Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 6
ARRET DU 15 MARS 2023
(n° ,11 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/09290 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFZYI
Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 14 Avril 2022 -TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS CEDEX 17 - RG n° 20/05948
APPELANTE
S.A. CREDIT LOGEMENT
inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Laval sous le numéro 302 493 275, dont le siège ,prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 9]
Représentée par Me Stéphane FERTIER de l'AARPI JRF AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : L0075
ayant pour avocat plaidant Maître Denis LANCEREAU, Avocat a barreau de Paris,
INTIMES
Monsieur [T] [Y]
né le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 11] (94)
[Adresse 1]
[Localité 10]
Madame [I] [Y] Née [E]
née le [Date naissance 5] 1970 à [Localité 13] (Chine)de nationalité française,
[Adresse 1]
[Localité 10]
S.E.L.A.R.L. SLEMJ & ASSOCIÉS
inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Laval sous le numéro 523 336 014, prise en la personne de Maître [K] [B],
Es-qualité de mandataire liquidateur de la Société FAROI, inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de Laval, placée en liquidation judiciaire suivant jugement du Tribunal de Commerce de Laval du 25 janvier 2017,
[Adresse 8]
[Localité 7]
Représentée par Me Christophe PACHALIS de la SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : K148, avocat postulant
ayant pour avocat plaidant la SELARL BFC AVOCATS, représentée par Maître Nicolas FOUASSIER Avocat au Barreau de Laval (Mayenne),
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 31 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M.Marc BAILLY, Président de chambre, et MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :
M.Marc BAILLY, Président de chambre, chargé du rapport
M.Vincent BRAUD, Président,
MME Pascale SAPPEY-GUESDON, Conseillère,
Greffier, lors des débats : Madame Anaïs DECEBAL
ARRET :
- CONTRADICTOIRE
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par M.Marc BAILLY, Président de chambre, et par Anaïs DECEBAL,Greffière présente lors de la mise à disposition.
*
* *
Aux termes d'une offre acceptée le 22/09/2006, le LCL a consenti à Monsieur [T] [Y] et à Madame [I] [Y] née [E], époux mariés sous le régime de la séparation de biens, un prêt immobilier d'un montant de 172.000 €, au taux initial de 4.45% l'an, pour acquérir un immeuble sis [Adresse 2], constituant leur résidence principale.
Par acte en date du 22/09/2006, la société Crédit Logement s'est porté caution de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [Y] née [E] auprès de l'organisme prêteur au titre de ce contrat de prêt.
Monsieur [T] [Y] ainsi que son épouse, Madame [I] [E] ont fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire, suivant jugement du tribunal de commerce de Laval en date du 04 avril 2017, par extension de la procédure ouverte à l'égard de la sarl Faroi suivant jugement du 25 janvier 2017, la selarl [K] [B], en la personne de Maître [K] [B], étant désignée en qualité de mandataire liquidateur.
Les mises en demeure d'avoir à régler sous quinzaine la somme de 3.819,34€ au titre des échéances échues impayées, faute de quoi la déchéance du terme serait prononcée, adressées par le prêteur le 22/10/2018 à Monsieur [T] [Y] et à Madame [I] [Y] née [E], sont demeurées infructueuses.
La société Crédit Logement, en sa qualité de caution, a été amenée à régler diverses sommes au titre de ce contrat de prêt entre les mains de l'organisme prêteur, à savoir les échéances impayées des mois de juillet à octobre 2018, ainsi que les sommes restant dûes à la date du prononcé de l'exigibilité anticipée,soit 109.328,53€, ce qui représente la somme totale de 116.638,01 €, ce dont elle justifie par la production d'une quittance en date du 24/02/2020.
La société Crédit Logement a rappelé aux époux [Y], le 16/10/2018, qu'à défaut de paiement des échéances en cours, le prêteur était en droit de prononcer l'exigiblité anticipée du prêt, puis par lettre du 17/02/2020, leur a fait connaitre qu'elle était amenée à rembourser l'intégralité de la créance du prêteur , dans les droits duquel elle était intégralement subrogée. Elle a réclamé, infructueusement, le règlement de la somme de 116.638,01€.
Le 02/06/2020, le juge commissaire de la liquidation judiciaire des époux [Y] a autorisé la vente de gré à gré de l'immmeuble situé dans le [Localité 10].
Par ordonnance rendue sur requête par le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris en date du 20/06/2020, la société Crédit Logement a été autorisée à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur les biens et droits immobiliers objets des lots numéros 6 et 96 de l'état descriptif de division dépendant d'un ensemble immobilier sis à [Localité 10], cadastré section DF numéro [Cadastre 3], appartenant à Monsieur [T] [Y] et à Madame [I] [Y] née [E], pour garantie de la somme de 119.000€.
Le 01/ 07/ 2020 la société Crédit logement a inscrit l'hypothèque judiciaire provisoire au service de la publicité foncière et a dénoncé l'inscription d'hypothèque, le 06/07/2020, à Monsieur et Madame [Y].
Par acte extrajudiciaire en date du 06/07/2020, la société Crédit Logement a assigné Monsieur et Madame [Y] devant le tribunal judicaire de Paris aux fins de :
" Dire et juger recevable et bien fondée la Société Crédit Logement en ses demandes,
Vu l'article 2305 du Code Civil,
Condamner solidairement Monsieur [T] [Y] et Madame [I] [Y] née [E] à payer à la Société Crédit Logement la somme de 116 949,39 € en principal, outre les intérêts au taux légal à compter du 24/02/2020, date de la quittance.
Condamner solidairement Monsieur [T] [Y] et Madame [I] [Y] née [E] à payer à la Société Crédit Logement la somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du CPC.
Ordonner la capitalisation des intérêts conformément à l'article 1343-2 du Code Civil.
Condamner solidairement Monsieur [T] [Y] et Madame [I] [Y] née [E] aux entiers frais et dépens en vertu des dispositions de l'article 696 du CPC, outre les frais de l'hypothèque judiciaire provisoire au 9ème bureau de service de la publicité foncière de [Localité 12] , ainsi que ceux de l'hypothèque judiciaire définitive à régulariser en vertu de la décision à intervenir."
Le 10/07/2020, l'immeuble sur lequel la société Crédit Logement avait inscrit l'hypothèque a été vendu par la liquidation judiciaire des époux [Y], laquelle a le 15/ 07/ 2020 établi l'état de collocation, qui n'a fait l'objet d'aucun recours.
La selarl Slemj & Associés, anciennement dénommée Selarl [K] [B], ès-qualités de mandataire liquidateur de la sarl Faroi et par extension de Monsieur et Madame [Y], est intervenue à la procédure suivant conclusions d'intervention volontaires régularisées le 07 octobre 2020, a soulevé l'irrecevabilité des demandes de la société Crédit Logement et formé une demande de mainlevée de l'hypothèque judiciaire provisoire prise sur un bien appartenant à des personnes en liquidation judiciaire devant le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Paris.
C'est dans ces circonstances et conditions qu'est intervenue l'ordonnance du 14 avril 2022, par laquelle le juge de la mise en état a :
- reçu l'intervention volontaire de la selarl Slemj & Associés, en qualité de mandataire liquidateur de Monsieur [T] [Y] et de madame [I] [E] épouse [Y],
- déclaré la société Crédit logement irrecevable en sa demande de condamnation en paiement de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [E] épouse [Y], et aux fins de jugement valant titre exécutoire aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble,
- relevé d'office le moyen tiré de l'incompétence éventuelle du tribunal judiciaire pour statuer sur la demande de mainlevée d'hypothèque judiciaire provisoire,
- renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 19 mai 2022 13h30 pour conclusions des parties sur le moyen relevé d'office et sur la demande de versement du prix formée à l'encontre de la selarl Slemj&Associés, mandataire liquidateur de Monsieur [T] [Y] et de madame [I] [E] épouse [Y],
- condamné la société anonyme Crédit Logement à payer à la selarl Slemj&Associés , mandataire liquidateur de Monsieur [T] [Y] et de madame [I] [E] épouse [Y], la somme de 1.800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour statuer comme il l'a fait, le juge de la mise en état a dit que
- la créance de remboursement du Crédit Logement avait pris naissance à la date de l'engagement de caution en 2006 et était donc antérieure à l'ouverture de la procédure collective et que la société Crédit Logement ne pouvait en poursuivre le paiement à l'encontre des débiteurs, toute poursuite étant au surplus interdite par l'article L622-21 du code de commerce et que le Crédit Logement devait être déclaré irrecevable en sa demande de condamnation en paiement des époux [Y]
- 'le défaut de déclaration et l'interdiction des poursuites ne signifiaient pas l'absence de tout intérêt à agir du créancier qui peut toujours saisir le juge du fond aux fins d'établir l'existence et le montant de la créance pour obtenir un titre exécutoire et mettre en oeuvre des voies d'exécution sur un bien immobilier, soit qu'il est un bien indivis, soit qu'il est la résidence principale des débiteurs, si les conditions de l'article L 526-1 du code de commerce sont réunies ( le juge précisant qu'elles ne l'étaient pas, les époux [Y] n'étant pas immatriculés à un registre de publicité légale et la créance du Crédit Logement n'étant pas née à l'occasion de l'activité professionnelle), le bien étant dans les 2 cas exclu de la procédure collective'
-la règle édictée par l'article 815-17 du code civil pouvait recevoir application mais le Crédit Logement avait formé pour la première fois, par conclusions du 28 septembre 2021, une demande de fixation de sa créance pour obtenir un titre exécutoire aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble, alors qu'il n'avait plus d'intérêt à agir sur le bien indivis aliéné suite à la vente, intervenue par acte notarié du 10 juillet 2020, et alors qu'aucun recours n'avait été effectué contre l'état de colocation.
- la recevabilité de la demande de condamnation du liquidateur judiciaire au versement du prix de vente, qui n'était pas discutée, devait être renvoyée à la mise en état
- l'éventuelle incompétence du juge de la mise en état au profit du juge de l'exécution, pour statuer sur la demande de mainlevée d'hypothèque, devait être relevée d'office .
La société Crédit Logement a régularisé un appel, le 10 mai 2022, à l'encontre de cette ordonnance en ce qu'elle l'a :
- déclarée irrecevable en sa demande de condamnation en paiement de Monsieur et Madame [Y] et aux fins de mise en 'uvre de la sûreté lui bénéficiant ou voies d'exécution sur l'immeuble,
- condamnée à payer à la Selarl Slemj & Associés en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] la somme de 1800€ au titre de l'article 700 du code d eprocédure civile.
La selarl Slemj & Associés, qui conclut à la confirmation de l'ordonnance du 14 avril 2022 sur ces points, en demande l'infirmation en ce qu'elle a retenu que la société Crédit Logement pourrait faire valoir une demande de versement du prix de vente, alors qu'elle est manifestement irrecevable pour ce faire et en ce que le juge de la mise en état a entendu relever d'office le moyen tiré de l'incompétence du tribunal judiciaire de Paris pour connaitre de la demande de mainlevée de l'inscription d'hypothèque, faite au fond et qu'il a invité les parties à conclure au fond.
Par conclusions régularisées le 11/08/2022, la société Crédit logement demande à la cour, vu les articles 4, 31, 73, 122 et suivants, 537, 544, 546 et 789 du code de procédure civile, vu les articles L 213-6 du COJ et R 121-1, R 511-1 à R511-8, R 512-2, R 532-8 du Code des procédures civiles d'exécution, vu les articles 815-17, 2305 ancien, 2393 ancien , 2475 ancien du Code civil, vu les articles L622-6, L 622-24 et L 526-1 du Code de commerce, vu sa qualité de créancier de l'indivision reconnue par le juge de la mise en état et sa qualité de créancier hypothécaire sur le bien immobilier, de la déclarer recevable et bien fondée en son appel, d'infirmer l'ordonnance du 14 avril 2022 en ce qu'elle l'a déclaré irrecevable en sa demande de condamnation en paiement de Monsieur et Madame [Y] et aux fins de jugement valant titre exécutoire aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble, l'a condamnée à payer à la selarl Slemj & Associés en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] la somme de 1800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, statuant à nouveau de ces chefs, de déclarer le bien immobilier indivis hors la procédure de liquidation judiciaire, de la déclarer recevable, en sa qualité de créancier de l'indivision constituée des époux [Y], en sa demande de condamnation en paiement de Monsieur et Madame [Y], aux fins de jugement valant titre exécutoire aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble et/ou sur tout bien substitué notamment le prix de vente, de la déclarer recevable en sa qualité de créancier de l'indivision en sa demande aux fins de jugement valant titre exécutoire et aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble et/ou sur tout bien substitué notamment sur le prix de vente, tels que ses droits de suite et de préférence sur l'immeuble, renvoyer l'affaire au fond afin que le tribunal lui délivre un titre exécutoire à leur encontre à cette fin, débouter la Selarl Slemj & Associés en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi de sa demande de condamnation à lui payer une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, de compléter l'ordonnance du 14 avril 2022 en ce qui concerne la comparution des parties en première page et mentionner et lire :
Monsieur [T] [Y]
Né le [Date naissance 4] 1969 à [Localité 11] (94),
Nationalité : française , Profession : restaurateur
Demeurant [Adresse 1]
Non comparant
et
Madame [I] [Y] née [E]
Née le [Date naissance 5] 1970 à [Localité 14] (Chine), Nationalité : Chinoise, Profession : restauratrice
Demeurant [Adresse 1]
Non comparante ,
de déclarer la Selarl Slemj & Associés, en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi, sans intérêt à agir pour former appel incident, déclarer la Selarl Slemj & associés, en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi, irrecevable en son appel incident et l'en débouter, débouter la Selarl Slemj & Associés, en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi, de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions y compris au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et des dépens sollicités en cause d'appel, condamner la Selarl Slemj & Associés, ès-qualités de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi, comme à titre personnel, à lui payer la somme de 5.000€ au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, et condamner la Selarl Slemj & Associés, en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi, aux entiers dépens de première instance et d'appel. dont le recouvrement sera effectué par la selarl JRF & Associés, représentée par Maître Stéphane Fertier, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions notifiées le 12/07/2022, la selarl Slemj & Associés, prise en la personne de Maître [K] [B], en sa qualité de mandataire liquidateur de Monsieur et Madame [Y] et de la société Faroi, demande à la cour d'infirmer l'ordonnance entreprise du 14 avril 2022 en ce qu'elle a relevé d'office le moyen tiré de l'incompétence éventuelle du tribunal judiciaire pour statuer sur la demande de mainlevée d'hypothèque judiciaire provisoire, renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 19 mai 2022, 13h30 pour conclusions des parties sur le moyen relevé d'office et sur la demande de versement du prix formée à son encontre, de la confirmer pour le surplus, et statuant des chefs infirmés, de déclarer irrecevable le Crédit logement en l'intégralité ses demandes formées à l'encontre de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [Y] née [E], compte tenu de la procédure de liquidation judiciaire actuellement en cours et ce en application des dispositions de l'article L 622- 24 et L 641-3 du code de commerce et 122 du code de procédure civile, débouter la société Crédit Logement de l'intégralité de ses demandes, fins moyens et conclusions dirigées à l'encontre de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [Y] née [E], ainsi que d'elle même, débouter la société Crédit logement du surplus de ses demandes, fins moyens et conclusions, de condamner la société Crédit logement à lui payer et porter la somme de 5 000,00 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, et de la condamner aux entiers dépens, dont distraction au profit de la Selarl Recamier & Associés, représentée par Maître Christophe Pachalis, avocat aux offres et affirmations de droit.
SUR CE
La société Crédit Logement expose que le litige a désormais pour objet, en application de l'article 815-17 du code civil, de lui permettre, en sa qualité de créancière de l'indivision constituée de monsieur et madame [Y] de recouvrer sa créance hors procédure collective sur le bien indivis également hors procédure collective, et prétend être recevable et fondée à introduire une action contre l'indivision représentée par Monsieur et Madame [Y] afin d'obtenir un jugement valant titre exécutoire à leur encontre aux seules fins de sûretés ou de voies d'exécution sur l'immeuble indivis qu'elle peut toujours exercer nonobstant sa vente.
Elle soutient que l'indivision préexistait à la procédure de liquidation judiciaire puisque le prêt a été consenti aux époux [Y] qui l'ont acquis en indivision, le 22 septembre 2006 et qu'elle même s'est portée caution des emprunteurs le 22 septembre 2006, qu'elle est donc créancière de l'indivision, et fondée à poursuivre, nonobstant l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, en application de l'article 815-17 du code civil, le recouvrement de sa créance par prélèvement sur l'actif de l'indivision avant partage, alors que les biens indivis ne font pas partie de l'actif de la procédure collective et que le liquidateur judiciaire s'est irrégulièrement approprié le bien et l'a vendu de façon illicite.
Elle reproche à l'ordonnance déférée, qui a dit que le bien indivis en vertu de l'article 815-17 du code civil est exclu de la procédure, de n'avoir tiré les conséquences de droit de ce principe et d'avoir dit au contraire que les règles régissant la procédure collective était applicables.
Elle affirme que ses demandes sont recevables, qu'elle dispose de l'intérêt et de la qualité à agir, précise qu'elle agit sur le fondement de l'article 2305 ancien du code civil, que le créancier de l'indivision n'est pas visé par l'arrêt des poursuites individuelles dès lors qu'elles tendent au seul paiement de sa créance sur le bien hors procédure collective et peut poursuivre le recouvrement de sa créance sur le bien indivis ou insaisissable qui échappent à la dite procédure, qu'elle n'avait pas l'obligation de déclarer sa créance, qu'étant créancier de l'indivision, elle n'est pas privée de ses droits par une vente autorisée par le juge commissaire ou une répartition effectuée par le liquidateur et a le droit de faire valoir sa créance par prélèvement sur l'actif de l'indivision avant son partage, sans que la procédure collective puisse faire obstacle.
Selon elle la déclaration d'irrecevabilité est :
- contraire au droit des sûretés . Elle précise qu'elle agit conformément aux dispositions de l'article R 511-7 alinéa 1er du CPCE, que sa demande était donc recevable et bien fondée, que surtout elle a régularisé son inscription le 1er juillet 2020 au service de la publicité foncière et que ses droits sont opposables aux tiers y compris aux sous acquéreurs. Elle soutient qu'aux termes de l'article 2393 du code civil, le créancier hypothécaire qu'elle est a acquis un droit de suite sur l'immeuble en quelques mains qu'il passe et un droit de préférence sur le prix.
- contraire aux dispositions du CPCE. Elle rappelle qu'aux termes de l'article R512-1 du CPCE, la mainlevée peut être obtenue que si les seules conditions énumérées aux articles R511-1 à R 511-8 ne sont pas réunies : à savoir une absence de principe de créance et/ou de péril, que l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire a été dénoncée le 6 juillet 2020 à Monsieur et Madame [Y] leur rappelant la possibilité d'en demander mainlevée, sans que ceux-ci n'aient jugé utile de le faire, que l'inscription est valable dès lors que le débiteur était propriétaire au moment de l'inscription, ce qui était le cas en l'espèce. Elle prétend que la vente du bien au mépris d'une inscription hypothécaire ne permet en aucun cas d'en obtenir la mainlevée et qu'il appartenait au mandataire (à supposer pour les besoins du raisonnement qu'il ait eu pouvoir et capacité pour vendre un bien indivis hors procédure collective) d'obtenir la mainlevée au plus tard le jour de la vente, l'article R532-8 du CPCE prévoyant que si le bien est vendu avant que la publicité définitive soit accomplie, il est procédé à la consignation des fonds revenant au bénéficiaire de l'inscription d'hypothèque judiciaire provisoire contre mainlevée de l'inscription, et que le mandataire n'a pas suivi la procédure prévue par ce texte. Elle ajoute que l'article 2475 ancien du Code civil prévoit en outre une procédure de purge des hypothèques que le mandataire se devait de mettre en 'uvre.
Elle affirme que cette inscription prise contre l'indivision demeure et qu'en conséquence, elle est fondée, en application de l'article R 511-7 du CPCE, à obtenir le titre exécutoire sollicité également aux fins de mesures conservatoires pour rendre son hypothèque définitive et/ou pour exercer son droit de suite ou son droit de préférence sur le prix.
Le liquidateur judiciaire réplique que les dispositions de l'article 815-17 du code civil sont inapplicables en l'espèce, que la société Crédit Logement n'est pas créancière de l'indivision, qu'elle n'a pas financé l'indivision existant entre les époux [Y], que c'est LCL qui l'a fait et qu'elle a seulement consenti un engagement de caution au bénéfice de la société LCL pour garantir la défaillance de Monsieur et Madame [Y] à l'égard de l'établissement prêteur de deniers, que c'est dans ce cadre qu'elle a effectué le 24 février 2020 le règlement de la somme de 116 638,01 € entre les mains de la société LCL, soit près de trois ans après le jugement étendant à chacun de Monsieur et Madame [Y] la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l'égard de la société Faroi , et alors que LCL n'a pas déclaré de créance au passif de la procédure collective, de sorte que sa créance est inopposable à la procédure de liquidation judiciaire, étant précisé au surplus que LCL qui n'a pas engagé d'action à l'encontre de ses débiteurs, était prescrite au jour où la société Crédit logement a effectué son paiement, en application des dispositions de l'article L 218-2 du code de la consommation.
Il ajoute que LCL ne peut avoir subrogé la société Crédit Logement dans des droits qu'elle n'avait plus à l'encontre de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [Y] et, à supposer que l'on admette la subrogation, la société Crédit logement n'est pas devenue créancier de l'indivision, mais de chacun des deux coindivisaires, de sorte qu'elle ne peut se prévaloir de 815-17 du code civil, étant au surplus relevé que la société Crédit Logement n'est nullement un créancier « qui aurait pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eut indivision » puisqu'elle n'a pas payé le bien immobilier et qu'elle n'est devenue créancière de chacun de Monsieur [T] [Y] et Madame [I] [Y] née [E] que lorsqu'elle a effectué des règlements entre les mains de LCL, en février 2020, soit près de trois années après que Monsieur [T] [Y] et Madame [I] [Y] née [E] aient été placés en liquidation judiciaire.
Il soutient que la société Crédit Logement n'est pas un créancier ayant pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eût indivision et que si elle peut agir sur les biens indivis, ce n'est qu'à compter de la date du 24 février 2020, donc, après qu'il y eut indivision, puisque l'indivision résulte de l'acquisition de l'immeuble intervenu en 2006.
Il conclut que les conditions de l'article 815-17 du code civil ne sont pas réunies à l'égard
de la société Crédit logement qui n'est pas recevable à les invoquer et qui d'ailleurs ne les invoquait pas à la date de l'assignation et que le droit des procédures collectives est opposable à la société Crédit logement , et notamment les dispositions des articles L 622-21 du code de commerce et L 662-30 du code de commerce. Il rappelle que ce n'est qu'après le jugement de clôture pour insuffisance d'actif que certains créanciers, aux rangs desquels les coobligés et les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie, retrouvent leur droit de poursuite individuelle conformément aux dispositions de l'article L 643-11 II du code de commerce et que tant que le jugement de clôture pour insuffisance d'actif n'a pas été prononcé, il n'est pas possible pour un créancier quel qu'il soit d'engager une action visant au paiement d'une somme d'argent qui a son origine antérieure au jugement d'ouverture.
Aux termes de l'article 2305 du code civil, invoqué par la société Crédit logement comme fondement de son action à l'encontre des époux [Y], ' la caution qui a payé a son recours contre le débiteur principal, soit que le cautionnement ait été donné au su ou à l'insu du débiteur. Le recours a lieu tant pour le principal que pour les intérêts et frais (...) et elle a aussi recours pour les dommages-intérêts s'il y a lieu'.
Selon l'article 815-17 alinéa 1er du code civil ' les créanciers qui auraient pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eut indivision et ceux dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis seront payés par prélèvement sur l'actif avant le partage. Ils peuvent en outre poursuivre la saisie et la vente des biens indivis. Les créanciers personnels d'un indivisaire ne peuvent saisir sa part dans les biens indivis meubles et immeubles' .
La caution qui a payé le créancier cautionné dispose à l'encontre du débiteur principal, outre d'un recours subrogatoire, d'un recours personnel.
En l'espèce, la société Crédit Logement a payé le LCL le 24 février 2020, puis a été autorisée, par ordonnance rendue sur requête en date du 20/06/2020 du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Paris, à inscrire une hypothèque judiciaire provisoire sur l'immeuble qui faisait l'objet d'une indivision entre les époux [Y] pour garantie de la somme de 119.000€. Elle a inscrit, le 01/ 07/ 2020, l'hypothèque judiciaire provisoire au service de la publicité foncière et a dénoncé l'inscription d'hypothèque, le 06/07/2020, à Monsieur et Madame [Y]. Elle a enfin assigné les époux [Y] devant le tribunal judiciaire de Paris, suivant exploit en date du 6 juillet 2020, en application de l'article R511-7 du CPCE qui dispose que "Si ce n'est dans le cas où la mesure conservatoire a été pratiquée avec un titre exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit l'exécution de la mesure, à peine de caducité,introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire'.
Elle a appris dans le cadre de cette procédure que les deux époux avaient été placés en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Laval, par jugement du 4 avril 2017, et que le bien sur lequel elle avait inscrit antérieurement une hypothèque judiciaire provisoire avait été vendu, par les organes de la procédure collective, le 10 juillet 2020.
Il ne peut être sérieusement contesté que la créance de la société Crédit Logement a pris naissance à la date de son engagement de caution, c'est à dire le 22 septembre 2006, puisque seule doit être prise en considération la date du fait générateur de la créance et non la date de son exigibilité.
Pour autant la société Crédit Logement ne saurait être considérée comme un créancier de l'indivision, au sens de l'article 815-17 du code civil, et invoquer un droit propre qui s'imposerait même en cas d'ouverture d'un procédure collective, puisqu'elle n'était pas créancière hypothécaire de l'indivision préexistante à l'ouverture de la procédure collective des indivisaires, n'aurait pas pu agir sur les biens indivis avant qu'il y eut indivision et ne peut être considérée comme un créancier' dont la créance résulte de la conservation ou de la gestion des biens indivis'.
En premier lieu, elle ne disposait en effet, à la date du 22 septembre 2006, d'aucun privilège sur le bien et les deux époux ne lui avaient consenti aucune hypothèque sur le bien acquis, de sorte que, si elle était bien créancière de chacun des époux, elle n'était pas, à l'origine, créancière de l'indivision qui existait entre eux relativement au bien immobilier. Elle n'a pu agir sur le bien indivis que postérieurement à l'inscription de l'hypothèque judiciaire provisoire, c'est à dire à compter du 1er juillet 2020, et donc postérieurement à l'ouverture de la procédure collective des époux [Y], la présente instance ayant précisément pour objet de lui fournir un titre exécutoire, et postérieurement à la date de naissance de l'indivision qui est celle de l'acquisition de l'immeuble.
Ensuite, ayant réglé le créancier trois ans après l'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire, et manifesté son intention de s'approprier le bien immobilier et de le vendre, elle ne peut, comme l'a dit le premier juge, être considérée comme ayant permis aux débiteurs de conserver le dit bien, alors au surplus que ces derniers, du fait de la procédure collective, étaient dessaisis par le liquidateur judiciaire, qui, agissant dans l'intérêt des créanciers de la procédure aux rangs desquels ne figurent ni la banque prêteur de deniers, ni la société Crédit Logement qui n'ont pas déclaré leur créance, a procédé à la vente du dit bien.
Il résulte de ce qui précède, d'une part, que la société Crédit Logement ne peut, au visa de l'article 2305 du code civil, revendiquer les prérogatives accordées aux créanciers de l'indivision sur le bien indivis et opérer un prélèvement sur l'actif avant partage et la saisie et la vente des biens indivis, d'autre part qu'elle est soumise aux règles de la procédure collective, et notamment celles édictées, par l'article L622-24 alinéa 1er du code de commerce qui prévoit que doivent être déclarées toutes les créances nées avant le jugement d'ouverture, par son article L 622-21 qui dispose que sont interdites toutes actions visant à obtenir la condamnation des débiteurs au paiement des créances antérieures au jugement d'ouverture et par son article L 662-30 aux termes duquel les hypothèques ne peuvent plus être inscrites postérieurement au jugement d'ouverture.
Il s'ensuit que la société Crédit Logement est irrecevable à agir en paiement contre les époux [Y] et tout aussi irrecevable à solliciter la fixation de sa créance et la délivrance d' un titre exécutoire.
L'ordonnance déférée qui a déclaré la société Crédit logement irrecevable en sa demande de condamnation en paiement de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [E] épouse [Y], et aux fins de jugement valant titre exécutoire aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble sera donc confirmée mais par substitution de motifs, la cour disant que la société Crédit logement ne peut se prévaloir des dispositions de l'article 815-17 du code civil.
- sur l'appel incident
La décision dans laquelle le juge relève d'office un moyen et pour respecter le principe du contradictoire, renvoie à une audience ultérieure pour que les parties concluent, ne statue sur aucune prétention et ne cause ainsi aucun grief à aucune des parties.
Il s'ensuit que la disposition par laquelle le premier juge a relevé d'office le moyen tiré de l'incompétence éventuelle du tribunal judiciaire pour statuer sur la demande de mainlevée d'hypothèque judiciaire provisoire ne peut faire l'objet d'un appel, le liquidateur judiciaire, qui ne succombe pas, n'ayant aucun intérêt à agir.
Constitue une mesure d'administration judiciaire et n'est de ce fait sujet à aucun recours la disposition de l'ordonnance par laquelle le premier juge a invité les parties à conclure et renvoyé l'affaire à la mise en état.
Il s'en déduit que le liquidateur judiciaire est irrecevable au visa de l'article 537 du code de procédure civile à interjeter appel incident des dispositions de l'ordonnance ayant 'renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 19 mai 2022 13h30 pour conclusions des parties sur le moyen relevé d'office et sur la demande de versement du prix formée à l'encontre de la selarl Slemj&Associés, mandataire liquidateur de Monsieur [T] [Y] et de madame [I] [E] épouse [Y]'.
- sur les frais irrépétibles et les dépens
La société Crédit Logement , qui sera condamnée aux dépens d'appel, ne peut prétendre à l'octroi de sommes au titre de l'article 700 du code de procédure civile, étant précisé qu'elle est irrecevable à former une telle demande à l'encontre du liquidateur judiciaire à titre personnel, lequel n'est partie à la procédure qu'en sa qualité de liquidateur judiciaire des époux [Y]. L'équité commande au contraire de la condamner à verser au liquidateur judiciaire ès qualités la somme de 2500€ à ce titre.
Les dispositions de l'ordonnance relatives aux frais irrépétibles seront confirmées .
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant publiquement et contradictoirement,
DÉCLARE la selarl Slemj &Associés, prise en la personne de Maître [K] [B], en sa qualité de liquidateur judiciaire des époux [Y], irrecevable en son appel dirigé contre la disposition de l'ordonnance qui a 'renvoyé l'affaire à l'audience de mise en état du 19 mai 2022 13h30 pour conclusions des parties sur le moyen relevé d'office et sur la demande de versement du prix formée à l'encontre de la selarl Slemj&Associés, mandataire liquidateur de Monsieur [T] [Y] et de madame [I] [E] épouse [Y]' et contre celle dans laquelle le premier juge a 'relevé d'office le moyen tiré de l'incompétence éventuelle du tribunal judiciaire pour statuer sur la demande de mainlevée d'hypothèque judiciaire provisoire'.
DÉCLARE la société Crédit Logement irrecevable en sa demande en paiement de frais irrépétibles dirigée contre la selarl Slemj&Associés, en la personne de Maître [K] [B], à titre personnel,
CONFIRME l'ordonnance déférée en ce qu'elle a déclaré la société Crédit logement irrecevable en sa demande de condamnation en paiement de Monsieur [T] [Y] et de Madame [I] [E] épouse [Y], et aux fins de jugement valant titre exécutoire aux fins de sûretés ou voies d'exécution sur l'immeuble et en ce qu'elle a condamné la société Crédit Logement à payer la somme de1.800€ au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Y ajoutant,
CONDAMNE la société Crédit logement à payer la somme de 2.500€ à la selarl Slemj&Associés, prise en la personne de Maître [K] [B], en sa qualité de liquidateur judiciaire des époux [Y], au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
REJETTE toute autre demande des parties,
CONDAMNE la société Crédit logement aux dépens et admet l'avocat concerné au bénéfice de l'article 699 du code de procédure civile .
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT