Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 2
ARRET DU 16 MARS 2023
(n° , 9 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/06979 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGDS2
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 24 Juin 2022 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de BOBIGNY - RG n° R22/00042
APPELANT
Monsieur [H] [M]
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Katia BITTON, avocat au barreau de PARIS, toque : E1543
INTIMÉE
S.A.S. SERVICES CORRESPONDANCES HANDLING
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par Me Anne LEPARGNEUR, avocat au barreau de TOULOUSE, toque : 71
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 16 Février 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Marie-Paule ALZEARI, présidente, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Marie-Paule ALZEARI, présidente
Olivier FOURMY, Premier Président de chambre
Christine LAGARDE, conseillère
Greffière lors des débats : Mme Alicia CAILLIAU
ARRÊT :
- Contradictoire
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile
- signé par Marie-Paule ALZEARI, présidente et par Alicia CAILLIAU, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSÉ DU LITIGE
Monsieur [M] est entré au service de la société SCH le 6 juillet 2005, alors qu'il occupait un poste de chef d'équipe, niveau 2, coefficient 190, avec une reprise d'ancienneté au 1er juillet 1994.
Dès son transfert au sein de la société SCH, Monsieur [M] a été promu au poste d'Animateur/Qualité au coefficient 225, statut agent de maîtrise.
Son emploi dépend de la convention collective Aéroportuaire (région parisienne) (IDCC n°1391).
Monsieur [M] se trouve depuis plusieurs années sans planning et donc sans affectation.
Monsieur [M] considère que sa situation s'est particulièrement détériorée depuis la crise sanitaire puisque la société SCH l'a placé au chômage partiel total.
Malgré un courrier de son avocat, resté sans réponse, la société SCH a persisté dans sa demande de restitution du véhicule de fonction de Monsieur [M].
Enfin, un accord APLD a été conclu au sein de la société SCH.
Cet accord n'a pas été mis en oeuvre à l'égard de Monsieur [M].
Au regard de manquements de la société, Monsieur [M] a saisi la juridiction compétente afin, notamment, d'obtenir sa réintégration à son poste, des rappels de salaires, et des indemnités.
Par ordonnance du 24 juin 2022, le Conseil de prud'hommes de Bobigny, en sa formation des référés, a :
prononcé la mise hors de cause de la société Services Correspondances Bagages
dit n'y avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes
débouté Monsieur [M] de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
débouté la société Services Correspondances Handling de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile
laissé les dépens à la charge de Monsieur [M].
Selon déclaration du 11 juillet 2022, Monsieur [M] a interjeté appel de cette décision.
PRÉTENTIONS DES PARTIES :
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 9 décembre 2022, Monsieur [M] demande à la cour :
'Vu les dispositions des articles R.1455-6 et R.1455-7 du Code du travail
Et tout autre moyen de fait et de droit à suppléer et même d'office.
INFIRMER l'Ordonnance du Conseil de prud'hommes de BOBIGNY en date du 24 juin 2022 en ce qu'il a :
Dit ne pas avoir lieu à référé sur l'ensemble des demandes.
Débouté Monsieur [H] [M] de sa demande au titre de l'article 700 du Code de procédure civile.
Laissé les dépens à la charge de Monsieur [H] [M].
Par suite et statuant à nouveau,
ACCUEILLIR Monsieur [H] [M] en ses présentes écritures, l'y déclarer bien-fondé et y faisant droit ;
JUGER son salaire mensuel moyen à la somme de 5.308,58 € Bruts,
JUGER que Monsieur [H] [M] était placé au chômage partiel total de mi-mars 2020 au 12 juin 2022 inclus,
JUGER que depuis de nombreuses années, la Société SCH s'abstient de fournir à Monsieur [H] [M] un travail effectif et conforme à l'intitulé de son poste,
JUGER que Monsieur [H] [M] percevait, avant modification unilatérale de l'employeur, une rémunération forfaitaire mensuelle minimale comprenant :
- un salaire sur la base de 151,67 Heures
- une prime différentielle de 500 Euros
- une majoration dimanche sur la base de 40 heures
- une prime de nuit sur la base de 39 heures
- une prime de non accident d'un montant de 31,85 Euros
- une prime d'expérience d'un montant de 28,93 Euros
- une prime SRB d'un montant de 37,92 Euros
- une indemnité intitulée 'autres heures' de 500 Euros
JUGER que le poste d'Animateur qualité/Sécurité n'a pas été supprimé suite à la procédure de licenciement pour motif économique et dont le licenciement n'a pas été autorisé,
JUGER que Monsieur [H] [M] doit être réintégré à son poste de travail d'Animateur qualité/Sécurité, avec toutes les conséquences de droit, sous astreinte de 200 Euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir, la Cour se réservant la liquidation de l'astreinte,
JUGER que la Société SCH ne produit aucun planning de Monsieur [H] [M] (antérieur ou postérieur à la crise sanitaire et ce, jusqu'au 13 juin 2022),
JUGER que la Société SCH ne fournit aucun travail à Monsieur [M] depuis le 13 juin 2022,
JUGER que la société SCH a modifié unilatéralement l'intitulé de poste de Monsieur [M] à compter du mois de d'octobre 2022,
CONDAMNER, à titre provisionnel, la Société SCH à lui régler la somme de 14.016,43 € au titre de rappel de salaire au titre de la prime complément différentiel pour la période de mars 2020 à août 2022 outre les congés payés afférents d'un montant de 1.401,64 €,
CONDAMNER, à titre provisionnel, la Société SCH à lui régler la somme de 15.000 € à titre d'indemnité pour perte de salaire, hors salaire de base et prime différentielle,
CONDAMNER, à titre provisionnel, la Société SCH à lui régler la somme de 11.261,23 € au titre de rappel de salaire au titre de la prime différentielle pour la période de mars 2020 à novembre 2022 outre les congés payés afférents d'un montant de 1.126,12 €,
CONDAMNER, à titre provisionnel, la Société SCH à lui régler la somme de 81,57 € au titre de rappel de salaire au titre de la déduction injustifiée du mois d'octobre 2022 outre les congés payés afférents d'un montant de 8,16 €,
JUGER que la Société SCH doit transmettre l'assiette de calcul de la prime de fin d'année de novembre 2022 de Monsieur [M],
CONDAMNER, à titre provisionnel, la Société SCH à lui régler la somme de 3.000 € à titre de rappel de la prime de fin d'année outre les congés payés afférents d'un montant de 300 €,
ORDONNER la remise des bulletins conformes
ORDONNER l'intérêt au taux légal au jour de la saisine, soit au 4 février 2022 ainsi que la capitalisation des intérêts,
DEBOUTER la Société SCH de sa demande d'irrecevabilité ;
DEBOUTER la Société SCH de toutes ses demandes reconventionnelles ;
CONDAMNER la Société SCH à payer à Monsieur [H] [M] la somme de 3.500 Euros au titre de l'article 700 du Code de procédure Civile ;
CONDAMNER la Société SCH aux entiers dépens'.
Par dernières conclusions transmises par RPVA le 11 janvier 2023, la société SCH demande à la cour :
'Vu la compétence matérielle de la formation de référé,
Vu les textes visés,
Vu la jurisprudence visée,
Vu les pièces versées aux débats,
Et tout autre moyen de fait et de droit à suppléer et même d'office,
CONFIRMER l'ordonnance dont appel,
JUGER les demandes nouvelles irrecevables,
En conséquence,
DEBOUTER Monsieur [M] de l'intégralité de ses demandes ;
A titre subsidiaire,
JUGER infondées, et/ou injustifiées, les demandes formées par Monsieur [M] à l'encontre de la société SCH,
DEBOUTER Monsieur [M] de l'intégralité de ses demandes ;
En tout état de cause,
CONDAMNER Monsieur [M] au paiement de la somme de 2.000,00 € à la société SCH en application de l'article 700 du Code de Procédure Civile ainsi qu'aux dépens.'
L'ordonnance de clôture a été rendue le 13 janvier 2023.
Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits de la cause conformément aux dispositions de l'article 455 du code procédure civile.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur l'irrecevabilité des demandes nouvelles en appel
La société SCH soutient que Monsieur [M] formule en cause d'appel deux types de demandes nouvelles.
D'une part, il sollicite des congés payés sur les trois rappels de salaire qu'il demande. A cet égard, la société précise que son contrat de travail est toujours en cours de sorte qu'il ne peut formuler une telle demande.
D'autre part, Monsieur [M] sollicite un rappel de 'prime complément différentiel', un rappel de salaire en raison d'une absence injustifiée du 3 octobre 2022 et un reliquat de prime de fin d'année 2022.
S'agissant du rappel de 'prime complément différentiel', la société SCH soutient qu'il ne s'agit pas d'un complément d'une demande précédente mais d'une demande portant sur une prime différente, nécessitant une nouvelle saisine du Conseil de prud'hommes. S'agissant enfin du rappel de salaire et du reliquat de prime de fin d'année 2022, la société soutient que ces demandes sont afférentes à des périodes postérieures au jugement.
M.[M] ne répond pas sur ces points.
Aux termes de l'article 564 du code de procédure civile, « à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. »
Selon l'article 566 du code de procédure civile, « les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire. »
Devant les premiers juges, outre la réintégration, M.[M] a sollicité un rappel de salaire au titre de la prime différentielle de mars 2020 à février 2022 ainsi qu'une indemnité pour perte de salaire hors salaire de base et prime différentielle.
A hauteur d'appel, il réclame un rappel de salaire au titre de la prime complément différentiel pour la période de mars 2020 à août 2022 outre les congés payés afférents.
Force est de constater que cette prétention n'a pas été formulée en première instance.
Il n'est nullement justifié, ni d'ailleurs allégué, que cette prime soit l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire des demandes initiales.
Cette prétention, outre les congés payés afférents, est donc irrecevable en application des dispositions précitées.
En revanche, les demandes au titre des congés payés afférents à la prime différentielle et aux rappels de salaire au titre de la déduction injustifiée peuvent être examinées en ce qu'elles sont le complément nécessaire des demandes formulées à titre de rappel de salaire.
Sur le trouble manifestement illicite
Monsieur [M] soutient que la société ne lui fournit aucun travail. Il explique qu'elle a tenté de le licencier pour motif économique mais que, n'ayant pas obtenu l'autorisation de l'Inspection du travail, elle a décidé de le maintenir en chômage partiel total à la différence d'autres salariés.
Monsieur [M] soutient également que la société ne justifie pas des motifs pour lesquels il n'a pas bénéficié de l'accord APLD, ni de l'absence de fourniture de travail. A cet égard, il fait valoir qu'il aurait dû être réintégré comme ses autres collègues a minima de l'accord APLD et qu'il aurait dû bénéficier de l'entièreté de sa rémunération.
Outre sa mise sa mise à l'écart, Monsieur [M] soutient qu'il subit une perte de sa rémunération mensuelle importante. Il dit également se voir contraint de restituer son véhicule de service.
Surtout, il prétend que, depuis la saisine du Conseil de prud'hommes, la société SCH a modifié, sans son accord, l'intitulé de son poste. En effet, depuis octobre 2022, ses bulletins de salaire ne mentionnent plus l'emploi 'Animateur qualité/sécurité' mais 'Interface suivi de l'activité'.
Dans ces conditions, Monsieur [M] conclut que l'employeur s'est rendu coupable de manquements graves, caractérisant un trouble manifestement illicite.
En conséquence, Monsieur [M] sollicite sa réintégration concrète et effective à son poste initial et demande divers rappels d'indemnité et de salaire pour la période de mars 2020 à novembre 2022.
En réponse, la société SCH soutient que le salarié ne caractérise aucun trouble manifestement illicite. En effet, Monsieur [M] occupant un poste administratif d'Animateur Qualité, la société précise que c'est le salarié qui organise ses tâches.
S'agissant du chômage partiel, la société fait valoir que la circonstance que Monsieur [M] soit demeuré en chômage partiel total est justifiée par la suppression de son poste en l'absence d'activité suffisante pour le maintenir. Contrairement à ses collègues, il ne pouvait plus être replacé à son poste qui n'existe plus. C'est la raison pour laquelle la société a proposé de le réintégrer dans un emploi équivalent.
S'agissant de la modification de l'intitulé du poste de Monsieur [M], la société soutient que le salarié ne peut caractériser une violation d'un texte de loi puisqu'elle l'a affecté à un poste équivalent en application de l'article L.2421-9 du code du travail. En outre, elle précise que le salarié ne caractérise pas l'éventuel préjudice autonome qui résulterait du seul changement de dénomination de son poste.
S'agissant de la rémunération de Monsieur [M], la société SCH soutient qu'en application de l'accord APLD, le salarié a perçu 70% de son salaire brut horaire de base, soit environ 84% de soin salaire net. En tout état de cause, la société précise que Monsieur [M] ne peut plus se plaindre de sa situation alors qu'il a refusé pendant plusieurs semaines une reprise du travail qui lui aurait permis de percevoir son salaire à 100% pour les heures travaillées et de travailler comme ses collègues.
S'agissant de la demande de restitution du véhicule de service, la société rappelle que l'arrivée à échéance du leasing justifie à elle seule cette demande. En outre, la société précise qu'elle lui avait confirmé par écrit le maintien de cet avantage dans le cadre de la proposition qui lui a été adressée.
Dans ces conditions, la société SCH soutient que Monsieur [M] ne démontre aucun trouble manifestement illicite qui résulterait de manquements graves de l'employeur ou d'un comportement déloyal et vexatoire à son égard.
M.[M] fonde ses réclamations sur l'article R. 1455-6 du code du travail qui dispose que « la formation de référé peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »
À ce titre, le conseil de prud'hommes a exactement relevé que ' M.[H] [M] ne vise aucun texte de droit et se contente d'affirmer qu'il n'est plus affecté à ses fonctions et que la société a tenté de le licencier pour motif économique injustifié.'
Il est ajouté que M.[M] ne démontre pas une mise à l'écart ou une quelconque discrimination pas plus qu'il n'établit percevoir un salaire moyen de 5308,58 euros.
En définitive, le conseil a estimé que les demandes impliquaient un examen préalable quant à l'existence du poste occupé initialement, question qui relève, à l'évidence, d'une appréciation du juge du fond.
Il est constant que l'inspection du travail puis le ministère du travail ont refusé l'autorisation de licenciement .
En effet, Madame la ministre du travail, par décision du 11 février 2022, a confirmé la décision de l'inspectrice du travail en date du 31 mai 2021 au motif pris des irrégularités constatées dans la consultation du comité social et économique et sans qu'il soit nécessaire d'examiner le bien-fondé des motifs invoqués au soutien de la demande de licenciement économique.
Il doit y être ajouté qu'au soutien de sa décision, l'inspectrice du travail a également retenu l'absence de recherche loyale au sein de l'ensemble des entreprises du groupe impliquant ainsi que 'l'employeur ne peut être regardé comme ayant satisfait à son obligation de recherche de reclassement loyalement.'
Force est de constater que la réalité et l'existence d'un motif économique n'est pas pertinemment contredite.
De fait, l'entreprise soutient, sans que les éléments de la cause puissent apporter la preuve contraire, que le poste d'animateur/qualité, occupé antérieurement par M.[H] [M] a été supprimé.
Ainsi, en l'état d'un refus de l'inspecteur du travail d'inclure un salarié protégé dans un licenciement collectif ayant pour conséquence une réorganisation de l'entreprise et la suppression du poste, il appartient à l'employeur de reclasser le salarié concerné dans un autre emploi équivalent au précédent.
En l'espèce, par courrier du 7 avril 2022, la société, reprenant les éléments antérieurs, (suppression du poste d'animateur/qualité, refus du licenciement par l'inspection du travail le 31 mai 2021 et décision de rejet explicite par le ministère du travail le 11 février 2022) et précisant qu'elle avait saisi d'un recours à l'encontre de ces décisions le tribunal administratif, a proposé à M.[M] une reprise d'activité dans le cadre d'un poste d'agent de maîtrise/interface suivi de l'activité avec bénéfice d'un véhicule de service.
Force est effectivement de considérer que M.[M] n'apporte pas la démonstration d'un trouble manifestement illicite au regard de sa réintégration dans un poste équivalent ou similaire en termes d'emploi et de rémunération.
À cet égard, le seul changement de dénomination du poste est indifférent et inopérant.
La demande de réintégration dans le poste de d'animateur qualité/sécurité ne peut donc utilement prospérer sur le fondement des dispositions précitées.
Sur l'urgence et l'évidence déterminant la compétence du juge des référés
Au visa de l'articles R.1455-7 du code du travail, Monsieur [M] demande à ce que soit prescrit des mesures conservatoires pour faire cesser le trouble illicite.
En l'espèce, Monsieur [M] rappelle que le trouble illicite est caractérisé puisqu'il se trouve privé de son poste et d'une partie de sa rémunération.
En réponse, la société SCH soutient que Monsieur [M] ne caractérise aucune urgence. A cet égard, elle fait valoir qu'une saisine de la formation de référé près de 10 mois après la révélation du prétendu trouble ne peut caractériser une quelconque urgence et ne permet pas de démontrer la compétence de cette section sur ce fondement.
Sur la demande de Monsieur [M] tendant à ce qu'on lui applique l'accord APLD, la société soutient qu'il est de jurisprudence constante que si le trouble a cessé au jour de la décision du juge, il n'y a pas matière à référé. A cet égard, la société fait valoir que Monsieur [M] n'est plus fondé à se prévaloir d'un quelconque trouble s'agissant de l'accord APLD puisqu'il n'est plus appliqué pour aucun salarié de l'entreprise.
Enfin, la société SCH soutient que Monsieur [M] est malvenu à solliciter sa réintégration sous astreinte alors qu'il n'a en réalité aucune intention réelle de reprendre un quelconque travail. La société précise que le salarié n'a jamais répondu à une proposition de reprise du travail pour des missions correspondant à ses fonctions et avec maintien de ses avantages.
A titre subsidiaire, la société soutient que Monsieur [M] n'est pas fondé à solliciter à titre de provisions un rappel de salaire, alors qu'il échoue à démontrer préalablement l'absence de contestations sérieuses à sa demande d'octroi de provisions pour un total de plus de 39 000 euros. A cet égard, la société fait valoir qu'il existe sur tous les chefs de demandes de Monsieur [M] de réelles contestations sérieuses tant sur leurs fondements que sur leurs montants.
L'article R. 1455-7 du code du travail dispose que « dans le cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, la formation de référé peut accorder une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire. »
Au regard de la procédure de licenciement pour motif économique, de l'absence d'évidence quant à l'existence du poste occupé précédemment mais également en considération de l'absence de justification d'éléments permettant de se convaincre de la rémunération effectivement due sur la période, il ne peut être que considéré que les demandes en paiement se heurtent à des contestations sérieuses en application de la disposition précitée.
À cet égard, l'intimée fait utilement valoir que M.[M] ne peut utilement réclamer une indemnité à hauteur de 15'000 euros au titre des rappels de salaire, sans aucune précision et justificatif, en dehors du salaire de base et de la prime différentielle.
Plus spécifiquement, sur la demande de rappel de prime différentielle pour un montant total de 11'261,23 euros, M.[M] conteste le fait que la rubrique 'autres heures' soit passée de 500 euros par mois à 250 euros mensuels à compter d'octobre 2019, sans pour autant s'expliquer sur les heures de délégation qui lui ont été payées.
Sur ce point, la Société explique et justifie qu'à la suite des nouvelles élections du CSE, le mandat d'élu titulaire de M.[M] au CSE ne lui permettait plus que de bénéficier d'un crédit d'heures de délégation de 10 heures par mois et non plus de 20 heures.
De même, la demande au titre de la retenue du mois d'octobre 2022 est justifiée par l'absence injustifiée de M.[M] l'après-midi du 3 octobre 2022 ainsi que cela est établi par les feuilles d'émargement de la Société.
Enfin, sur la prime de fin d'année 2022, le reliquat réclamé ne peut être justifié par la seule explication d'un montant particulièrement dérisoire à l'aune des primes perçues en 2018, 2019 et 2020.
À l'opposé, la Société fait état de contestations sérieuses au regard de l'absence injustifiée du 3 octobre 2022, de la nécessaire proratisation en fonction du nombre d'heures d'activité partielle ce qui induit une contestation sérieuse au regard du reliquat demandé, même à titre provisionnel.
Les demandes en paiement ne peuvent donc utilement prospérer en application de l'article R. 1455-7.
Il n'y a donc pas lieu à remise des bulletins conformes.
Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile
M.[M], qui succombe sur les mérites de son appel, doit être condamné aux dépens et débouté en sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile.
Il sera fait application de cet article au profit de la partie intimée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire, publiquement, en dernier ressort
Déclare irrecevable la demande en paiement à titre provisionnel de la somme de 14'016,43 euros au titre de rappel de salaire au titre de la prime complément différentiel pour la période de mars 2020 à août 2022 , outre les congés payés afférents d'un montant de 1401,64 euros,
Confirme l'ordonnance déférée en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne M.[H] [M] aux dépens d'appel et le déboute en sa demande fondée sur l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M.[H] [M] à payer à La société Services Correspondances Handling la somme de 2000 euros en application des dispositions de l'article 700 de procédure civile.
La Greffière, La Présidente,