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23/03/2023 | FRANCE | N°21/04828

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 5, 23 mars 2023, 21/04828


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 6 - Chambre 5



ARRET DU 23 MARS 2023



(n°2023/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04828 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYTV



Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Avril 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 20/09300





APPELANTE



S.A.S. AUXILIADOM

[Adresse 1]

[Localité 8]



ReprésentÃ

©e par Me Françoise FELISSI, avocat au barreau de PARIS, toque : G225



INTIMEE



Madame [S] [V]

[Adresse 5]

[Localité 10]

née le 31 Décembre 1963 à [Localité 11] (MAROC)



Représentée par Me Céc...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 5

ARRET DU 23 MARS 2023

(n°2023/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/04828 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDYTV

Décision déférée à la Cour : Jugement du 12 Avril 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 20/09300

APPELANTE

S.A.S. AUXILIADOM

[Adresse 1]

[Localité 8]

Représentée par Me Françoise FELISSI, avocat au barreau de PARIS, toque : G225

INTIMEE

Madame [S] [V]

[Adresse 5]

[Localité 10]

née le 31 Décembre 1963 à [Localité 11] (MAROC)

Représentée par Me Cécile AUBRY, avocat au barreau de PARIS, toque : C1731

(bénéficie d'une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/037940 du 22/09/2021 accordée par le bureau d'aide juridictionnelle de PARIS)

PARTIES INTERVENANTES

S.E.L.A.R.L. ATHENA ès qualités de mandataire judiciaire de la société AUXILIADOM

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représentée par Me Françoise FELISSI, avocat au barreau de PARIS, toque : G225

S.C.P. CBF ès qualités d'administrateur judiciaire de la société AUXILIADOM

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Françoise FELISSI, avocat au barreau de PARIS, toque : G225

Association UNEDIC AGS

[Adresse 3]

[Localité 9]

Non représentée

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 02 Février 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Catherine BRUNET, Présidente de chambre, Présidente de formation,

Madame Marie-José BOU, Présidente de chambre,

Madame Séverine MOUSSY, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame Catherine BRUNET, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Cécile IMBAR, lors des débats

ARRÊT :

- réputé contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, initialement prévue le 9 mars 2023 et prorogée au 23 mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Catherine BRUNET, Présidente et par Madame Philippine QUIL, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

EXPOSE DU LITIGE :

Madame [S] [V] était salariée de la société Auxiliadom en qualité d'assistante de vie et percevait en dernier lieu un salaire de 794,58 euros.

Par jugement du 8 juin 2020, le conseil de prud'hommes de Paris a notamment :

- ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant le prononcé de la décision, le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte ;

- ordonné l'exécution provisoire sur le fondement de l'article 515 du code de procédure civile.

Ce jugement a été notifié à chacune des parties le 29 juin 2020.

Par courriel officiel du 16 juillet 2020, le conseil de Mme [V] a réclamé au conseil de la société les documents de fin de contrat.

Par courrier adressé le 20 juillet et remis le 21 juillet à la salariée, la société a transmis une attestation Pôle emploi, un reçu pour solde de tout compte, un certificat de travail et des bulletins de paie.

Par courriel du 23 juillet 2020, le conseil de Mme [V] a indiqué au conseil de la société que les documents remis étaient peu lisibles, n'étaient pas conformes à la décision rendue, comportaient des erreurs et étaient datés du 15 juin 2020.

Par courrier distribué le 4 août 2020, la société a adressé à nouveau à la salariée les documents de fin de contrat et un bulletin de paie.

Par courriel du 7 août 2020, son conseil a indiqué au conseil de la société que ces documents comportaient des erreurs et que les sommes au paiement desquelles la société avait été condamnée, n'étaient pas réglées. Par message du 22 septembre 2020, elle lui a rappelé être dans l'attente des documents de fin de contrat conformes et du paiement des condamnations.

Par courriel du 2 octobre 2020, le conseil de la société a indiqué au conseil de Mme [V] que les documents de fin de contrat avaient été transmis à nouveau à la salariée.

En réponse, par message du 5 octobre 2020, le conseil de Mme [V] a dénoncé des erreurs affectant l'attestation Pôle emploi.

Le 14 octobre 2020, les documents de fin de contrat ont été remis à la salariée. Son conseil par message adressé le 16 octobre 2020 au conseil de la société, a relevé des erreurs affectant l'attestation Pôle emploi.

Le 21 octobre 2020, Mme [V] a reçu de nouveaux documents de fin de contrat et son conseil par courriel du 22 octobre 2020 a relevé des erreurs dans l'attestation Pôle emploi et dans le reçu pour solde de tout compte.

Le 8 décembre 2020, Mme [V] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris aux fins notamment de liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du 8 juin 2020 qui, par jugement du 12 avril 2021 auquel la cour renvoie pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a :

- fixé le montant de l'astreinte à la somme de 50 euros par jour de retard et par document à compter du huitième jour suivant le prononcé de la décision du 8 juin 2020 ;

- prononcé la liquidation de l'astreinte à hauteur de 28 000 euros en application du jugement prononcé le 8 juin 2020 ;

- condamné la société Auxiliadom à lui verser une astreinte définitive de 100 euros par jour de retard et par document durant un mois à compter du prononcé de la décision à intervenir, le conseil se réservant la liquidation définitive ;

- condamné la société Auxiliadom à lui verser la somme de 1 500 euros au titre des dommages et intérêts pour préjudice moral ;

- ordonné l'exécution provisoire du jugement en application de l'article 515 du code de procédure civile ;

- condamné la société Auxiliadom aux entiers dépens.

La société Auxiliadom a régulièrement interjeté appel de ce jugement le 25 mai 2021.

Entre temps, le 23 mars 2021, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de sauvegarde à l'égard de la société Auxiliadom. La société CBF Associés, prise en la personne de Maître [K] [Z] a été nommée administrateur judiciaire et la société Athena, prise en la personne de Maître [O] [M], a été nommée mandataire judiciaire.

Par jugement du 28 septembre 2021, le tribunal de commerce de Paris a prolongé la période d'observation pour une durée de six mois, soit jusqu'au 23 mars 2022.

Par jugement du 22 mars 2022, le tribunal de commerce de Paris a prolongé la période d'observation à titre exceptionnel pour une durée de six mois, soit jusqu'au 23 septembre 2022.

L'extrait KBIS du 28 décembre 2022 produit ne mentionne pas d'évolution de la procédure collective.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 31 janvier 2022 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, la société Auxiliadom, la société CBF Associés, prise en la personne de Maître [K] [Z], administrateur judiciaire de l'appelante, et la société Athena, prise en la personne de Maître [O] [M], mandataire judiciaire de l'appelante, demandent à la cour d'infirmer le jugement en ce que:

* il a fixé le montant de l'astreinte à la somme de 50 euros par jour de retard et par document à compter du huitième jour suivant le prononcé de la décision du 8 juin 2020,

* il a prononcé la liquidation de l'astreinte à hauteur de 28 200 euros en application du jugement du 8 juin 2020,

* il l'a condamnée à verser 1 500 euros à Mme [V] à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 21 octobre 2021 auxquelles la cour se réfère pour plus ample exposé des moyens et prétentions en application de l'article 455 du code de procédure civile, Mme [V] demande à la cour de :

- confirmer le jugement en toutes ses dispositions ;

- fixer au passif de la société Auxiliadom les sommes suivantes :

* 28 000 euros au titre de l'astreinte liquidée en application du jugement prononcé le 8 juin 2020,

* 1 500 euros au titre des dommages-intérêts pour le préjudice moral,

* les dépens ;

- débouter la société Auxiliadom de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.

La déclaration d'appel a été signifiée à l'UNEDIC AGS le 12 juillet 2021 à personne morale. Elle n'a pas constitué avocat.

La décision sera en conséquence réputée contradictoire.

L'ordonnance de clôture est intervenue le 18 janvier 2023.

L'affaire a été évoquée à l'audience du 2 février 2023. La cour a demandé aux parties de faire valoir leurs observations sur les dispositions de l'article R. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution par notes en délibéré.

Les parties ont adressé des notes en délibéré par voie électronique le 13 février 2023.

MOTIVATION

A titre liminaire, la cour constate que la disposition du jugement concernant une astreinte définitive n'est pas critiquée par les deux parties.

Sur la prise d'effet de l'astreinte

Les premiers juges ont retenu dans leur jugement du 12 avril 2021 que le point de départ de l'astreinte était fixé au 8ème jour suivant le prononcé de la décision du 8 juin 2020 alors que la société Auxiliadom soutenait qu'il devait être fixé au 7 juillet 2020.

La société Auxiliadom, la société CBF Associés, prise en la personne de Maître [K] [Z], administrateur judiciaire de l'appelante, et la société Athena, prise en la personne de Maître [O] [M], mandataire judiciaire de l'appelante, soutiennent que l'astreinte ne court qu'à compter du 7 juillet 2020, la notification du greffe datée du 26 juin 2020 ayant été reçue le 29 juin et les parties n'ayant pas eu connaissance de la date du prononcé de la décision prorogé au 8 juin 2020 dans le contexte particulier de l'état d'urgence sanitaire. Elles rappellent les dispositions de l'article 503 du code de procédure civile.

Par note en délibéré du 13 février 2023, elles soutiennent que l'astreinte ne peut pas être antérieure au jour où la décision est devenue exécutoire de sorte qu'elle ne commence à produire ses effets qu'à compter de la notification de la décision. Elles ajoutent qu'elles n'ont pas eu connaissance du prononcé du 8 juin 2021.

Mme [V] soutient que l'astreinte court à compter de la date fixée par le conseil de prud'hommes dans son jugement du 8 juin 2021 soit au 8ème jour de son prononcé en l'occurence le 16 juin.

Par note en délibéré du 13 février 2023, elle fait valoir que la décision étant exécutoire à titre provisoire, l'obligation de remise des documents est née dès le prononcé de la décision. Elle en déduit que l'astreinte est postérieure au caractère exécutoire du jugement prud'homal et est conforme aux dispositions de l'article R. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution.

Aux termes de l'article 503 du code de procédure civile, les jugements ne peuvent être exécutés contre ceux auxquels ils sont opposés qu'après leur avoir été notifiés, à moins que l'exécution n'en soit volontaire. En cas d'exécution au seul vu de la minute, la présentation de celle-ci vaut notification.

Il résulte des dispositions de l'article R. 131-1 du code des procédures civiles d'exécution que l'astreinte prend effet à la date fixée par le juge, laquelle ne peut pas être antérieure au jour où la décision portant obligation est devenue exécutoire. Toutefois, elle peut prendre effet dès le jour de son prononcé si elle assortit une décision qui est déjà exécutoire.

Il s'en déduit que l'astreinte ne peut courir avant la notification de la décision qui l'ordonne que si celle-ci est exécutoire au seul vu de la minute ou si elle est ordonnée par une décision postérieure au jugement ayant constaté l'obligation principale devenu exécutoire.

Il ressort de l'attestation de notification produite aux débats que le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 8 juin 2020 a été notifié à la société Auxiliadom le 29 juin 2020 de sorte que l'astreinte fixée ne pouvait pas courir antérieurement à cette date.

Dès lors, le délai de 8 jours fixé par les premiers juges suivant le prononcé de la décision étant déjà expiré à la date de notification du jugement intervenue le 29 juin 2020, qui l'a rendu exécutoire, il convient contrairement à la décision du 12 avril 2021 entreprise, de retenir que l'astreinte a pris effet et commencé à courir au 29 juin 2020.

Sur la liquidation de l'astreinte

La société Auxiliadom, la société CBF Associés, prise en la personne de Maître [K] [Z], administrateur judiciaire de l'appelante, et la société Athena, prise en la personne de Maître [O] [M], mandataire judiciaire de l'appelante, soutiennent que l'astreinte ordonnée par le jugement du 8 juin 2020 ne porte que sur la remise de l'attestation Pôle emploi, du certificat de travail et du reçu pour solde de tout compte de sorte que, selon elles, il n'y a pas lieu à liquidation de l'astreinte pour la remise des bulletins de paie. Elles font valoir que les documents de fin de contrat ont été remis dès le 17 juillet 2020, que le certificat de travail et le reçu pour solde de tout compte rectifiés ont été remis le 21 juillet 2020. S'agissant de l'attestation Pôle emploi, elles indiquent que des divergences d'interprétation quant aux mentions devant y figurer au regard du jugement du 8 juin 2020, ont entraîné de nombreux échanges et en déduisent qu'il ne peut pas valablement être reproché à la société Auxiliadom un retard à ce titre. Elles soulignent que l'astreinte de 28200 euros est selon elles, totalement injustifiée et disproportionnée. Elles ajoutent que la salariée ne produit pas un courrier de Pôle emploi indiquant un refus de prise en charge ou une mise en demeure de corriger l'attestation et qu'elle ne justifie pas d'une privation de revenus de remplacement du fait d'une attestation erronée.

Mme [V] soutient que le 11 février 2021, elle n'était toujours pas en possession de l'intégralité des documents sociaux conformes. Elle fait valoir que les premiers juges n'ont pas visé dans leur décision du 8 juin 2020 seulement les documents de fin de contrat mais également les bulletins de paie. Elle affirme que les éléments à mentionner sur l'attestation Pôle emploi n'ont pas fait débat entre les parties et souligne qu'il appartient à l'employeur de savoir remplir ce document.

Par application des dispositions combinées des articles L. 131-2 à L 131-4 du code des procédures civiles d'exécution, l'astreinte est indépendante des dommages-intérêts. Elle est provisoire ou définitive. Elle est considérée comme provisoire, à moins que le juge n'ait précisé son caractère définitif. L'astreinte, même définitive, est liquidée par le juge de l'exécution, sauf si le juge qui l'a ordonnée reste saisi de l'affaire ou s'en est expressément réservé le pouvoir. Le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter. Le taux de l'astreinte définitive ne peut jamais être modifié lors de sa liquidation. L'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou partie, d'une cause étrangère.

En outre, il convient de s'assurer au moment de la liquidation de l'astreinte, que le montant de l'astreinte liquidée est raisonnablement proportionnel à l'enjeu du litige.

Sur la remise des bulletins de paie

Par application combinée des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile et 1355 du code civil, le jugement énonce la décision sous forme de dispositif et l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ces points.

Le dispositif du jugement du 8 juin 2020 ordonne 'la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision sous astreinte de 50 euros par jour de retard et par document à compter du 8ème jour suivant le prononcé de la décision, le conseil se réservant le droit de liquider l'astreinte' de sorte que les premiers juges n'ont pas ordonné la remise des bulletins de paie. Dès lors, aucune astreinte n'a été ordonnée à ce titre et ne peut être liquidée.

Sur la remise du certificat de travail et du reçu pour solde de tout compte

La cour constate au vu des pièces produites que si les premiers reçus pour solde de tout compte adressés par la société à la salariée comportaient des erreurs, la société a remis à Mme [V] le 2 octobre 2020 un reçu pour solde de tout compte n'appelant pas d'observations de sa part et conforme à la décision.

Dès lors, il convient de retenir qu'à cette date, la société avait rempli son obligation à ce titre.

Pour ce qui concerne le certificat de travail, la cour constate qu'un certificat de travail conforme à la décision a été remis à la salariée le 4 août 2020 en ce qu'il mentionne une date d'embauche au 16 avril 2016 et une date de fin de contrat au 26 mai 2019 ainsi que la qualité d'aide à domicile de Mme [V] conformément au jugement du 8 juin 2020 qui rappelle la date d'engagement, la qualité de la salariée et fixe le point de départ du préavis au 26 mars 2019 pour une durée de deux mois.

Il convient donc de retenir qu'à cette date la société avait rempli son obligation à ce titre.

Sur l'attestation Pôle emploi

Il résulte des pièces produites aux débats l'existence de nombreux échanges entre les parties quant à la manière de renseigner l'attestation Pôle emploi. Le conseil de prud'hommes dans son jugement du 8 juin 2020 devenu définitif indique que Mme [V] a été placée en arrêt de travail à compter du 23 octobre 2017 consécutivement à un accident du travail, qu'elle a repris son emploi le 12 octobre 2018 puis que la société ne lui a plus fourni de travail à compter du mois de décembre 2018 ce qui l'a conduite à prendre acte de la rupture de son contrat de travail le 15 mars 2019. Le conseil de prud'hommes a considéré que cette prise d'acte produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse et a fixé la date de cette rupture au 25 mars 2019, date de présentation de la lettre de prise d'acte de la rupture du contrat de travail.

Les échanges entre les conseils des parties révèlent un désaccord quant aux salaires à mentionner dans la partie 7.1 de l'attestation Pôle emploi dans laquelle l'employeur doit mentionner 'les salaires des douze mois civils complets précédant le dernier jour travaillé et payé'. Le conseil de la salariée a considéré que devaient être mentionnés les douze mois antérieurs au 30 novembre 2018, dernier jour travaillé et payé, alors que le conseil de la société lui faisait observer que cela entrainerait la mention de salaires nuls car correspondant à une période d'arrêt de travail et empêcherait Pôle emploi de calculer l'indemnité. La cour constate sur l'imprimé de l'attestation Pôle emploi que les douze derniers mois doivent correspondre aux mois antérieurs au dernier jour travaillé effectivement et payé ce qui n'est pas le cas lorsque le salarié est placé en arrêt de travail. La société s'est conformée au souhait de la salariée sur ce point dans l'attestation remise à Mme [V] le 9 octobre 2020. Par courriel du 16 octobre 2020, Mme [V] a fait remarquer à juste titre que les rappels de salaires octroyés par le conseil de prud'hommes dans son jugement du 8 juin 2020, 3 045,74 euros, ne figuraient pas au bon endroit et l'attestation remise à la salariée le 21 octobre 2020 comporte toujours cette erreur, cette somme figurant au titre des sommes inhérentes à la rupture.

La société ne produit pas d'attestation Pôle emploi postérieure à cette date et la salariée produit aux débats une attestation Pôle emploi du 22 février 2021.

Il convient donc de retenir que la société n'a pas délivré d'attestation Pôle emploi conforme à la décision notamment sur ce point.

Vainement, la société Auxiliadom, la société CBF Associés, prise en la personne de Maître [K] [Z], administrateur judiciaire de l'appelante, et la société Athena, prise en la personne de Maître [O] [M], mandataire judiciaire de l'appelante, font valoir que Mme [V] ne justifie pas de l'existence d'un préjudice pour contester le montant de l'astreinte, celle-ci n'ayant pas une nature indemnitaire mais de sanction civile.

Cependant, d'une part, s'agissant de la remise de l'attestation Pôle emploi, compte tenu des développements précédents, la cour retient que la société Auxiliadom a rencontré des difficultés pour l'exécuter et, d'autre part, rappelle que le montant de l'astreinte liquidée doit être raisonnablement proportionnel à l'enjeu du litige.

En conséquence, il convient de fixer la liquidation de l'astreinte à la somme de 10 800 euros pour la remise des ces trois documents soit 1 080 euros pour un retard de 36 jours dans la délivrance d'un certificat de travail conforme à la décision, 2 910 euros pour 97 jours de retard dans la délivrance du reçu pour solde de tout compte conforme à la décision et 6 810 euros pour 227 jours de retard dans la délivrance de l'attestation Pôle emploi conforme à la décision.

Cette somme sera fixée au passif de la procédure collective.

La décision des premiers juges sera infirmée à ce titre.

Sur les dommages et intérêts pour préjudice moral

La société Auxiliadom, la société CBF Associés, prise en la personne de Maître [K] [Z], administrateur judiciaire de l'appelante, et la société Athena, prise en la personne de Maître [O] [M], mandataire judiciaire de l'appelante, font valoir que Mme [V] ne justifie pas d'un refus de prise en charge par Pôle emploi et qu'il appartient à la salariée de démontrer l'existence d'un préjudice moral.

Mme [V] soutient que le retard apporté dans la remise de ces documents l'ont privée de la possibilité de faire valoir ses droits auprès de Pôle emploi et qu'elle a connu une situation de précarité ce qui a entraîné un préjudice moral dont elle doit être indemnisée.

La cour constate que Mme [V] ne justifie pas de sa situation par rapport à Pôle emploi et qu'elle ne produit pas d'élément quant à l'existence d'un préjudice moral.

Elle sera déboutée de sa demande à ce titre et la décision des premiers juges sera infirmée sur ce chef de demande.

Sur les dépens

Partie perdante, la société Auxiliadom sera condamnée au paiement des dépens, la décision des premiers juges étant confirmée à ce titre.

PAR CES MOTIFS

LA COUR statuant par arrêt réputé contradictoire mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions dans la limite de sa saisine,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

FIXE la créance de Mme [S] [V] à valoir au passif de la procédure collective de la société Auxiliadom à la somme de :

- 10 800 euros au titre de la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 8 juin 2020 ;

DÉBOUTE les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

CONDAMNE la société Auxiliadom aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 5
Numéro d'arrêt : 21/04828
Date de la décision : 23/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-23;21.04828 ?
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