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30/03/2023 | FRANCE | N°21/05203

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 11, 30 mars 2023, 21/05203


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 4 - Chambre 11



ARRET DU 30 MARS 2023



(n° , pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05203

N° Portalis 35L7-V-B7F-CDKEP



Décision déférée à la Cour : jugement du 19 janvier 2021 - tribunal judiciaire de PARIS RG n° 19/14106



APPELANTS



Monsieur [D] [I]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Né le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 9]
>Représenté par Me Audrey HINOUX de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Substituée à l'audience par Me Claire DISSAUX, avocat au barreau de PARIS



Madame [N...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 11

ARRET DU 30 MARS 2023

(n° , pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/05203

N° Portalis 35L7-V-B7F-CDKEP

Décision déférée à la Cour : jugement du 19 janvier 2021 - tribunal judiciaire de PARIS RG n° 19/14106

APPELANTS

Monsieur [D] [I]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Né le [Date naissance 4] 1960 à [Localité 9]

Représenté par Me Audrey HINOUX de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Substituée à l'audience par Me Claire DISSAUX, avocat au barreau de PARIS

Madame [N] [I]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Née le [Date naissance 1] 1963 à [Localité 7]

Représentée par Me Audrey HINOUX de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Substituée à l'audience par Me Claire DISSAUX, avocat au barreau de PARIS

INTIMEES

MUTUELLE GENERALE

[Adresse 2]

[Adresse 2]

n'a pas constitué avocat

S.A. LA POSTE en sa qualité d'organisme de Sécurité sociale de Monsieur [D] [I]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

n'a pas constitué avocat

S.A.M.C.V. MUTUELLE DE POITIERS

[Adresse 6]

[Adresse 6]

Représentée par Me Joyce LABI de la SCP COURTEAUD PELLISSIER, avocat au barreau de PARIS, toque : P0023

Assistée par Me Yves DELAUNAY, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre

Mme Nina TOUATI, présidente de chambre

Mme Dorothée DIBIE, conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Mme Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile

.

Greffier lors des débats : Mme Roxanne THERASSE

Greffier lors de la mise à disposition : Mme Emeline DEVIN

ARRET :

- réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Françoise GILLY-ESCOFFIER, présidente de chambre et par Emeline DEVIN, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Le 17 février 2015, M. [D] [I] qui circulait au guidon de sa moto, assurée auprès de la société MACIF, a été percuté par un véhicule conduit par Mme [B] [H] et assuré auprès de la société Mutuelle de Poitiers.

La société MACIF a versé à M. [I], une provision de 10 000 euros.

La société Mutuelle de Poitiers a versé à M. [I] la somme de 10 000 euros, selon quittance en date du 28 novembre 2016.

Une expertise amiable et contradictoire a été réalisée par les Docteurs [T] et [G] ; ces experts ont établi leur rapport définitif le 2 décembre 2016.

M. [I] et son épouse, Mme [N] [I], ont assigné devant le tribunal de grande instance de Paris, par actes des 21, 22 et 25 novembre 2019 la société Mutuelle de Poitiers, le groupe La Poste et la Mutuelle générale, tiers payeurs, pour obtenir l'indemnisation de leurs préjudices consécutifs à l'accident du 17 février 2015.

Par jugement rendu le 19 janvier 2021, le tribunal judiciaire de Paris, a :

dit que le droit à indemnisation de M. [I] des suites de l'accident de la circulation survenu le 17 février 2015 est entier,

condamné la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [I] les sommes suivantes, en deniers ou quittance, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement, en réparation des préjudices suivants :

- 109, 35 euros au titre des dépenses de santé actuelles,

- 2 587, 39 euros au titre des frais divers,

- 200 euros au titre du préjudice matériel,

- 3 329, 10 euros au titre de l'assistance par tierce personne avant consolidation,

- 30 000 euros au titre de l'incidence professionnelle,

- 2 846, 65 euros au titre du déficit fonctionnel temporaire,

- 16 000 euros au titre des souffrances endurées,

- 800 euros au titre du préjudice esthétique temporaire,

- 24 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent,

- 2 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent,

- 8 000 euros au titre du préjudice d'agrément,

- 6 000 euros au titre du préjudice sexuel,

débouté M. [I] de sa demande au titre de la tierce personne après consolidation,

condamné la société Mutuelle de Poitiers à payer à Mme [N] [I] les sommes suivantes :

- 4 000 euros au titre du préjudice d'affection et du trouble dans les conditions d'existence,

- 5 000 euros au titre du préjudice sexuel,

débouté Mme [N] [I] de ses demandes au titre de la baisse de prime de service et des frais de prise en charge psychologique,

condamné la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [I] les intérêts au double du taux de l'intérêt légal sur le montant de l'offre effectuée le 23 mai 2017, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 17 octobre 2015 et jusqu'au 23 mai 2017,

dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil,

déclaré le jugement commun au groupe La Poste et à la Mutuelle Générale,

condamné la société Mutuelle de Poitiers aux dépens et à payer à M. [I] la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, cette somme avec intérêts au taux légal à compter du jour du jugement,

dit que Maître Cyril Irrmann pourra recouvrer sur la partie condamnée ceux des dépens dont il aurait fait l'avance sans avoir reçu provision en application de l'article 699 du code de procédure civile,

rejeté la demande relative à la prise en charge exclusive par le débiteur des frais d'exécution forcée,

ordonné l'exécution provisoire du jugement,

débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Par déclaration du 17 mars 2021 M. et Mme [I] ont interjeté appel de cette décision en visant expressément ses dispositions relatives d'une part, aux postes du préjudice corporel de M. [I] d'incidence professionnelle, souffrances endurées, préjudice esthétique temporaire, préjudice esthétique permanent, préjudice d'agrément, préjudice sexuel et tierce personne définitive, d'autre part, au rejet des demandes d'indemnisation de Mme [I] d'un préjudice sexuel, de la baisse de primes et de la prise en charge psychologique, enfin, au doublement de l'intérêt légal, à l'anatocisme, à l'article 700 du code de procédure civile, aux frais d'exécution forcée et au rejet de leurs prétentions plus amples ou contraires.

Par ordonnance du 7 avril 2022, le conseiller de la mise en état, a :

déclaré M. et Mme [I] irrecevables en leur demande tendant à faire dire irrecevables les conclusions de la société Mutuelle de Poitiers en date du 16 septembre 2021 et les pièces communiquées à l'appui de ces conclusions et à faire juger que l'appel incident de cette société serait « caduc »,

condamné M. et Mme [I] à verser à la société Mutuelle de Poitiers la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

condamné M. et Mme [I] aux dépens de l'incident.

Par arrêt du 27 octobre 2022, rendu sur déféré, la cour d'appel de Paris, a:

- confirmé l'ordonnance du conseiller de la mise en état du 7 avril 2022 en toutes ses dispositions, sauf à préciser que les époux [I] sont irrecevables en leur demande tendant à faire juger que l'appel incident de la société Mutuelle de Poitiers ne serait pas recevable,

Y ajoutant,

- constaté que la société Mutuelle de Poitiers n'était pas tenue de signifier ses conclusions

d'intimée à la société La Poste et à la Mutuelle générale et qu'aucune irrecevabilité n'est encourue de ce chef,

- rejeté, en application de l'article 700 du code de procédure civile, la demande de la

société Mutuelle de Poitiers au titre des frais irrépétibles exposés lors de la procédure de

déféré,

- condamné M. et Mme [I] aux dépens de la procédure dedéféré.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Vu les conclusions de M. et Mme [I], notifiées le 15 décembre 2021, aux termes desquelles ils demandent à la cour, de :

Vu la loi du 5 juillet 1985,

Vu les articles L 211-9 et L 211-13 du code des assurances,

Vu l'article 25 de la loi n°2006-1640 du 21 décembre 2006,

Vu les articles 1231-7 et 1343-2 du code civil,

Vu les articles R 631-4 du code de la consommation et L 111-8 du code des procédures civiles d'exécution,

juger les époux [I] recevables et bien fondés en leur appel et en leurs demandes,

juger la société Mutuelle de Poitiers mal fondée en ses demandes et en son appel incident, l'en débouter ; toutes réserves étant faites quant à la recevabilité des conclusions d'appel incident et à la caducité de celui-ci compte tenu de l'incident pendant devant le conseiller de la mise en état,

juger, conformément aux dispositions des articles 132 et 906 du code de procédure civile, les pièces visées par la société Mutuelle de Poitiers dans ses conclusions signifiées le 16 septembre 2021, irrecevables,

juger, en conséquence, que la cour ne peut fonder sa décision sur de telles pièces,

confirmer le jugement en ce qu'il a :

- jugé le droit à indemnisation des époux [I] intégral,

- condamné la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [D] [I] les sommes suivantes, en deniers ou quittance, provisions non déduites, en réparation des préjudices suivants :

- dépenses de santé actuelles : 109, 35 euros

- frais divers : 2 587, 39 euros

- préjudice matériel : 200 euros

- assistance par tierce personne avant consolidation : 3 329, 10 euros

- déficit fonctionnel temporaire : 2 846, 65 euros

- déficit fonctionnel permanent : 24 000 euros

- condamné la Société Mutuelle de Poitiers à payer à Mme [N] [I] les sommes suivantes, en deniers ou quittances, provisions non déduites, en réparation des préjudices suivants :

- préjudice d'affection et troubles dans les conditions d'existence : 4 000 euros

- ordonné l'application de l'anatocisme conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil,

infirmer le jugement entrepris pour le surplus,

statuant à nouveau,

évaluer les préjudices de M. [I] de la manière suivante :

- tierce personne définitive pour l'entretien du jardin, à titre principal 81 833, 54 euros ; à titre subsidiaire 40 000 euros

- incidence professionnelle : 60 000 euros

- souffrances endurées : 30 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 3 000 euros

- préjudice esthétique permanent : 5 000 euros

- préjudice d'agrément 15 000 euros

- préjudice sexuel 10 000 euros

condamner la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [D] [I] à ce titre la somme, sauf à parfaire, en deniers et quittances, de :

- à titre principal : 204 833, 54 euros

- à titre subsidiaire : 163 000 euros

évaluer les préjudices de Mme [I] à la somme de 10 747 euros de la manière suivante :

- baisse de la prime de service : 607 euros

- frais de prise en charge psychologique : 140 euros

- préjudice sexuel 10 000 euros

condamner la société Mutuelle de Poitiers à payer à Mme [I] la somme, sauf à parfaire en deniers et quittances, de 10 747 euros,

juger que l'évaluation qui sera faite du préjudice de M. [I], créance de La Poste, de la Mutuelle Générale et provisions incluses, portera intérêts au double du taux de l'intérêt légal du 17 octobre 2015 jusqu'à la date à laquelle la décision à intervenir sera définitive,

juger que les sommes dues par la société Mutuelle de Poitiers porteront intérêt au taux légal à compter du 17 février 2015, date de l'accident, sinon à compter du 5 mai 2017, avec anatocisme,

condamner la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [I] la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, au titre de la première instance et à la somme complémentaire de 5 000 euros au titre de la procédure devant la cour,

condamner la société Mutuelle de Poitiers aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Cyril Irrmann, avocat aux offres de droits,

juger, conformément aux dispositions de l'article R 634-1 du code de la consommation, que sera mise à la charge de la société Mutuelle de Poitiers, l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L 111-8 du code des procédures civiles d'exécution qui pourrait s'avérer nécessaire de mettre en 'uvre,

déclarer la décision commune au groupe La poste et à la Mutuelle Générale.

Vu les conclusions de la société Mutuelle de Poitiers, notifiées le 16 septembre 2021, aux termes desquelles elle demande à la cour, de :

Vu le jugement prononcé par le tribunal judiciaire de Paris le 19 janvier 2021,

Vu la loi n°85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation,

Vu l'article 1240 du code civil,

Vu le jugement rendu le 9 décembre 2015 par le tribunal correctionnel de Créteil,

Vu les articles L 211-9 et L 211-13 du code des assurances,

juger M. et Mme [I] irrecevables et en tout cas mal fondés en leur appel principal,

juger la société Mutuelle de Poitiers recevable et bien fondée en ses conclusions portant appel incident,

Ce faisant,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes formées par M. [I] au titre de la tierce personne après consolidation,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a limité à 800 euros l'indemnisation allouée à M. [I] du chef du préjudice esthétique permanent,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [I] une indemnité de 30 000 euros au titre de l'incidence professionnelle et, statuant à nouveau, réduire l'indemnisation de ce chef à de plus justes proportions, qui ne sauraient excéder la somme de 10 000 euros offerte par la société Mutuelle de Poitiers,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [I] une indemnité de 16 000 euros au titre des souffrances endurées et, statuant à nouveau, réduire l'indemnisation de ce chef à de plus justes proportions, qui ne sauraient excéder la somme de 12 000 euros offerte par la société Mutuelle de Poitiers,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [I] une indemnité de 2 000 euros au titre du préjudice esthétique permanent et, statuant à nouveau, réduire l'indemnisation de ce chef à de plus justes proportions, qui ne sauraient excéder la somme de 1 600 euros offerte par la société Mutuelle de Poitiers,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [I] une indemnité de 24 000 euros au titre du déficit fonctionnel permanent et, statuant à nouveau, réduire l'indemnisation de ce chef à de plus justes proportions, qui ne sauraient excéder la somme de 21 000 euros offerte par la société Mutuelle de Poitiers,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [I] une indemnité de 8 000 euros au titre du préjudice d'agrément,

débouter M. [I] de toutes ses demandes fins et prétention de ce chef,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à M. [I] une indemnité de 6 000 euros au titre du préjudice sexuel et, statuant à nouveau, réduire l'indemnisation de ce chef à de plus justes proportions, qui ne sauraient excéder la somme de 2 000 euros offerte par la société Mutuelle de Poitiers,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté les demandes formées par Mme [I] au titre de la baisse de la prime de services et au titre des frais de prise en charge psychologique,

débouter en conséquence Mme [I] de toutes ses demandes fins et prétention de ces chefs,

infirmer le jugement déféré en ce qu'il a alloué à Mme [I] une indemnité de 5 000 euros au titre du préjudice sexuel et, statuant à nouveau, réduire l'indemnisation de ce chef à de plus justes proportions, qui ne sauraient excéder la somme de 1 000 euros offerte par la société Mutuelle de Poitiers,

infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a fait application des dispositions de l'article L 211-9 du code des assurances et, statuant à nouveau,

débouter M. [I] de ses demandes de ce chef,

subsidiairement, confirmer le jugement en ce qu'il a limité le doublement des intérêts au taux légal sur le montant de l'offre effectuée le 23 mai 2017, à la période comprise entre le 17 octobre 2015 et le 23 mai 2017,

confirmer le jugement déféré en ce qu'il a rejeté la demande de fixation du point de départ des intérêts légaux à une date antérieure au jugement,

débouter M. et Mme [I] de toutes leurs demandes plus amples ou contraires,

En toutes hypothèses,

condamner in solidum M. et Mme [I], à payer à la société Mutuelle de Poitiers la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

laisser les dépens à la charge des appelants et autoriser Maître Joyce Labi de la SCPA Courteaud-Pellissier, à les recouvrer sur le fondement des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Le groupe La Poste et la CPAM, auxquels la déclaration d'appel a été signifiée par actes d'huissier de justice respectivement en date du 10 mai 2021 et du 17 mai 2021, délivrés à personne habilitée, n'ont pas constitué avocat.

Par message RPVA du 6 janvier 2023 la cour a demandé à la société Mutuelle de Poitiers de communiquer en cours de délibéré toutes ses conclusions de première instance ; par message RPVA du 12 janvier 2023, la société Mutuelle de Poitiers a communiqué ses conclusions en date du 25 juin 2020, déposées devant le tribunal judiciaire de Paris.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur les préjudices de M. [I]

Il résulte des appels principal et incident que le jugement est définitif sur le préjudice matériel subi par M. [I] et sur les postes de son préjudice corporel relatifs aux dépenses de santé actuelles, frais divers, assistance par tierce personne avant consolidation et déficit fonctionnel temporaire.

Les experts, les Docteurs [T] et [G] ont indiqué dans leur rapport en date du 5 décembre 2016 que M. [I] a présenté, à la suite de l'accident du 17 février 2015, une fracture du cotyle droit au niveau des deux colonnes et un traumatisme du poignet droit et qu'il conserve comme séquelles une raideur de la hanche droite dans tous les axes rendant difficile la réalisation de certaines épreuves dynamiques et un frein de la flexion palmaire et des inclinaisons du poignet droit.

Ils ont conclu ainsi qu'il suit :

- arrêt des activités professionnelles du 17 février 2015 au 19 juillet 2015

- déficit fonctionnel temporaire total du 17 février 2015 au 10 mars 2015

- déficit fonctionnel temporaire partiel au taux de 75 % du 11 mars 2015 au 2 avril 2015, au taux de 50 % du 3 avril 2015 au 30 juin 2015 et au taux de 25 % du 1er juillet 2015 au 1er juillet 2016

- assistance temporaire par tierce personne de 4 heures par jour durant la période de déficit fonctionnel temporaire partiel à 75 %, de 1h30 mn durant la période de déficit fonctionnel temporaire partiel à 50 % puis de 3 heures par semaine du 1er juillet 2015 au 30 septembre 2015

- consolidation au 1er juillet 2016

- souffrances endurées de 4/7

- déficit fonctionnel permanent de 15 %

- incidence professionnelle : gêne à la station debout prolongée rendant les déplacements professionnels relativement pénibles

- préjudice esthétique de 1,5/7

- préjudice d'agrément : les séquelles entraînent une gêne importante pour les activités sportives sollicitant les membres inférieurs, la gêne est moindre pour la pratique de la guitare

- préjudice sexuel positionnel.

Ce rapport constitue une base valable d'évaluation du préjudice corporel subi par M. [I] à déterminer au vu des diverses pièces justificatives produites, de l'âge de la victime née le [Date naissance 4] 1960, de son activité de cadre au sein du groupe La Poste, de la date de consolidation, afin d'assurer sa réparation intégrale et en tenant compte, conformément aux articles 29 et 31 de la loi du 5 juillet 1985, de ce que le recours subrogatoire des tiers payeurs s'exerce poste par poste sur les seules indemnités qui réparent des préjudices qu'ils ont pris en charge, à l'exclusion de ceux à caractère personnel sauf s'ils ont effectivement et préalablement versé à la victime une prestation indemnisant de manière incontestable un tel chef de dommage.

Par ailleurs, l'évaluation du dommage doit être faite au moment où la cour statue et le barème de capitalisation utilisé sera celui publié par la Gazette du palais du 28 novembre 2017 dont l'application est sollicitée par la victime et qui est le plus approprié en l'espèce pour assurer la réparation intégrale de son préjudice corporel.

Sur les préjudices patrimoniaux permanents en litige

- Sur l'assistance permanente par tierce personne

Ce poste vise à indemniser, postérieurement à la consolidation, le coût pour la victime de la présence nécessaire, de manière définitive, d'une tierce personne à ses côtés pour l'assister dans les actes de la vie quotidienne, préserver sa sécurité, contribuer à restaurer sa dignité et suppléer sa perte d'autonomie.

M. [I] fait valoir qu'avant l'accident il entretenait seul son jardin, composé de pelouses à tondre et d'arbustes à élaguer, ce que les séquelles de l'accident l'empêchent désormais de faire ; il se fonde sur un devis d'entretien et fixe le coût annuel de l'aide à 2 808 euros par an qu'il capitalise de façon viagère pour l'avenir en précisant que le préjudice dont il sollicite l'indemnisation est distinct du préjudice d'agrément.

La société Mutuelle de Poitiers oppose que M. [I] n'a jamais fait état d'une activité de jardinage exercée avant l'accident, que les gênes consécutives à celui-ci sont à relativiser, la victime étant gauchère, et que le devis communiqué est exagéré.

Sur ce, l'expert n'a pas retenu de besoin de M. [I] d'être assisté par une tierce personne après la consolidation ; M. [I] qui n'a pas fait état lors de l'expertise de ce qu'il ne pouvait plus entretenir son jardin, en raison des séquelles de l'accident, ni même fait état d'une activité de jardinage antérieure à l'accident, notamment au titre de ses loisirs, ne rapporte aucune preuve de ce qu'avant l'accident il entretenait lui-même et seul son jardin ; le besoin n'étant pas démontré, sa demande d'indemnisation formée au titre d'une assistance permanente par tierce personne doit être rejetée.

Le jugement est confirmé.

- Sur l'incidence professionnelle

Ce chef de dommage a pour objet d'indemniser non la perte de revenus liée à l'invalidité permanente de la victime mais les incidences périphériques du dommage touchant à la sphère professionnelle en raison, notamment, de sa dévalorisation sur le marché du travail, de sa perte d'une chance professionnelle ou de l'augmentation de la pénibilité de l'emploi qu'elle occupe imputable au dommage, ou encore l'obligation de devoir abandonner la profession exercée au profit d'une autre en raison de la survenance de son handicap ; il inclut les frais de reclassement professionnel, de formation ou de changement de poste, la perte de retraite que la victime va devoir supporter en raison de son handicap et la dévalorisation sociale ressentie par la victime du fait de son exclusion définitive du monde du travail.

M. [I] reproche au premier juge d'avoir sous-évalué ce poste ; il sollicite une indemnité de 60 000 euros et invoque la pénibilité accrue, la perte d'estime de soi, la dévalorisation sur le marché du travail et le sentiment de diminution par rapport à ses collègues.

La société Mutuelle de Poitiers demande à la cour de minorer l'indemnité allouée par le tribunal, dans la mesure où M. [I], qui invoque devoir monter et descendre de cabines d'engins et effectuer des déplacements à l'intérieur de son site, n'en rapporte pas la preuve, à défaut de communication, notamment, d'une fiche de poste.

Sur ce, les experts ont retenu que les blessures subies par M. [I] au cours de l'accident entraînent, de façon définitive, sur le plan physique, une raideur de la hanche droite dans tous les axes rendant difficile la réalisation de certaines épreuves dynamiques et un frein de la flexion palmaire et des inclinaisons du poignet droit, et ont pour conséquence, sur le plan professionnel, d'occasionner une gêne à la station debout prolongée rendant les déplacements professionnels relativement pénibles.

M. [I], dont il est admis par la société Mutuelle de Poitiers, qu'il était cadre au sein du groupe La Poste lors de l'accident, a communiqué les attestations établies par M. [J] [A] et par M. [C] [E], le 9 mai 2017, qui, se déclarant, l'un, encadrant à La Poste et l'autre, responsable de l'agence de [Localité 10], indiquent que le poste qu'occupe M. [I] nécessite de nombreux déplacements sur son site de travail et à l'extérieur et que depuis son accident du 17 février 2015 il a des difficultés à assurer ses tâches notamment à monter et descendre dans les cabines des poids-lourds, et qu'il est ainsi contraint à alterner ses activités administratives et de suivi du parc de véhicules.

Ces témoignages démontrent que M. [I] doit faire de nombreux déplacements et monter et descendre de cabines de poids-lourds dans le cadre de son emploi ; compte tenu des séquelles de l'accident il est établi qu'il subit une pénibilité accrue et une dévalorisation sur le marché du travail, conduisant à une baisse d'estime de soi, et justifiant, eu égard à l'âge de M. [I] à la consolidation, soit 55 ans, l'indemnité de 30 000 euros allouée par le premier juge.

Aucune prestation de nature à s'imputer sur ce poste de dommage n'ayant été versée à M. [I], cette indemnité lui revient en intégralité.

Le jugement est confirmé.

Sur les préjudices extra-patrimoniaux temporaires en litige

- Sur les souffrances endurées

Ce poste comprend l'indemnisation de toutes les souffrances physiques et psychiques, ainsi que des troubles associés, que doit endurer la victime durant la maladie traumatique, c'est-à dire du jour de l'accident jusqu'à celui de la consolidation.

En l'espèce, il convient de prendre en considération les souffrances physiques et psychiques et les troubles associés supportés par la victime en raison du traumatisme initial, de l'hospitalisation, de l'intervention chirurgicale, des examens et soins, notamment de rééducation ; évalué à 4/7 par l'expert, ce chef de préjudice justifie l'octroi d'une indemnité de 20 000 euros.

Le jugement est infirmé.

- Sur le préjudice esthétique temporaire

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique avant la consolidation.

Il ressort des mentions du rapport d'expertise que M. [I] a dû utiliser un déambulateur, puis des cannes anglaises et enfin porter une attelle au poignet droit jusqu'à mi-juillet 2015 ; il en résulte que M. [I] a subi un préjudice esthétique temporaire qui justifie une indemnisation à hauteur de la somme de 1 500 euros.

Le jugement est infirmé.

Sur les préjudices extra-patrimoniaux permanents

- Sur le déficit fonctionnel permanent

Ce poste de dommage vise à indemniser la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant de l'atteinte anatomo-physiologique à laquelle s'ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques et notamment le préjudice moral et les troubles dans les conditions d'existence (personnelles, familiales et sociales).

Il est caractérisé par une raideur de la hanche droite dans tous les axes rendant difficile la réalisation de certaines épreuves dynamiques et un frein de la flexion palmaire et des inclinaisons du poignet droit, conduisant à un taux de 15 % et justifiant compte tenu des souffrances morales et des troubles induits dans les conditions d'existence l'indemnité de 24 000 euros allouée par le premier juge pour un homme âgé de 55 ans à la consolidation.

Le jugement est confirmé.

- Sur le préjudice esthétique permanent

Ce poste de dommage cherche à réparer les atteintes physiques et plus généralement les éléments de nature à altérer l'apparence physique après la consolidation.

Coté 1/7 au titre de l'asymétrie dans la position du bassin et de la cicatrice au niveau de la hanche droite de 27 cm, il a été justement indemnisé à hauteur de la somme de 2 000 euros.

Le jugement est confirmé.

- Sur le préjudice d'agrément

Ce poste de dommage vise exclusivement l'impossibilité ou la difficulté pour la victime à poursuivre la pratique d'une activité spécifique sportive ou de loisir.

M. [I] justifie ne plus pouvoir pratiquer certaines activités sportives auxquelles il s'adonnait régulièrement avant l'accident, à savoir le ski, le tennis, le vélo, la natation et les randonnées, suivant attestations versées aux débats, et subir une gêne dans la pratique de la guitare, ce qui justifie l'indemnité de 8 000 euros allouée par le premier juge.

Le jugement est confirmé.

- Sur le préjudice sexuel

Ce poste concerne la réparation des préjudices touchant à la sphère sexuelle, soit le préjudice morphologique lié à l'atteinte aux organes sexuels primaires et secondaires résultant du dommage subi, le préjudice lié à l'acte sexuel lui-même qui repose sur la perte du plaisir lié à l'accomplissement de l'acte sexuel (perte de l'envie ou de la libido, perte de la capacité physique de réaliser l'acte, perte de la capacité à accéder au plaisir) et le préjudice lié à une impossibilité ou une difficulté à procréer (ce préjudice pouvant notamment chez la femme se traduire sous diverses formes comme le préjudice obstétrical, etc.).

M. [I] a déclaré à l'expert avoir des difficultés positionnelles dans les relations intimes ayant conduit à une quasi abstinence et l'expert a retenu un préjudice sexuel résultant d'une gêne positionnelle, ce qui est en cohérence avec la nature des séquelles conservées et justifie une évaluation à hauteur de la somme de 8 000 euros.

Le jugement est infirmé.

Sur les préjudices de Mme [I]

- Sur la perte de primes

Mme [I] soutient que l'accident de son conjoint a entraîné chez elle un syndrome dépressif réactionnel qui a conduit à un arrêt de travail du 11 mars 2015 au 12 avril 2015 et à une baisse de sa prime semestrielle, ce qu'elle affirme démontrer par une attestation de son supérieur hiérarchique.

La société Mutuelle de Poitiers oppose que l'attestation communiquée est insuffisante pour établir le lien entre la baisse de prime et l'accident, dans la mesure où elle ne précise pas les conditions et modalités d'allocation de la prime et les dates habituelles de paiement ; elle doute qu'une absence d'un mois ait généré une baisse de prime.

Sur ce, les certificats du Docteur [F] qui ont été produits aux débats établissent que l'accident subi par M. [I], a entraîné chez Mme [I] un syndrome dépressif réactionnel qui a nécessité un arrêt de travail du 11 mars 2015 au 12 avril 2015 ; par ailleurs M. [S], cadre supérieur de santé au service de pharmacie du Groupe hospitalier [8] a attesté le 17 septembre 2015, que Mme [I] secrétaire médicale dans son service, a subi une baisse de moitié de sa prime semestrielle à la suite de son arrêt de travail du 11 mars au 12 avril 2015.

En l'état de ces pièces Mme [I] justifie que sa baisse de prime est directement imputable à l'accident subi par M. [I] ; ce préjudice, eu égard aux bulletins de salaire communiqués, doit être évalué à la somme de 607 euros.

Le jugement est infirmé.

- Sur les frais de prise en charge psychologique

Mme [I] sollicite l'indemnisation des frais de prise en charge psychologique prescrits à la suite de son état dépressif réactionnel à l'accident subi par son mari.

La société Mutuelle de Poitiers oppose que le certificat médical communiqué ne permet pas de rattacher les troubles constatés à l'accident dont a été victime M. [I].

Sur ce, la facture de M. [M] qui a été produite aux débats, mentionne des séances d'hypnothérapie s'étant déroulées le 2 février 2016 et le 24 février 2016, soit près d'un an après l'accident ; le lien entre ces séances et l'accident n'est pas suffisamment démontré et la demande d'indemnisation formée à ce titre doit être rejetée.

Le jugement est confirmé.

- Sur le préjudice sexuel

Le préjudice sexuel de M. [I], résultant d'une gêne positionnelle retentit sur la vie sexuelle de Mme [I], ce qui justifie une évaluation à hauteur de la somme de 8 000 euros.

Le jugement est infirmé.

Sur le doublement des intérêts au taux légal

Le tribunal a condamné la société Mutuelle de Poitiers à verser à M. [I] le double des intérêts au taux légal, courus du 17 octobre 2015 au 23 mai 2017, sur le montant de l'offre effectuée le 23 mai 2017, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées.

M. [I] soutient que l'offre était incomplète et manifestement insuffisante ; il demande que la sanction soit appliquée sur l'évaluation de son préjudice, créances des tiers payeurs et provisions incluses, à compter du 17 octobre 2015 jusqu'au jour de l'arrêt définitif.

La société Mutuelle de Poitiers invoque la convention IRCA conclue entre assureurs et affirme que c'était à la société MACIF, assureur mandaté, de faire une offre ; elle estime avoir formulé son offre dans le délai légal, soit dans les cinq mois de la date à laquelle elle a eu connaissance de la consolidation ; elle estime qu'il n'y a pas lieu à doublement des intérêts dans la mesure où d'une part, si certains postes avaient été réservés, c'était dans l'attente de justificatifs à fournir par M. [I] et d'autre part, où l'offre n'était pas manifestement insuffisante.

Sur ce, en application de l'article L. 211-9 du code des assurances, l'assureur qui garantit la responsabilité civile du fait d'un véhicule terrestre à moteur est tenu de présenter à la victime, lorsque la responsabilité n'est pas contestée, et le dommage entièrement quantifié, une offre d'indemnité motivée dans le délai de trois mois à compter de la demande d'indemnisation qui lui est présentée. Lorsque la responsabilité est rejetée ou n'est pas clairement établie, ou lorsque le dommage n'a pas été entièrement quantifié, l'assureur doit, dans le même délai, donner une réponse motivée aux éléments invoqués dans la demande.

Une offre d'indemnité comprenant tous les éléments indemnisables du préjudice doit être faite à la victime qui a subi une atteinte à sa personne dans un délai maximal de huit mois à compter de l'accident. Cette offre peut avoir un caractère provisionnel lorsque l'assureur n'a pas, dans les trois mois de l'accident, été informé de la consolidation de l'état de la victime et l'offre définitive d'indemnisation doit alors être faite dans un délai de cinq mois suivant la date à laquelle l'assureur a été informé de cette consolidation.

A défaut d'offre dans les délais impartis, étant précisé que le délai applicable est celui qui est le plus favorable à la victime, le montant de l'indemnité offerte par l'assureur ou allouée par le juge, produit intérêt de plein droit au double du taux de l'intérêt légal, en vertu de l'article L.211-13 du même code, à compter de l'expiration du délai et jusqu'au jour de l'offre ou du jugement devenu définitif. Cette pénalité peut être réduite par le juge en raison de circonstances non imputables à l'assureur.

Par ailleurs il résulte de l'article R. 211-31 du code des assurances, qu'à compter de la présentation de la première correspondance de l'assureur avec la victime, celle-ci dispose d'un délai de 6 semaines pour donner les renseignements demandés mentionnés à l'article R. 211-37. À défaut, le délai de 8 mois est suspendu à compter de l'expiration du délai de 6 semaines et jusqu'à la réception de la lettre contenant les renseignements demandés, étant précisé que les dispositions de l'article R. 211-31 s'appliquent bien, nonobstant la référence faite au premier alinéa de l'article L. 211-9, au délai de 8 mois prévu par ce texte, l'harmonisation de ces deux articles n'ayant pas été opérée lors de la réforme issue de la loi du n° 2003-706 du 1er août 2003 qui a introduit un nouveau premier alinéa.

La société Mutuelle de Poitiers avait, en application des textes rappelés ci-dessus, la double obligation de présenter à M. [I] dont l'état n'était pas consolidé, une offre provisionnelle dans le délai de 8 mois de l'accident survenu le 17 février 2015, soit au plus tard le 17 octobre 2015, et de lui faire ensuite, une offre définitive dans le délai de 5 mois suivant la date à laquelle elle a été informée de la consolidation de son état, soit au plus tard le 28 juillet 2017, étant précisé que la société Mutuelle de Poitiers indique avoir reçu le rapport d'expertise le 28 février 2017, et que la preuve qu'elle a connu avant cette date la consolidation de M. [I] n'étant pas rapportée.

La société Mutuelle de Poitiers, qui ne justifie pas avoir fait à M. [I] dont l'état de santé n'était pas consolidé une offre provisionnelle détaillée, avant le 18 octobre 2015, est redevable des intérêts au double du taux légal à compter de cette date, étant précisé qu'elle ne peut valablement opposer à M. [I], pour échapper à son égard aux obligations légales précitées, les termes de la convention IRCA, qui n'a été conclue qu'entre les assureurs et n'est pas opposable à la victime.

La première offre dont justifie la société Mutuelle de Poitiers est en date du 23 mai 2017.

Or cette offre est incomplète pour ne pas contenir de propositions notamment pour les postes d'aide humaine, de frais restés à charge, et de préjudice d'agrément qui avaient été caractérisés par les experts, pour lesquels elle a mentionné 'dans l'attente des justificatifs' alors qu'elle ne démontre pas avoir respecté les formalités de l'article R. 211-31 du code des assurances.

La société Mutuelle de Poitiers ne justifie pas que M. [I] a reçu une offre complète et non manifestement insuffisante, avant l'instance engagée devant le tribunal de grande instance de Paris.

Au cours de cette instance, la société Mutuelle de Poitiers a pris un seul jeu de conclusions, le 25 juin 2020, qui contenaient une offre d'indemnisation, mais celle-ci était incomplète pour ne contenir aucune proposition pour le préjudice d'agrément pourtant retenu par l'expert.

Les conclusions de la société Mutuelle de Poitiers en date du 16 septembre 2021, déposées devant la cour sont incomplètes pour ne pas plus contenir d'offre pour le préjudice d'agrément.

Il résulte des motifs qui précèdent, que les indemnités allouées à M. [I] par le jugement à titre définitif, et par la cour, avant déduction des provisions versées et imputation du recours des tiers payeurs, produiront intérêts au double du taux légal à compter du 18 octobre 2015 jusqu'à l'arrêt devenu définitif.

Sur la capitalisation des intérêts

Il convient de dire que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l'article 1343-2 du code civil.

Sur les demandes accessoires

Il n'y a pas lieu de déclarer l'arrêt opposable au Groupe La Poste et la Mutuelle générale qui sont en la cause.

Les dispositions du jugement relatives aux dépens et aux frais irrépétibles doivent être confirmées.

La société Mutuelle de Poitiers qui succombe partiellement dans ses prétentions et qui est tenue à indemnisation supportera la charge des dépens d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile.

L'équité commande d'allouer à M. [I] une indemnité de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés devant la cour et de rejeter la demande de la société Mutuelle de Poitiers formulée au même titre.

Le litige n'étant pas un litige de consommation il n'y a pas lieu de statuer sur l'application de l'article R. 631-4 du code de la consommation.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Et dans les limites de l'appel

- Confirme le jugement sur :

- les condamnations prononcées en faveur de M. [D] [I] au titre des postes de son préjudice corporel relatifs à l'incidence professionnelle, au déficit fonctionnel permanent, au préjudice esthétique permanent et au préjudice d'agrément

- en ce que M. [D] [I] a été débouté de sa demande d'indemnisation au titre d'une assistance permanente par tierce personne

- en ce que Mme [N] [I] a été déboutée de sa demande d'indemnisation de frais de suivi par un psychologue,

- sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile,

- Infirme le jugement sur :

- les condamnations prononcées en faveur de M. [D] [I] au titre des postes de son préjudice corporel relatifs aux souffrances endurées, préjudice esthétique temporaire et préjudice sexuel

- sur la condamnation prononcée en faveur de Mme [N] [I] au titre de l'indemnisation de son préjudice sexuel

- en ce que Mme [N] [I] a été déboutée de sa demande d'indemnisation d'une perte de primes

- sur la sanction du doublement du taux de l'intérêt légal,

Statuant à nouveau sur les points infirmés et y ajoutant,

- Condamne la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [D] [I] les indemnités suivantes, provisions et sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement non déduites, au titre des postes ci-après de son préjudice corporel consécutif à l'accident du 17 février 2015 :

- souffrances endurées : 20 000 euros

- préjudice esthétique temporaire : 1 500 euros

- préjudice sexuel : 8 000 euros ,

- Condamne la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [D] [I] les intérêts au double du taux légal courus sur les indemnités allouées, par le jugement, à titre définitif et par la cour, avant déduction des provisions versées et imputation du recours des tiers payeurs, à compter du 18 octobre 2015 jusqu'à l'arrêt devenu définitif, avec capitalisation des intérêts échus dans les conditions de l'article 1343-2 du code civil,

- Condamne la société Mutuelle de Poitiers à payer à Mme [N] [I] les indemnités suivantes, provisions et sommes versées en vertu de l'exécution provisoire du jugement non déduites, en réparation des préjudices consécutifs à l'accident du 17 février 2015 :

- perte de primes : 607 euros

- préjudice sexuel : 8 000 euros,

- Condamne la société Mutuelle de Poitiers à payer à M. [D] [I] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,

- Déboute la société Mutuelle de Poitiers de sa demande au titre de ses propres frais irrépétibles d'appel exposés,

- Dit n'y avoir lieu de statuer sur l'application de l'article R. 631-4 du code de la consommation,

- Condamne société Mutuelle de Poitiers aux dépens d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 21/05203
Date de la décision : 30/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-30;21.05203 ?
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