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30/03/2023 | FRANCE | N°21/08782

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 30 mars 2023, 21/08782


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 30 MARS 2023



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08782 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDUEW



Décision déférée à la Cour : jugement du 19 janvier 2021 -tribunal judiciaire de MELUN RG n° 19/00623



APPELANT



Monsieur [O] [B]

[Adresse 11]

[Localité 8]

Représenté par Me Serge BEYNET de la SELARL SERGE

BEYNET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0482

assisté par Me Chloé SERS, avocat au barreau de PARIS



INTIMES



S.A. AXA FRANCE IARD

[Adresse 5]

[Localité 17]

Représentée par Me Jérôme...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 30 MARS 2023

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/08782 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDUEW

Décision déférée à la Cour : jugement du 19 janvier 2021 -tribunal judiciaire de MELUN RG n° 19/00623

APPELANT

Monsieur [O] [B]

[Adresse 11]

[Localité 8]

Représenté par Me Serge BEYNET de la SELARL SERGE BEYNET, avocat au barreau de PARIS, toque : C0482

assisté par Me Chloé SERS, avocat au barreau de PARIS

INTIMES

S.A. AXA FRANCE IARD

[Adresse 5]

[Localité 17]

Représentée par Me Jérôme CHARPENTIER, avocat au barreau de PARIS, toque : E1216

assistée par Me Aurélie VIMONT, avocat au barreau de PARIS

Madame [W] [X]

[Adresse 16]

[Localité 14]

n'a pas constitué avocat

Monsieur [K] [M]

[Adresse 9]

[Localité 13]

n'a pas constitué avocat

AGENT JUDICIAIRE DE L'ETAT

Direction des affaires juridiques des ministères économiques et financiers

[Adresse 10]

[Localité 12]

n'a pas constitué avocat

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SEINE ET MARNE

Direction des affaires juridiques

Département recours contre tiers

[Adresse 21]

[Localité 15]

n'a pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 03 novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Françoise Gilly-Escoffier, présidente de chambre, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Emeline DEVIN

ARRET :

- rendu par défaut

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

M. [O] [B] a été victime d'un accident de la circulation le 12 septembre 1997 impliquant un véhicule conduit par Mme [W] [X], appartenant à M. [K] [M], et assuré auprès de la société Axa France IARD (la société Axa).

Par ordonnance du 6 mars 2009, le juge des référés du tribunal de grande instance de Melun a ordonné une expertise médicale de M. [B] confiée au Docteur [D] [E].

L'expert a établi son rapport le 2 décembre 2009.

Par exploits des 13, 20 et 25 février 2019, M. [B] a fait assigner M. [M], Mme [X], la société Axa et la caisse primaire d'assurance maladie de Seine et Marne (la CPAM) aux fins d'indemnisation de ses préjudices.

Par acte du 16 septembre 2019, M. [B] a attrait en la cause l'agent judiciaire de l'Etat (AJE).

Par jugement du 19 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Melun, a :

- donné acte à la société Axa de ce qu'elle ne conteste pas le droit à indemnisation de la victime,

- condamné la société Axa à payer à M. [B], avec intérêts au taux légal à compter du présent jugement :

- la somme de 60 283,62 euros, au titre du solde indemnitaire définitif de ses préjudices corporels, patrimoniaux et extra-patrimoniaux

- la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamné la société Axa à payer à M. [B], pour la période du 2 mai 2010 au 2 mai 2013, les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur l'indemnité allouée,

- dit que les intérêts seront capitalisés dès qu'ils seront dus pour une année entière,

- déclaré le jugement commun à la CPAM,

- ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- condamné la société Axa aux dépens, qui comprendront les frais d'expertise et dont distraction au profit de Maître Beynet.

Par déclaration du 6 mai 2021, M. [B] a interjeté appel de ce jugement, d'une part, en ce qu'il l'a débouté de ses demandes formées au titre des dépenses de santé actuelles, de l'assistance par tierce personne temporaire et permanente, des pertes de gains professionnels futurs, du préjudice sexuel et du préjudice esthétique permanent, d'autre part, en ce qu'il a limité l'indemnisation des postes de frais divers, de pertes de gains professionnels actuels, d'incidence professionnelle, de déficit fonctionnel temporaire, de souffrances endurées, de déficit fonctionnel permanent et de préjudice d'agrément et enfin, sur la sanction du doublement des intérêts légaux.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de M. [B], notifiées le 27 octobre 2021, aux termes desquelles il demande à la cour, de :

Vu les dispositions de la loi du 5 juillet 1985 dite 'Badinter',

- confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a donné acte à la société Axa de ce qu'elle ne conteste pas le droit à indemnisation de M. [B],

- confirmer le jugement en ce qu'il a alloué à M. [B] la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance,

- confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Axa aux dépens, comprenant les frais d'expertise,

- infirmer pour le surplus,

et, statuant à nouveau,

- condamner in solidum M. [M], Mme [X] et la société Axa à indemniser, en deniers ou quittance, M. [B] des préjudices qu'il a subis en conséquence de l'accident dont il a été victime le 12 septembre 1997, ainsi qu'il suit, créance des tiers payeurs déduite :

- dépenses de santé actuelles : 151,69 euros

- frais divers : 6 354,08 euros

- besoin d'assistance temporaire : 9 919,28 euros,

subsidiairement, il est demandé à la cour de désigner tel expert en médecine physique et de réadaptation qu'il plaira, pour se prononcer sur le besoin d'assistance de M. [B],

- perte de gains professionnels actuels : 33 385,49 euros

- perte de gains professionnels futurs : 690 597,97 euros

- incidence professionnelle : 150 000 euros

- besoin d'assistance définitif : 128 086,13 euros,

subsidiairement, il est demandé au tribunal de désigner tel expert en médecine physique et de réadaptation qu'il plaira, pour se prononcer sur le besoin d'assistance de M. [B],

- déficit fonctionnel temporaire : 41 840 euros

- souffrances endurées : 20 000 euros

- déficit fonctionnel permanent : 75 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 8 000 euros

- préjudice d'agrément : 40 000 euros

- préjudice sexuel : 10 000 euros

total : 1 213 334,64 euros,

- dire que ces sommes, majorées des créances des tiers-payeurs, portent intérêts au double du taux légal à compter du 13 mai 1998, avec capitalisation par année entière,

- condamner in solidum M. [M], Mme [X] et la société Axa à payer à M. [B] une indemnité de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel,

- condamner in solidum M. [M], Mme [X] et la société Axa aux dépens d'appel, qui pourront directement être recouvrés par le Cabinet d'avocats Serge Beynet pour ceux dont il a fait l'avance.

Vu les conclusions de la société Axa, notifiées le 14 juin 2022, aux termes desquelles elle demande à la cour, de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

- confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf sur le préjudice d'agrément et les intérêts majorés quant à leur assiette,

- dire n'y avoir lieu à l'application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- laisser à chacune des parties la charge de ses dépens,

- débouter M. [B] de sa demande de préjudice d'agrément,

- juger que les intérêts majorés auront pour assiette le montant de l'offre de l'assureur faite par voie de conclusions le 19 juin 2019, créance incluse et limiter ceux-ci à une durée de trois ans selon l'article L. 211-13 dernier alinéa du code des assurances.

La déclaration d'appel et les conclusions d'appelants ont été signifiées aux intimés défaillants, pour la CPAM, par acte du 23 juillet 2021 remis à personne habilitée, pour l'AJE par acte du 21 juillet 2021 remis à une personne présente au domicile, pour M. [M] par acte du 23 juillet 2021 déposé en l'étude de l'huissier de justice instrumentaire, et pour Mme [X] par acte du 23 juillet 2021 délivré selon les modalités prévue par l'article 659 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le droit à indemnisation de M. [B] à l'égard de M. [M] et de Mme [X]

Si le tribunal a donné acte à la société Axa de ce qu'elle ne contestait pas le droit à indemnisation de M. [B], il n'a pas statué sur la demande formée devant lui, par M. [B], de condamnation de M. [M] et de Mme [X] in solidum avec la société Axa à cette indemnisation.

Il résulte des articles 1er et 2 de la loi du 5 juillet 1985, que la victime d'un accident de la circulation dans lequel est impliqué un véhicule terrestre à moteur est indemnisée de ses dommages par le conducteur ou le gardien de ce véhicule.

Par ailleurs, le propriétaire d'un véhicule impliqué dans un tel accident en est présumé avoir été le gardien et est tenu en cette qualité d'indemniser les victimes, sauf à ce que soit rapportée la preuve d'un transfert de cette garde.

En l'espèce, il ressort du constat amiable d'accident en date du 12 septembre 1997 que M. [B], qui était au volant de son véhicule à l'arrêt à un feu rouge a été heurté à l'arrière par le véhicule conduit par Mme [X] et appartenant à M. [M].

Aucun élément ne permet de considérer que M. [M] avait transféré à Mme [X] les pouvoirs d'usage, de contrôle et de direction de son véhicule, caractéristiques de la garde, à Mme [X], ce que le seul constat de ce que cette dernière était au volant du véhicule lors de la collision ne suffit pas à établir ; M. [M] est donc tenu d'indemniser M. [B] de ses préjudices consécutifs à l'accident du 12 septembre 1997 et M. [B] doit être débouté de ses demandes en ce qu'elles sont dirigées contre Mme [X].

Sur le préjudice corporel de M. [B]

Le tribunal a indemnisé le préjudice corporel subi par M. [B] à la suite de l'accident du 12 septembre 1997, sur la base des conclusions de l'expert judiciaire, le Docteur [E], dans son rapport en date du 2 décembre 2009.

M. [B] reproche à cet expert d'avoir considéré que certains des troubles qu'il a présenté à la suite de l'accident ne sont pas imputables à celui-ci, en écartant les conclusions du Docteur [S], psychiatre, qui a estimé que rien ne corroborait la thèse d'une personnalité antérieure pathologique ou vulnérable, et que l'accident avait entraîné une 'névrose post-traumatique avec reviviscences intrusives, insomnie, phobies spécifiques liées à l'accident, rituels de protection, symptômes de conversion liés au souvenir de l'accident et altération de la personnalité sur un mode anxieux, inhibé et dépressif ', analyse qui a été partagée par Mme [L], neuro-psychologue, qui a conclu à l'existence d'une 'névrose post traumatique à composante conversive évoluant vers une symptomatologie défensive obsessionnelle majeure extrêment invalidante sans terrain pathologique antérieur avéré'.

Il invoque en outre le rapport du Docteur [I], psychiatre, qu'il a consulté à la suite de l'expertise du Docteur [E], et celui du Docteur [Y] en date du 19 septembre 2005, qui confirment la réalité de la pathologie psychiatrique et son imputabilité à l'accident.

M. [B] indique, s'agissant de la crainte qu'il aurait eue que son fils chute d'un caddie qu'aucun des médecins qui l'a examiné n'a rattaché ses tremblements à cet événement.

Il ajoute que, même s'il était retenu qu'il présentait au moment de l'accident une personnalité structurelle immature, celle-ci ne l'empêchait pas de mener une vie normale et autonome, ce qui n'est pas le cas depuis l'accident et que les conclusions du Docteur [E] sont d'autant plus contestables que même en considérant, qu'il ait eu une personnalité vulnérable le prédisposant à la survenue d'une névrose post-traumatique, le lien de causalité entre cette névrose et l'accident n'en serait pas moins direct.

La société Axa relève, d'une part, une très nette disproportion entre le fait traumatique et les séquelles alléguées par M. [B], qu'elle qualifie de variables et exponentielles au gré des expertises et, d'autre part, que M. [B], bien qu'assisté par un médecin conseil, n'a déposé aucun dire à la suite de l'expertise du Docteur [E].

Elle précise que M. [B] est titulaire d'une pension d'invalidité de catégorie 2 depuis le 21 janvier 2002, alors que l'accident du 12 septembre 1997 a été pris en charge en accident du travail, de sorte que la CPAM a considéré que les troubles actuels à l'origine de la 2ème invalidité ne sont pas imputables à l'accident et se prévaut de l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour d'appel de Paris en date du 8 mars 2012 qui a rejeté l'existence d'une rechute à la date du 10 mai 2000, comme étant une conséquence de l'accident de trajet du 12 septembre 1997, alors que la problématique était identique à celle actuellement soumise à l'appréciation de la cour, à savoir le lien entre l'accident et les troubles postérieurs allégués par M. [B].

La société Axa ajoute qu'hormis certains des médecins conseils de la victime, soit les Docteurs [S], [I] et [J], tous les praticiens qui ont examiné M. [B] ont retenu une imputabilité limitée des troubles actuels à l'accident, et considéré qu'eu égard à la faiblesse du traumatisme initial et à la personnalité de [B], son état actuel est dû à un état antérieur ayant évolué pour son propre compte et donc sans lien avec l'accident et que celui-ci n'a entraîné ni inaptitude professionnelle ni besoin d'assistance par une tierce personne.

***

Sur ce, il doit être rappelé que le droit de la victime à obtenir l'indemnisation de son préjudice corporel ne saurait être réduit en raison d'une prédisposition pathologique lorsque l'affection qui en est issue n'a été provoquée ou révélée que par le fait dommageable.

Par jugement rendu le 4 novembre 2008, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun a débouté M. [B] de sa demande de nouvelle expertise, à la suite de l'expertise effectuée par le Docteur [Y], et de son recours contre la décision de la Commission de recours amiable de la sécurité sociale en date du 26 mars 2003 ayant rejeté sa contestation des décisions de la CPAM en date du 5 juillet 2000 refusant, l'une, de reconnaître le caractère de rechute de l'accident du travail du 12 septembre 1997 aux lésions décrites dans le certificat médical du Docteur [N] du 10 mai 2000 faisant état de névralgies cervico-brachaiaes bilatérales prédominantes à gauche, de tremblement d'attitude distal et de douleurs myofaciales, et l'autre, de prendre en charge au titre de la législation relative aux accidents du travail les soins post-consolidation.

Si par arrêt du 8 mars 2022, la cour d'appel de Paris a confirmé ce jugement, l'autorité de chose jugée n'a lieu conformément à l'article 1355 du code civil 'qu'à l'égard de ce qui a fait l'objet du jugement. Il faut que la chose demandée soit la même ; que la demande soit fondée sur la même cause ; que la demande soit entre les mêmes parties, et formée par elles et contre elles en la même qualité' ce qui n'est à l'évidence pas le cas en l'espèce.

En effet, la demande de M. [B] formée devant la présente juridiction n'a pas pour objet de faire reconnaître, au regard de la législation de la sécurité sociale, que les séquelles dont il reste atteint constituent une rechute de l'accident du 12 septembre 1997, mais d'obtenir, sur le fondement de la loi du 5 juillet 1985, l'indemnisation de son entier préjudice consécutif à cet accident par l'auteur de son dommage et son assureur, la CPAM n'étant présente qu'en sa qualité de subrogée dans les droits de M. [B] ; la chose demandée dans le cadre de la présente instance n'a donc pas le même objet ni la même cause que celle soumise à la cour d'appel de Paris sur recours du jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Melun du 4 novembre 2008 ni n'oppose les mêmes parties en la même qualité.

L 'expert, le Docteur [E] a indiqué en conclusion de son rapport en date du 2 décembre 2009 'M. [B] présenté au cours d'un accident de la voie publique le 12 septembre 1997 un traumatisme mineur du rachis cervical. Dans les suites de ce traumatisme M. [B] a présenté des douleurs cervicales et brachiales. En octobre 1997, apparaît un tremblement des membres supérieurs, initialement intermittent puis qui devient permanent avec des paroxysmes. Depuis l'accident M. [B] a des plaintes multiples (céphalées, acouphènes, troubles de la mémoire, troubles du sommeil) à rattacher à un syndrome subjectif post-commotionnel des traumatisés du rachis cervical. La majoration fonctionnelle observée, en partie liée à une névrose post-traumatique qui compte tenu de caractère mineur du traumatisme a dû être favorisée par des motivations externes'.

Il a émis l'avis suivant sur les postes du préjudice corporel de M. [B] en lien avec l'accident :

- date de consolidation : 21 janvier 2002

- incapacité temporaire totale : du 13 septembre 1997 au 21 janvier 2002

- incapacité permanente partielle : 13 %

- souffrances endurées : 2/7

- préjudice esthétique : 0/7.

Cet expert a précisé qu'il n'y avait pas de perte d'autonomie en relation avec l'accident, que le déficit fonctionnel permanent de 13 % comportait 3 % pour le syndrome post-commotionnel et 10 % pour la névrose post-traumatique, qu'il n'y avait pas de préjudice sexuel en rapport avec l'accident et que le principal préjudice d'agrément de M. [B] était son impossibilité de dessiner (secondaire au tremblement) qui apparaissait comme définitive.

Il a noté dans le corps de son rapport : 'la symptomatologie douloureuse (névralgies cervico-brachiales, céphalées), est secondaire au traumatisme cervical (syndrome subjectif post-commotionnel) mais majorée par le trouble de la personnalité. Les tremblements sont de type tremblement essentiel avec une majoration d'origine psychogène, ils ne peuvent être rattachés de manière directe au traumatisme cependant ils peuvent s'intégrer dans le trouble de la personnalité post-traumatique observée chez M. [B]'.

Il a ajouté : 'L'expertise du Docteur [S] du 13 mars 1996 [2006] soit presque 9 ans après l'accident, reprend l'ensemble des éléments et conclut à une névrose post-traumatique. Certains éléments sont rapportés pour la 1ère fois : 'reviviscences intrusives, phobies, rituels spécifiques' et l'on peut s'interroger sur leur exactitude puisque les nombreux médecins, y compris psychiatres, qui ont suivi M. [B] n'en ont jamais fait part dans leurs observations (les psychiatres du centre anti-douleur de l'hôpital [18] rapportent même l'absence de rituels ou phobies) ce qui conduit à penser que ces éléments ont pu être suggérés à M. [B] ce d'autant que le traumatisme en question était relativement 'mineur'.

Le Docteur [E] a ainsi estimé que le trouble de la personnalité de M. [B] était 'en partie' secondaire au traumatisme.

Ainsi l'expert [E] met en doute, sans toutefois être affirmatif, ni préciser les éléments médicaux sur lesquels il se fonde, que certains des troubles que présente M. [B], signalés par le Docteur [S], psychiatre, dans son rapport en date du 13 mars 2006, soit les reviviscences intrusives, phobies, et rituels spécifiques, soient réels et avance même qu'ils auraient pu lui être suggérés. Il est par ailleurs ambigu sur l'imputabilité à l'accident du tremblement affectant M. [B].

Or, il résulte des diverses expertises communiquées et notamment du rapport Docteur [R], en date du 12 novembre 1998, que le tremblement que présente M. [B] a été signalé médicalement pour la première fois par son médecin traitant, le Docteur [N], dans un certificat du 29 mai 1998, même si M. [B] situe sa date d'apparition au mois d'octobre 1997, ce que les divers praticiens n'ont d'ailleurs pas remis en cause, soit, en toute hypothèse, très peu de temps après l'accident, dans la suite d'une névralgie cervico-brachiale, de dysesthésies et paresthésies, et le Docteur [H], neurologue, dans un certificat du 23 avril 1999 a considéré que ce tremblement invalidant était le signe d'une souffrance psychique et qu'il n'existait aucun élément en faveur d'une simulation, ce qu'a confirmé le Docteur [V], psychiatre, à l'issue d'un examen pratiqué le 13 novembre 2000.

Le Docteur [G], neurologue, dans un certificat du 6 octobre 2000, a rattaché ce tremblement à une névrose post-traumatique et le Docteur [S] psychiatre a estimé, au terme d'un rapport du 13 mars 2006, que M. [B], à la suite de l'accident du 12 septembre 1997 a présenté une double pathologie chronicisée, à savoir un syndrome subjectif des traumatisés crânio-cérébraux avec céphalées, vertiges, acouphènes, scintillements visuels et altération de ses capacités cognitives et une névrose post-traumatique avec reviviscences intrusives, insomnies, phobies spécifiques liées à l'accident, rituels de protection, symptômes de conversion liés au souvenir de l'accident et altération de la personnalité sur un mode anxieux, inhibé et dépressif.

Mme [L], psychologue et neuro-psychologue, a estimé que M. [B] présentait à la suite de l'accident du 12 septembre 1997 un syndrome post-commotionnel avec des troubles de type neurologiques, cognitifs et comportementaux dont l'intensité s'était progressivement aggravée, corrélativement un état neuropsychologique cognitif, émotionnel et comportemental déficitaire et non stabilisé et une névrose post-traumatique à composante conversive évoluant vers une symptomatologie défensive obsessionnelle majeure extrêmement invalidante, sans terrain pathologique antérieur avéré.

Les divers médecins s'étant prononcés sur le cas de M. [B] ont relevé l'absence d'un état antérieur symptomatique, même s'il a été noté par le Docteur [V] un trouble de la personnalité antérieur (personnalité immature et dépendante) mais celui-ci n'avait produit aucun effet néfaste avant l'accident, puisque M. [B] était autonome et travaillait comme enseignant.

Ainsi rien ne permet d'affirmer que les troubles actuels de M. [B] seraient factices et leur apparition, développement et aggravation progressifs sont à relier au syndrome post-commotionnel et à la névrose post-traumatique qui ont été provoqués par l'accident.

Ainsi, contrairement aux conclusions de l'expert judiciaire, l'ensemble des troubles actuels de M. [B] est directement imputable à l'accident.

La cour ne disposant pas des éléments lui permettant de déterminer les divers postes du préjudice corporel de M. [B] intégrant l'ensemble des troubles qu'il présente, il convient de recourir à une mesure d'expertise, selon la mission définie au dispositif de la présente décision, aux frais avancés de M. [B].

Sur les demandes accessoires

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

Les dépens et frais irrépétibles d'appel doivent être réservés.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt rendu par défaut et par mise à disposition au greffe,

- Confirme le jugement en ce qu'il a donné acte à la société Axa France IARD de ce qu'elle ne conteste pas le droit à indemnisation de la victime, sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile,

- Condamne M. [K] [M] in solidum avec la société Axa France IARD, à indemniser M. [B] de ses préjudices consécutifs à l'accident du 12 septembre 1997,

- Déboute M. [O] [B] de ses demandes dirigées contre Mme [W] [X],

- Dit que l'ensemble des troubles que présente M. [O] [B], dont le tremblement, signes d'un syndrome post-commotionnel et d'une névrose post-traumatique, sont directement imputables à l'accident du 12 septembre 1997,

Avant dire droit sur l'indemnisation du préjudice corporel de M. [O] [B] et sur la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal,

- Ordonne une expertise médicale de M. [O] [B]

Commet en qualité d'expert

Le Docteur [T] [Z]

EPSM [20]

[Adresse 19]

Tél : [XXXXXXXX04]

Fax : [XXXXXXXX03]

Port. : [XXXXXXXX01]

Mèl : [Courriel 24]

en cas d'indisponibilité de celui-ci

Le Docteur [A] [U] [C]

CH [22]

[Adresse 25]

[Adresse 25]

[Adresse 25]

[Localité 7]

Tél : [XXXXXXXX02]

Mèl : [Courriel 23]

Lequel pourra s'adjoindre s'il l'estime utile, tout praticien de son choix dans une spécialité médicale distincte de la sienne,

Enjoint à la victime de fournir immédiatement à l'expert toutes pièces médicales nécessaires à l'accomplissement de sa mission (notamment : certificat médical initial, certificat de consolidation, autres certificats, radiographies, comptes-rendus d'opérations et d'examens...),

Dit qu'à défaut l'expert pourra déposer son rapport en l'état,

Donne à l'expert la mission suivante, compte tenu des motifs de la présente décision, en tenant compte que l'ensemble des troubles que présente M. [B], dont le tremblement, signes d'un syndrome post-commotionnel et d'une névrose post-traumatique, sont directement imputables à l'accident du 12 septembre 1997,

- Le cas échéant, se faire communiquer le dossier médical complet de la victime, avec l'accord de celle-ci ou de ses ayants-droit,

- En tant que de besoin, se faire communiquer par tout tiers détenteur les pièces médicales nécessaires à l'expertise, avec l'accord susvisé,

- Noter les doléances de la victime,

- Examiner la victime et décrire les constatations ainsi faites,

- Indiquer, compte tenu de l'état de la victime, ainsi que des lésions initiales et de leur évolution, le délai normal de déficit fonctionnel temporaire total ou le cas échéant partiel et dans ce dernier cas, en préciser le taux, et proposer la date de consolidation de ces lésions,

- Décrire les actes, gestes et mouvements rendus difficiles partiellement ou entièrement impossibles en raison de l'accident,

- Donner un avis sur le taux du déficit fonctionnel qui résulte des difficultés ou impossibilités imputables à l'accident.

- Donner en toute hypothèse un avis sur le taux du déficit fonctionnel actuel de la victime, tous éléments confondus (état antérieur inclus). Si un barème a été utilisé, préciser lequel,

- Se prononcer sur la nécessité pour la victime d'être assistée par une tierce personne (cette assistance ne devant pas être réduite en cas d'assistance familiale),

Dans l'affirmative, préciser si cette tierce personne doit ou non être spécialisée, ses attributions exactes ainsi que les durées respectives d'intervention de l'assistant spécialisé et de l'assistant non spécialisée,

Donner à cet égard toutes précisions utiles,

- Préciser le cas échéant :

- la nécessité de l'intervention d'un personnel médical : médecins, kinésithérapeutes, infirmiers (nombre et durée moyenne de leurs interventions)

- la nature et le coût des soins susceptibles de rester à la charge de la victime en moyenne annuelle

- les adaptations des lieux de vie de la victime à son nouvel état

- le matériel susceptible de lui permettre de s'adapter à son nouveau mode de vie ou de l'améliorer,

- Dire si le blessé est apte à la conduite d'un véhicule et dans cette hypothèse quels aménagements doit éventuellement comporter le véhicule,

- Donner un avis détaillé sur la difficulté ou l'impossibilité pour la victime de :

a) poursuivre l'exercice de sa profession antérieure

b) opérer une reconversion

c) continuer à s'adonner aux sports et activités de loisir qu'il déclare avoir pratiqués,

- Donner un avis sur l'importance des souffrances (physiques et/ou morales) et des atteintes esthétiques,

- Donner son avis sur l'existence d'un préjudice sexuel : dans l'affirmative préciser la nature de ce préjudice (préjudice morphologique, préjudice lié à l'acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l'accomplissement de l'acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte, perte de la capacité à accéder au plaisir) et le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer,

- Déterminer les postes de préjudice temporaires (préjudice esthétique, tierce personne temporaire ...),

- Prendre en considération les observations des parties ou de leurs conseils, dans les conditions de l'article 276 du code de procédure civile,

Dit que M. [O] [B] devra consigner auprès du Régisseur d'avances et de recettes de la cour d'appel de PARIS - [Adresse 6] - avant le 15 mai 2023, une somme de 1 500 euros à valoir sur les frais et honoraires de l'Expert,

Dit que faute d'une telle consignation dans ledit délai, la mission de l'expert deviendra caduque,

Dit que l'expert :

- sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile,

- devra indiquer au greffe de la chambre, dans le délai d'un mois à compter de la réception de la copie de la présente décision s'il accepte sa mission,

- adressera par lettre recommandée avec avis de réception un pré-rapport aux avocats des parties, lesquels disposeront d'un délai de cinq semaines à compter du jour de la réception de ce pré-rapport, pour faire valoir auprès de l'expert, sous formes de dires, leurs questions et observations,

- répondra de manière précise et circonstanciée à ces dires qui devront être annexés au rapport définitif qui sera établi à l'issue de ce délai de cinq semaines et dans lequel devra figurer impérativement

* le nom des personnes convoquées aux opérations d'expertise en précisant pour chacune d'elle la date d'envoi de la convocation la concernant et la forme de cette convocation

* le nom des personnes présentes à chacune des réunions d'expertise

* la date de chacune des réunions tenues

* la liste exhaustive de toutes les pièces par lui consultées

* les déclarations des tiers éventuellement entendus par lui, en mentionnant leur identité complète, leur qualité et leur lien éventuel avec les parties

* le cas échéant, l'identité du technicien dont il s'est adjoint le concours, ainsi que les constatations et avis de celui-ci (lesquels devront également figurer dans le pré-rapport)

* les dates d'envoi à chacun des avocats du pré-rapport puis du rapport définitif,

Dit que l'expert déposera son rapport définitif au greffe de la chambre et en enverra un exemplaire à l'avocat de chacune des parties avant le 15 décembre 2023, délai de rigueur, sauf prorogation expresse accordée par le magistrat chargé du contrôle des expertises,

Dit qu'en application de l'article 282 du même code, le dépôt par l'expert de son rapport sera accompagné de sa demande de rémunération, dont il adressera un exemplaire aux parties par tout moyen permettant d'en établir la réception,

Dit que, s'il y a lieu, les parties adresseront à l'expert et à la juridiction ou, le cas échéant, au magistrat chargé du contrôle des mesures d'instruction, leurs observations écrites sur cette demande dans un délai de quinze jours à compter de sa réception,

- Réserve les dépens d'appel et l'application de l'article 700 du code de procédure civile devant la cour.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/08782
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;21.08782 ?
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