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15/03/2023 | FRANCE | N°21/09605

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 1, 15 mars 2023, 21/09605


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 1



ARRÊT DU 15 MARS 2023



(n° 038/2023, 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : 21/09605 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDWV7



Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Février 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS - 3ème chambre 3ème section - RG n°19/11153





APPELANTE



S.A.R.L. RE.MEC


Société au capital de 150 000 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nice sous le numéro 479 995 342

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domi...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 1

ARRÊT DU 15 MARS 2023

(n° 038/2023, 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : 21/09605 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDWV7

Décision déférée à la Cour : Jugement du 26 Février 2021 - Tribunal Judiciaire de PARIS - 3ème chambre 3ème section - RG n°19/11153

APPELANTE

S.A.R.L. RE.MEC

Société au capital de 150 000 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Nice sous le numéro 479 995 342

Agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentée et assistée de Me Audrey SCHWAB de la SELARL 2H AVOCATS, avocate au barreau de PARIS, toque L 0056

INTIMEE

S.A.R.L. SUD-OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE - SOPLA

Société au capital de 20 733,07 euros

Immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Toulouse sous le numéro B 302 265 095

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocate au barreau de PARIS, toque K 0065

Assistée de Me Rémi SCABORO plaidant pour la SELAS ALTIJ, avocat au barreau de TOULOUSE, case 177

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l'article 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 18 janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente, chargée d'instruire l'affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport et Mme Déborah BOHEE, conseillère.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre,

Mme Françoise BARUTEL, conseillère,

Mme Déborah BOHEE, conseillère,

Greffier, lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRÊT :

Contradictoire

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

signé par Isabelle DOUILLET, Présidente de chambre et par Karine ABELKALON, Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOSE DU LITIGE

La société RE.MEC a pour activité la réparation de véhicules, matériel industriel, travaux publics, mécanique générale, construction, réparation, travaux de métallerie et chaudronnerie, réparations hydrauliques, carrosserie, garnitures et tambours de freins pour matériel de travaux publics, de nautisme et poids lourds, le négoce de pièces détachées pour poids lourds et remorques et la métrologie légale relative aux installations, inspections et contrôles des chronotachygraphes numériques et analogiques.

La société SUD OUEST POIDS LOURD ASSISTANCE (ci-après « SOPLA ») est spécialiste des pièces détachées de remorques et de semi-remorques, et expose être, à ce titre, partenaire des constructeurs de ces équipements, parmi lesquels la société ATELIERS DE CONSTRUCTIONS ET DE TRAVAUX MÉCANIQUES (ci-après «ACTM »), dont elle assurait la distribution et/ou l'utilisation de pièces détachées dans le cadre du service après-vente des remorques et semi-remorques ACTM depuis 1975.

La société RE.MEC expose avoir, par jugement du 19 novembre 2014 du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère, été déclarée cessionnaire des actifs de la société ACTM, placée en liquidation judiciaire, parmi lesquels notamment les marques ACTM ci-dessous :

- marque française semi-figurative n° 1547015 enregistrée le 18 août 1989, expirée le 18 août 2019, en classes 7 (tous appareils et engins de manutention) et 12 (véhicules terrestres, en particulier remorques et semi-remorques de toutes sortes);

-marque de l'Union européenne semi-figurative n°6541742 enregistrée le 27 décembre 2007 en classes 7 (appareils et engins de manutention) et 12 (véhicules terrestres, en particulier remorques et semi-remorques);

- marque internationale semi-figurative n°550010, enregistrée le 16 février 1990, expirant le 16 février 2030, en classes 7 (appareils et engins de manutention) et 12 (véhicules terrestres, en particulier remorques et semi-remorques) et désignant le Benelux, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie et le Portugal :

Le 15 mai 2017, la société RE.MEC a fait constater par huissier de justice l'usage de ces marques sur le site internet de la société SOPLA, à côté de la photographie d'une pièce détachée, la société SOPLA mettant en avant son expérience et ses compétences techniques lui permettant de fabriquer elle-même tous les éléments de carrosserie et de remorque ACTM.

Par acte du 13 mars 2018, la société RE.MEC a fait assigner la société SOPLA devant le tribunal de grande instance de Marseille en contrefaçon des trois marques ACTM dont elle est titulaire. Par ordannance du 3 juin 2019, le juge de la mise en état de ce tribunal s'est déclaré incompétent au profit du tribunal de grande instance, devenu tribunal judiciaire, de Paris, auquel la procédure a été transmise.

Devant le tribunal judiciaire de Paris, la société RE.MEC a limité ses demandes en contrefaçon aux marques européenne et internationale.

Dans son jugement rendu le 26 février 2021 dont appel, le tribunal judiciaire de Paris a statué en ces termes:

-déclare la société RE.MEC irrecevable en son action en contrefaçon de la marque semi-figurative 'ACTM' de l'Union européenne n°6541742 et de la marque semi-figurative 'ACTM' internationale n°550010,

-déboute la société SOPLA de sa demande en dommages et intérêts et d'amende civile pour procédure abusive,

-condamne la société RE.MEC à payer à la société SOPLA la somme de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

-condamne la société RE.MEC aux dépens.

Le 20 mai 2021, la Société RE.MEC a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions numérotées 3, déposées et signifiées par RPVA le 6 octobre 2022, la société RE.MEC demande à la cour de :

- déclarer la société RE.MEC recevable en son action et bien fondée en sa demande.

- infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 26 février 2021 dont appel en ce qu'il a retenu la documentation l'INPI, l'EUIPO et le WIPO insuffisante, a déclaré la société RE.MEC irrecevable en son action, l'a déboutée de ses demandes et l'a condamnée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

- juger que la société SUD OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE s'est rendue coupable de contrefaçon de la marque semi-figurative "ACTM" de l'Union Européenne n°6541742 enregistrée pour les classes de produits et services 7 et 12 et de la marque semi-figurative "ACTM" internationale n°550010 enregistrée pour les classes de produits et services 7 et 12, pour les pays désignés Benelux, Allemagne, Espagne, Italie, Portugal.

- faire interdiction à la société SUD OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE, sur le territoire français, sur le territoire de l'Union Européenne et à l'international, d'exploiter, directement ou indirectement, par toute personne physique ou morale, la marque ACTM, telle qu'elle a été identifiée ci-dessus, à peine d'une astreinte de quinze mille euros (15.000,00 €) par infraction constatée, passé le délai de quinze jours, à compter du jugement à intervenir.

- condamner la société SUD OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE à payer à la société RE.MEC la somme de cinq cent mille euros (500.000,00 €), à titre de dommages et intérêts forfaitaires en réparation du préjudice commercial.

- débouter la société SUD OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE de l'intégralité de ses demandes, fins et prétentions.

En tout état de cause :

- condamner la société SUD OUEST POIDS LOURD ASSISTANCE à payer à la société RE.MEC la somme de 15.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance, sur le fondement de l'article 699, dont distraction au profit de Maître SCWAB, Avocat aux offres et affirmations de droit.

- débouter la société SUD OUEST POIDS LOURD ASSISTANCE de l'intégralité de ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires.

Dans ses conclusions numérotées 4, signifiées le 10 octobre 2022, la société SOPLA demande à la cour de :

- rejeter toutes conclusions contraires comme injustes et mal-fondées.

- débouter la société RE.MEC de l'ensemble de ses moyens, demandes, fins et prétentions.

- infirmer le jugement du 26 février 2021 du tribunal judiciaire de Paris en ce qu'il a débouté la société SUD-OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE de sa demande en dommages et intérêts et d'amende civile pour procédure abusive.

Statuant à nouveau,

- condamner la société RE.MEC à payer à la société SUD-OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE la somme de dix mille (10 000) euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- confirmer le jugement du 26 février 2021 du tribunal judiciaire de Paris pour le surplus.

À défaut,

- déclarer irrecevable l'action de la société RE.MEC en contrefaçon des marques française n° 1547015, de l'Union européenne n° 6541742 et internationale n° 550010.

En conséquence,

- débouter la société RE.MEC de l'ensemble de ses moyens, demandes, fins et prétentions.

À défaut,

- prononcer, à titre reconventionnel, la déchéance des marques française n° 1547015, de l'Union européenne n° 6541742 et internationale n° 550010.

- débouter la société RE.MEC de l'ensemble de ses moyens, demandes, fins et prétentions.

En toutes hypothèses,

- prononcer, à titre reconventionnel, la déchéance des marques française n° 1547015, de l'Union européenne n° 6541742 et internationale n° 550010.

- débouter la société RE.MEC de l'ensemble de ses moyens, demandes, fins et prétentions.

- condamner la société RE.MEC à payer à la société SUD-OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE la somme de dix mille (10 000) euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive.

- condamner la société RE.MEC à payer à la société SUD-OUEST POIDS LOURDS ASSISTANCE la somme de dix mille (10 000) euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DECISION

En application des dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, il est expressément renvoyé, pour un exposé exhaustif des prétentions et moyens des parties, aux conclusions écrites qu'elles ont transmises, telles que susvisées.

Sur la recevabilité de l'action en contrefaçon

La société SOPLA constate que la société RE.MEC ne produit pas, à hauteur d'appel, les certificats d'enregistrement des deux marques qu'elle lui oppose et soutient qu'elle ne présente ni intérêt ni qualité à agir à son encontre en contrefaçon de marques, les fiches marques issues de la base de données de l'INPI étant insuffisantes sur ce point, outre que la marque internationale ne vise pas la France.

La société SOPLA plaide également que la société RE.MEC ne justifie pas de sa titularité des marques, la cession d'une marque européenne n'étant opposable aux tiers que si elle est inscrite au registre des marques de l'UE. Elle estime que le fait que la société RE.MEC ait éventuellement procédé, en cours de procédure, à des demandes d'inscriptions ne lui permet pas de régulariser, a posteriori, la présente action, l'appelante ne pouvant ainsi prétendre avoir été propriétaire de la marque antérieurement au 31 juillet 2020, de sorte que son action en contrefaçon doit être déclarée irrecevable.

Elle conteste également le fait que la société RE.MEC puisse revendiquer la propriété de ces marques dans le cadre de la cession des actifs de la liquidation judiciaire de la société ACTM, ces dernières n'étant pas identifiées, le délai fixé n'ayant pas été respecté et une société tierce étant désignée comme cessionnaire (la société KAISER).

La société RE.MEC rappelle qu'ayant été déclarée cessionnaire des actifs de la société ACTM, elle est bien propriétaire des marques en cause et critique la décision du tribunal, qui a, selon elle, fait preuve d'un formalisme inapproprié.

S'agissant de la marque européenne, elle indique verser aux débats notamment un extrait certifié conforme du registre des demandes et des enregistrements de marques de l'EUIPO en date du 31 juillet 2020 confirmant le transfert de la marque à son profit. S'agissant de la marque internationale, elle verse un extrait WIPO justifiant de son enregistrement et de sa titularité et soutient que cette marque s'impose en France, alors qu'elle justifie de violations de ses droits au delà des frontières nationales en raison d'un site consultable en Europe et dans le monde. Elle conteste l'argumentation de la société SOPLA relative aux conséquences de l'absence d'enregistrement au registre des marques et leur inopposabilité dans la présente procédure, mettant en avant les effets attachés au jugement ayant autorisé la cession qui fait l'objet d'une publication et qui l'a rendue en conséquence opposable aux tiers, conformément, selon elle, à l'article 20 du règlement UE 2017/1001. Elle ajoute qu'en vertu de l'article 126 du code de procédure civile, l'inscription est intervenue avant que la cour ne soit amenée à statuer.

En vertu de l'article L.714-7 du code de la propriété intellectuelle, « Toute transmission ou modification des droits attachés à une marque doit, pour être opposable aux tiers, être inscrite au Registre national des marques.

Toutefois, avant son inscription, un acte est opposable aux tiers qui ont acquis des droits après la date de cet acte mais qui avaient connaissance de celui-ci lors de l'acquisition de ces droits.

Le licencié, partie à un contrat de licence non inscrit sur le Registre national ou international des marques, est également recevable à intervenir dans l'instance en contrefaçon engagée par le titulaire de la marque afin d'obtenir la réparation du préjudice qui lui est propre.»

Selon l'article 20 du règlement UE 2017/1001 relatif au transfert de la marque européenne,

«1. La marque de l'Union européenne peut, indépendamment du transfert de l'entreprise, être transférée pour tout ou pour partie des produits ou des services pour lesquels elle est enregistrée.

2. Le transfert de l'entreprise dans sa totalité implique le transfert de la marque de l'Union européenne, sauf si, en conformité avec la législation applicable au transfert, il existe une convention contraire ou si cela ressort clairement des circonstances. Cette disposition s'applique à l'obligation contractuelle de transférer l'entreprise.

3. Sans préjudice du paragraphe 2, la cession de la marque de l'Union européenne doit être faite par écrit et requiert la signature des parties au contrat, sauf si elle résulte d'un jugement; à défaut, la cession est nulle.

4. Sur requête d'une des parties, le transfert est inscrit au registre et publié.

5. La demande d'enregistrement d'un transfert comporte des informations permettant d'identifier la marque de l'Union européenne, le nouveau titulaire, les produits et services sur lesquels porte le transfert ainsi que les documents établissant en bonne et due forme le transfert conformément aux paragraphes 2 et 3. La demande peut également contenir, s'il y a lieu, des informations permettant d'identifier le représentant du nouveau titulaire. (...)

11. Tant que le transfert n'a pas été inscrit au registre, l'ayant cause ne peut pas se prévaloir des droits découlant de l'enregistrement de la marque de l'Union européenne.
1:. Soulignement ajouté par la cour.

12. Lorsque des délais doivent être observés vis-à-vis de l'Office, l'ayant cause peut faire à l'Office les déclarations prévues à cet effet dès que celui-ci a reçu la demande d'enregistrement du transfert.

13. Tous les documents qui doivent être notifiés au titulaire de la marque de l'Union européenne, conformément à l'article 98, sont adressés à la personne enregistrée en qualité de titulaire.»

C'est d'abord par de justes motifs adoptés par la cour que le tribunal, après avoir constaté qu'il résultait du jugement du tribunal de commerce de Romans-sur-Isère du 19 novembre 2014 que l'offre de reprise de la société RE.MEC ayant été retenue, celle-ci est effectivement cessionnaire de l'ensemble des actifs de la société ACTM, en ce compris les éléments incorporels, dont les droits de propriété intellectuelle de la société liquidée, a retenu que les marques invoquées ont fait l'objet d'une cession à son profit.

Par ailleurs, la cour rappelle que la publication de cette cession d'actifs organisée au BODACC dans le cadre de la procédure collective ne rend pas opposable cette cession aux tiers, seule l'inscription de ce transfert au registre pouvant produire cet effet, comme le mentionne clairement l'article 20.11 du règlement UE 2017/1001 relatif au transfert de la marque européenne, de sorte qu'un cessionnaire ne peut agir en contrefaçon que si le transfert de propriété a été publié au registre.

Or, force est de constater s'agissant de la marque UE N°006541742 que la société RE.MEC justifie que le transfert de titulaire de la marque n'a été sollicité que le 27 juillet 2020 et obtenu le 31 juillet 2020, soit postérieurement au procès-verbal de constat sur internet du 15 mai 2017 et à son assignation dénonçant les faits de contrefaçon, délivrée le 13 mars 2018. Elle ne démontre ni n'invoque au demeurant de faits postérieurs à cette date, la société SOPLA justifiant avoir ôté la mention en cause de son site internet suite à l'assignation délivrée.

Par ailleurs, s'agissant de la marque internationale n° 550010, la cour constate qu'elle ne vise pas la France et ne peut, conformément au principe de territorialité des marques, fonder une action en contrefaçon de marques pour des faits commis en France. En outre, la société RE.MEC ne produit pas aux débats le document attestant de la date d'inscription de la cession de cette marque à son profit, pourtant mentionnée en pièce jointe au mail versé en pièce 28 de son conseil en propriété intellectuelle, se contentant de verser un extrait de la base Marques du site DATA INPI du 28 juillet 2021 où elle figure effectivement comme titulaire, mais à une date bien postérieure à l'assignation et aux faits de contrefaçon allégués.

Ainsi, la société RE.MEC ne justifie pas d'un transfert inscrit au registre des marques en cause à son profit antérieurement aux faits de contrefaçon imputés à la société SOPLA.

Le jugement querellé doit en conséquence être confirmé en ce qu'il a déclaré la société RE.MEC irrecevable en ses demandes en contrefaçon.

Il n'y a en conséquence pas lieu d'examiner la demande en déchéance de marques formulée à titre subsidiaire par la société SOPLA.

Sur la demande reconventionnelle pour procédure abusive:

La société SOPLA soutient que les demandes de RE.MEC souffrent d'une absence manifeste de fondement et qu'elles sont dépourvues de tout sérieux, au regard des différentes fins de non recevoir et des moyens opposés et dénonce l'acharnement de l'appelante à son égard, alors qu'une société tiers exploite la marque en cause sans être inquiétée.

La société RE.MEC conteste tout abus dans l'exercice de ses droits.

Sur ce, la cour rappelle que l'accès au juge étant un droit fondamental et un principe général garantissant le respect du droit, ce n'est que dans des circonstances tout à fait exceptionnelles que le fait d'agir en justice ou d'exercer une voie de recours légalement ouverte est susceptible de constituer un abus. Or, la société SOPLA ne démontre pas la faute commise par la société RE.MEC qui aurait fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice, l'intéressée ayant pu légitimement se méprendre sur l'étendue de ses droits. Elle ne justifie pas en outre de l'existence d'un préjudice distinct de celui causé par la nécessité de se défendre en justice qui sera réparé par l'allocation d'une indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

C'est en conséquence à juste titre que le tribunal a rejeté les demandes de dommages et intérêts formulées par la société RE.MEC au titre de l'amende civile et de la procédure abusive, le jugement déféré étant confirmé de ces chefs.

Sur les autres demandes

La société RE.MEC, succombant, sera condamnée aux dépens d'appel, et gardera à sa charge les frais non compris dans les dépens qu'elle a exposés à l'occasion de la présente instance, les dispositions prises sur les dépens et frais irrépétibles de première instance étant confirmées.

Enfin, l'équité et la situation des parties commandent de condamner la société RE.MEC à verser à la société SOPLA une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société RE.MEC aux dépens d'appel,

Condamne la société RE.MEC à verser à la société SUD OUEST POIDS LOURD ASSISTANCE une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 1
Numéro d'arrêt : 21/09605
Date de la décision : 15/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-15;21.09605 ?
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