Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 6 - Chambre 7
ARRET DU 16 MARS 2023
(n° , 6 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07253 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAG5G
Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de VILLENEUVE SAINT-GEORGES - RG n° F17/00556
APPELANT
Monsieur [Z] [J]
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représenté par Me Jean-laurent EMOD, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE, toque : C2311
INTIMEE
Société TRANSAVIA FRANCE
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Jean-michel TROUVIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0354
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre
Madame Bérénice HUMBOURG, présidente de chambre
Monsieur Laurent ROULAUD, conseiller
Greffier, lors des débats : Madame Marie-Charlotte BEHR
ARRET :
- CONTRADICTOIRE,
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Guillemette MEUNIER, présidente de chambre et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Monsieur [Z] [J] a conclu avec la société SAS Transavia, qui fait partie du Groupe KLM-AIR France, un contrat de travail en qualité de comptable polyvalent au statut agent de maîtrise et au coefficient 235 échelon 7 à durée déterminée en date et à effet du 1er Avril 2014 jusqu'au 31 décembre 2014.
Ce contrat à temps plein a été souscrit dans le cadre dit d'un " accroissement temporaire d'activité " moyennant une rémunération annuelle brute de 30 000,10 euros sur 13 mois, avec une période d'essai d'un mois non renouvelable
A compter du 1er Août 2014, le contrat de Monsieur [J] a fait l'objet d'un avenant aux fins de transformer son contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée à compter de cette date en qualité d'Analyste Fraudes au service " Finance ", sans changement de statut (Agent de Maîtrise) et toujours au coefficient 235.
Cet avenant comportant un changement de poste a prévu une période d'essai de 3 mois renouvelable une fois et une rémunération élevée à 35 000 euros bruts annuels gratification comprise.
Le salaire moyen brut des 3 derniers mois effectifs complets s'élève à 3 158,48 euros pour
151,67 h par mois.
La convention collective nationale applicable est celle des Transports Aériens de Passagers.
Par lettre du 25 Septembre 2015, M. [J] s'est vu notifier son licenciement pour motif
économique à la suite de la suppression annoncée de son poste.
M. [J] a quitté effectivement l'entreprise le 18 octobre 2015 et a bénéficié d'un CSP à compter du 2 octobre 2015.
Contestant le bien fondé de son licenciement, il a saisi le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges, lequel a par jugement en date du 7 avril 2017:
- ordonné la requalification du contrat de travail à durée déterminée consenti à M. [Z] [J] en contrat de travail à durée indéterminée;
-déclaré le licenciement dont M. [Z] [J] a fait l'objet le 25 septembre 2015 dépourvu de cause réelle et sérieuse;
-condamné la société Transavia France à payer à M. [Z] [J] les sommes suivantes:
- 3 158,48 € en brut au titre de l'indemnité de requalification
-15 000 € en net à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive
-3 158,48 € en brut au titre de l'indemnité compensatrice de préavis outre 315,85 € au titre des congés payés afférents
- 64,29 € en brut à titre de complément d'indemnité légale de licenciement
- 4 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la priorité de réembauchage ou pour non communication des pièces justifiant le respect de cette priorité
- 1 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile
-rappelé que l'indemnité compensatrice de préavis et les congés payés afférents, " l'indemnité de licenciement, portent intérêts au taux légal à compter du 23 décembre " 2015 et que le surplus des sommes allouées est assorti des intérêts au taux légal à " compter de la présente décision
-rejeté toute autre demande ;
-rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire dans les conditions " prévues par les articles R 1454-14 et R 1454-28 du Code du Travail, la moyenne " mensuelle brute des trois derniers salaires étant fixée à la somme de 3 158,48 euros et les " charges sociales devant être déduites pour le recouvrement des créances salariales
-condamné la société Transavia France aux dépens.
Ce jugement est devenu définitif.
Suivant requête présentée par M. [J] le 19 septembre 2017 aux fins de voir condamner son employeur à des dommages et intérêts et rappels de salaire au regard de la priorité de réembauchage, le Conseil de Prud'hommes de Villeneuve Saint-Georges a par jugement rendu le 23 mai 2019:
-déclaré M.[Z] [J] irrecevable en ses demandes du fait de l'autorité de la chose jugée par le jugement du Conseil de Prud'hommes de Villeneuve Saint-Georges du 7 avril 2017 qui est exécutoire et définitif,
- débouté M. [Z] [J] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
- condamné M. [Z] [J] au paiement de la somme de 100 euros à la SAS Transavia France prise en la personne de son représentant légal, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. [Z] [J] aux entiers frais et éventuels dépens de la présente instance.
M. [J] a interjeté appel par déclaration déposée par la voie électronique le 18 juin 2019.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 17 septembre 2019, M. [J] demande à la Cour d'infirmer le jugement rendu le 23 mai 2019 par le Conseil de Prud'hommes de Villeneuve Saint-Georges en toutes ses dispositions et notamment en ce qu'il a déclaré M. [Z] [J] irrecevable en ses demandes du fait de l'autorité de la chose jugée par le jugement du conseil de Prud'hommes de Villeneuve Saint-Georges du 7 avril 2017 qui est exécutoire et définitif, débouté M. [Z] [J] de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions, condamné M. [Z] [J] au paiement de la somme de 100 euros à la SAS Transavia France prise en la personne de son représentant légal, sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et condamné M. [Z] [J] aux entiers frais et éventuels dépens de la présente instance;
Y ajoutant, statuant à nouveau :
-rejeter la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée et rejeter toutes les demandes, fins et prétentions de la société Transavia;
-juger que la société Transavia France refuse délibérément de respecter son obligation de priorité de réembauche sans explication pertinente, y compris nonobstant le jugement
exécutoire et définitif l'ayant précédemment condamnée à ce titre;
- donner acte de l'absence de communication du registre du personnel en original, d'une copie certifiée conforme du registre du personnel et de la liste de tous les postes à pourvoir depuis le 9 juillet 2015 jusqu'au 17 octobre 2017, malgré la sommation d'y déférer ;
-donner acte de l'absence de toute proposition de postes au titre de la priorité de réembauchage du salarié licencié depuis le 7 Avril 2017 jusqu'au 17 Octobre 2017, malgré la sommation déférée à la société Transavia;
-condamner la SAS Transavia France à payer à M. [J] les sommes suivantes le tout avec intérêts de droit à compter de la date de saisine du Conseil de Prud'hommes de Villeneuve Saint Georges valant mise en demeure, soit le 22 septembre 2017 :
- dommages et intérêts forfaitaires pour non-respect d'une décision de justice définitive sur la priorité de réembauchage et pour non communication des pièces justifiant le respect de
cette priorité : 8 000 €
-dommages et intérêts complémentaires pour compenser la perte de revenus entre la somme journalière accordée net par Pôle Emploi à compter du 24 Juillet 2017 et le salaire de Transavia de 145,77 € brut ou 121,47 € net par jour, soit :
- pour 15 jours du 24/07/2017 au 07/08/2017 : somme accordée par Pôle Emploi de 45,81 € net, soit une différence de 121,47 - 45,81 = soit 75,66 x 15 = 1 134,90 €
pour 46 jours du 08/08/2017 au 22/09/2017 : somme accordée par Pôle Emploi de 46,11 € net, soit une différence de 121,47 - 46,11 = 75,36 € x 46 = 3 466,56 €
- pour 466 jours à partir du 23/09/2017 : somme accordée par Pôle Emploi de 53,74 € net, soit une différence de 121,47 - 53,74 = 67,73 x 466 = 31 562,18 €
- article 700 du code de procédure civile et dépens : 3 000,00 €
- condamner la SAS Transavia France aux entiers dépens dont ceux exposés au titre des articles 902, 909 et 911 du code de procédure civile à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir, et en cas d'exécution par voie extrajudiciaire, les sommes retenues par l'huissier instrumentaire, en application des dispositions de l'article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996, devront être supportées exclusivement par la société défenderesse.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées par la voie électronique le 3 décembre 2019, la société Transavia France demande à la Cour de :
Vu les dispositions de l'article 122 et 500 du code de procédure civile,
Vu les dispositions de l'article 1355 du code civil,
- confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges du 23 mai 2019 qui a déclaré M. [J] irrecevables en ses demandes du fait de l'autorité de la chose jugée par le jugement du conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges du 7 avril 2017 qui est exécutoire et définitif ;
A titre infiniment subsidiaire, au fond,
-dire et juger que la société Transavia France a respecté la priorité de réembauchage en ce qu'elle justifie qu'il n'existait aucun poste disponible et compatible avec les qualifications de M. [J] ;
-débouter M. [J] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
-recevoir la société Transavia France en sa demande reconventionnelle au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
- condamner M. [J] à payer à la société Transavia France la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
La Cour se réfère pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties à leurs conclusions conformément aux dispsitions de l'article 455 du code de procédure civile.
L'instruction a été déclarée close le 1er décembre 2021.
MOTIFS DE LA DECISION
Il convient de constater que les deux déclarations d'appel enregistrées sous les n° RG 19/07253 et RG 19/07686 portent sur la même décision critiquée rendue par le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges en date du 23 mai 2019.
En vertu de l'article 367 du code de procédure civile, le juge peut ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s'il existe entre les litiges un lien tel qu'il soit de l'intérêt d'une bonne justice de les faire instruire et juger ensemble.
Il y a lieu, en conséquence, d' ordonner la jonction des procédures inscrites sous les n°RG 19/07253 et RG 19/07686 l'affaire étant désormais appelée sous le n°RG 19/07253.
Sur la fin de non-recevoir
La société Transavia oppose aux demandes formulées par l'appelant une fin de non-recevoir tirée de l'autorité de la chose jugée attachée au jugement rendu par le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges le 7 avril 2017.
Elle soutient à cet égard qu'en application des dispositions des articles 1355 du code civil et 122 du code de procédure civile, lorsque la demande porte sur les mêmes choses, est fondée sur la même cause et concerne les mêmes parties, la décision qui est rendue est revêtue de l' autorité de la chose jugée et toute nouvelle action des mêmes chefs serait irrecevable. Le jugement rendu par le conseil de prud'hommes du 7 avril 2017 a statué sur les demandes formées par le salarié à l'égard de la société et la décision est devenue définitive.
M. [J] oppose que le délai de priorité de réembauche n'était pas expiré à la date du prononcé du jugement puisqu'il bénéficiait par l'application des dispositions conventionnelles d'une priorité de réembauche de deux ans, expirant au 17 octobre 2017. ll se prévaut de ce que le jugement du 7 avril 2017 n'a pas indiqué que le montant de l'indemnisation octroyée allait couvrir l'intégralité de la période des années de priorité de réembauche alors qu'il a subi un nouveau préjudice non indemnisé depuis la date du jugement jusqu'à l'expiration du délai de la priorité de réembauche dont il n'a pas pu bénéficier.
Aux termes de l'article L. 1471-1 du code du travail, toute action portant sur l'exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l'exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'exercer ce droit.
Il ressort de la chronologie des faits visée en exorde de l'arrêt que lors de de sa première saisine du conseil de prud 'hommes de Villeneuve Saint Georges, M. [J] a engagé une action portant sur sa priorité de réembauchage, laquelle était ainsi connue du salarié qui avait alors formé, sur le fondement de son non-respect, une demande de dommages intérêts. Il avait également formé une demande de dommages et intérêts correspondant au remboursement de la différence entre les allocations versées dans le cadre du CSP et l'allocation d'aide au retour à l'emploi(ARE) dont il aurait bénéficié le salarié sans l'adhésion au CSP.
Le conseil de prud'hommes a notamment fait droit à sa demande de dommages et intérêts au titre de la priorité de réembauche. La juridiction était saisie des demandes de M.[J] qui selon les conclusions présentées alors réclamait des dommages et intérêts pour non-respect de la priorité de réembauchage.
Aux termes du dispositif de ses dernières conclusions présentées dans le présent litige, M. [J] sollicite la condamnation de la société Transavia à lui payer 8000 euros à titre de dommages et intérêts pour non-respect d'une décision de justice définitive sur la priorité de réembauchage et pour non communication des pièces justifiant le respect de cette priorité et des dommages et intérêts complémentaires pour compenser la perte de revenus entre la somme journalière accordée par pôle emploi à compter du 24 juillet 2017 et le salaire versé par Transavia.
Aux termes de la motivation de son jugement en date du 7 avril 2017, le conseil de prud'hommes de Villeneuve Saint Georges a retenu que " la société Transavia n'a formulé aucune proposition à M. [Z] [J] sur la période litigieuse de deux ans et a systématiquement refusé ses candidatures. Or, elle ne justifie pas des postes éventuellement disponibles qui auraient pu être proposés à M. [J] dans le cadre de la priorité de réembauchage ".
Or, au-delà de la dénomination de la demande au titre de la priorité de réembauche et alors que la société justifie avoir exécuté les condamnations prononcées par le jugement devenu définitif, la demande de M. [J] à l'encontre du même employeur se heurte au principe de l' autorité de la chose jugée, la question de sa priorité de réembauchage par la société Transavia ayant été définitivement tranchée par le conseil de prud'hommes le 7 avril 2017.
S'agissant de la seconde demande, outre qu'elle se rattache à la demande relative à la priorité de réembauchage, le litige tant lié à la rupture du contrat que l'exécution du contrat de travail a été définitivement tranché par un jugement devenu définitif.
Dès lors, le jugement déféré rendu le 23 mai 2019 mérite confirmation en ce qu'il a retenu que les demandes de M. [J] devaient être déclarées irrecevables.
Sur les demandes accessoires
Partie perdante, M. [J] est condamné aux dépens d'appel et est débouté de sa demande.
Il est également débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles et condamné à payer à ce titre à la société Transavia la somme de 300 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile. Les dispositions du jugement déféré seront confirmées.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,
ORDONNE la jonction des procédures inscrites sous les n° RG 19/07253 et RG 19/07686, l'affaire étant désormais appelée sous le n°RG 19/07253;
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions,
CONDAMNE M. [Z] [J] à payer à la SAS Transavia France la somme de 300 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE M. [Z] [J] aux dépens.
DEBOUTE les parties de toute autre demande.
La greffière, La Présidente.