REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 4 - Chambre 5
ARRET DU 15 MARS 2023
(n° 54 /2023, 10 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/00267 - N° Portalis 35L7-V-B7D-B7A4C
Décision déférée à la Cour : jugement du 26 novembre 2018 -tribunal de grande instance d'EVRY RG n° 16/02893
APPELANTS
Monsieur [H] [R] [G]
[Adresse 3]
[Localité 6]
Madame [E] [D] [L]
[Adresse 4]
[Localité 6]
Représentés par Me Sandrine PRISO de la SELARL SOCIETE D'AVOCAT GOGET-PRISO, avocat au barreau d'ESSONNE, toque : PC39
INTIMEES
Société QBE EUROPE Société de droits étrangers venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROP LIMITED, ayant son établissement principal [Adresse 2], agissant poursuites et diligences en la personne de son représentant légal ou statutaire domicilié audit siège
[Adresse 8]
[Localité 1] - BELGIQUE
Représentée par Me Sylvie KONG THONG de l'AARPI Dominique OLIVIER - Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069
Assistée de Me Raphaël GOMES, avocat au barreau de Paris
SARL REBATIR
[Adresse 5]
[Localité 7]
n'a pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L'affaire a été débattue le 15 novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
Mme Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre
Madame Elise THEVENIN-SCOTT, conseillère
Mme Alexandra PELIER-TETREAU, vice-présidente placée faisant fonction de conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame [K] [V] dans les conditions prévues par l'article 804 code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Mme Céline RICHARD
ARRET :
- défaut
- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Marie-Ange SENTUCQ, présidente de chambre et par Manon CARON, greffière, présente lors de la mise à disposition à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D]-[L] ont entrepris des travaux de rénovation de leur habitation courant 2011. Dans ce cadre, ils ont fait appel à l'EURL REBATIR suivant devis en date du 22 juin 2011 pour un coût total de 73 639 euros TTC.
Le descriptif des travaux comprenait, notamment, les lots maçonnerie, peinture, revêtements de sol, plomberie et électricité.
Les travaux n'ont donné lieu à aucune opération de réception matérialisée par un procès-verbal mais étaient achevés en mai 2012.
Au mois de septembre 2012, les maîtres d'ouvrage constataient des désordres sur les travaux de peinture et sur le parquet. Une expertise était alors diligentée par leur assureur, donnant lieu à un rapport en date du 8 mars 2013. L'entreprise déniait toute responsabilité dans un courrier du 10 septembre 2013.
Des désordres de plomberie sont apparus à la suite, donnant lieu à une nouvelle expertise non judiciaire et à un rapport remis le 26 février 2014.
Le 31 mars 2014 (courrier non communiqué mais non contesté), Monsieur [G] et Madame [D]-[L] sollicitaient la garantie de l'assureur en responsabilité civile décennale et en responsabilité civile de l'EURL REBATIR, la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED. Le 9 mai 2014, la compagnie d'assurance les informait qu'elle contestait devoir sa garantie.
Par actes en date des 22 septembre et 23 octobre 2014, Monsieur [G] et Madame [D]-[L] saisissaient en référé le président du tribunal de grande instance d'EVRY aux fins d'expertise.
Le 27 janvier 2015, Monsieur [I], expert, était désigné par ordonnance. Il remettait son rapport le 30 septembre 2015.
Suivant acte du 29 mars 2016, Monsieur [G] et Madame [D]-[L] ont assigné au fond l'EURL REBATIR et la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED en indemnisation de leurs préjudices.
Par jugement du 26 novembre 2018, le tribunal de grande instance d'EVRY a :
' Condamné in solidum la société REBATIR et la société QBE INSURANCE EUROP LIMITED à payer à Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D] [L] la somme de 4 502,96 € au titre de la réparation des dommages résultant des malfaçons des travaux de peinture ;
' Débouté Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D] [L] du surplus de leurs demandes principales ;
' Condamné in solidum la société REBATIR et la société QBE INSURANCE EUROP LIMITED au paiement des entiers dépens lesquels comprennent les frais de l'expertise judiciaire;
' Condamné in solidum la société REBARTIR et la société QBE INSURANCE EUROP LIMITED à payer la somme de 2 500 € à Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D] [L] au titre de l'article 700 du code de procédure civile;
' Rejeté la demande de la société QBE INSURANCE EUROP LIMITED au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
' Ordonné l'exécution provisoire.
Monsieur [G] et Madame [D]-[L] ont interjeté appel du jugement le 2 janvier 2019.
L'EURL REBATIR n'a pas constitué avocat. La déclaration d'appel et les conclusions lui ont été signifiées le 20 mai 2019.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 5 septembre 2019, Monsieur [G] et Madame [D]-[L] demandent à la cour de :
CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL REBATIR et la compagnie QBE INSURANCE au paiement d'une somme de 14 356,65 € TTC en réparation des malfaçons affectant les parquets et la peinture.
CONDAMNER conjointement et solidairement la SARL REBATIR et la compagnie QBE INSURANCE au paiement d'une somme de 23 940 € au titre du préjudice de jouissance.
Les condamner au paiement d'une somme de 3 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'en tous les dépens qui comprendront notamment les frais d'expertise, voir ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir.
Aux termes de leurs dernières conclusions signifiées par voie électronique le 14 mai 2019, la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED et QBE EUROPE SA/NV, intervenant volontaire, demandent à la cour de :
À titre liminaire,
DIRE ET JUGER que la société QBE EUROPE SA/NV est recevable et bien fondée en son intervention volontaire ;
PRONONCER la mise hors de cause de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED ;
À titre principal,
CONFIRMER le jugement susvisé en ce qu'il a dit que les désordres de parquet n'engageaient pas la responsabilité décennale de la société REBATlR;
DÉBOUTER les consorts [G]-[D] de toutes leurs demandes formées à ce titre dirigées tant contre la société REBATIR que contre son assureur, la société QBE EUROPE SA/NV, qui vient aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED,
INFIRMER le jugement susvisé en ce qu'il a retenu que les garanties facultatives de la police responsabilité civile souscrite auprès de la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE EUROPE INSURANCE LIMITED, étaient mobilisables et condamné en conséquence la concluante à payer la somme de 4 502,96 euros, au titre de la réparation des dommages résultant des malfaçons des travaux de peinture.
Statuant à nouveau,
DÉBOUTER les consorts [G]-[D] de toutes leurs demandes, fins et conclusions dirigées à l'encontre de la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED ;
CONDAMNER les consorts [G]-[D] à payer à la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED, une indemnité de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile;
CONDAMNER les consorts [G]-[D] aux entiers dépens d'appel, lesquels comprendront les frais d'expertise judiciaire.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 6 septembre 2022. L'affaire a été appelée à l'audience du 15 novembre 2022 et mise en délibéré au 15 mars 2023.
MOTIVATION
I. Sur la mise hors de cause de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED
À titre liminaire, les intimés sollicitent que soit déclarée recevable l'intervention volontaire de la société QBE EUROPE SA/NV et la mise hors de cause de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED, expliquant qu'à la suite de la sortie du Royaume Uni de l'Union européenne, la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED, société de droit britannique dont le siège social est à Londres, a transféré l'ensemble de ses activités à la société QBE EUROPE SA/NV, dont le siège social est à Bruxelles et qui vient aux droits de la première.
Monsieur [G] et Madame [D]-[L] n'exposent aucun argument opposant à cette demande.
Les intimés versent un extrait K-Bis à l'appui de leur prétention.
En conséquence, il convient de déclarer recevable l'intervention volontaire de la société QBE EUROPE SA/NV, et de mettre hors de cause la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED, la société QBE EUROPE SA/NV venant aux droits de cette dernière.
II. Sur la nature, la cause et l'origine des désordres
Il est de principe que le juge n'est lié ni par les constatations d'un expert judiciaire ni par ses conclusions.
Il n'en demeure pas moins qu'un expert judiciaire est choisi pour ses compétences techniques afin de prêter assistance à la juridiction qui elle ne justifie d'aucune compétence technique en la matière et qu'il accomplit sa tâche en respectant le principe de la contradiction.
Il résulte du rapport de Monsieur [I] en date du 30 septembre 2015 que lors des opérations d'expertise des travaux importants étaient en cours au sein du logement de Monsieur [G] et Madame [D]-[L], mais sans rapport avec les désordres allégués.
L'expert, relèvent les désordres suivants :
Il ne retient pas de désordre s'agissant de l'électricité dans la buanderie.
S'agissant de la plomberie, il ne peut effectuer aucun constat, les travaux réparatoires ayant été réalisés en urgence, avant l'expertise, par le maître d'ouvrage, mais retient un désordre en se basant sur le rapport d'expertise non judiciaire de Monsieur [S] dès lors que l'intervention réparatoire réalisée a permis de mettre fin au désordre décrit lors des premières constations comme « un désordre lié à un écoulement difficile au niveau de la canalisation des eaux usées en provenance de la cuisine et engorgement de l'évacuation ».
Peinture : nombreuses traces de défaut de ponçage et marques indiquant que la couche de finition n'a pas été régulièrement appliquée. Fissures révélant des entoilages et des enduits mal réalisés. L'expert considère qu'il s'agit d'un désordre de nature purement esthétique.
Parquets : globalement déposés. Grâce à cette dépose, l'expert peut observer que la mise en place du parquet a été réalisée sur des supports hétérogènes et sans application de ragréage. Il aurait été indispensable de réaliser un ragréage général ou de poser une sous couche générale épaisse permettant de rattraper les irrégularités du sol. L'expert souligne que le devis comportait la pose d'une sous-couche polyuréthane totale sous le parquet (') ce qui n'a pas été constaté sur place. Il existe un défaut d'encollage, un encollage irrégulier, des zones avec dallage inexistant, des joints de dilatation irréguliers ce qui révèle un défaut de calage, certaines lames ne présentent pas de joints de dilatation. Sur ce désordre, l'expert considère que « le non-respect des règles de l'art est fortement susceptible de faire évoluer le désordre vers une dilatation excessive des lames et des soulèvements ponctuels le rendant impropre à sa destination dans la période de la garantie (décennale) ».
Au regard de ce qui précède, il convient de statuer sur la responsabilité de l'EURL REBATIR, seule intervenante, dans les désordres constatés.
III. Sur les régimes de responsabilités applicables
Monsieur [G] et Madame [D]-[L] ne forment aucune demande au titre de la plomberie et de l'électricité. Concernant les parquets, ils fondent leur demande sur l'article 1792 du code civil. Ils souhaitent que la date de réception tacite soit fixée par le tribunal (sic) au 24 mai 2012, date de fin des travaux et de règlement du solde.
Concernant les peintures, ils fondent leur demande sur l'article 1147 du code civil.
La société QBE EUROPE SA/NV, quant à elle, sollicite la confirmation du jugement ayant écarté l'application de la garantie décennale et retenu une responsabilité contractuelle de droit commun.
Réponse de la cour :
La garantie légale des articles 1792 et suivants du code civil n'est due que par l'architecte, les entrepreneurs qui participent directement à la construction de l'ouvrage et qui sont liés au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage. Sont bénéficiaires de cette garantie, le maître de l'ouvrage, propriétaire du bien, ainsi que les acquéreurs de l'ouvrage. La garantie légale suppose que soient remplies les conditions suivantes pour pouvoir être actionnée : un ouvrage, une réception, un dommage survenu après cette réception et qui compromet la solidité de l'ouvrage ou l'affecte dans l'un de ses éléments constitutifs ou l'un de ses éléments d'équipement, le rendant impropre à sa destination.
La réception est définie par l'article 1792-6 du code civil comme étant « l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l'amiable, soit à défaut judiciairement. Elle est, en tout état de cause, prononcée contradictoirement. »
En l'espèce, il ressort des éléments du dossier que par courrier du 10 septembre 2013, l'EURL REBATIR indique que les travaux se sont achevés le 24 mai 2012, date à laquelle ils ont « livré le chantier et reçu un chèque d'un montant de 11 527 euros pour solde de tout compte ». Cette date correspond également à la date de réception proposée par Monsieur [G] et Madame [D]-[L]. Le jugement ayant constaté la réception tacite au 24 mai 2012 sera donc confirmé.
Pour autant, les désordres affectant le parquet ne peuvent être considérés comme étant de nature décennale. En effet, les désordres décrits par l'expertise (problèmes de pose) ne rendent pas l'ouvrage impropre à sa destination dans son ensemble. Par ailleurs, et contrairement à ce qu'affirme l'expert, ne peuvent relever de la garantie décennale les désordres qui ne compromettent pas actuellement la solidité de l'ouvrage et ne le rendent pas impropre à sa destination, sauf à pouvoir constater que l'atteinte à la destination interviendra avec certitude dans le délai de garantie. Or, en l'espèce, l'expert se contente d'indiquer qu'il s'agit d'une évolution susceptible de se présenter.
En conséquence, la garantie légale ne peut être mise en 'uvre et seule la responsabilité contractuelle de droit commun de l'EURL REBATIR peut être recherchée. Le jugement sera confirmé sur ce point.
Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de ses prétentions.
L'article 1134 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites, qu'elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel et, enfin, qu'elles doivent être exécutées de bonne foi.
En application de l'article 1147 du même code, le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au payement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part.
Les entrepreneurs sont tenus à une obligation de résultat dans le cadre de leurs rapports avec le maître de l'ouvrage se définissant comme l'obligation de livrer des travaux conformes à la destination convenue, exécutés en respectant les règles de l'art et les normes en vigueur au jour de leur intervention. Ils ne peuvent s'exonérer de leur responsabilité qu'en établissant l'existence d'une cause étrangère ou d'un cas de force majeure.
En l'espèce, l'expertise note que la prestation de peinture n'est pas « digne d'un professionnel », que les désordres liés à celle-ci proviennent d'un défaut d'exécution, et que concernant le parquet, les désordres sont dus au non-respect des règles de l'art. Le seul intervenant à ces différents postes a été l'EURL REBATIR. Il est démontré un manquement à son obligation de résultat consistant à livrer des travaux exempts de désordres, sans qu'existe une cause étrangère ou un cas de force majeure.
En conséquence, le jugement ayant retenu la responsabilité de l'EURL REBATIR pour les peintures sera confirmé. Il sera complété s'agissant des parquets pour lesquels la garantie décennale a été écartée mais sans que le tribunal se prononce sur un autre régime de responsabilité.
IV. Sur les préjudices indemnisables
Monsieur [G] et Madame [D]-[L] sollicitent :
Une indemnisation au titre des travaux réparatoires à hauteur de 14 356,65 euros TTC, sans distinguer selon les différents désordres.
Une indemnisation au titre du préjudice de jouissance, à hauteur de 23 940 euros, évaluée comme suit : valeur locative (1 900 euros/mois) x 30% x 42 mois (du 8 mars 2015 à septembre 2016) = 570 euros x 42 mois
La société QBE EUROPE SA/NV ne conteste ni la responsabilité contractuelle de son assurée, ni le montant des travaux de reprise évalués par l'expert. Elle estime, en revanche, que le préjudice de jouissance n'est pas démontré et n'a pas été évalué dans le cadre de l'expertise.
Le tribunal de grande instance d'EVRY a fait droit à la demande de Monsieur [G] et Madame [D]-[L] à hauteur de 4 502,96 euros au titre des seules peintures. Il les a déboutés au titre du préjudice de jouissance, considérant qu'ils n'établissaient pas que la maison avait été rendue inhabitable en raison des malfaçons de peinture.
Réponse de la cour :
S'agissant de l'indemnisation des préjudices de Monsieur [G] et Madame [D]-[L], il ne pourra être fait droit aux demandes qu'à la condition que soit rapportée la preuve par eux de la réalité du préjudice, ainsi que du lien de causalité direct avec les désordres constatés.
Sur les préjudices matériels
L'expertise retient un préjudice évalué à 14 356,65 euros TTC, sur la base d'un devis RENOLIV du 22 février 2014 d'un montant total de 19 299,61 euros TTC sur lequel l'expert propose un abattement de 50% s'agissant du poste « peinture » compte tenu de l'absence de réserves lors de la réception et de la vétusté, diminution non critiquée par Monsieur [G] et Madame [D]-[L].
Il est établi que les désordres, imputables à la seule EURL REBATIR, ont nécessité les travaux de reprise chiffrés dans le devis. Il convient donc d'évaluer le préjudice matériel de Monsieur [G] et Madame [D]-[L] à la somme de 14 356,65 euros TTC.
Le jugement sera infirmé en ce qu'il a limité l'indemnisation au seuls travaux de reprise de peinture.
Sur les préjudices immatériels
Monsieur [G] et Madame [D]-[L] ne prétendent pas avoir été intégralement privé de l'usage de leur maison, mais uniquement d'une partie de celle-ci qu'ils évaluent à 30% de la valeur locative totale.
Toutefois force est de constater qu'ils procèdent par affirmation, sans établir avoir réellement été privés de l'usage de 30% de la surface de leur bien, sur la totalité d'une période de 42 mois.
En conséquence, le jugement ayant rejeté cette demande sera confirmé.
V. Sur la garantie de l'assureur
La société QBE EUROPE SA/NV sollicite l'infirmation du jugement de première instance en ce qu'il l'a condamnée à garantir l'EURL REBATIR des condamnations prononcées à son encontre. À ce titre, elle souligne, en premier lieu, que les désordres n'étant pas de nature décennale, sa garantie au titre de la police couvrant la responsabilité décennale de l'EURL REBATIR ne peut être engagée.
En second lieu, s'agissant de la garantie au titre de la responsabilité civile, elle fait valoir que la police de l'EURL REBATIR a été résiliée le 28 octobre 2012 pour non-paiement des primes, et que Monsieur [G] et Madame [D]-[L] ne se sont adressés à elle que le 31 mars 2014, soit postérieurement à cette résiliation, ajoutant que lorsque la résiliation est causée par une faute de l'assuré, aucune garantie subséquente n'est due.
Enfin, et en tout état de cause, elle affirme que la garantie est exclue concernant les frais engagés pour réparer, parachever ou refaire le travail de l'assuré ou pour remplacer tout ou partie du produit.
Monsieur [G] et Madame [D]-[L] demandent, quant à eux, la confirmation du jugement de première instance qui a retenu la garantie de la société QBE EUROPE SA/NV aux motifs que si les garanties ont été suspendues à compter du 18 octobre 2012 et le contrat résilié le 28 octobre 2012, la réclamation est intervenue pendant le délai subséquent de dix ans prévu à la fois par les conditions générales et par l'article L.124-5 du code des assurances. Ils ajoutent que la clause d'exclusion dont se prévaut l'assureur concerne la non-garantie des frais engagés par l'assuré lui-même pour réparer les malfaçons dont il est à l'origine.
Réponse de la cour :
En application de l'article L.112-6 du code des assurances, l'assureur peut opposer au porteur de la police ou au tiers qui en invoque le bénéfice les exceptions opposables au souscripteur originaire.
L'article L.124-1 du même code précise que dans les assurances de responsabilité, l'assureur n'est tenu que si, à la suite du fait dommageable prévu au contrat, une réclamation amiable ou judiciaire est faite à l'assuré par le tiers lésé.
L'article L.124-3 alinéa 1er du code des assurances énonce que le tiers lésé dispose d'un droit d'action directe à l'encontre de l'assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.
Enfin, il résulte des dispositions de l'article L. 124-5 du code des assurances, qui ne peuvent être modifiées par convention en application de l'article L. 111-2 du même code, que la garantie déclenchée par la réclamation couvre l'assuré contre les conséquences pécuniaires des sinistres dès lors que le fait dommageable est antérieur à la date de résiliation ou d'expiration de la garantie et que la première réclamation est adressée à l'assuré ou à son assureur entre la prise d'effet initiale de la garantie et l'expiration d'un délai subséquent à sa date de résiliation ou d'expiration mentionné par le contrat, quelle que soit la date des autres éléments constitutifs des sinistres.
En l'espèce, il est établi que la mise en demeure adressée par la société d'assurance à l'EURL REBATIR le 18 septembre 2012, en raison du non-paiement de ses primes, a conduit à une suspension des garanties à compter du 18 octobre 2012 et une résiliation du contrat le 28 octobre 2012. Il est également constant que la réclamation a été adressée par Monsieur [G] et Madame [D]-[L] le 31 mars 2014, soit postérieurement à la période de suspension et à la résiliation du contrat. Toutefois, l'article IV 'B des conditions générales du contrat d'assurance de l'EURL REBATIR, reprenant les termes de l'article L.124-5 du code des assurances, prévoit que la garantie s'applique pendant une période subséquente de dix ans s'agissant d'un entrepreneur lié par un contrat de louage d'ouvrage avec le maître d'ouvrage en cas de résiliation du contrat par l'assureur. En conséquence, la réclamation est intervenue pendant le délai subséquent et, à ce titre, la garantie de la société QBE EUROPE SA/NV est due.
En outre, et enfin, contrairement à ce qu'affirme la société QBE EUROPE SA/NV, et comme l'a justement retenu le tribunal de grande instance d'EVRY dans son jugement en date du 26 novembre 2018, l'article III ' 34 du chapitre IV des conditions générales qui indique que sont exclus de la garantie après réception ou après livraison « le prix du travail effectué et/ou du produit livré par l'assuré et/ou ses sous-traitants, ainsi que les frais engagés pour : Réparer, parachever ou refaire le travail, ou remplacer tout ou partie du produit » concerne exclusivement les frais engagés par l'assuré et non ceux engagés par le maître d'ouvrage, au titre des travaux réparatoires rendus nécessaires du fait des malfaçons dont est responsable l'assuré.
En conséquence, le jugement ayant retenu la garantie de la société QBE EUROPE SA/NV sera confirmé.
VI. Sur les autres demandes
Le sens de l'arrêt conduit à confirmer le jugement en ses dispositions relatives à l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
Il apparaît inéquitable de laisser à la charge de Monsieur [G] et Madame [D]-[L] leurs frais irrépétibles au titre de l'instance d'appel. En conséquence, l'EURL REBATIR et la société QBE EUROPE SA/NV seront condamnés, in solidum, à leur verser une indemnité de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, les dépens seront mis à la charge de l'EURL REBATIR et de la société QBE EUROPE SA/NV qui succombent.
PAR CES MOTIFS
La cour,
DECLARE recevable l'intervention volontaire de la société QBE EUROPE SA/NV,
PRONONCE la mise hors de cause de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED,
CONFIRME le jugement du tribunal de grande instance d'EVRY en date du 26 novembre 2018 sauf en ce qu'il a débouté Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D]-[L] de leur demande d'indemnisation au titre du parquet ;
STATUANT A NOUVEAU,
CONDAMNE, in solidum'l'EURL REBATIR et la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED, à payer à Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D]-[L] la somme de 14 356,65 euros TTC au titre des travaux réparatoires ;
CONDAMNE, in solidum'l'EURL REBATIR et la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED, à payer à Monsieur [H] [R] [G] et Madame [E] [D]-[L] la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
DÉBOUTE la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED de sa demande d'indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE, in solidum'l'EURL REBATIR et la société QBE EUROPE SA/NV, venant aux droits de la société QBE INSURANCE EUROPE LIMITED aux entiers dépens d'appel, avec distraction au profit des avocats en ayant fait la demande en application de l'article 699 du code de procédure civile.
La greffière, La présidente,