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29/03/2023 | FRANCE | N°20/03169

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 29 mars 2023, 20/03169


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 29 MARS 2023



(n° , 2 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03169 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB3CX



Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/00635



APPELANTE



Madame [T] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté

e par Me Cécile VILLIE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0280



INTIMEE



S.A.S. KELLY SERVICES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Florence FARABET ROUVIER, avoca...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 29 MARS 2023

(n° , 2 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/03169 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB3CX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 Septembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/00635

APPELANTE

Madame [T] [F]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Cécile VILLIE, avocat au barreau de PARIS, toque : B0280

INTIMEE

S.A.S. KELLY SERVICES

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Florence FARABET ROUVIER, avocat au barreau de PARIS, toque : C0628

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 30 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Anne-Ga'l BLANC, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président de chambre

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [T] [F] a été engagée par la SAS Kelly services, agence de travail temporaire, qui, dans le cadre d'un contrat de mission du 26 mars au 15 juin 2018, l'a mise à disposition de la société My money bank en qualité de comptable fournisseur.

Le 28 janvier 2019, Mme [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris, sollicitant la condamnation de la seule société d'intérim à lui payer 2.400 euros pour licenciement abusif, 2.400 euros pour non-signature de son contrat de mission et 1.000 euros de rappel de salaire, outre 2.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 septembre 2019, le conseil a rejeté l'ensemble des demandes de la salariée et l'a condamnée aux dépens.

Par déclaration du 15 mai 2020, Mme [F], bénéficiaire de l'aide juridictionnelle suivant décision du 12 mai consécutive à sa demande du 7 décembre 2019, a fait appel de ce jugement qui lui avait été notifié le 12 novembre précédent.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 1er février 2021, elle demande à la cour d'infirmer le jugement et, statuant à nouveau et y ajoutant, de :

- condamner la société Kelly services à lui payer 1.970,80 euros d'indemnité de requalification ;

- condamner la société Kelly services à lui payer 1.970,80 euros d'indemnité pour licenciement abusif ;

- condamner la société Kelly services à lui payer 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

Dans ses dernières conclusions remises au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 février 2021, la société Kelly services demande à la cour de :

- déclarer irrecevable la demande tendant à obtenir la requalification en contrat à durée indéterminée ;

- confirmer le jugement en ce qu'il rejette les demandes de Mme [F] ;

- subsidiairement, si la demande de requalification était jugée recevable, débouter néanmoins Mme [F] de l'intégralité de ses demandes et, si, par extraordinaire, la cour devait retenir une faute dans la transmission du contrat de travail, limiter le montant de l'indemnité à un mois de salaire ;

- condamner Mme [F] au paiement de 1.500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 décembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 30 janvier 2023.

Pour l'exposé des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

1 : Sur la recevabilité de la demande de requalification en contrat à durée indéterminée

Aux termes des articles 564 et suivants du code procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. Cependant, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu'elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge même si leur fondement juridique est différent. Les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

En l'espèce, l'instance a été introduite après l'entrée en vigueur, le 1er août 2016, de la réforme de la procédure prud'homale mettant fin à l'unicité de l'instance. Ainsi, les demandes nouvelles, même lorsqu'elles dérivent du même contrat de travail, sont irrecevables.

Or, en première instance, Mme [F] demandait la condamnation de son employeur au paiement d'une indemnité pour licenciement abusif, d'une indemnité pour non-signature du contrat ainsi qu'un rappel de salaire sans former de demande de requalification de son contrat de mission en contrat à durée indéterminée.

Cependant, même si son fondement juridique est différent cette demande tend aux mêmes fins qu'une des prétentions soumises au premier juge à savoir l'indemnisation du préjudice lié à une éventuelle rupture abusive du contrat. La demande d'indemnité de requalification en est par ailleurs le complément nécessaire.

La fin de non recevoir tirée du caractère nouveau de la demande de requalification sera donc rejetée et le jugement complété en ce sens.

2 : Sur la requalification en contrat à durée indéterminée

2.1 : Sur l'indemnité de requalification

Il est constant que le salarié temporaire dont le contrat de mission est requalifié en contrat à durée indéterminée tant à l'égard de la société de travail temporaire qu'à l'égard de l'entreprise utilisatrice, ne peut prétendre, concernant la première, qu'à sa condamnation au titre de la rupture du contrat et non au titre de l'indemnité de requalification, celle-ci ne pouvant être mise à la charge que du seul utilisateur.

La demande à ce titre sera donc rejetée.

Le jugement sera complété en ce sens.

2.2 : Sur la requalification du contrat

L'article L.1251-40 du code du travail prévoit les hypothèses de requalification du contrat en contrat à durée indéterminée à l'encontre de l'entreprise utilisatrice. Ces hypothèses ne sauraient s'étendre aux entreprises de travail temporaire.

Cependant, il constant que la responsabilité de l'entreprise de travail temporaire peut être engagée s'il est établi qu'elle a agi frauduleusement en concertation avec l'entreprise utilisatrice ou qu'elle a manqué aux obligations qui lui sont propres.

Au cas présent, au soutien de sa demande de requalification dirigée contre la seule entreprise de travail temporaire, la salariée fait valoir, en premier lieu, que le contrat de mission lui a été transmis tardivement, en second lieu, qu'il ne préciserait pas, contrairement à ce qu'imposerait l'article L.1251-43 du code du travail, la date de paie, la périodicité et le montant des acomptes éventuels, le mode de paiement en vigueur dans l'entreprise ainsi que le montant de la rémunération et des différents avantages et accessoires et, enfin, en troisième lieu, que le motif tiré de l'accroissement temporaire d'activité serait erroné, le contrat ayant en réalité vocation à pourvoir à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice.

Cependant, s'il était de principe au visa de l'article L.1251-40 ancien du code du travail que la requalification était encourue par l'entreprise de travail temporaire qui n'avait pas adressé au salarié les contrats relatifs aux missions dans les deux jours ouvrables suivant sa mise à disposition, cet article, dans sa version désormais applicable, prévoit que la méconnaissance de l'obligation de transmission ne saurait, à elle seule, entraîner la requalification en contrat à durée indéterminée mais ouvre uniquement droit, pour le salarié, à une indemnité qui ne peut être supérieure à un mois de salaire. Il en résulte que le moyen tiré de la transmission tardive, même à la supposer établie, est inopérant, étant souligné que la salariée ne sollicite pas le paiement de l'indemnité désormais prévue à ce titre.

Par ailleurs, si l'article L1251-43 6° du code du travail prévoit que le contrat de mission comporte "le montant de la rémunération avec ses différentes composantes, y compris, s'il en existe, les primes et accessoires de salaire que percevrait dans l'entreprise utilisatrice, après période d'essai, un salarié de qualification professionnelle équivalente occupant le même poste de travail", en l'espèce, le contrat comporte ces mentions et l'absence des autres mentions invoquées n'est pas de nature à emporter requalification du contrat de mission à l'égard de la société d'intérim. Ce moyen est donc également inopérant.

Enfin, si l'article L.1251-5 du code du travail dispose que le contrat de mission ne peut pourvoir durablement un emploi lié à l'activité normale et permanente de l'entreprise utilisatrice et si l'article L.1251-6 du même code prévoit qu'il ne peut être fait appel à un salarié temporaire que dans des cas limitativement énumérés, parmi lesquels figure l'accroissement temporaire de l'activité de l'entreprise utilisatrice, au cas présent, le contrat de mission mentionne bien qu'il répond à un accroissement temporaire de l'activité, lié à un afflux de factures du fait de la mise en place du logiciel Oracle, la preuve de la réalité de ce motif incombe exclusivement à l'entreprise utilisatrice qui n'est pas dans dans la cause et la salariée a travaillé uniquement du 26 mars au 15 juin 2018, soit deux mois et demi, en sorte que le contrat de mission n'a pu avoir pour objet ni pour effet de répondre à un besoin structurel de main d'oeuvre dont l'intimée aurait eu connaissance. Ce moyen doit donc également être écarté.

La demande de requalification du contrat de mission en contrat à durée indéterminée sera donc rejetée et le jugement complété en ce sens.

La demande subséquente d'indemnité pour licenciement abusif sera également rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

3 : Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé sur les dépens et les frais irrépétibles.

La salariée supportera les dépens de l'appel ainsi qu'une somme de 500 euros au titre des frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS,

La cour :

- Rejette l'exception d'irrecevabilité de la demande tendant à obtenir la requalification de son contrat en contrat de travail à durée indéterminée ;

- Confirme le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 24 septembre 2019 ;

Y ajoutant :

- Rejette la demande d'indemnité de requalification ;

- Rejette la demande requalification du contrat en contrat à durée indéterminée ;

- Condamne Mme [T] [F] à payer à la SAS Kelly services la somme de 500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- Condamne Mme [T] [F] aux dépens.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/03169
Date de la décision : 29/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-29;20.03169 ?
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