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03/04/2023 | FRANCE | N°21/00191

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 9, 03 avril 2023, 21/00191


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 9



ORDONNANCE DU 03 AVRIL 2023

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2023, 5 pages)







Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00191 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDMLX





NOUS, Sylvie FETIZON, Conseillère, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRE

TZ, au prononcé de l'ordonnance.





Vu le recours formé par :





Madame [C] [I]

[Adresse 3]

[Localité 2]



Comparante en personne,

Demandeur au recou...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 9

ORDONNANCE DU 03 AVRIL 2023

Contestations d'Honoraires d'Avocat

(N° /2023, 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/00191 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDMLX

NOUS, Sylvie FETIZON, Conseillère, à la Cour d'Appel de PARIS, agissant par délégation de Monsieur le Premier Président de cette Cour, assistée de Eléa DESPRETZ, au prononcé de l'ordonnance.

Vu le recours formé par :

Madame [C] [I]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Comparante en personne,

Demandeur au recours,

contre une décision du Bâtonnier de l'ordre des avocats de PARIS dans un litige l'opposant à :

Maître [O] [T]

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Chrystelle DESCHAMPS, avocat au barreau de PARIS

Défendeur au recours,

Par décision contradictoire, statuant par mise à disposition au Greffe, après avoir entendu les parties présentes à notre audience publique du 15 Février 2023 et pris connaissance des pièces déposées au Greffe,

L'affaire a été mise en délibéré au 03 Avril 2023 :

Vu les articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991 ;

****

Statuant en application des articles 174 et suivants du décret du 27 novembre 1991, Monsieur le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Paris a rendu une décision contradictoire le 10 mars 2021 qui a :

- fixé à la somme de 20 000 euros HT le montant des honoraires dus à Maître [O] [T], avocat, par Madame [C] [I]

- constaté le versement d'ores et déjà intervenu de la somme de 2500 € HT soit 3000 € TTC

- condamné en conséquence Madame [C] [I] à payer à Maître [O] [T] la somme de17 500 € HT, somme majorée de l'intérêt au taux légal à compter de la date de notification de la décision

- rejeté toutes les autres demandes, plus amples ou complémentaires

- dit que la signification de la décision sera à la charge de Madame [C] [I] s'il se révélait nécessaire d'y procéder.

Le 29 mars 2021, par lettre reçue au greffe le 02 avril 2021, Madame [C] [I] a formé un recours contre cette décision.

A L'AUDIENCE

Madame [C] [I] se présente. Elle sollicite de la cour :

- l'infirmation de la décision critiquée

- la confirmation de ses demandes devant le Bâtonnier soit le remboursement des honoraires versés à Maître [T] ainsi qu'une somme de 3000 euros.

- le débouté de Maître [T] de l'intégralité de ses demandes

Madame [I] fait notamment valoir :

- qu'elle n'a obtenu par son avocat aucun résultat justifiant le versement d'honoraires

- qu'elle a refusé de signer le dernier protocole transactionnel qui lui a été soumis en raison des termes mensongers et accusatoires à son encontre ; ce protocole était en réalité un acte d'accusation contre elle

- que malgré ses remarques, Maître [T] n'a pas voulu rectifier le dernier protocole envoyé et s'est dessaisi de son dossier, la contraignant à trouver un autre avocat

- qu'elle a préféré porter son affaire devant le conseil des prud'hommes afin de faire reconnaître, notamment, l'existence d'un harcèlement de la part de son employeur

- qu'en tout état de cause, les diligences prétendument effectuées par Maître [T] ont été largement exagérées et son avocat travaillait en réalité dans l'intérêt de son employeur et non dans son propre intérêt, Maître [T] étant rémunéré par l'employeur ; elle conteste notamment le nombre d'appels téléphoniques passés ainsi que les 240 mails figurant dans le relevé de diligences

- que tous les projets de protocole ont été rédigés par la partie adverse et non, dans son intérêt

Maître [T] est représenté à l'audience par un avocat.

Ce dernier dépose des conclusions visées par le greffe auxquelles la Cour se réfère et dans lesquelles il est demandé :

- de confirmer la décision critiquée en ce qu'elle a condamné Madame [I] à lui verser des honoraires en compensation des prestations et diligences incontestables qu'elle a réalisées

- de réformer la décision sur son quantum

- de voir fixer le montant des honoraires sous déduction des provision perçues à hauteur de 28 500 € HT soit 34 200 € TTC à la suite de l'ensemble des diligences effectuées

- à titre subsidiaire, de fixer le montant des honoraires à une somme qui ne saurait être inférieure à 25 000 € HT soit la somme de 30 000 € TTC correspondant aux diligences effectuées dans le cadre de la négociation d'un départ amiable de Madame [I]

- à titre subsidiaire, de confirmer la décision attaquée en ce qu'elle a condamné Madame [I] à lui verser la somme de 20 000 € HT au titre des honoraires dus

Maître [T] soutient notamment :

- qu'elle a succédé à deux confrères

- que de nombreuses tractations ont été rendues nécessaires pour aboutir à un départ négocié de sa cliente

- qu'il a été aussi nécessaire de rédiger 8 protocoles d'accord dans l'intérêt de Madame [I], cette dernière refusant finalement de signer le huitième protocole soumis lequel prévoyait le versement d'une somme d'environ 220 000 euros, soit 44 mois de salaire brut, somme bien supérieure à celle obtenue par sa cliente postérieurement devant le Conseil de Prud'hommes

- que les diligences effectuées correspondent à l'équivalent de 140 heures de travail, que ce soient les rendez vous physiques tant avec Madame [I] qu'avec les conseils de son employeur, sans compter le temps passé à étudier le dossier, analyser les pièces et effectuer des recherches juridiques

SUR CE

En l'espèce, il est constant que Madame [C] [I], assistante de Direction depuis une trentaine d'années de M [B] [N], hommes d'affaires à la tête notamment de la société ACANTHE DEVELOPPEMENT,a saisi le 21 janvier 2020 Maître [O] [T], avocat, pour la défense de ses intérêts dans le cadre d'un départ amiable de son entreprise, compte tenu des difficultés importantes qu'elle rencontrait au sein de son entreprise.

Une convention d'honoraires a été signée entre les parties, laquelle prévoyait « un honoraire forfaitaire de 2500 € HT (3000 € TTC) et un honoraire de résultat de 11 % des sommes obtenues au profit de Madame [I] que ce soit devant le conseil de prud'hommes dans le cadre d'une transaction / toute voie amiable (l'honoraire de résultat portera sur l'ensemble des sommes obtenues)

Des tractations sont intervenues entre l'employeur et Madame [I] via leurs avocats respectifs pour finaliser la fin du contrat de travail de l'appelante.

Un huitième protocole a été proposé à Madame [I], laquelle a refusé d'y donner suite, n'étant pas d'accord avec les termes utilisés par son employeur qu'elle estimait mensongers. Les indemnités proposées s'élevaient à la somme de 223 000 euros environ.

Maître [T] mettait un terme à leurs relations et se dessaisissait du dossier avant toute décision définitive, contraignant Madame [I] à prendre attache avec un autre avocat pour porter son litige au contentieux prud'homal. Madame [I] a obtenu une décision de départage définitive le 16 novembre 2022 dans laquelle une somme totale de 114 000 euros lui a été allouée, notamment une somme de 3000 € à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral et 35 000 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul.

Il convient de constater que le dessaisissement de l'avocat intimé est intervenu avant qu'une décision définitive soit rendue.

Le dessaisissement de l'avocat avant que soit intervenu un acte ou une décision juridictionnelle irrévocable rend inapplicable la convention d'honoraires initialement conclue et les honoraires dus à l'avocat pour la mission effectuée doivent alors être fixés selon les critères définis à l'article 10 alinéa 2 de la loi du 31 décembre 1971à savoir la situation de fortune du client, la difficulté de l'affaire, les frais exposés par l'avocat, sa notoriété et des diligences de celui-ci...

De même, dans le cadre d'un dessaisissement de l'avocat, l'honoraire de résultat n'est dû que si, au jour où le premier président statue, un acte ou une décision irrévocable est intervenu. L'avocat ne peut saisir le prétexte d'un résultat obtenu très satisfaisant pour solliciter des honoraires supplémentaires dans le cadre de la fixation d'honoraires devant le Bâtonnier.

Le taux horaire pratiqué par l'avocat, soit 250 € HT est conforme aux usages de la profession et correspond au taux visé dans la convention d'honoraires. Il n'est d'ailleurs pas contesté nonobstant l'absence d'information de la part de l'avocat vis à vis de sa cliente.

Il convient de rappeler que la Cour, statuant dans cette composition, n'a pas compétence pour statuer sur une mise en cause d'une éventuelle responsabilité professionnelle de l'avocat. Ainsi, le reproche fait à Maître [T] d'avoir été rémunéré par l'entreprise ACANTHE DEVELOPPEMENT si la transaction avait aboutie ainsi que les reproches vis à vis de l'avocat portant sur le caractère mensonger de certaines clauses du protocole sont inopérants en l'espèce. Enfin, l'argument tiré de la collusion énoncée entre Maître [T] et l'entreprise ACANTHE DEVELOPPEMENT sera écarté pour le même motif.

Madame [I] conteste la teneur du dernier protocole soumis à sa signature, estimant que des propos mensongers figuraient dans ce document et l'empêchaient donc de signer l'accord envisagé. Toutefois, le choix de procéder à un accord amiable lui incombait, toute transaction nécessitant des concessions de part et d'autre, nonobstant la teneur des propos tenus de part et d'autre dans le huitième protocole soumis dont la cour n'a pas apprécié la teneur.

Les diligences qui ont fait l'objet d'une facturation se décomposent notamment ainsi, le cabinet d'avocat étant doté d'un logiciel de facturation. La cour se réfère aux écritures prises pour le détail des diligences invoquées.

- plusieurs rendez vous : 13H25

- conférences téléphoniques : 17,75 heures

- analyses des pièces et recherches juridiques : 43 Heures ( étude des fiches de paie, recherches juridiques sur les bulletins de paie, arrêt maladie et avis d'aptitude, sur le lanceur d'alerte)

- phase de négociation avec les clients et les conseils de l'entreprise) : 12 heures

- nombreux mails échangés :

- diligences effectuées dans le cadre d'un travail administratif ( 13H75) dont copie et scan de pièces ainsi que transport et livraison de pièces )

- diligences effectuées dans le cadre de la saisine de taxation par le conseil de l'ordre : 11,75 heures

- nombreuses reprises du protocole en raison des remarques de Madame [I] : 14H25

Compte tendu des éléments dont la cour dispose, des tableaux précisant heures par heures les diligences effectuées, compte tenu aussi de la transaction effectuée qui a nécessité la rédaction de plusieurs protocoles et donc un nécessaire échange avec les avocats de la société ACANTHE DEVELOPPEMENT, la Cour estime disposer des éléments suffisants pour fixer les honoraires de Maître [T] à l'équivalent de 40 heures de temps passé dans l'intérêt de la cliente.

Madame [I] ne justifie pas que son avocat ait effectué des diligences manifestement excessives, Maître [T] souhaitant obtenir un accord amiable entre les parties comme cela avait été décidé à l'origine par les deux parties.

Au vu des éléments produits, du type de procédure adoptée, des diligences effectuées, les actes effectués par Maître [T] seront réduits à l'équivalent de 40 heures, le temps passé pour les échanges entre avocats, ainsi que la préparation du présent litige comme l'a souligné M le Bâtonnier, ne peuvent entrer dans les diligences effectuées dans l'intérêt de Madame [I]. De même sera réduite à de plus justes proportions l'équivalent du temps passé en mails et communications en tout genre, nonobstant leurs caractères chronophages. Enfin, certains postes tels que scan et « sélection de pièces » sans autre précision ainsi que « l'étude de risques » outre le poste de recherche juridiques et analyse des pièces (essentiellement des fiches de paie) seront écartées de la facturation. Il convient en outre de noter que les huits protocoles aveint des termes à peu près équivalents ce qui n'a pas suscité un travail très important, sauf les négociation entre conseils.

Ainsi, les honoraires peuvent être évalués à l'équivalent de 40 heures au taux de 250 € HT (taux horaire moyen de Maître [T] et son collaborateur) soit la somme globale de

10 000 euros HT soit encore de 12 000 euros TTC, la somme fixée par le Bâtonnier étant en conséquence réduite à de plus justes proportions.

Sur l'application de l'article 700 du CPC :

Il n'apparaît pas inéquitable de faire supporter par les parties des sommes non comprises dans les dépens

Sur les dépens:

Chacune des parties conservera par devers elles ,les dépens par elles exposés.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant en dernier ressort, contradictoirement et publiquement par mise à disposition de la décision au greffe de la chambre

Dit le recours recevable en la forme

Fixe le montant des honoraires dus par Madame [I] à Maître [O] [T] à la somme de 12 000 euros TTC

Constate le versement d'ores et déjà intervenu de la somme de 2500 euros HT soit 3000 euros TTC

Condamne Madame [C] [I] à verser à Maître [T] la somme de 9000 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision rendue par M le Bâtonnier de l'Ordre des Avocats de Paris

Rejette toute autre demande plus ample ou contraire

Dit n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du CPC

Dit que chacune des parties conservera sa charge les dépens par elles exposés

Dit qu'en application de l'article 177 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991, l'ordonnance sera notifiée aux parties par le Greffe de la Cour suivant lettre recommandée avec accusé de réception.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 9
Numéro d'arrêt : 21/00191
Date de la décision : 03/04/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-04-03;21.00191 ?
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