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15/03/2023 | FRANCE | N°20/11537

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 4, 15 mars 2023, 20/11537


Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 4





ORDONNANCE DU 15 MARS 2023

(n° , 6 pages)





Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/11537 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCGZT



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2020 TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 19/53753



Nature de la décision : réputée contradictoire



N

OUS, Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.



Statuant sur le recours formé par :

...

Copies exécutoires République française

délivrées aux parties le : Au nom du peuple français

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 4

ORDONNANCE DU 15 MARS 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/11537 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CCGZT

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2020 TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de PARIS - RG n° 19/53753

Nature de la décision : réputée contradictoire

NOUS, Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, agissant par délégation du Premier Président de cette Cour, assistée de Sonia DAIRAIN, Greffière.

Statuant sur le recours formé par :

DEMANDEURS

Madame [Y] [I]

[Adresse 1]

[Localité 14]

Monsieur [E] [X]

[Adresse 1]

[Localité 14]

Représentés par Me Dominique LAURIER, avocat au barreau de PARIS, toque : D1418

contre

DEFENDEURS

Madame [S] [D]

[Adresse 2]

[Localité 8]

Assistée de Me Antoine TIREL de la SELAS LARRIEU ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : J073

SA PACIFICA

[Adresse 12]

[Localité 10]

Représentée par Me GACEB substituant Me Nathanaël ROCHARD de la SELARL LAMBARD & ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : P0169

Madame [O] [G] - AR de convocation signé

[Adresse 5]

[Localité 9]

SMABTP - AR de convocation signé

[Adresse 11]

[Localité 10]

SACOGI, pour le SDC du [Adresse 4] de convocation signé

[Adresse 3]

[Localité 9]

SWISS LIFE - AR de convocation signé

[Adresse 7]

[Localité 13]

Défaillants

Et après avoir appelé les parties lors des débats de l'audience publique du 06 Février 2023 :

EXPOSE DU LITIGE

Mme [Y] [I] et M. [E] [X], propriétaires d'un appartement donné en location, situé [Adresse 6], se sont plaints de ce que la propriétaire de l'appartement situé à l'étage du dessous , Mme [G] , avait fait réaliser courant 2015 d'importants travaux, confiés à la SARL AMECO, assurée auprès de la société SMABTP, ayant, selon eux, causé des dommages à leur appartement.

La SARL AMECO a fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire suivant jugement en date du 19 septembre 2016.

Par ordonnance de référé du tribunal judiciaire de Paris du 11 juin 2019, une expertise a été ordonnée et Mme [S] [D], architecte, a été désignée en qualité d'expert, en substance pour décrire les désordres allégués, en détailler l'origine, la cause et l'étendue et donner son avis sur les solutions pour y remédier ainsi que sur les préjudices et les coûts induits.

La provision a été mise à la charge de Mme [I] et M. [X].

L'expert a déposé son rapport « en l'état » le 3 juin 2020, sur autorisation du juge du contrôle de l'expertise en date du 18 mai 2020.

Par ordonnance du 29 juin 2020, le juge taxateur a fixé à la somme de 4460 euros ttc la rémunération de l'expert et a constaté que les sommes consignées excédaient le montant de la rémunération à hauteur de 1890 €, cette somme devant donc être restituée à M. [X] et Mme [I].

Par requête en date du 7 août 2020 enregistrée au greffe le 20 août 2020, Mme [I] et M. [X] ont formé un recours contre l'ordonnance de taxe rendue.

L'affaire a été examinée à l'audience du 6 février 2023 à laquelle les parties ont été régulièrement convoquées.

Dans leurs conclusions déposées et soutenues à l'audience par leur conseil, Mme [I] et M. [X] demandent de :

- Infirmer l'ordonnance de taxe en ce qu'elle a fixé à la somme de 4.460 euros TTC le montant des honoraires de Madame [S] [D],

Statuant à nouveau,

-Juger que le dépôt de ce rapport ne peut donner lieu à aucun honoraires et ce d'autant plus qu'aux termes d'un jugement en date du 24 janvier 2023, le tribunal judiciaire de PARIS en a prononcé la nullité,

-A titre subsidiaire, les appelants sollicitent une très importante réduction des honoraires sollicités,

-Rejeter les demandes de Mme [D],

-Condamner Mme [D] à leur verser la somme de 4.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Dans ses conclusions déposées et soutenues à l'audience par son conseil, l'expert demande la confirmation de la décision sur le montant de ses honoraires et la condamnation solidaire de M. [X] et de Mme [I] à lui payer la somme de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

L'expert a été entendu en ses observations. Elle a fait notamment valoir qu'elle a quasiment intégralement procédé à l'accomplissement de la mission qui lui avait été confiée et n'est pas responsable du dépôt 'en l'état' qu'elle n'a pas sollicité.

A l'audience, le conseil de la société Pacifica a également été entendu en ses observations et a fait valoir qu'elle s'associait aux conclusions des appelants.

SUR CE,

En application de l'article 284 alinéa 1er du code de procédure civile, le juge fixe la rémunération de l'expert en fonction notamment des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni.

L'article 724 du code de procédure civile dispose que les décisions mentionnées aux articles 255, 262 et 284, émanant d'un magistrat d'une juridiction de première instance ou de la cour d'appel, peuvent être frappées de recours devant le premier président de la cour d'appel dans les conditions prévues aux articles 714 (alinéa 2) et 715 à 718. Si la décision émane du premier président de la cour d'appel, elle peut être modifiée dans les mêmes conditions par celui-ci.

Le délai court, à l'égard de chacune des parties, du jour de la notification qui lui est faite par le technicien.

Le recours et le délai pour l'exercer ne sont pas suspensifs d'exécution. Le recours doit, à peine d'irrecevabilité, être dirigé contre toutes les parties et contre le technicien s'il n'est pas formé par celui-ci.

En l'espèce, le recours formé apparaît recevable.

Il est constant qu'un jugement a été rendu le 24 janvier 2023 par le tribunal judiciaire de Paris dans l'instance introduite au fond par M. [X] et Mme [I], à la suite de l'ordonnance de référé précitée ayant ordonné l'expertise objet de la présente instance, et par lequel ce tribunal a notamment :

-annulé le rapport d'expertise de Mme [S] [D] du 3 juin 2020,

-ordonné le partage de responsabilité dans la survenue des dommages subis par M. [X] et Mme [I], pour 30 % à la charge de ces derniers et pour 70 % à la charge de Mme [G],

- condamné Mme [G] à payer certaines sommes à M. [X] et Mme [I] en réparation de leur préjudice,

-condamné in solidum la société SMA et la société Pacifica à relever et garantir Mme [G] des condamnations mises à sa charge,

- condamné in solidum M. [X] et Mme [I] aux dépens de l'instance, de l'expertise et du référé, avec partage de ceux-ci, dans leurs recours réciproques, à proportion de leurs responsabilités respectives.

M. [X] et Mme [H] font ainsi valoir que le rapport litigieux a été annulé, faute de respect du contradictoire, l'expert ayant déposé son rapport 'en l'état' sans en aviser les parties ni avoir établi un document de synthèse ni sollicité les observations des parties ; ils ajoutent que le rapport finalement déposé est inutile et inexploitable, ce qui leur a porté préjudice, aucune évaluation de leur préjudice n'ayant été effectuée et le tribunal s'étant in fine déterminé au fond en fonction de devis incomplets et anciens.

Ils estiment enfin que les honoraires fixés sont excessifs compte tenu des diligences accomplies.

Mme [D] fait valoir :

-qu'elle n'est nullement à l'origine de la décision de déposer le rapport 'en l'état' et s'est bornée à obtempérer à la décision du juge du contrôle de l'expertise en ce sens, qu'elle n'a pas sollicitée,

-qu'elle a effectué toutes les diligences utiles jusque-là et a respecté le principe du contradictoire pendant l'exercice de sa mission ainsi que cela résulte du jugement du 24 janvier 2023, lequel ne retient un défaut de contradiction que concernant les conditions du dépôt du rapport final ;

-que ce rapport n'est pas inexploitable puisqu'il répond aux questions posées et que ses investigations ont été prises en compte sur le fond par le jugement du 24 janvier 2023, mais dans un sens qui ne satisfait pas les appelants.

Le juge fixe la rémunération de l' expert en fonction notamment des diligences accomplies, du respect des délais impartis et de la qualité du travail fourni (CPC, art. 284, al. 1).

Au préalable il convient de constater qu'il résulte du courrier du 18 mai 2020 par lequel le juge du contrôle des expertises autorise l'expert à déposer son rapport en l'état, en application de l'article 220 du code de procédure civile, que cette décision est prise « faisant suite au courrier de Maître [R] [W] en date du 2 mars 2020 » ; cet avocat n'étant pas celui de l'expert, il ne saurait être reproché à Mme [D] d'être à l'origine de ce dépôt en l'état; aucune faute ne peut lui être reprochée et n'est établie à cet égard.

Par ailleurs il résulte des éléments du dossier et du jugement du 24 janvier 2023, lequel n'est toutefois pas définitif, que :

-Mme [D] a organisé 2 réunions d'expertise contradictoires sur place en septembre et en novembre 2019, visité plusieurs appartements concernés par le litige, rédigé quatre notes aux parties, en septembre, novembre et décembre 2019,

-qu'elle a estimé nécessaire la vérification de l'état de planchers, parties communes, et a demandé au syndicat des copropriétaires de missionner en ce sens un géomètre expert;que ces recherches n'ont cependant pas été effectuées en raison des désaccords des parties, le syndicat des copropriétaires refusant notamment de prendre en charge le coût des recherches complémentaires préconisées;

- aucun retard dans l'accomplissement de ses diligences ne lui est reproché ni n'est reprochable, dans le contexte d'une part de l'état d'urgence sanitaire lié à la pandémie de covid 19 et d'autre part des difficultés rencontrées, qui ont justifié la saisine du juge du contrôle des expertises,

- selon le jugement précité, Mme [D] a exercé l'essentiel des diligences qui lui étaient confiées, a émis ses observations et un avis technique sans manquer à son devoir d'impartialité ou au principe du contradictoire pendant l'accomplissement de ces diligences; le rapport déposé comprend 8 pages de conclusions détaillées;

- à l'issue de ses diligences, Mme [D] a informé les parties des difficultés qu'elle rencontrait concernant les investigations complémentaires qu'elle demandait mais ne leur a pas indiqué que l'origine des désordres se trouvait selon elle dans l'état de vétusté des installations de M. [X] et Mme [I] ce qu'elle a finalement indiqué dans son rapport sans les avoir invités à émettre des observations sur ce point ; de plus, le jugement précité a considéré que quand bien même l'expert avait été autorisée par le juge à procéder au dépôt du rapport en l'état, il lui appartenait d'informer préalablement et en temps utile les parties et de susciter toute observation de leur part préalablement à ce dépôt, ce dont elle s'est abstenue, méconnaissant ainsi le principe du contradictoire et l'article 16 du code de procédure civile sur ce point seulement ;

- à l'issue de ces opérations, Mme [D] a procédé de manière injustifiée au dépôt précipité de son rapport sans que les parties en soient informées et sans avoir préalablement réalisé un document de synthèse, prévue dans la mission qui lui était confiée, ni sollicité les observations des parties, en méconnaissance du principe du contradictoire entachant ainsi le rapport d'irrégularité,

- le tribunal statue néanmoins, explicitement, au vu des éléments résultant des investigations de Mme [D], en tant que pièces du dossier versées contradictoirement aux débats, au même titre que les autres pièces produites; il constate que les diligences ont été valablement effectuées et que les consorts [X] et [I] ne justifient d'aucun préjudice résultant du déroulement de l'expertise et causé par des manquements reprochés à Mme [D] ; il s'estime suffisamment informé et rejette la demande subsidiaire de M. [X] et Mme [I] visant à faire ordonner une nouvelle expertise; ainsi les diligences accomplies par l'expert ont donné lieu à des éléments parfaitement exploitables et utiles pour le juge du fond.

Il convient de rappeler que les critiques relatives au contenu de l'expertise relèvent du juge du fond et non du juge chargé de fixer la rémunération de l'expert et de retenir que l'annulation du rapport, au demeurant non définitive, ne justifie pas que l'expert ne soit pas rémunéré pour les diligences effectivement accomplies, et ce au regard des critères de l'article 284 du code de procédure civile.

Il y a lieu de relever :

- que, dans sa demande d'évaluation et de rémunération, l'expert n'a pas facturé la rédaction du document de synthèse (réunion de synthèse, communication d'un projet de rapport') qui n'a certes pas été effectuée et ce en contradiction avec les termes de la mission qui lui était impartie;

-la rédaction du rapport est facturée à hauteur de 1430 € (soit 11 vacations à 130 € chacune) alors que les diligences devant être accomplies en vue du respect du contradictoire ont été omises lors de son dépôt;

-la facturation des réunions d'expertise sur site (520 € pour 2 réunions, outre 130 € de temps de déplacement), de 4 notes de 11 pages intégrant une réponse aux dires d'une partie ( 910 euros), n'est pas excessive ; il en est de même des frais exposés à hauteur de 597, 10 euros (secrétariat, reprographie,...);

Au vu de l'ensemble de ces éléments la rémunération sollicitée, à hauteur de 4.460 euros TTC et accordée par l'ordonnance entreprise sera seulement réduite comme étant excessive et la rémunération de l'expert sera fixée à la somme de 3.800 euros TTC ; l'ordonnance entreprise doit donc être infirmée.

Les demandes des parties n'étant que partiellement accueillies, il apparaît équitable de ne pas faire application de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [D] sera enfin condamnée aux dépens de la présente procédure.

PAR CES MOTIFS

INFIRMONS l'ordonnance de taxe entreprise ;

Statuant à nouveau,

FIXONS la rémunération totale de Mme [S] [D], expert, à la somme de 3.800 euros TTC,

REJETONS toute autre demande,

CONDAMNONS in solidum Mme [Y] [I] et M. [E] [X] aux dépens de la présente instance.

ORDONNANCE rendue par Mme Anne-Laure MEANO, Présidente de chambre, assistée de Mme Sonia DAIRAIN, greffière lors de la mise à disposition de l'ordonnance au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

La Greffière, La Présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 20/11537
Date de la décision : 15/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-15;20.11537 ?
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