre attestations justifiant du bénéfice d'un tarif réduit pour la période allant du 1er janvier au 23 septembre 2018 et demandant que soit appliqué le tarif réduit pour 75 % de sa consommation électrique totale, utilisée pour la production de froid.
Le 29 mai 2019, elle a transmis ses états récapitulatifs pour l'année 2018 à Strasbourg Énergie Grand Est pour ses quatre sites.
Le 5 juin 2019, l'administration des douanes et droits indirects a effectué une visite au sein du siège social de la société Stef Logistique et a émis, le 29 juillet 2019, un avis de résultat d'enquête aux termes duquel elle a considéré que la société ne disposait pas d'une installation industrielle au sens du décret n°2016-556, qu'elle ne pouvait pas bénéficier du taux réduit de la TICFE et qu'elle en avait indûment bénéficié en 2018.
Elle a confirmé sa position le 18 septembre 2019 et a dressé un procès-verbal de notification d'infraction le 8 octobre 2019. Elle a remis à la société Stef Logistique [Localité 7] un avis de paiement daté du 8 octobre 2019 portant sur la somme totale de 245 149,00 euros comprenant 237 722,00 euros de droits et 7 427,00 euros d'intérêts de retard.
Elle a émis le 5 novembre 2019 un avis de mise en recouvrement du même montant, que la société Stef Logistique [Localité 7] a contesté. Sa réclamation a été rejetée par l'administration des douanes le 9 janvier 2020.
Par acte du 4 mars 2020, la société Stef Logistique [Localité 7] a fait assigner l'administration des douanes et droits indirects devant le tribunal judiciaire de Paris.
Par jugement rendu le 9 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Paris a statué comme suit :
'- Déboute la société par actions simplifiée Stef Logistique [Localité 7] de l'ensemb1e de ses prétentions ;
- Condamne la société par actions simplifiée Stef Logistique [Localité 7] à payer à l'administration des douanes 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamne la société par actions simplifiée Stef Logistique [Localité 7] aux dépens.
- Dit n'avoir lieu à exécution provisoire ;'
Par déclaration du 22 novembre 2021, la S.A.S.U. Stef Logistique [Localité 7] a interjeté appel du jugement, intimant l'Etat, ministère de l'action et des comptes publics, direction générale des douanes et droits indirects représentée par le directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 5] Ouest.
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 24 janvier 2022, la S.A.S.U. Stef Logistique [Localité 7] demande à la cour de :
'Vu les articles 4, 5, 16, 515 et 700 du code de procédure civile, l'article 266 quinquies C du code des douanes, les articles L. 211-2 et L. 211-3 du code des relations entre le public et l'administration ;
Vu le décret n°2010-1725 du 30 décembre 2010,
Vu le décret n°2007-1888 du 26 décembre 2007,
Vu le décret n°2018-802 du 21 septembre 2018,
Vu la circulaire du 11 mai 2016,
Vu la jurisprudence administrative, notamment la décision du Conseil d'Etat du 22 février 2017,
- Déclarer recevable et fondé l'appel formé par la société Stef Logistique [Localité 7].
Y faisant droit,
Annuler ou, en tout état de cause, infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 9 septembre 2021 en ce qu'il a:
- débouté la société par actions simplifiée Stef Logistique [Localité 7] de l'ensemble de ses prétentions ;
- condamné la société par actions simplifiée Stef Logistique [Localité 7] à payer à l'administration des douanes 1 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile o;
- condamné la société par actions simplifiée Stef Logistique [Localité 7] aux dépens.
Et statuant à nouveau,
- Constater que la société Stef Logistique [Localité 7] est éligible au régime des tarifs réduits de CSPE applicable aux installations industrielles électro-intensives ;
- Prononcer l'illégalité de l'avis de mise en recouvrement n°773/2019/090 du 5 novembre 2019 d'un montant de 245 149 euros et de la décision de rejet du 9 janvier 2020 ;
- Annuler l'avis de mise en recouvrement n°773/2019/090 du 5 novembre 2019 d'un montant de 245 149 euros et la décision de rejet du 9 janvier 2020 ;
- Décharger la société Stef Logistique [Localité 7] du paiement de la somme de 245 149 euros
Y ajoutant,
- Condamner l'État au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- Condamner l'État au paiement des entiers dépens.'
Par dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par voie électronique le 16 février 2022, le directeur régional des douanes et droits indirects demande à la cour de :
'- Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
- Débouter la société Stef Logistique [Localité 7] de l'ensemble de ses demandes,
Et y ajoutant,
- Condamner la société Stef Logistique [Localité 7] à payer à l'administration des douanes et droits indirects la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamner la société Stef Logistique [Localité 7] aux entiers dépens d'appel.'
MOTIVATION
1.- Sur l'éligibilité de la société Stef Logistique [Localité 7] au taux réduit de TICFE
Enoncé des moyens
La société Stef Logistique [Localité 7] fait valoir que, à la date des faits à l'origine du litige, elle exerçait bien une activité de production et distribution d'air réfrigéré, relevant de la section D de la NAF (sous classe 35.30Z), distincte de ses activités de stockage et de transport (relevant de la section H de la NAF sous classe 52.10A), et que cette activité lui ouvre droit au régime des tarifs réduits de la TICFE.
Selon elle, la circonstance que l'air réfrigéré qu'elle produit soit nécessaire à l'exercice de son activité principale est sans incidence sur son éligibilité aux taux réduits de TICFE, et ce pour plusieurs motifs.
En premier lieu, elle soutient qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne permet d'exclure de la section D de la NAF les activités de production et de distribution d'air réfrigéré lorsque le produit de cette activité est intégralement consommé pour les besoins de l'activité principale ; au contraire, la NAF elle-même définit des activités dont le produit est intégralement auto-consommé.
En second lieu, la société Stef Logistique [Localité 7] indique que l'éligibilité aux taux réduits de TICFE est conditionnée à l'exercice d'une activité relevant des sections B à E de la NAF, qui peut être une activité principale, secondaire ou auxiliaire. Elle expose que, selon le guide d'utilisation de la NAF, l'activité principale est celle qui contribue le plus à la valeur ajoutée, l'activité secondaire est celle qui donne lieu à la production de biens ou de services pour être destinées à des tiers et l'activité auxiliaire est celle qui vient au soutient d'une activité principale ou secondaire. Elle rappelle cependant que le guide d'utilisation exclut du champ des activités auxiliaires un certain nombre d'activités qui, eu égard à leur importance économique, doivent être considérées comme des activités principales ou secondaires, quand bien même elles ne seraient qu'auxiliaires pour l'entreprise. Tel est le cas de la production de biens ou services qui font partie intégrante de la production de l'activité principale ou secondaire ainsi que de la production d'énergie, même si la totalité de la production est consommée par l'unité mère. La société Stef Logistique [Localité 7] soutient que son activité de production et de distribution de froid se situe dans le cadre de ces deux exceptions, que c'est en réalité l'activité principale de l'installation de production et de distribution d'air réfrigéré que de produire et distribuer de l'air réfrigéré et que les sociétés Stef disposent ainsi d'une installation industrielle éligible au régime des taux réduits de TICFE, et ce alors même que le produit de cette installation est auto-consommé.
En troisième lieu, la société Stef Logistique [Localité 7] fait valoir que le caractère accessoire d'une activité par rapport à une autre activité n'est pas de nature à justifier que le régime des taux réduits de TICFE lui soit refusé dès lors que le législateur ne l'a pas prévu, qu'en outre, le guide d'utilisation de la NAF précise que celle-ci ne distingue pas les activités en fonction de leur mode d'exploitation et/ou des modalités d'utilisation des produits que l'activité génère et que, dès lors, une activité dont le produit est intégralement auto-consommé peut parfaitement être qualifiée d'activité économique à part entière, d'autant plus que le guide d'utilisation de la NAF reconnaît la possibilité que coexistent plusieurs activités économiques au sein d'une même société.
La société Stef Logistique [Localité 7] soutient en outre que s'il a fallu une modification réglementaire pour exclure les activités secondaires du domaine d'application de l'article 266 quinquies C du code des douanes, cela signifie nécessairement que ces activités pouvaient antérieurement bénéficier du taux réduit d'imposition et que seule la loi de finances rectificative pour 2017 a interdit aux entreprises considérées comme non industrielles, mais exploitant à titre secondaire ou accessoire des installations industrielles, de bénéficier du taux réduit.
Par ailleurs, la société Stef Logistique [Localité 7] expose qu'au sens du décret du 30 décembre 2010, dans sa version applicable à la date des faits, l'installation se définit comme une 'unité technique fixe', sans référence à la notion d'autonomie qui n'est apparue dans le droit positif qu'au 1er juillet 2018 et que l'interprétation de l'article 266 quinquies C du code des douanes à la lumière du droit européen confirme l'absence de condition liée à la prétendue autonomie de l'unité technique fixe pour pouvoir prétendre au bénéfice des taux réduits de la TICFE. Elle souligne que ses installations de production et de distribution d'air réfrigéré ne sont pas mobiles, sont séparées structurellement de ses entrepôts de stockage et font l'objet d'une exploitation autonome, fonctionnant même lorsqu'il n'y a plus d'activité sur les sites, les jour fériés et les week-ends notamment et pouvant être mises à l'arrêt indépendamment des autres installations des sites. Elle en conclut que ces installations sont des unités techniques fixes et, par suite, des installations industrielles.
En réponse, l'administration des douanes fait valoir que le bénéfice du taux réduit de la TICFE est réservé aux installations industrielles c'est-à-dire aux installations électro-intensives au sein desquelles sont exercées exclusivement des activités relevant des sections B (industries extractives), C (industries manufacturières), D (production d'électricité, de gaz, de vapeur et d'air conditionné), E (production et distribution d'eau, assainissement, gestion des déchets et dépollution) de la NAF. Elle soutient que pour bénéficier du taux réduit, les activités doivent toutes relever des sections B, C, D et E de l'annexe du décret du 26 décembre 2007 et rappelle que la société Stef Logistique [Localité 7] relève du code APE (NAF) 5210A avec pour activité l'entreposage et le stockage.
L'administration des douanes considère que les installations en litige ne peuvent pas présenter un caractère industriel au motif qu'il y serait exercé non seulement une activité de stockage mais également une activité de production et de distribution d'air et d'eau refroidis relevant de la section D sous classe 35.30Z qui implique d'en assurer la livraison ou la distribution sous forme de chaleur ou de froid à différents clients ou abonnés par un réseau. En effet, pour elle, le principe général revendiqué par la société Stef de prendre en compte une activité auto-consommée comme activité économique productive n'est pas reconnu par la NAF.
Par ailleurs, l'administration des douanes fait valoir que la société Stef Logistique [Localité 7] n'exerce pas distinctement une activité de stockage et d'entreposage réfrigéré et une activité de production et de distribution d'air et d'eau refroidis dans ses installations. Selon elle, la production de froid dans ses installations fait partie intégrante du processus d'entreposage et de stockage frigorifié et ne peut donc pas être considérée comme une activité distincte de l'activité d'entreposage et de stockage relevant de la section D pouvant donner aux installations un caractère industriel.
L'administration des douanes considère enfin que l'installation industrielle mentionnée à l'article 266 quinquies C du code des douanes dans sa rédaction antérieure à la loi de finances pour 2017, doit nécessairement s'entendre comme une entité autonome, comme cela résulte de la directive 2003/96/CE transposée par la réglementation nationale relative à la TICFE, c'est-à-dire capable de fonctionner par ses propres moyens et qu'elle doit être consacrée à la réalisation d'activités principalement industrielles, excluant de fait le bénéfice du taux réduit à une entreprise non industrielle exerçant une activité à titre secondaire. Elle considère que l'existence en l'espèce d'un local affecté à la production d'air conditionné n'est pas significatif dès lors, d'une part, que le local est totalement intégré aux locaux réservés à l'activité d'entreposage et, d'autre part, qu'il ne constitue aucunement une unité autonome consacrée à la réalisation d'une activité industrielle.
Réponse de la cour
Le bénéfice du taux réduit de la TICFE est régi, jusqu'au 23 septembre 2018, par les règles suivantes :
L'article 266 quinquies C du code des douanes qui dispose, dans sa rédaction alors applicable que :
'(')
-a. Pour les personnes qui exploitent des installations industrielles électro-intensives au sens où, au niveau de l'entreprise ou de ses sites, le montant de la taxe qui aurait été due en application du B, sans application des exonérations et exemptions, est au moins égal à 0,5 % de la valeur ajoutée, le tarif de la taxe intérieure de consommation applicable aux consommations finales d'électricité effectuées pour leurs besoins est fixé à :
2 € par mégawattheure, si la consommation du site ou de l'entreprise est strictement supérieure à 3 kilowattheures par euro de valeur ajoutée ;
5 € par mégawattheure, si la consommation du site ou de l'entreprise est comprise entre 1,5 et 3 kilowattheures par euro de valeur ajoutée ;
7,5 € par mégawattheure, si la consommation du site ou de l'entreprise est strictement inférieure à 1,5 kilowattheure par euro de valeur ajoutée.
(...).'
L'article 3 du décret n°2016-566 du 6 mai 2016 modifiant le décret n°2010-1725 du 30 décembre 2010 pris pour l'application de l'article 266 quinquies C du code des douanes qui dispose que:
'L'article 2 du décret n°2010-1725 du 30 décembre 2010 est remplacé par les dispositions suivantes :
« Art. 2. - Pour l'application du a du C du 8 de l'article 266 quinquies C du code des douanes, on entend par « installation industrielle » une unité technique fixe au sein de laquelle sont effectuées une ou plusieurs des activités relevant des sections B, C, D et E de l'annexe au décret no 2007-1888 du 26 décembre 2007 portant approbation des nomenclatures d'activités et de produits françaises ainsi que toute autre activité s'y rapportant directement, exercée sur le même site et techniquement liée à ces activités.
(...)'
La circulaire du 11 mai 2016 relative à la TICFE qui précise en son paragraphe n°93 que :
'[93] Détermination du caractère industriel : Sont considérées comme industrielles, les installations qui exercent au moins une activité relevant des sections B (industrie extractive), C (industrie manufacturière), D (production et distribution d'électricité, de gaz, de vapeur et d'air conditionné) ou E (production et distribution d'eau; assainissement, gestion des déchets et dépollution) de l'annexe au décret n° 2007-1888 du 26 décembre 2007, portant approbation des nomenclatures d'activités et de produits françaises (NAF).'
Ces dispositions légales et réglementaires transposent en droit interne la directive 2003/96/CE du 27 octobre 2003 restructurant le cadre communautaire de taxation des produits énergétiques et de l'électricité, comme en atteste le visa fait à cette directive dans le préambule du décret n°2010-1725 du 30 décembre 2010 pris en application de l'article 266 quinquies C du code des douanes et du décret modificatif n°2016-556 du 6 mai 2016.
Il en résulte que ces dispositions et les concepts qu'elles contiennent ne peuvent être appliqués et interprétés qu'à la lumière du texte et de la finalité de la directive européenne qu'elles transposent en droit interne, et ce afin d'atteindre le résultat visé par cette directive (CJUE, 10 avril 2014, aff. n°14/83).
L'article 17 paragraphe 1 point a) 1er alinéa de la directive 2003/96/CE dispose que :
'1. Pour autant que les niveaux minima communautaires de taxation prévus par la présente directive soient respectés en moyenne pour chaque entreprise, les États membres pourront appliquer des réductions fiscales sur la consommation de produits énergétiques utilisés pour le chauffage ou pour les besoins prévus à l'article 8, paragraphe 2, points b) et c), et d'électricité dans les cas suivants:
a) en faveur des entreprises grandes consommatrices d'énergie.
On entend par «entreprise grande consommatrice d'énergie», une entreprise, telle que définie à l'article 11, dont les achats de produits énergétiques et d'électricité atteignent au moins 3 % de la valeur de la production ou pour laquelle le montant total des taxes énergétiques nationales dues est d'au moins 0,5 % de la valeur ajoutée. Dans le cadre de cette définition, les États membres peuvent appliquer des critères plus restrictifs, tels que des définitions du chiffre d'affaires, du procédé et du secteur industriel.
(...)'
Contrairement à ce que soutient la société Stef Logistique [Localité 7] la référence à 'l'entreprise' est donc pertinente pour apprécier le champ d'application de la TICFE et de ses exonérations car il s'agit de la seule unité de référence à laquelle se réfère la directive 2003/96/CE.
Or, pour les besoins de l'application de cette directive, 'l'entreprise' est définie en son article 11 paragraphe 2 comme suit :
'2. Aux fins de la présente directive, on ne peut entendre par «entreprise» une entité d'une taille inférieure à celle d'une division d'une entreprise ou d'une entité juridique qui, du point de vue de l'organisation, constitue une exploitation indépendante, c'est-à-dire une entité capable de fonctionner par ses propres moyens.'
Il en résulte que l'unité technique fixe composant l'installation industrielle à laquelle se réfère l'article 2 du décret du 30 décembre 2010 modifié le 6 mai 2016 pour l'application de l'article 266 quinquies C paragraphe 8 point C a) du code des douanes s'entend d'une entité constituant une exploitation indépendante d'une taille équivalente à une division d'une entreprise ou d'une entité juridique.
Toute autre interprétation de 'l'unité technique fixe' visée par le décret n°2016-566 du 6 mai 2016 est exclue sauf à porter atteinte au principe d'interprétation conforme du droit européen et au risque de créer une distorsion de concurrence entre les entreprises situées sur les différents territoires de l'Union européenne.
La société Stef Logistique [Localité 7] soutient que son installation de production d'air réfrigéré distribué dans le réseau alimentant les entrepôts frigorifiques des sites exploités à [Localité 3], [Localité 4] Nord et [Localité 7] correspond à une unité technique fixe éligible au taux réduit de TICFE pour la période allant du 1er janvier au 23 septembre 2018..
Elle ne verse cependant aux débats aucune pièce de nature à caractériser le fait allégué que ces installations de production d'air réfrigéré constituent chacune une division des établissements de [Localité 3], [Localité 4] Nord et [Localité 7] 1 et 2 dont l'activité principale est l'entreposage sous température dirigée, activité dont la société Stef Frigorifique [Localité 7] ne conteste pas qu'elle ne peut entrer dans la catégorie des installations industrielles au sens de l'article 266 quinquies C paragraphe 8 point C a) du code des douanes.
Elle ne justifie pas ainsi que ces installations de production d'air réfrigéré disposent de moyens juridiques et humains autonomes et qu'elles génèrent un chiffre d'affaire identifiable dans les comptes de la société Stef Frigorifique [Localité 7].
Le seul fait que les installations de production d'air réfrigéré de la société Stef Logistique [Localité 7] fassent l'objet d'une exploitation en site propre, dans une partie physiquement séparée des sites d'entreposage est insuffisant pour caractériser une ou des divisions de la société Stef Logistique [Localité 7] constituant une ou des exploitations indépendantes.
La société Stef Logistique [Localité 7] ne justifie donc pas qu'elle remplissait les conditions posées par l'article 266 quinquies C paragraphe 8 point C a) du code des douanes pour bénéficier du taux réduit de TICFE pour la période de consommation d'électricité allant du 1er janvier au 23 septembre 2018, son activité de production d'air réfrigéré ne pouvant être qualifiée d'installation industrielle, le débat qu'elle introduit sur l'absence d'exclusion par ce texte des activités secondaires ou même seulement accessoires étant dès lors dépourvu d'objet et de pertinence.
Pour ce motif également, il a été exactement rappelé par les premiers juges que les moyens tirés de la modification apportée à l'article 266 quinquies C paragraphe 8 point C a) du code des douanes par la loi de finances rectificative du 28 décembre 2017 sont inopérants.
Par suite, le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a débouté la société Stef Logistique [Localité 7] de sa demande d'annulation pour illégalité de l'avis de mise en recouvrement n°773/2019/090 du 5 novembre 2019 ainsi que de la décision de rejet de l'administration des douanes du 9 janvier 2020 et de sa demande de décharge des droits et intérêts de retard mis en recouvrement.
2.- Sur les frais du procès
Selon l'article 109-II de la loi n°2019-222 du 23 mars 2019, l'article 5 (hors 5-II) ayant abrogé l'article 367 du code des douanes, s'applique aux instances introduites à compter du 1er janvier 2020. Tel est le cas de l'instance introduite par la société Stef Logistique [Localité 7] par assignation signifiée le 4 mars 2020. Les premiers juges ont donc exactement statué sur les dépens conformément aux dispositions des articles 695 et 696 du code de procédure civile ainsi que sur la demande formée par l'administration des douanes à titre d'indemnité de procédure. Le jugement déféré sera dès lors confirmé en ce qu'il a condamné la société Stef Logistique [Localité 7], partie perdante en première instance, aux dépens et aux frais irrépétibles.
Partie perdante également en appel, la société Stef Logistique [Localité 7] sera condamnée aux dépens d'appel.
Pour ce motif, elle sera déboutée de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle sera condamnée à payer la somme de 3 000 euros à l'administration des douanes et des droits indirects à titre d'indemnité de procédure en considération des frais de justice que cette dernière a dû exposer afin d'assurer la défense de ses intérêts.
PAR CES MOTIFS
La cour,
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour,
Y ajoutant,
CONDAMNE la S.A.S.U. Stef Logistique [Localité 7] aux dépens d'appel,
DÉBOUTE la S.A.S.U. Stef Logistique [Localité 7] de sa demande formée au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la S.A.S.U. Stef Logistique [Localité 7] à payer la somme de 3 000 euros à l'Etat, ministère de l'action et des comptes publics, Direction générale des douanes et droits indirects représentée par le directeur régional des douanes et droits indirects de [Localité 5], en application de l'article 700 du code de procédure civile,
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT,