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23/03/2023 | FRANCE | N°21/22194

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 7, 23 mars 2023, 21/22194


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7



ARRÊT DU 23 Mars 2023

(n° , 17 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22194 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE3XF



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Octobre 2021 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 20/00063





APPELANTE

E.P.I.C. SOCIETE DU GRAND [Localité 31]

représentée par Monsieur [J] [N]

agissant en qualité de Président

du Directoire

[Adresse 9]

[Localité 20]

représentée par Me Stéphane DESFORGES de la SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K131





INTIMÉS

Mon...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Au nom du Peuple Français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 7

ARRÊT DU 23 Mars 2023

(n° , 17 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/22194 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CE3XF

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 07 Octobre 2021 par le Tribunal Judiciaire de BOBIGNY - RG n° 20/00063

APPELANTE

E.P.I.C. SOCIETE DU GRAND [Localité 31]

représentée par Monsieur [J] [N]

agissant en qualité de Président du Directoire

[Adresse 9]

[Localité 20]

représentée par Me Stéphane DESFORGES de la SELARL LE SOURD DESFORGES, avocat au barreau de PARIS, toque : K131

INTIMÉS

Monsieur [Y] [I]

[Adresse 1]

[Localité 21]

représenté par Me Jean Yves LE GOFF, avocat au barreau de VAL D'OISE, toque : 85

Madame [O] [I]

[Adresse 1]

[Localité 21]

représentée par Me Jean Yves LE GOFF, avocat au barreau de VAL D'OISE, toque : 85

DIRECTION DEPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES DE LA SEINE SAINT DENIS COMMISSAIRE DU GOUVERNEMENT

France Domaine

[Adresse 3]

[Localité 23]

représentée par Madame [P] [D], en vertu d'un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 08 Décembre 2022, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Hervé LOCU, Président chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Hervé LOCU, Président

Monsieur Raphaël TRARIEUX, Conseiller

Madame Valérie GEORGET, Conseillère

Greffier : Madame Dorothée RABITA, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Hervé LOCU, Président et par Dorothée RABITA, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

L'établissement public société du Grand [Localité 30] (SGP) créé par la loi n°2010-597 du 3 juin 2010 relative au Grand [Localité 30], a pour mission principale de concevoir et d'élaborer le schéma d'ensemble et les projets d'infrastructures composant le réseau de transport public du Grand [Localité 30] et d'en assurer également la réalisation, laquelle comprend notamment la construction des lignes, ouvrages et installations fixes ainsi que la construction et l'aménagement des gares, y compris d'interconnexion.

Le schéma d'ensemble prévoit notamment la création d'une ligne 15 Est Orange de 23 km de métro automatique en souterrain qui desservira [Adresse 2].

Par arrêté inter-préfectoral n°2016-1133 du 25 avril 2016, ont été prescrites l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et l'ouverture de l'enquête pour la mise en compatibilité des documents d'urbanisme des communes de [Localité 35], [Localité 22], [Localité 29], [Localité 26], [Localité 23], [Localité 28], [Localité 24], [Localité 33], [Localité 27] et [Localité 32], relative au projet de création de la ligne 15 Est Orange. Par la suite, un arrêté inter-préfectoral n°2017-2645 du 13 septembre 2017 a prescrit l'ouverture d'une enquête préalable à la déclaration d'utilité publique modificative concernant la ligne 15 Est Orange du réseau complémentaire du réseau de transport public du Grand [Localité 30] entre « [Localité 35] Pleyel » et « [Localité 25] centre », menée sur les communes de [Localité 23], [Localité 24], [Localité 33] et [Localité 36], concernées par la modification du périmètre d'intervention potentielle, ainsi que d'une enquête pour la mise en compatibilité du PLU de la commune de [Localité 33], rendue nécessaire par 1'une des modifications apportées au projet.

Par un arrêté inter-préfectoral n°2017-325 du 13 février 2017, ont été déclarés d'utilité publique et urgents les travaux nécessaires à la réalisation de la ligne 15 Est Orange du réseau complémentaire du réseau de transport public du Grand [Localité 30] entre « [Localité 35] Pleyel » (gare exclue) et « [Localité 25] centre ». Par un arrêté inter-préfectoral n°2018-1438 du 20 juin 2018, l'arrêté inter-préfectoral n°2017-325 du 13 février 2017 susvisé a été modifié afin de tenir compte des évolutions du périmètre d'intervention potentielle.

La parcelle cadastrée section Z n°[Cadastre 8] est incluse dans le périmètre des expropriations. Elle se situe en zone UMTa du plan local d'urbanisme. Elle supporte un ensemble immobilier placé sous le statut de la copropriété comprenant un bâtiment A en façade sur la [Adresse 34], élevé sur sous-sol, avec un rez-de-chaussée, cinq étages et un grenier mansardé et un bâtiment B élevé sur terre-plein avec un rez-de-chaussée et un étage, en retrait du bâtiment A, séparé de lui par une cour commune. L'immeuble est dans un état d'entretien correct.

Sont notamment concernés par l'opération, Monsieur et Madame [I] qui sont propriétaires :

'du lot numéro 3 situé dans le bâtiment A, à savoir un appartement rez-de-chaussée de 22,45 m² (21,14 m² en loi Carrez) selon certificat de mesure de la société Qualy Diag du 16 mai 2020, composé d'un séjour avec une cuisine ouverte, une chambre, une salle d'eau aveugle avec sanitaires, lavabo, une douche carré et un débarras, étant précisé que la hauteur sous plafond est relativement importante ;

'du lot numéro 41 situé dans bâtiment B, à savoir un appartement au premier étage de 15,25 m² selon le même certificat de mesurage, composée d'une pièce avec une kitchenette, salle d'eau comprenant une fenêtre, double vitrage WC ;

'du lot numéro 37 situé dans bâtiment B, à savoir un garage 20 m², vide lors de la visite des lieux ;

'du lot numéro 46 situé dans le bâtiment B au premier étage, à savoir un couloir.

Lors du transport sur les lieux les lots précités étaient libres de toute occupation.

A défaut d'accord amiable sur l' indemnité de dépossession à revenir à M. et Mme [I], la Société du Grand [Localité 30] a saisi le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Paris par mémoire valant offre du 11 mai 2021 visé par le greffe le 14 septembre 2021.

Par un jugement du 7 octobre 2021 le juge de l'expropriation du tribunal judiciaire de Paris a :

Fixé la date de référence au 31 mars 2020  ;

- Fixé à la somme de 250 2929 euros l'indemnité à revenir à Monsieur et Madame [I] pour la dépossession de leur local cadastré section Z n°[Cadastre 8], lots n° [Cadastre 10], [Cadastre 12],[Cadastre 13] [Cadastre 14] situé [Adresse 11] sur la commune [Localité 22], d'une contenance cadastrale de 81 m², se décomposant comme suit :

Indemnité principale : 235'390 euros,

Frais de remploi : 24'539 euros

Condamné la Société du Grand [Localité 30] à payer à M. et Mme [I] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Rappelé que les dépens sont de droit supportés par l'expropriant en vertu de l'article L.312-1 du code de l'expropriation pour cause d'utilité publique.

La Société du Grand [Localité 30] a interjeté appel du jugement le 21 décembre 2021 sur la fixation de l'indemnité de dépossession.

Pour l'exposé complet des faits, de la procédure, des prétentions et moyens des parties, conformément à l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé à la décision déférée et aux écritures :

1/ adressées au greffe par la Société du Grand [Localité 30], le 21 mars 2022 notifiées le 22 mars 2022 (AR intimé 23 mars 2022 et AR 23 mars 2022), et le 14 septembre 2022 notifiées le 15 septembre 2022 (AR du 19 septembre 2022 et 5 octobre 2022) aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

'rejeter le moyen tiré d'irrecevabilité de l'appel soulevé par les intimés ;

Infirmer le jugement en ce qu'il a fixé à la somme de 259'929 euros l'indemnité de dépossession à revenir à M. et Mme [I] ;

Statuant à nouveau,

Fixer en valeur libre à la somme globale de 141'250 euros en NR tous chefs de préjudices confondus, l'indemnité devant revenir à M. et Mme [I] ;

- condamner Monsieur et Madame [I] aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme de 2000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

2/ déposées au greffe par M. et Mme [I] , intimés, formant appel incident le 16 juin 2022, notifiées le 17 juin 2022 (AR appelant le 21 juin 2022 et AR CG le 21 juin  2022) et le 18 novembre 2022 notifiées le 21 novembre 2022 (AR non retourné) aux termes desquelles il est demandé à la cour de :

- constater l'irrecevabilité de l'appel interjeté par l'expropriant ;

subsidiairement

Confirmer le jugement au titre de l'indemnité principale d'éviction, au titre de l'indemnité accessoire et au titre de l' article 700 du code de procédure civile ;

infirmer le jugement en ce qu'il les a déboutés de leur demande de paiement d'une indemnité principale d'expropriation de 15'000 euros au titre du lot numéro 46, une indemnité de 100'489,17 euros pour non-respect des dispositions des articles R 213-14 et R2 113'15 du code de l'expropriation et une indemnité de 182'078 euros au titre des droits à construire ;

condamner la Société du Grand [Localité 30] à leur payer ces sommes

Condamner la Société du Grand [Localité 30] à leur verser la somme de 4000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamner la Société du Grand [Localité 30] aux dépens.

Le commissaire du gouvernement n'a pas adressé ou déposé de conclusions.

EXPOSÉ DES PRÉTENTIONS ET DES MOYENS DES PARTIES :

La Société du Grand [Localité 30] fait valoir que :

-S'agissant du moyen soulevé de l'irrecevabilité de l'appel au motif que l'expropriation n'aurait pas été réalisée dans les cinq ans suivant l'arrêté du 13 février 2017, la recevabilité de l'appel d'un jugement fixant les indemnités d'expropriation n'est pas subordonnée à la validité de la déclaration d'utilité publique et ne saurait être opposé la caducité de la déclaration d'utilité publique, puisque l'expropriation a bien été réalisée dans les 5 ans et les effets de l'arrêté de déclaration d'utilité publique du 13 février 2017 ont été prorogés pour une durée de cinq ans par arrêté inter préfectoral du 13 janvier 2022 (pièce numéro 7) ;

-sur la demande de fixation d'une indemnité réparant le préjudice qui résulterait du non-respect allégué des dispositions des articles R 213-14 et R213-15 du code de l'urbanisme, la Société du Grand [Localité 30] a soulevé en première instance l'incompétence de la juridiction d'expropriation et le jugement sera confirmé qui a estimé que le préjudice allégué était sans lien direct certain avec l'opération d'expropriation.

-Sur l'indemnité au titre du lot numéro 46 pour le couloir grevé d'une servitude de passage, le premier juge a exactement considéré qu' il ne s'agit que d'une valeur résiduelle par rapport aux logements des services et il convient de confirmer le jugement qui a fixé à 500 euros l'indemnité principale à ce titre.

-Sur l'indemnité au titre des droits relatifs à construire, il convient de confirmer le jugement puisque le préjudice est purement éventuel en l'absence de justification d'un véritable projet de construction;

-Concernant la description du bien, la parcelle est située au centre de la commune d'[Localité 22], dans le quartier de centre-ville à vocation mixte résidentielle et commerciale, et supporte une copropriété.

-Le lot numéro 3 constitué d'un appartement en rez-de-chaussée du bâtiment A, porte face de l'escalier, d'une surface de 21,12 m², accessible par le couloir constituait le lot numéro 46, le lot numéro 41 constitué d'un appartement situé au premier étage du bâtiment B, d'une surface de 15,25 m² accessibles par le couloir constituant le lot numéro 46, le lot 37 constitue un garage fermé débarras d'une surface de 20 m², en rez-de-chaussée du bâtiment B, accessible par la cour commune et le numéro 46 constitue un couloir situé au premier étage du bâtiment B, grevé d'une servitude de passage au fil des lots numéro 42 et 43.

Concernant la situation d'urbanisme, le bien est situé en zone UMTa, qui correspond notamment au centre-ville d'[Localité 22].

Concernant la situation locative, le bien est libre d'occupation.

Concernant la date de référence, il résulte des article L.322-2 du code de l'expropriation et L.213-4 du code de l'urbanisme que celle-ci doit en l'espèce être fixée au 31 mars 2020, date à laquelle est devenue opposable aux tiers la dernière modification du plan local d'urbanisme intercommunal de la Plaine Commune.

Le jugement doit être infirmé s'agissant des surfaces, car il convient de retenir non la surface utile mais les surfaces Carrez ;

'le jugement sera infirmé en ce qu'il a retenu une valeur unitaire de 5700 euros du m², car au vu des nouveaux termes de comparaison versée, il convient de retenir une valeur vénale de 4400 euros/m² ;

'le jugement sera infirmé s'agissant des améliorations apportées postérieurement à l'ouverture de l'enquête publique en application de l'article L 322-1 du code de l'expropriation ; par jugement d'adjudication du 21 mars 2017, les expropriés ont acquis les biens visés, qui étaient en mauvais état, pour un prix de 112'000 euros et ce n'est qu'ensuite qu'ils ont réalisé les travaux de rénovation significatifs qui sont présumés avoir été faits dans le but d'obtenir une indemnité plus élevée ; il convient en conséquence d'appliquer un abattement de 30 % par rapport à la valeur du marché ;

's'agissant de la valeur du garage il convient d'infirmer le jugement et de retenir un montant de 15'000 euros.

M. et Mme [I] rétorquent que :

'sur l'irrecevabilité de l'appel de la société du Grand [Localité 30]

il apparaît que l'expropriation n'a pas été réalisée dans délai de 5 ans courant à compter de la déclaration d'utilité publique et la société du Grand [Localité 30] est donc irrecevable en son appel ;

'à titre subsidiaire :

'sur la superficie des lots expropriés : aucune disposition du code de l'expropriation n'impose au juge de l'expropriation d'appliquer la loi Carrez ;

'sur la valeur vénale des appartements. La société du Grand [Localité 30] ne produit aucun document probant ;

'sur l'abattement de 30 % en raison des améliorations apportées postérieurement à l'ouverture de l'enquête publique. Le jugement d'adjudication du 21 mars 2017 (pièce numéro un) ne fait pas mention de la procédure d'expropriation ; ils sont en conséquence de bonne foi ;

'sur la valeur du garage : la Société du Grand [Localité 30] propose 19'000 euros en première instance ;

'le jugement doit être confirmé sur les indemnités principales et accessoires des lots 3,37 et 41 ;

'le jugement doit être infirmé partiellement : sur la valorisation du lot de copropriétés numéro 46 avec l'attribution d'une indemnité principale de 15'000 euros ;

'une indemnisation du préjudice en raison du non-respect dispositions des articles R213-14 et R213-15 du code de l'urbanisme ; ils ont souscrit un emprunt de 90'000 euros (pièce numéro 23) ils ont réalisé les travaux de rénovation importants pour un montant de 33'000 euros TTC : pièces numéro 15 et 21) ce qui aboutit à un préjudice de 108'489,17 euros ;

'sur l'indemnisation des droits résiduels à construire, l' expropriation a pour conséquence de les priver de leurs droits résiduels à construire liés à la privation de leurs droits de copropriétés sur les parties communes ; ils sollicitent à ce titre :

303 46 m²X 600 euros= 182076 euros

SUR CE, LA COUR

- Sur la recevabilité des conclusions

Aux termes de l'article R311-26 du code de l'expropriation modifié par décret N°2017-891 du 6 mai 2017-article 41 en vigueur au 1 septembre 2017, l'appel étant du 21 décembre 2021, à peine de caducité de la déclaration d'appel, relevée d'office, l'appelant dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d'appel.

À peine d'irrecevabilité, relevée d'office, l'intimé dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et les documents qu'il entend produire dans un délai de trois mois à compter de la notification des conclusions de l'appelant. Le cas échéant, il forme appel incident dans le même délai et sous la même sanction.

L'intimé à un appel incident ou un appel provoqué dispose, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, d'un délai de trois mois à compter de la notification qui en est faite pour conclure.

Le commissaire du gouvernement dépose ou adresse au greffe de la cour ses conclusions et l'ensemble des pièces sur lesquelles il fonde son évaluation dans le même délai et sous la même sanction que celle prévue au deuxième alinéa.

Les conclusions et documents sont produits en autant d'exemplaires qu'il y a de parties, plus un.

Le greffe notifie à chaque intéressé et au commissaire du gouvernement, dès leur réception, une copie des pièces qui lui sont transmises.

En l'espèce, les conclusions de la SGP du 21 mars 2022 , de M. et Mme [I] du 16 juin 2022 adressées ou déposées dans les délais légaux sont recevables.

Les conclusions hors délai de la SGP du 14 septembre 2022 sont de pure réplique à celles de M. et Mme [I], appelants incidents, ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux, sont donc recevables au delà des délais initiaux.

Les conclusions hors délai de M. et Mme [I] sont de pure réplique à celles de la SGP ne formulent pas de demandes nouvelles ou de moyens nouveaux sont donc recevables au delà des délais initiaux.

- sur le recevabilité de l'appel

La SGP a régulièrement formé appel le 21 décembre 2021 par RPVA limité à l'infirmation concernant l'indemnité de dépossession.

Cependant, M. et Mme [I] soulèvent à titre principal l'irrecevabilité de l'appel de la société du Grand [Localité 30] au motif que l'expropriation n'a pas été réalisée dans le délai de cinq ans courant à compter de la déclaration d'utilité publique.

Ils indiquent que par arrêté un préfectoral numéro 2017-325 du 13 février 2017, ont été déclaré d'utilité publique et urgents les travaux nécessaires à la réalisation de la ligne 15 Est orange du réseau complémentaire du réseau de transport public

du Grand [Localité 30] entre « [Localité 35] Pleyel » (gare exclu) et « [Localité 25] centre » (pièce numéro 49) ; que l'article 6 de cet arrêté stipule que « l'expropriation des immeubles nécessaires à la réalisation du projet doit être accomplie dans un délai de 5 ans à compter de la signature du présent arrêté », soit un délai de 5 ans à compter du 13 février 2017 finissant le 13 février 2022 ; que cet arrêté a fait l'objet de plusieurs arrêtés inter préfectoraux qui ont maintenu la durée l'expropriation à 5 ans à compter de sa signature du 13 février 2022, notamment les arrêtés numéro 2018'1438 du 20 juin 2018 (pièce numéro 50) numéro 2021-3381 du 2 décembre 2021 (pièce numéro 51) dernier en date, qui comprenaient un l'article 6 stipulant « le délai de 5 ans à compter de la date de l'arrêté de déclaration d'utilité publique initiale fixée pour procéder à l'expropriation est inchangé ».

Ils considèrent en conséquence que l'expropriation n'a pas été réalisée dans les 5 ans courant à compter de la déclaration d'utilité publique, et que dès lors que l'expropriation n'a pas été réalisée dans le délai fixé, la Société du Grand [Localité 30] est irrecevable en son appel.

Cependant, la recevabilité de l'appel d'un jugement fixant les indemnités d'expropriation n'est pas subordonnée à la validité de la déclaration d'utilité publique.

En outre, l'article L 121'4 du code de l' expropriation dispose que l'acte déclarant l'utilité publique précise le délai accordé pour réaliser l'expropriation. Il ne peut excéder cinq ans, si la déclaration d'utilité publique n'est pas prononcée par décret en conseil d'État en application de l'article L 121-1 et l'article L 121-5 du même code dispose qu'un acte pris dans la même forme peut proroger une fois les effets de la déclaration d'utilité publique pour une durée au plus égale à la durée initialement fixée, lorsque celle-ci n'est pas supérieure à cinq ans. Cette prorogation peut être accordée sans nouvelle enquête préalable, en l'absence de circonstances nouvelles.

Or, en l'espèce, l'expropriation du bien des époux [I] a été prononcée par ordonnance du juge de l' expropriation de Seine-[Localité 35] du 3 août 2021 (pièce numéro 6) qui a été notifiée aux expropriés ; l' expropriation a bien été réalisée dans les cinq ans suivant l'arrêté de déclaration d'utilité publique du 13 février 2017 ; de plus, les effets de l'arrêté de déclaration d'utilité publique du 13 février 2017 ont été prorogés pour une durée de 5 ans par arrêté préfectoral numéro 2022'00 93 du 13 janvier 2022 (pièce numéro 7) qui a fait l'objet de mesures de publicité.

En conséquence, il convient de débouter Monsieur et Madame [I] de leur demande d'irrecevabilité de l'appel de la société du Grand [Localité 30].

- Sur le fond

Aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ratifiée qui s'impose au juge français, toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; ces dispositions ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes.

Aux termes de l'article 17 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la propriété est un droit inviolable et sacré, dont nul ne peut être privé si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige évidemment, et sous la réserve d'une juste et préalable indemnité.

L'article 545 du code civil dispose que nul ne peut être contraint de céder sa propriété, si ce n'est pour cause d'utilité publique, et moyennant une juste et préalable indemnité.

Aux termes de l'article L 321-1 du code de l'expropriation, les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation.

Aux termes de l'article L 321-3 du code de l'expropriation le jugement distingue, dans la somme allouée à chaque intéressé, l'indemnité principale et, le cas échéant, les indemnités accessoires en précisant les bases sur lesquelles ces diverses indemnités sont allouées.

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété ou lorsque l'expropriant fait fixer l'indemnité avant le prononcé de l'ordonnance d'expropriation, à la date du jugement.

Conformément aux dispositions de l'article L 322-2, du code de l'expropriation, les biens sont estimés à la date de la décision de première instance, seul étant pris en considération - sous réserve de l'application des articles L 322-3 à L 322-6 dudit code - leur usage effectif à la date définie par ce texte.

L'appel de la SGP porte sur l'indemnité de dépossession, tandis que l'appel incident de M. et Mme [I] concerne le débouté s'agissant d'une demande de paiement d'une indemnité principale d'expropriation de 15'000 euros au titre du lot numéro 46, d'une indemnité de 108'489,17 euros pour non-respect des dispositions des articles R213'14 et R213'15 du code de l'urbanisme et une indemnité de 182'078 euros au titre de la perte des droits à construire résiduels.

S'agissant de la date de référence, le premier juge a retenu en application de l'article L213-6 du code urbanisme, le bien objet de l'expropriation étant soumis au droit de préemption urbain, la date du 31 mars 2020, date à laquelle est devenu opposable aux tiers le plus récent des actes approuvant, révisant ou modifiant le plan local d'urbanisme et délimitant la zone dans laquelle est situé le bien.

Les parties retenant la même date, le jugement sera confirmé sur ce point.

S'agissant des données d'urbanisme, à cette date la parcelle se situe en zone UMT du PLU, correspondant à une zone mixte traditionnelle.

La parcelle sur laquelle est implanté le local se situe au c'ur du centre-ville de la commune d'[Localité 22] juste à côté de la mairie, dans un environnement privilégié très dynamique avec la présence de nombreux commerces et services aux alentours, des transports et de toutes les commodités.

Pour ce qui est de la nature du bien, de son usage effectif et de sa consistance, il s'agit d'un immeuble composé :

'd'un bâtiment A en façade sur la [Adresse 34], élevé sur sous-sol, d'un rez-de-chaussée, 5 étages d'un grenier mansardé ;

'd'un bâtiment B élevé sur terre plein d'un rez-de-chaussée et d'un étage, en retrait du bâtiment A et séparé de lui par une cour commune.

M. et Madame [I] sont propriétaires :

'du lot numéro 3 situé dans bâtiment A, à savoir un appartement en rez-de-chaussée, composé d'un séjour avec une cuisine ouverte, d'une chambre, d'une salle d'eau aveugle avec sanitaires, un lavabo, une douche carrée et un débarras, avec une hauteur sous plafond relativement importante ;

'du lot numéro 41 situé dans bâtiment B, à savoir un appartement au premier étage, composé d'une pièce avec une kitchenette, salle d'eau comprenant une fenêtre double vitrage et WC ;

'du lot numéro 37 situé dans bâtiment B, à savoir un garage, vide de biens lors de la visite des lieux ;

'du lot numéro 46 situé dans bâtiment B au premier étage, à savoir un couloir.

Pour une plus ample description, il convient de se référer au procès verbal de transport.

S'agissant de la date à laquelle le bien exproprié doit être estimé, il s'agit de celle du jugement de première instance conformément à l'article L322-2 du code de l'expropriation, soit le 7 octobre 2021.

- sur la demande d'indemnisation du préjudice lié au non-respect des dispositions des articles R213'14 et R213'15 du code de l'urbanisme

Le premier juge a déclaré irrecevable la demande des expropriés au titre de l'incompétence du juge de l'expropriation.

M. et Madame [I] indiquent que les dispositions des articles R 213-14 et R 213-15 du code de l'urbanisme n'ont pas été respectées lors de la procédure d'adjudication ;qu'ils ont souscrit un emprunt 90'000 euros auprès du CIC destiné à financer partiellement le rachat en adjudication, qu'au 5 juin 2020, ils restent devoir en capital la somme de 75'489,17 euros (pièce numéro 23), qu'ils ont réalisé des travaux de rénovation importants dans les biens acquis en adjudication pour un montant de 33'000 euros TTC (pièces 9 à 14, pièces 15 à 21, pièces numéros 22 et 25) ; que s'ils avaient été informés de la procédure de déclaration d'utilité publique, ils ne se seraient pas endettés pour acquérir les lots de copropriétés et n'auraient pas engagé des travaux de rénovation .

Ils indiquent que le préjudice correspond à ces dépenses de 75'489,17 euros et 33'000 euros soit la somme de 108'489,17 euros, qu'ils demandent au titre du préjudice lié au non-respect des dispositions des articles R 213-14 et R213-15 du code de l'urbanisme.

En application des articles L 311-5 et L 321-1 du code de l'expropriation, la compétence du juge de l' expropriation est limitée à la fixation des indemnités réparatrices du préjudice subi du fait de l'expropriation et celui-ci n'est compétent que pour statuer sur les préjudices en lien direct et certain à l'opération d'expropriation.

Les expropriés font état d'un préjudice au motif que la société du Grand [Localité 30] aurait bénéficié du droit de préemption et n'aurait pas exercé celui-ci, au visa des dispositions des articles R 213-14 et R213-15 du code de l'urbanisme relative à la procédure en matière de droit de préemption applicable aux ventes par adjudication ; cependant, en vertu du principe de séparation des autorités administratives et judiciaires par la loi des 16'24 août 1790 et réaffirmé par le décret du 16 fructidor an III, le juge administratif est seul compétent pour statuer sur une action en responsabilité dirigée contre l'administration.

En conséquence, le premier juge a exactement considéré que cette demande formulée par les expropriés est irrecevable, le juge de l' expropriation n'étant pas compétent pour statuer sur ce point.

Le jugement sera donc confirmé en ce sens.

- Sur l'indemnité principale

1° Sur les surfaces

Le premier juge précise que le lot numéro 3 situé dans bâtiment A, à savoir un appartement rez-de-chaussée a une surface de 22,45 m² (21,14 m² en loi Carrez) selon certificat de surface de la société Qualy Diag et que le lot numéro 41 situé dans bâtiment B, à savoir un appartement au premier étage a une surface de 15,25 m² selon le même certificat de mesurage.

Il a retenu les surfaces utiles ce qui n'a pas été contesté par la SGP.

En appel, la société du Grand [Localité 30] qui produit les certificats de mesurage (pièce numéro 3) indique qu' en application de l'article 46 de la loi numéro 65-557 du 10 juillet 1965, la superficie à retenir pour les mutations de locaux en co- propriétés est la superficie de la partie privative du lot, définie aux articles 4-1 et 4-2 du décret numéro 67-223 du 17 mars 1967 pris pour l'application de ladite loi :

« article 4-1

la superficie de la partie privative d'un lot ou d'une fraction de lots mentionnés à l'article 46 de la loi du 10 juillet 1965 est la superficie des planchers des locaux clos et couvert après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d'escaliers, gaines, embrasures de portes et de fenêtres. Il n'est pas tenu compte des planchers des parties des locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 m.

Article 4-2

les lots et fractions de lots d'une superficie inférieure à 8 m² ne sont pas pris en compte pour le calcul de la superficie mentionnée à l'article 4-1 ».

Elle demande en conséquence de prendre en compte la surface définie selon les prescriptions de la loi Carrez à savoir :

'surface de l'appartement rez-de-chaussée (numéro 3) : 21,12 m².

'surface de l'appartement au premier étage (lots 41) : 15,25 m².

M. et Madame [I] rétorquent qu'aucune disposition du code de l'expropriation n'impose au juge de l'expropriation d'appliquer la loi Carrez.

En matière d'expropriation, par principe, il est d'usage de privilégier la surface utile, définie par l'article R111-12 du code de la construction et l'habitation comme étant égale à la surface de plancher construite, après déduction des surfaces occupées par les murs, cloisons, marches et cages d'escaliers, gaines, embrasures de portes et de fenêtres; le volume habitable correspond au total des surfaces habitables ainsi définies multipliées par les hauteurs sous plafond.

Il n'est pas tenu compte de la superficie des combles aménagés, caves, sous-sols, remises, garage, terrasse, loggias, balcons, séchoirs extérieurs au logement, vérandas, volumes vitré prévus à l'article R111-10, locaux communs et autres dépendances des logements, ni des parties des locaux d'une hauteur inférieure à 1,80 m.

Les annexes privatives incluses sont les suivantes : caves et sous-sol, combles et greniers aménageables, remises et ateliers, séchoirs et celliers externes, balcons et loggias, vérandas, terrasses accessibles en l'étage ou semi- enterré dans la limite de 9 m².

En outre, suivant les recommandations de la charte de l'expertise en évaluation immobilière, les locaux techniques sont exclus du calcul de la surface utile.

La surface habitable correspond à la somme de la surface construite de toutes les pièces (surface de plancher), à laquelle il faut retirer les espaces qui peuvent être qualifiés de non habitables, à savoir : les murs et cloisons, les marches et cages d'escaliers, les gaines et embrasures de portes et de fenêtres, les surfaces dans la hauteur et en-deçà d'1,80 m, les annexes (combles non aménagés, balcons, caves et sous-sol, garages, ateliers, espaces extérieur privatifs et véranda).

En conséquence, en matière d'expropriation, il n'y a pas obligation de retenir la surface Carrez même pour la copropriété ; il convient en conséquence de confirmer le jugement qui a retenu les surfaces utiles à partir des certificats de mesurage pour une plus juste indemnisation soit :

'lots numéro 3 : 22,45 m²

'lots numéro 41 : 15,25 m²

2° Sur la situation locative

Aux termes de l'article L 322-1 du code de l'expropriation le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété.

Les biens ont été acquis par jugement d'adjudication rendue le 21 mars 2017 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Bobigny.

Lors du transport sur les lieux, les lots étaient libres de toute occupation.

La fixation en valeur libre n'est pas contestée par les parties.

Le jugement sera donc confirmé en ce sens.

3° Sur la méthode

Le juge de l'expropriation dispose du pouvoir souverain d'adapter la méthode qui lui paraît la mieux appropriée à la situation des biens expropriés.

Le premier juge a retenu la méthode par comparaison qui n'est pas contestée par les parties.

Le jugement sera donc confirmé en ce sens.

4° Sur les références des parties

Le premier juge après examen des références des parties pour les lots numéro 3 et numéro 41 a retenu une valeur de 5700 euros/m², une valeur de 20'000 euros pour le lot numéro 7 et une valeur de 500 euros pour le lot numéro 46 soit une indemnité principale de 235'390 euros.

Il convient en conséquence d'examiner les références des parties :

1° Lots N°3 et 41

a) Les références de la SGP

Elle demande de retenir une valeur de 4400 euros/m² en proposant les références suivantes, en précisant qu'elle demande un abattement de 30 % par rapport à la valeur du marché en raison des améliorations apportées au bien postérieurement à l'ouverture de l'enquête publique :

-Cessions d'appartement d'une pièce principale, d'une surface entre 15 et 30 mètres carrés, au sein d'immeubles anciens, dans un rayon de 500 m autour du bien exproprié avec les références de publication et cadastrales en valeur libre, la surface étant en Carrez :

T1 : 19/05/2020: 3, rue Achille Domart, construction de 1935,30 m², 120'000 euros, 4000 euros/m², rayon de 300 m ;

T2 : 5 mars 2021,[Adresse 6], construction de 1900,24 m², 130'000 euros, 5416 euros/m², rayon de 300 m ;

T3 : 27 mars 2020 : 34, rue de la commune de [Localité 30], construction de 1974,16 m², 72'000 euros, 4500 euros/m², rayon de 300 m ;

T4 : 18 février 2020 : 4, rue du docteur Pesque, construction de 1890,35 m², 95'000 euros, 2714 euros/m², rayon de 300 m ;

T5 : 4 mars 2021 : 17, rue de la Nouvelle-France, construction de 1914,19 m², 85'000 euros, 4473 euros/m², rayon de 500 m ;

T6 : 24 février 2020 : 17 avenue la république, construction de 1880,36 m², 157'750 euros, 4304 euros/m², rayon de 500 m.

Ces termes non critiqués par les expropriés comparables en consistance et en localisation seront retenus.

La SGP invoque également des acquisitions amiables réalisées au sein d'immeubles du [Adresse 4], situés à proximité immédiate du bien exproprié, portant sur des appartements de deux pièces principales d'une surface de 30 à 40 m², dotés chacun d'une cave libre d'occupation, avec les références de publication:

'12 novembre 2020 : lots 30 et 34,34 m², 4794 euros/m² ;

'2 octobre 2020 : lots 29 et 33,31 m², 4097 euros/m² ;

'25 juin 2020 : lots 28 et 35, 36,3 m², 4270 euros/m² ;

'18 juin 2020 : lots 24 et 39,35 m², 3371 euros/m²

soit une valeur médiane de 4184 euros/m² et une valeur moyenne de 4133 euros/m².

Ces termes non critiqués par les expropriés comparables en consistance et localisation seront retenus .

La SGP indique qu'elle verse aux débats de nouvelles références datant de 2021, portant sur des cessions de petits appartements au sein d'immeubles anciens, dans un rayon de 500 m autour du bien exproprié, avec les références d'enregistrement et cadastrales, en surface Carrez :

'T1 : 21 avril 2021 : 7, rue Louis Fourier, construction de 1934,2 pièces, 4e étage,

38 m², 125'000 euros, 3303 euros/m² ;

'T2 : 11 février 2021 : 2, rue de la Nouvelle-France, construction de 1900, 2 pièces,

4e étage, 34 m², 130'000 euros, 3824 euros/m² ;

'T3 : 15 avril 2021 : [Adresse 18], construction de 1975, une pièce, 5e étage, 34 m², 110'000 euros, 4231 euros/m² ;

'T4 : 15 juillet 2021 : [Adresse 17], construction de 1955, 2 pièces,

4e étage, 34 m², 150'000 euros, 4286 euros/m² ;

'T5 : 30 avril 2021 : 46, rue Heurtault : construction de 1870, 2 pièces, 1er étage, 22 m², 95'000 euros, 4318 euros/m² ;

'T6 : 4 mars 2021 : 17, rue de la Nouvelle-France, construction de 1114, 1 pièce,

2e étage, 19 m², 85'000 euros, 4474 euros/m² ;

'T7 : 31 mai 2021 : 12, rue Heurtaut, construction de 1880, 2 pièces, 2e étage, 27 m², 122'000 euros, 4539 euros/m² ;

'T8 : 25 juin 2021 : 4, impasse Legendre, construction de 1891, une pièce,

1er étage, 26 m², 118'735 euros, 4005 67 euros/m² ;

'T9 : 7 octobre 2021 : 17, rue de la Nouvelle-France, construction de 1914, 1 pièce,

3e étage, 12 m², 55'000 euros, 4583 euros/m² ;

'T9 : 1er juillet 2021 : 12, rue Heurtaut, construction de 1880, 2 pièces,

1er  étage, 24 m², 111'000 euros, 4598 euros/m² ;

'T 10 : 16 avril 2021:[Adresse 16], construction de 1930, 2 pièces, 1er étage,

32 m², 150'000 euros, 4720 euros/le maître carré ;

'T 11 : 12 mars 2021 : 148, avenue Victor Hugo, construction de 1924, 2 pièces,

1er étage, 31 m², 155'000 euros, 5065 euros/m² ;

'T12 : 29 octobre 2021 : 57, rue de la commune de [Localité 30], construction de 1979, une pièce, 2e étage, 27 m², 145'000 euros, 5370 euros/m² ;

'T 13 : 22 septembre 2021 : [Adresse 7], construction de 1900, une pièce,

1er étage, 24 m², 129'200 euros, 5383 euros/m² ;

'T 14 : 5 mars 2021 : 20, rue de la commune de [Localité 30], construction de 1800, 2 pièces, 2e étage, 25 m², 136'000 euros, 5395 euros/m² ;

'T 15 : 26 mai 2021 : 22, rue de la commune de [Localité 30], construction de 1900, 2 pièces, 2e étage, 32 m², 182'000 euros, 5688 euros/m² ;

Soit une valeur médiane de 4591 euros/m² une valeur moyenne de 4646 euros/m².

Ces termes non critiqués par les expropriés comparables en consistance et localisation seront retenus

b) Les références de M. et Mme [I]

Ils demandent la confirmation pour la valeur de 5700 euros/m² et proposent les termes suivants avec les références de publication :

'transactions immobilières de logement de 15 m² à 21 m² dans un périmètre de 300 m de janvier 2018 à avril 2020 (pièce numéro 5 ) :

'17 juin 2019 : 14, rue de la commune de [Localité 30] : 19 m², 5571,88 euros/m² ;

'25 mars 2019 : 20, rue de la commune de [Localité 30] : 21 m², 6014 29 euros/m²

'20 juin 2019 : 20, rue de la commune de [Localité 30] : 20 m² , 5400 euros/ m²

'26 janvier 2018 : 34 rue de la commune de [Localité 30] : 15 m² , 8033,33 euros/m²

'27 juin 2019 : 39, rue de la commune de [Localité 30] : 20 m², 6750 euros/m²

'9 octobre 2019 : 1 rue de la Courneuve :15 m², 8653,33 euros/ m²,

'3 juillet 2018 : 16, rue de la Courneuve : 19 m², 5526,32 euros/m²

'27 juin 2019 : 16, rue de la Courneuve : 20 m², 6000 euros/m²

'21 juin 2019 : 5, rue Louis Fourier : 20 m², 7500 euros/m²

soit une moyenne de 6605 euros/m².

Ces termes non critiqués par l'expropriant comparables en localisation et en consistance seront retenus.

Ils ajoutent que cette valeur est confirmée par les ventes d'appartements T1 libres intervenues au [Adresse 15] en 2020 dans un immeuble construit en 1860 (pièce numéro 26 à 28 ), avec les références de publication :

'vente du 15 juin 2020,16 m², 6666,67 euros/m²

'vente du 7 août 2020, 23 m², 6666,67 euros/m²

'vente du 23 décembre 2020, 15 m², 6000 euros/m².

Ces termes non critiqués par l'expropriant comparables en consistance et localisation seront retenus.

Ils indiquent que les appartements de type T1 sont très recherchés et ils produisent les termes suivants (pièces numéro 52,53 , 54 ) avec les références de publication :

' 9 octobre 2019 : 1 rue de la Courneuve : 8653,33 euros/m²

' vente du 9 mars 2020 : 17, rue de la Nouvelle-France : 6611,11 euros/m²

' vente du 7 septembre 2020 : 47 rue du Moutier : 8666,67 euros/m².

Ces termes non critiqués par l'expropriant comparables en consistance et localisation seront retenus .

La moyenne des termes est donc de :

4000 + 5416 +4500 + 2714 + 4473 + 4304 + 4794 + 4097 + 4270 + 3371 (termes de la SGP) + 5571,88 + 6014, 29 + 5400 +8033,33 + 6750+ 8653,33 + 5526,32+6000 + 7500 (termes de M. et Madame [I])

= 101388, 15/19= 5336,2 euros/m².

En raison de l'ancienneté de certaines références et de l'évolution du marché, le premier juge a donc exactement retenu une valeur supérieure de 5700 euros/ m².

La société du Grand [Localité 30] demande d'appliquer un abattement de 30 % par rapport à la valeur du marché au titre des améliorations apportées au bien postérieurement à l'ouverture de l'enquête publique.

Elle se fonde sur l'article L 322-1 du code de l'expropriation qui dispose que le juge fixe le montant des indemnités d'après la consistance des biens à la date de l'ordonnance portant transfert de propriété.

Toutefois, les améliorations de toute nature , telles que constructions, plantations, installations diverses, acquisition de marchandises, qui auraient été faites à l'immeuble, à l'industrie ou au fonds de commerce, même antérieurement à l'ordonnance d' expropriation, ne donnent lieu à aucune indemnité si, en raison de l'époque à laquelle ces améliorations ont eu lieu ou de tout autre circonstance, il apparaît qu'elles ont été faites dans le but d'obtenir une indemnité plus élevée. Sont présumées faites dans ce but, sauf preuve contraire, les améliorations postérieures à l'ouverture de l'enquête prévue à l'article L1.

La société du Grand [Localité 30] indique que par arrêté inter préfectoral du 25 avril 2016, le préfet de la Seine [Localité 35] et le préfet du Val-de-Marne ont prescrit l'ouverture de l'enquête préalable à la déclaration d'utilité publique et de l'enquête pour mise en compatibilité des documents d'urbanisme des communes de [Localité 35], [Localité 22], [Localité 29], [Localité 26], [Localité 23], [Localité 28], [Localité 24], [Localité 33], [Localité 27] et le [Localité 32] sur Marne , relative au projet de création de la ligne 15 est orange, l'enquête devant se dérouler du 23 mai 2016 au 27 juin 2016 (pièce numéro 1) et que par jugement d'adjudication du 20 mars 2017, les expropriés ont acquis les biens visés , qui étaient en mauvais état, pour un prix de 112'000 euros et ce n'est qu'ensuite qu'ils ont réalisé des travaux de rénovation significatifs, ainsi qu'ils en justifient ; la Société du Grand [Localité 30] en conclut que les améliorations de toute nature apportées au bien postérieurement au 23 mai 2016 sont présumées avoir été faites dans le but d'obtenir une indemnité plus élevée.

En l'espèce, les époux [I] ont acquis le bien immobilier selon jugement d'adjudication du 21 mars 2017, soit postérieurement à la déclaration d'utilité publique du 13 février 2017 sur une procédure de saisie immobilière engagée par le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du 3 ru Ferragus à Aubervilliers (pièce numéro 1) ; le jugement mentionne en page 2 qu'il a été « justifié de l'accomplissement des formalités légales » ; la Société du Grand [Localité 30] , n'a pas exercé son droit de préemption.

Il ne ressort donc ni du jugement d'adjudication du 21 mars 2017, ni du cahier des conditions de vente, que les époux [I] ont été mis au courant de la procédure d'expropriation en cours ; ils ont réalisé des travaux de mise aux normes d'habitabilité quelques semaines seulement suivant leur acquisition telle que cela ressort du devis établi le premier juin 2017 par la SARL PYRAMIDES BAT suivant facture du 29 juillet 2017 soit de manière concomitante à l'acquisition ; ils rapportent donc la preuve de leur bonne foi.

Il convient donc de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté la Société du Grand [Localité 30] de sa demande d'un abattement en application de l'article L 122-1 du code de l'expropriation.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu'il a fixé l'indemnité principale pour les lots numéro 3 et numéro 41 aux sommes suivantes :

' lot numéro 3 : 22,45 m² X 5700 euros/m²= 127'965 euros.

' lot numéro 41 : 15,25 m² X 5700 euros/m²= 86'925 euros.

2° lots N°37 et 46

A lot N°37

La SGP propose les termes suivants avec les références de publication correspondant aux termes du commissaire du gouvernement de première instance :

'T1 : [Adresse 5], cadastre M 54, année de construction de 2002, boxe, 13'000 euros ;

'T2 : [Adresse 5], cadastre M 54, construction de 2002, boxe, 15'000 euros ;

'T3 : [Adresse 19], cadastre K400, année de construction de 2015, boxe, 18'000 euros.

La société du Grand [Localité 30] indique que la moyenne est de 16'200 euros/m², la valeur médiane de 15'000 euros/m² et demande l'infirmation en fixant l'indemnité principale à la somme de 15'000 euros.

M. et Madame [I] soulignent que la société du Grand [Localité 30] proposait une indemnité de 19'000 euros.

Au regard de l'ancienneté des transactions, les deux premières étant de 2019 et la troisième de 2020, et au regard de la consistance du bien, le premier juge a exactement retenu une valeur de 20'000 euros, proche de celle proposée par la société du Grand [Localité 30] en première instance.

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

B lot 46

Le premier juge indique que les parties ne produisent aucun élément pour évaluer l'expropriation relative au lot numéro 46 portant sur le couloir situé au 1er étage permettant, notamment, d'accéder au lot numéro 41 ; compte tenu de la valeur résiduelle de ce couloir qui constitue un fond servant permettant l'accès des occupants à leur logement, il a fixé une indemnité forfaitaire à 500 euros.

La société du Grand [Localité 30] demande la confirmation, tandis que M. et Mme [I] sollicitent une somme de 15'000 euros.

Cependant, les expropriés ne produisent aucun terme de référence ; s'agissant d'un lot portant sur le couloir situé au premier étage permettant, notamment, d'accéder au numéro 41 , compte tenu de la valeur résiduelle de ce couloir qui constitue un fond servant permettant l'accès des occupants à leur logement, le premier juge a exactement fixé une indemnité principale de 500 euros.

Le jugement sera confirmé sur ce point.

En conséquence, il convient de confirmer l'indemnité principale pour les lots numéro 3, 37,41 et 46 pour un montant de : 127'965 + 20'000 + 86'925 +500 = 235'390 euros en valeur libre.

- Sur les indemnités accessoires

1° Sur l'indemnité de remploi

En l'absence de contestation des parties sur les taux habituels retenus par le premier juge, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a exactement fixé l'indemnité de remploi à la somme de 24'539 euros.

2° sur l'indemnité au titre des droits résiduels à construire

M. et Madame [I] indiquent que l'article L321-1 du code de l'expropriation dispose que les indemnités allouées doivent couvrir l'intégralité des préjudices causés par l'expropriation, que celle-ci a eu pour conséquence de les priver de leur droit résiduel à construire liés à la privation de leurs droits de copropriétaires sur les parties communes ; ils doivent donc être indemnisés de la privation de ses droits, qui doivent être évalués au regard de l'article 37-1 du code de la construction et du bonus de constructibilité prévue par le règlement numéro un du PLUI, ce droit résiduel à construire concernant les deux bâtiments mais également la cour commune.

Ils ajoutent qu' ils ont donc chargé M. [B] [T], architecte, de calculer leur droit résiduel à construire qui se rapportant aux parties communes générales sont de 21,20 m² et leurs droits relatifs aux parties communes spéciales sont de 254,68 m² soit un total de droit de 275,88 m², ces droits à construire devant être majorés du bonus de constructibilité de 10 %, soit des droits résiduels à construitre de 303,46 m² (pièce numéro 8 ) qui doivent être indemnisés selon un coût au m² qui ne peut être inférieur à 600 m² soit :

303,46 m² X 600 euros =182 076 euros

L'article L 321-1 du code de l'expropriation dispose que les indemnités allouées couvrent l'intégralité du préjudice direct, matériel et certain causé par l'expropriation, ce qui exclut le préjudice éventuel.

En l'espèce, les expropriés ne sont pas propriétaires des parties communes de l'immeuble, même en partie, lequel est placé sous le régime de la copropriété ; en outre, ils ne versent aux débats aucune pièce démontrant qu'un projet de construction était en cours de réalisation au sein de l'immeuble ; enfin la possibilité d'utiliser des droits résiduels à construire n'est en l'espèce qu'une éventualité, qui ne constitue pas un préjudice certain indemnisable.

Il convient de confirmer le jugement qui a débouté M. et Madame [I] de leur demande d'indemnité accessoire au titre des droits résiduels à construire.

En conséquence, il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a fixé l'indemnité totale de dépossession à la somme de 259'929 euros se décomposant comme suit :

'indemnité principale : 235 390 euros.

'indemnité de remploi : 24'539 euros.

- Sur l'article 700 du code de procédure civile

Il convient de confirmer le jugement qui a condamné la société du Grand [Localité 30] à payer à M. et Madame [I] la somme de 3000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

L'équité commande de débouté la Société de Grand [Localité 30] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel et la condamner sur ce fondement à payer la somme de 2000 euros à M. et Mme [I].

- Sur les dépens

Il convient de confirmer le jugement pour les dépens de première instance, qui sont à la charge de l'expropriant conformément à l'article L 312-1 du code de l'expropriation.

La société du Grand [Localité 30] perdant le procès sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS,

La cour statuant publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoirement et 

en dernier ressort,

Déclare recevables les conclusions des parties ;

Statuant dans les limites de l'appel,

Confirme le jugement entrepris ;

Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

Condamne la Société du Grand [Localité 30] à payer à M. et Madame [I] la somme

de 2000 euros qu'il article 700 du code de procédure civile ;

Condamne la Société du Grand [Localité 30] aux dépens.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 21/22194
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;21.22194 ?
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