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14/03/2023 | FRANCE | N°20/00678

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 11, 14 mars 2023, 20/00678


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11



ARRET DU 14 MARS 2023



(n° , 13 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00678 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJXO



Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/07558



APPELANTE



Madame [G] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me Kamel YAHMI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0663



INTIMEE



ASSOCIATION POUR LA GESTION DU CENTRE DE FORMATION [7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 11

ARRET DU 14 MARS 2023

(n° , 13 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/00678 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CBJXO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Décembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 18/07558

APPELANTE

Madame [G] [T]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Kamel YAHMI, avocat au barreau de PARIS, toque : E0663

INTIMEE

ASSOCIATION POUR LA GESTION DU CENTRE DE FORMATION [7]

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Emmanuel MOITIE, avocat au barreau de PARIS, toque : E0428

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 12 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre,

Madame Anne HARTMANN, Présidente de chambre,

Madame Catherine VALANTIN, Conseillère,

Greffier, lors des débats : Madame Manon FONDRIESCHI

ARRET :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Isabelle LECOQ-CARON, Présidente de chambre, et par Madame Manon FONDRIESCHI, Greffière présente lors du prononcé.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Mme [G] [T], née le 25 avril 1964, a été embauchée le 1er mars 2011 par l'association pour la gestion du centre de formation [7] (ci-après l'association [7]) , en contrat à durée indéterminée à temps plein comme responsable des formations initiales EJE ( éducateurs jeunes enfants) & ES (éducateurs spécialisés), niveau Cadre ' classe 1 ' Niveau 1 - échelon 4.

Les relations contractuelles entre les parties étaient soumises à la convention collective nationale de travail des établissements et services pour personnes inadaptées et handicapées.

En septembre 2017, M. [O], directeur général de l'association, a quitté ses fonctions et a été remplacé provisoirement par M. [S], directeur général intérimaire, délégué dans ses fonctions par l'association Sauvegarde de l'enfance, de l'adolescence et de l'adulte des Yvelines avec laquelle l'association [7] avec un projet de fusion.

En avril 2018, le projet de fusion n'ayant pas abouti, Mme [B] qui exerçait les fonctions de responsable des formations par l'apprentissage et en cours d'emploi et de responsable du pôle socio-éducatif a été promue co-directrice de l'association [7] avec M. [X] qui exerçait les fonctions de directeur administratif et financier.

Selon avenant du 26 juin 2018, Mme [T] a été nommée à compter du 1er juin 2018 aux fonctions de responsable du département recherche et développement du centre de formation [7], sous l'autorité hiérarchique de Mme [B] et de M. [X].

Le 27 juin 2018, Mme [T] a été convoquée à un entretien préalable qui s'est déroulé le 6 juillet suivant avant d'être licenciée le 13 juillet 2018 pour faute grave.

A la date du licenciement, Mme [T] avait une ancienneté de 7 ans et 4 mois et l'association occupait à titre habituel plus de 10 salariés.

Contestant la légitimité du licenciement et réclamant diverses indemnités, outre des rappels de salaires ainsi que des dommages et intérêts, Mme [T] a saisi, le 8 octobre 2018, le conseil de prud'hommes de Paris, qui par jugement rendu le 17 décembre 2019, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, a statué comme suit :

- Dit le licenciement pour cause réelle et sérieuse,

- Condamne l'association pour la gestion du centre de formation [7] à verser à Mme [T] [G] les sommes suivantes':

* 33.080,88 euros à titre d'indemnité de licenciement,

* 18.044,88 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis

* 1.804,42 euros à titre de congés payés afférents,

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation,

Rappelle qu'en vertu de l'article R1454-28 du code du travail, ces condamnations sont exécutoires de droit à titre provisoire, dans la limite maximum de neuf mois de salaire calculés sur la moyenne des trois derniers mois de salaire. Fixe cette moyenne à la somme de 4'511,05 euros,

* 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- Ordonne la remise des documents sociaux conformes à la présente décision,

- Déboute Mme [T] [G] du surplus de ses demandes,

Déboute l'association pour la gestion du centre de formation [7] de ses demandes reconventionnelles,

Condamne l'association pour la gestion du centre de formation [7] aux dépens.

Par déclaration reçue par le greffe le 20 janvier 2020, Mme [T] a interjeté appel du jugement rendu par le conseil de prud'hommes, notifié aux parties par lettre du greffe adressée aux partie le 27 décembre 2019.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 2 février 2021, Mme [T] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement rendu en première instance en ce qu'il a condamné l'Association pour la gestion du centre de formation [7] à :

* 33.080,88 € à titre d'indemnité de licenciement ;

* 18.044,88 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 804,42 euros au titre des congés payés afférents ;

* 1.000 € au titre des frais irrépétibles de 1ère instance ;

Assorti les condamnations prononcées de la capitalisation des intérêts ;

- Infirmer le jugement entreprise pour le surplus

Et, statuant à nouveau :

- Juger le licenciement de Mme [T] prononcé en date du 13 juillet 2018 comme dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

- Condamner l'Association pour la gestion du centre de formation [7] à payer :

* A titre principal, 56.472,13 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* A titre subsidiaire, 36.088,40 € à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse,

* 1.566,81 € à titre de rappel de salaire sur la période 2015 à 2018, auxquels s'ajoutent 156,88 € au titre des congés payés afférents ;

* 3.000 € au titre de l'article 700 du CPC,

- Les dépens dont distraction au profit de Me Kamel Yahmi selon les dispositions de l'article 699 du CPC.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 1er décembre 2022, l'association pour la gestion du centre de formation [7] demande à la cour de :

- Réformer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que les griefs figurant dans la lettre de licenciement relèvent « nettement de motifs d'insuffisance professionnelle et non de fautes graves », que les griefs formulés contre Mme [T] à propos de son séjour au Canada sont sans fondement, que l' absence de Mme [T] à une réunion du Comité de Direction ne peut lui être reprochée, que le dépôt par Mme [T] à l'entrée des locaux des copies de la page de couverture d'un journal comportant une mention injurieuse n'a pas été considéré comme une faute grave mais comme une faute professionnelle, que le grief formulé contre Mme [T] d'opposition systématique et d'insubordination à l'encontre de Mme [B] n'a pas été retenu comme constituant une faute grave, que le licenciement pour faute grave a été déclaré infondé et requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse, condamné l'Association pour la Gestion du Centre de Formation [7] à payer à Mme [T] 33 080,88 € à titre d'indemnité conventionnelle de licenciement, 18 044,88 € à titre d'indemnité compensatrice de préavis et 1 804,42 € à titre de congés payés afférents à ce préavis, débouté l'Association pour la Gestion du Centre de Formation [7] de sa demande reconventionnelle, condamné l'Association pour la Gestion du Centre de Formation [7] à mettre à la disposition de Mme [T] « les documents sociaux quérables conformes, bulletins de paye et certificat de travail, en ce y compris l'attestation Pôle Emploi correspondante », condamné l'Association pour la Gestion du Centre de Formation [7] à payer des intérêts légaux à compter de la date de sa convocation devant le Bureau de conciliation, condamné l'Association pour la Gestion du Centre de Formation [7] à payer 1 000 € à Mme [T] au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et condamné l'Association pour la Gestion du Centre de Formation [7] aux dépens ;

- Infirmer le jugement entrepris et déclarer que les griefs formulés contre Mme [T] au titre de son licenciement résultent de fautes graves et non d'une insuffisance professionnelle ;

- Infirmer le jugement entrepris et déclarer que Mme [T] a commis une faute grave en obtenant frauduleusement le financement d'un voyage et d'un séjour au Canada en prétextant un motif professionnel ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a été jugé que le grief constitué par l'absence de la mise à jour correcte de la base de données DOKELIO était fondé ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a qualifié ce grief d'insuffisance professionnelle et déclarer que Mme [T] a commis une faute grave en ne s'assurant pas de la mise à jour correcte de la base de données DOKELIO ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a été jugé que le grief constitué par l'absence d'établissement à bonne date des plannings des étudiants de 2ème année était fondé ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a qualifié ce grief d'insuffisance professionnelle et déclarer que Mme [T] a commis une faute grave en ne s'assurant pas de l'établissement à bonne date des plannings des étudiants de 2ème année ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que Mme [T] n'a pas commis une faute grave envers Mme [B] et les membres du Conseil d'Administration par le moyen de la diffusion d'un document insultant et déclarer que cette diffusion a caractérisé une faute grave;

- Déclarer que le licenciement de Mme [T] ne résulte pas de motifs prétendument cachés;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que l'indemnité conventionnelle de licenciement était due, et déclarer qu'en raison des fautes graves commises par Mme [T], cette indemnité ne lui est pas due ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que l'indemnité compensatrice de préavis était due, et déclarer qu'en raison des fautes graves commises par Mme [T], cette indemnité ne lui est pas due ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé qu'aucune indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse n'est due à Mme [T] ;

- A supposer par impossible qu'il soit déclaré que Mme [T] n'aurait commis aucune faute grave, déclarer que la cause de son licenciement est réelle et sérieuse et, à ce titre, faire application du barème de l'article L 1235-3 du Code du travail ;

- Confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a jugé que Mme [T] ne caractérise aucun préjudice personnel, que ce soit d'ordre médical ou financier ;

- Déclarer que l'éventuelle reconversion professionnelle de Mme [T] n'est pas un préjudice indemnisable ;

- En tout état de cause, déclarer que l'indemnité éventuellement due à Mme [T] s'élèvera à 3 mois de salaire brut ;

- En tout état de cause également, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Mme [T] de sa demande de fixation d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse représentant 12 mois de rémunération brute ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté [7] de sa demande de condamnation de Mme [T] à lui rembourser 1 900 € (soit la contrepartie de 2 763 $ Canadiens), et condamner Mme [T] à payer cette somme à [7], outre les intérêts légaux capitalisés à compter du 28 février 2018 ;

- Infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a ordonné à [7] de donner à Mme [T] les documents modifiés tels que visés à l'article L 3243-2 du code du travail, et confirmer ledit jugement en ce qu'il a débouté Mme [T] de sa demande d'astreinte ;

- Condamner Mme [T] à payer 40.599,45 € à [7], en remboursement de la somme qui lui a été payée au titre de l'exécution par provision du jugement entrepris outre les intérêts légaux capitalisés à compter de la date du jugement entrepris ;

- Condamner Mme [T] à payer 5.000 € à [7] sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La clôture a été ordonnée à l'audience fixée le 12 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le licenciement

Pour infirmation de la décision déférée, Mme [T] soutient en substance que l'employeur s'est placé sur le terrain disciplinaire ; que les fautes reprochées ne sont pas établies ; que la chronologie des faits démontre que la cause réelle du licenciement est une réorganisation institutionnelle dans le cadre de laquelle l'association a souhaité l'écarter.

L'association [7] réplique que les fautes graves reprochées à la salariée sont établies et justifient son licenciement.

La faute grave est celle qui résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise même pendant la durée du préavis.

L'employeur qui invoque la faute grave pour licencier doit en rapporter la preuve.

Il est constant que le juge a le pouvoir de requalifier la gravité de la faute reprochée au salarié en restituant aux faits leur exacte qualification juridique conformément à l'article'12 du code de procédure civile ; qu'en conséquence, si le juge ne peut ajouter d'autres faits à ceux invoqués par l'employeur dans la lettre de licenciement, lorsque celui-ci intervient pour motif disciplinaire, il doit rechercher si ces faits, à défaut de caractériser une faute grave, comme le prétend l'employeur, ne constituent pas néanmoins une cause réelle et sérieuse de licenciement.

La lettre de licenciement qui circonscrit les limites du litige est ainsi rédigée :

' Par lettre recommandée du 27 juin 2018, nous vous avons convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement qui a eu lieu le 6 juillet dernier, au cours duquel nous vous avons exposé les motifs qui nous ont amenés à envisager votre licenciement en raison de votre comportement que nous estimons fautif et préjudiciable à l'association pour la gestion du centre de formation [7] ('[7]').

Lors cette réunion, vous étiez assistée, à votre initiative, d'une personne s'étant présentée comme étant Monsieur [P] [F], qui détenait une carte avec sa photographie signée d'un directeur du ministère du travail l'autorisant à assister à ce type d'entretien et indiquant qu'il figurait sur les listes. L'entretien a débuté à 11 heures et s'est terminé à 13heures 15.

Nous vous rappelons que nous vous avons reproché les faits suivants :

i) En votre qualité de responsable du pôle Educateurs de Jeunes Enfants [EJE], vous deviez

assurer la mise à jour de la base de données Dokelio, qui a été mise en place par la Région Ile-de-France, pour y inscrire toutes les formations EJE dispensées par [7].

Vous savez que cette mise à jour est obligatoire, puisqu'elle est indispensable au recensement des Centres de formation auprès de la Région Ile-de-France, qui finance [7], et de Pôle Emploi, qui finance les études de certains candidats.

Un courriel vous avait été adressé par Madame [E] [B] le 10 octobre 2017.

Par un courriel du 26 mai 2018, Madame [B] vous a demandé d'intervenir, en vous rappelant que cette mise à jour relevait de vos fonctions de responsable de pôle.

Dans un courriel du même jour, tout en vous dispensant de lui répondre, vous l'avez accusée de ne pas avoir suivi l'inscription des étudiants sur le logiciel d'inscription au Diplôme d'Etat d'Educateurs de Jeunes Enfants (DEEJE) dénommé Odessa et mis en place par la Direction Régionale de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale, sous-entendant ainsi que Madame [B] n'effectuait pas non plus son travail, comme si cette affirmation pouvait vous exonérer de votre propre responsabilité.

De surcroît vous avez sciemment dénigré Madame [B] auprès du Conseil d'administration en prétendant qu'elle n'aurait pas effectué son travail, ce qui était faux et ce que vous ne pouviez manquer d'ignorer.

A cette occasion, vous avez par ailleurs affirmé avoir travaillé un dimanche (13 mai 2018) avec Madame [U] [M], votre secrétaire, ce qui s'est ensuite également avéré être un mensonge.

Lors d'un Comité de Direction (CODIR) du 30 mal 2013, Madame [B] a expliqué que la base de données Dokelio n'était pas à jour pour les EJE.

Vous lui avez alors transféré un courriel datant d'octobre 2017 où vous confirmiez cette absence de mise à jour, en précisant que vous demandiez à Madame [M] de faire le nécessaire.

Mais cette mise à jour n'a jamais été faite, alors qu'il vous appartenait de vous assurer que ce travail avait été réalisé, puisque Madame [M] était votre assistante. Ceci est d'autant plus vrai que Madame [M] ne pouvait effectuer seule cette mise à jour en raison d'informations pédagogiques devant être insérées dans Dokelio que vous étiez seule à détenir.

Le 26 mai 2013, Mesdames [K] [C] et [B] ont découvert par hasard que la mise à jour n'avait pas été faite. En raison de l'urgence et de l'importance de celle-ci pour [7], elles s'en sont chargées, palliant ainsi votre carence.

La conséquence pour [7] a été extrêmement négative puisque jusqu'à la date de cette mise à jour effectuée par vos collègues à votre place, [7] était réputé ne pas dispenser de formation EJE faute d'être correctement référencé.

Or, à ce jour, nous constatons qu'il manque 30 étudiants au sein de l'effectif EJE.

En réponse, vous avez pris le parti de vous défausser sur Madame [M], en exposant que vous lui auriez donné instruction de saisir les informations en cause et que son absence ultérieure aurait empêché la mise à jour de la base de données.

Il se confirme ainsi :

- que vous n'avez pas vérifié la réalisation d'un travail dont vous étiez la responsable ultime et pour lequel vous étiez la seule à détenir certaines informations indispensable, et

- qu'informée de l'absence de Madame [M], vous ne vous êtes pas préoccupée de savoir si la base de données avait été effectivement été mise à jour ou si elle devait l'être.

Nous estimons que ces carences sont des fautes graves, qu'une personne ayant votre expérience, vos responsabilités et votre situation hiérarchique n'aurait pas dû commettre.

Ces fautes ont eu une répercussion profondément négative sur l'organisation et l'image du Centre [7].

En effet, les formations EJE dispensées par [7] ont été très tardivement recensées par la Région Ile-de-France et Pole Emploi, ce qui a empêché des inscriptions d'étudiants, faute d'offrir en apparence une formation correspondant à leurs souhaits et a privé [7] d'une source de financement.

De plus, [7]. était ainsi le seul établissement d'enseignement non référencé au niveau de la Région Ile- de-France pour les EJE, ne qui est inadmissible et ce qui nuit profondément à son image de marque, alors qu'il est majoritairement financé par des fonds alloués par la Région Ile-de-France.

ii) Il a été constaté qu'au 1er juin 2018, date de mise en place de la nouvelle organisation de [7], le logiciel dans lequel doit figurer le planning des EJE de deuxième année [voie directe] n'a pas été mis à jour.

Vous deviez transmettre des informations à votre successeur, mais vous avez effectué ce transfert, au demeurant incomplet, avec plus de 15 jours de retard et de manière tellement parcellaire que la saisie est encore en cours.

En votre qualité de responsable du Pole EJE, cette mise à jour relevait de votre responsabilité.

En réponse à ce grief, vous avez affirmé que la nouvelle organisation de [7] devait être effective en septembre 2018 et que chaque année, jamais le planning n'était prêt avant le 1er juin.

Or, la nouvelle organisation était effective au 1er juin 2018, ainsi qu'en témoigne notamment la fiche de poste que vous avez signée et les informations portées à votre connaissance avant le 1er juin 2018.

Vous étiez donc parfaitement informée que la nouvelle organisation se mettrait en place le 1er juin.

De plus, le retard récurrent du planning annuel a toujours résulté de vos propres retards, et non d'une pratique de [7].

Vous avez également allégué d'un manque de personnel, qui constitue un motif tout aussi inopérant et hors sujet.

Enfin, vous avez affirmé que la saisie s'effectuait lorsque l'ensemble du planning était prêt, et non d'une semaine sur l'autre, alors que vous avez donné des instructions contraires à votre secrétariat.

Nous estimons que cette carence est une faute grave qu'une personne ayant votre expérience, vos responsabilités et votre hiérarchie n'aurait pas dû commettre, qui porte préjudice à l'organisation et au bon fonctionnement de [7].

iii) Début 2018, vous avez demandé à Monsieur [R] [S], qui dirigeait alors [7] dans le cadre d'une délégation de pouvoir temporaire, l'autorisation de participer et d'intervenir au Congrès de l'Association Francophone pour le Savoir (ACFAS) prévu les 7 et 8 mai 2018 au Québec, sur une thème concernant 'la Petite Enfance' et l'expérience de [7] sur le sujet, en indiquant que votre présence bénéficierait à la notoriété de [7].

Fort de cette assurance, Monsieur [S] vous a donné son accord pour ce déplacement tous frais payés (Avion, hôtel, etc...)

Au retour, il vous a été demandé de faire un compte rendu de votre séjour et de communiquer le texte de votre intervention. En dépit de plusieurs relances, vous n'avez jamais répondu.

Etonnés par ce silence, nous avons recherché sur internet la trace de votre intervention. A notre grande surprise, nous avons constaté que cette unique intervention a porté sur un thème n'ayant rien à voir avec l'éducation des jeunes enfants, ni avec [7].

En effet, vous avez présenté un travail d'intérêt personnel réalisé avec votre compagnon, en qualité de dramaturge, sur des pratiques théâtrales au Chili. A l'évidence, cette intervention n'a pas été improvisée sur place.

Nous en concluons que vous avez délibérément dissimulé l'objet de votre participation à ce congrès et fait supporter à [7], en toute connaissance de cause, une absence inutile (une semaine) durant laquelle vous avez été rémunérée sans fournir de prestations à [7], ainsi que des frais de déplacement et de séjour injustifiés.

Lors de notre entretien, vous avez affirmé que le véritable motif de votre intervention, tel que nous l'avons identifié en dépit de votre réticence à nous le présenter (réticence que nous comprenons beaucoup mieux désormais) aurait été présenté à Monsieur [S] et que pendant la demi-journée consacrée à la Petite Enfance, vous auriez pris de nombreux contacts.

Sauf erreur, vous n'avez jamais décrit la nature et l'intérêt de ces soi-disants contacts dont nous ne comprenons d'ailleurs pas qu'il vous ait été nécessaire de rester une semaine sur place pour les formaliser. Et vous n'avez présenté aucun écrit attestant que vous auriez préalablement décrit à Monsieur [S] le contenu de votre intervention.

Vous avez également affirmé que la présence de photos aurait rendu impossible toute publication de votre intervention sur le site internet de [7], et que votre texte aurait dû être remis en forme. Vous n'avez cependant pas expliqué en quoi des photographies auraient été nécessaires à la compréhension de votre exposé et nous constations que vous n'avez jamais remis en forme votre texte.

Vous avez ajouté que votre compte-rendu ne vous paraissait pas prioritaire, car vous aviez jugé plus utile de travailler sur les projets ERASMUS.

Ainsi, vous avez passé une semaine au Canada pour assister et participer à une demi-journée de conférence dont vous n'avez jamais rendu compte pour y effectuer soi-disant une communication intéressant [7], ce qui s'est avéré faux et vous déclarez désormais que le sujet de votre intervention était de peu d'importance.

I1 aurait été plus judicieux de mieux vous renseigner à ce propos avant de faire engager une dépense inutile par [7].

Quoi qu'il en soit, nous observons que vous avez exclusivement utilisé ce voyage pour assurer la promotion des activités de votre compagnon qui n'a pourtant jamais travaillé pour ou avec [7].

L'utilisation pour un salarié de son temps de travail à des fins autres que celles pour lesquelles il perçoit une rémunération de son employeur est non seulement une faute disciplinaire justifiant un licenciement, mais encore est susceptible d'être constitutive du délit d'abus de confiance.

En l'espèce, nous estimons que vous avez commis une faute grave en parfaite connaissance de cause (i) de l'inutilité de votre déplacement pour [7] et (II) de son utilité à des fins strictement personnelles et dépourvues de rapport avec contre contrat de travail puisqu'il s'agissait d'assurer la promotion des activités de votre compagnon.

iv) Le 31 mai 2018, pendant une réunion générale du personnel à laquelle vous deviez obligatoirement participer, comme vous le savez, vous n'avez pas jugé utile d'être présente, sans motif, ( pour mémoire, dans une autre occasion, vous aviez fait le reproche et voulu faire sanctionner l'un de vos collègues alors qu'il avait un motif d'absence).

Vous avez tenté de justifier votre absence à cette réunion au prétexte qu'à cette date, vous n'aviez pas encore accepté votre nouveau poste (dont vous aviez pourtant concouru à définir le périmètre en demandant vous en voir confier les aspects internationaux et dont vous aviez accepté le principe au cours d'une réunion antérieure du personnel).

Vous avez également affirmé que le 1er juin 2013, vous n'aviez pas encore été informée de la modification de vos fonctions, ce qui est inexact, car les transformations organisationnelles avaient été annoncées lors d'une réunion avec les membres du Conseil d'administration du 3 avril 2018.

En réalité, après cette réunion, vous avez profité de l'absence de la secrétaire d'accueil pour déposer un document bien en vue sur le meuble des boîtes aux lettres des formateurs dont le but manifeste était qu'ils le découvrent le lendemain lorsqu'ils prendraient leur courrier.

Ce document, qui est la page de couverture d'un magazine 'Causette' de septembre 2017 comportait l'accroche suivante : 'Pourquoi les cons prennent du galon ''. Or, la même après-midi, nous annoncions des promotions dans le cadre de la nouvelle organisation.

C'était un moyen que vous preniez sans doute anonyme pour déconsidérer vos collègues concernés en portant une appréciation peu flatteuse, voire insultante sur leur personne ainsi que sur la direction qui les avait promus.

Vous aviez ainsi manifestement oublié qu'il existe un système de vidéo-surveillance qui enregistre automatiquement les entrées et les sorties de l'établissement.

C'est ainsi que nous vous avons présenté l'enregistrement vidéo de votre geste, non pour vous mettre en accusation, comme vous l'avez prétendu; mais pour vous faire prendre conscience de la portée et de la gravité de votre comportement et, si vous le souhaitiez, vous donner la possibilité de fournir une explication, que vous avez été toutefois incapable de formuler.

En effet, après avoir déclaré qu'il s'agissait d'un trait d'humour (sic), vous avez prétendu avoir trouvé les documents en cause sur votre bureau et les avoir mis en évidence sur le meuble des boîtes aux lettres pour que son, propriétaire les retrouve.

Quelqu'un aurait donc intentionnellement déposé ces documents sur votre bureau (dans quel but') Ou les aurait oubliés (sic) et votre premier réflexe aurait été de les déposer à l'accueil ' Il aurait été plus simple de les jeter ou de les mettre de côté en attendant que leur prétendu propriétaire vienne vous les réclamer.

Vos explications se révèlent ainsi incohérentes, contradictoires et dépourvues de tout crédit.

En réalité, depuis que madame [B] est devenue votre supérieur hiérarchique, vous n'avez eu de cesse de contester la légitimité de sa nomination, par des propos ou des comportements destinés à manifester ouvertement votre défiance et votre mécontentement, de même qu'à la dénigrer.

La distribution des photocopies de la couverture du magazine ' Causette' est l'expression évidente de votre contestation de cette nomination, ce qui constitue une remise en cause particulièrement inadmissible, tant dans la forme que dans le fond, des choix et décisions de [7] en matière d'organisation de ses activités et de promotions professionnelles.

Ceci constitue une manifestation d'hostilité inacceptable à l'encontre de Madame [B], qui est votre supérieur hiérarchique.

Madame [B], qui nous a confirmé que votre attitude déplaisante à son égard est récurrente depuis l'annonce de sa nomination es-qualités de Directrice de [7], a illustré son propos en nous donnant des exemples de situations où vous ne répondez pas à ses demandes, ou de réponses hors sujet, nuisant ainsi au bon fonctionnement et à l'organisation de [7], en citant notamment les faits suivants :

- le 9 avril 2018, Madame [B] vous a demandé de participer à une réunion afin de configurer le logiciel destiné à insérer le planning des élèves de première année. Le même jour vous lui avez répondu en formulant des questions agressives et hors sujet ('la répartition des EJE VD en 3 groupes est donc actée ' Par qui ' Je suis déjà dessaisie de mes fonctions'').

Lorsque Madame [B] vous a répondu que c'était vous qui aviez souhaité constituer trois groupes d'étudiants, vous lui avez indiqué que vous considériez qu'il ne s'agissait que d'hypothèses de travail et que vous estimiez nécessaire de faire 'des projections d'ordre budgétaire et pédagogique avant une validation ou décision finale'.

Madame [B] vous a donc bien rappelé que cette proposition de prévision budgétaire, faite de longue date, n'avait jamais reçu de réponse et vous a demandé de vous prononcer à propos du rendez-vous destiné à paramétrer le logiciel ;

- à la suite d'un courriel du 4 mai 2018 par lequel Madame [B] vous avait demandé de trouver des dates pour organiser un rendez-vous avec les Universités, auquel vous aviez répondu de manière plus qu'imprécise, vous lui avez écrit le 10 mai 2018 en employant un ton et des propos inconvenants et vindicatifs, alors que vous saviez que Madame [B] prenait très prochainement ses fonctions de direction et qu'elle était donc concernée au premier chef par les discussions avec les universités ;

- le 25 mai 2018, à la suite de ce qui avait été décidé en CODIR, Madame [B] vous a adressé un courriel pour vous demander, selon ses propres termes ' d'organiser le tuilage avec les futurs responsables de formation'. Elle souhaitait 'trouver un temps pour rassembler l'ensemble des équipes et aider les responsables de formations à organiser le travail de rentrée d'ici la fin de l'année scolaire'. Elle vous signalait qu'il en était de même 'pour la passation sur le dossier d'accréditation avec l'Université aux responsables de formation qui ont devoir suivre cette affaires aussi'. Elle voulait se coordonner avec vous pour 'rencontrer l'équipe dans son ensemble' mais vous ne lui avez pas répondu ;

- le 25 mai 2018, Madame [B] vous a adressé un courriel pour vous demander de lui indiquer la manière dont vous envisagiez de procéder à la remise des diplômes. Vous ne lui avez pas répondu.

La distribution des photocopies de la couverture du magazine 'Causette' ainsi que votre attitude d'opposition systématique à madame [B] et de dénigrement à son encontre sont des fautes graves que tien ne peut excuser compte tenu de vos fonctions et de votre échelon hiérarchique.

Votre déception de n'avoir été ni pressentie ni choisie pour le poste qui lui a été confié, dont vous vous êtes ouverte à la vice-présidente de [7], après de qui vous avez revendiqué avoir plus d'expérience et de diplômes que Madame [B], ne vous donnait pas le droit de vous comporter comme vous l'avez fait, tant envers cette dernière que [7].

L'état d'esprit très négatif que traduisent votre attitude et vos agissements nous paraît incompatible avec ce que l'on attend d'un cadre de votre niveau et de votre expérience puisque vous comptez parmi les trois plus importants salaires de [7]. Tout au contraire, votre situation devrait vous inciter à donner un exemple positif de motivation, d'implication et d'exemplarité.

A la suite de l'entretien préalable du 6 juillet 2018 au cours duquel nous vous donné plusieurs exemples de l'insubordination et de déloyauté que nous vous reprochons, constituant autant de fautes graves, vos explications ne nous ont pas convaincues et nous vous informons que nous avons décidé de vous licencier pour fautes graves...'

L'employeur reproche ainsi à Mme [T] :

- L'absence de mise à jour de la base de données Dokelio';

- Le défaut de mise à jour du logiciel contenant le planning des étudiants éducateurs jeunes enfants de 2ème année au 1er juin 2018';

- La participation à un congrès au Canada aux frais de l'association en ayant dissimulé la nature exacte de l'intervention, qui serait sans lien avec les fonctions occupées';

- L'absence lors d'une réunion générale du personnel et insubordination prenant la forme d'une diffusion de supports photocopiés au contenu « insultant » pour des collègues';

- Le dénigrement de Mme [B] auprès du conseil d'administration, l'absence de réponses et l'attitude d'opposition systématique à des demandes de Mme [B].

Sur le 1er grief, l'employeur reproche à Mme [T] l'absence de mise à jour de la base de données Dokelio entre octobre 2017 et mai 2018. Or Mme [T] était alors 'responsable du pôle formation initiale EJE et mobilité internationale' et Mme [B] était 'responsable du pôle socio-éducatif apprentissage et situation d'emploi'. L'association n'établit pas que Mme [T] était en charge de renseigner la base de données Dokelio qui recense l'offre de formation professionnelle continue, la formation initiale et les actions d'accompagnement n'étant pas inclues comme le soutient sans être contredite Mme [T]. En tout état de cause, les échanges de courriels versés aux débats établissent que Mme [B] interrogeant Mme [T] sur le renseignement de Dokelio pour les éducateurs jeunes enfants le 11octobre 2017, celle-ci lui répondait le jour même que sa secrétaire, Mme [M] attendait une réponse de la secrétaire de Mme [B] pour y travailler ; que le 13 octobre 2017, Mme [M], secrétaire filière EJE informait Mme [T] qu'elle travaillait dans le bureau de [J] (secrétaire de Mme [B]) pour 'identification de la formation EJE sur Dokelio Pôle Emploi' ; qu'aucune difficulté n'a ensuite été relevée jusqu'en mai 2018. Dès lors, ce grief ne saurait être retenu.

Sur le 2ème grief, l'employeur n'établit nullement que la date du 1er juin 2018 était une date butoir pour élaborer les plannings des étudiants et c'est en vain qu'il se prévaut du compte rendu du CODIR du 16 mai 2018 qui n'invoque nullement cette question. En outre, les éléments du dossier révèlent que Mme [T] terminait habituellement la préparation de la rentrée dans la première quinzaine de juillet, ce dont était informé le président de l'association sans remarque en retour de sa part, qu'elle avait transmis une maquette dès le 25 mai 2018 à Mme [Y] et que le planning a été finalisé le 22 juin 2018. Dès lors ce grief ne saurait être retenu.

Sur le 3ème grief, il n'est pas contesté que Mme [T] a participé, avec l'autorisation de son employeur, au congrès organisé au Canada 'Regards croisés sur la recherche biographique en éducation, en création et en transmission culturelle', cette participation ayant d'ailleurs été évoquée au CODIR du 16 mai 2018. L'employeur n'établit nullement contrairement à ce qu'il soutient que Mme [T] devait réaliser une communication sur la petite enfance, ce qui n'est pas l'objet du congrès dont il avait parfaitement connaissance. Celui-ci avait également connaissance de ce que ce congrès était organisé par le centre de recherche [5] (Université [6]) et le réseau québécois selon trois axes de réflexion - l'éducation, la création et la transmission culturelle - et de ce que Mme [T] était également chercheur associé auprès de [5]. En outre, l'intervention de Mme [T] lors de ce congrès a été utilisée par l'association pour son dossier d'accréditation 'diplômes DEEJE-DEES' au titre des publications du corps enseignant et intervenant du centre de formation. De surcroît, Mme [T] avait proposé de prendre des jours RTT pour se rendre à ce congrès, ce qui a été refusé a posteriori. Dès lors, c'est en vain que l'association soutient que la salariée a délibérément dissimulé l'objet de sa participation à ce congrès et fait supporter au centre de formation une absence inutile durant laquelle elle a été rémunérée sans fournir de prestations, ainsi que des frais de déplacement et de séjour injustifiés. Ce grief ne sera donc pas retenu.

Sur le 4ème grief, l'association ne saurait valablement reprocher à Mme [T] de ne pas avoir assisté à la réunion du 31 mai 2018 alors que des discussions étaient en cours sur la réorganisation des services, que Mme [T] souhaitait réfléchir au nouveau poste proposé, que le 8 juin, le président de l'association accusait réception de son message d'acceptation, lui précisant qu'elle avait pris la bonne décision et qu'ils allaient faire du bon travail. En tout état de cause, le fait de ne pas assister à une réunion dans ce contexte ne caractérise pas une insubordination.

Sur le 5ème grief, Mme [T] reconnaît avoir déposé sur le meuble contenant les boîtes aux lettres des formateurs un lot de photocopies représentant la couverture du magazine 'Causette' contenant la phrase 'pourquoi les cons prennent du galon'', ce lot ayant été trouvé par la secrétaire le 1er juin 2018 et l'association ayant identifié Mme [T] le 25 juin à la suite de la consultation des vidéos de surveillance du local. Si le dépôt de ce lot avec un tel titre bien apparent, dans un contexte social tendu eu égard à la réorganisation des services en cours, de la part d'une cadre est pour le moins très maladroit, il n'en demeure pas moins que l'employeur a permis à Mme [T], après la connaissance de ces faits du 1er juin et de l'identification de son auteur le 25 juin, de signer le 26 juin 2018 l'avenant n°2 à son contrat de travail la nommant aux fonctions de responsable du département recherche et développement du centre de formation, à un poste présenté par l'association comme une promotion. Il s'ensuit que l'employeur ne peut soutenir que ce grief dont il avait parfaitement connaissance avant le 26 juin 2018, était constitutif d'une faute grave.

Sur le 6ème grief, les échanges de courriel versés aux débats ne caractérisent nullement des propos agressifs ou vindicatifs comme prétendu dans la lettre de licenciement, ni ne caractérisent un quelconque dénigrement de Mme [B] ou un refus systématique de répondre aux demandes de celle-ci. Ce grief ne sera pas davantage retenu.

Il s'ensuit que les griefs invoqués par l'association à l'encontre de Mme [T] ne sont pas établis, que ni la faute grave, ni la cause réelle et sérieuse ne sont caractérisées et qu'il convient de juger, par infirmation de la décision déférée, que le licenciement de la salariée est dépourvu de cause réelle et sérieuse.

Sur les conséquences financières

En application de la convention collective, vu les bulletins de salaire produits et l'ancienneté de la salarié, c'est à juste titre que les premiers juges ont condamné l'association [7] à Mme [T] les sommes, au demeurant non contestées, de 18.044,20 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, de 1.804,42 euros de congés payés afférents et de 33.080,88 euros d'indemnité conventionnelle de licenciement.

Sur la demande d'indemnité au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse, la salariée conteste l'application du barème prévu par l'article L.1235.3 du code du travail motifs pris que le plafonnement des indemnités empêche la réparation intégrale du préjudice subi.

Aux termes de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, la loi doit être la même pour tous, soit qu'elle protège, soit qu'elle punisse.

Les stipulations de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail, qui créent des droits dont les particuliers peuvent se prévaloir à l'encontre d'autres particuliers et qui, eu égard à l'intention exprimée des parties et à l'économie générale de la convention, ainsi qu'à son contenu et à ses termes, n'ont pas pour objet exclusif de régir les relations entre Etats et ne requièrent l'intervention d'aucun acte complémentaire, sont d'effet direct en droit interne.

Les dispositions des articles L. 1235-3, L. 1235-3-1 et L. 1235-4 du code du travail, dans leur rédaction issue de l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, qui permettent raisonnablement l'indemnisation de la perte injustifiée de l'emploi et assurent le caractère dissuasif des sommes mises à la charge de l'employeur, sont de nature à permettre le versement d'une indemnité adéquate ou une réparation considérée comme appropriée au sens de l'article 10 de la Convention n° 158 de l'Organisation internationale du travail.

En application de l'article L.1235-3 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n°2018-217 du 29 mars 2018, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. Si l'une ou l'autre des parties refuse cette réintégration, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur, dont le montant, eu égard à l'ancienneté de 7 ans de la salariée, est compris entre 3 mois et 8 mois de salaire.

A la date de la rupture, Mme [T] était âgée de 54 ans. Elle justifie avoir bénéficié des indemnités chômage jusqu'en mars 2019 et avoir retrouvé en emploi en qualité de maître de conférence à [6] pour un salaire brut de 2.469,53 euros. Les éléments médicaux versés aux débats ne démontrent pas un lien de causalité direct entre le licenciement et la dégradation de son état de santé. En conséquence, il convient d'allouer à Mme [T] la somme de 25.000 euros.

Sur les indemnités chômage

En application de l'article L. 1235-4 du code du travail dans sa version issue de la loi n°2016-1088 du 8 août 2016, dans les cas prévus aux articles L. 1132-4, L. 1134-4, L. 1144-3, L. 1152-3, L. 1153-4, L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l'employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d'indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d'office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l'instance ou n'ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

En conséquence, il convient d'ordonner le remboursement par l'association [7] des indemnités de chômage versées à Mme [T] dans la limite de 6 mois.

Sur le rappel de salaires au titre des jours de réduction du temps de travail

Il résulte de l'accord d'entreprise sur l'aménagement du temps de travail applicable au sein de l'association et non contesté que le nombre de jours de repos auquel peut prétendre un salarié est fixé à deux jours ouvrés par mois complet de travail effectif, soit au maximum 21 jours de repos supplémentaires dans l'année pour les formateurs, les responsables de pôles et le responsable de projets.

Il appartient à l'employeur, contrairement à ce qu'il soutient, de prouver qu'il a appliqué l'accord collectif et qu'il a permis à sa salariée de bénéficier des jours de RTT conformément à cet accord.

Mme [T], responsable du pôle Petite Enfance jusqu'au 1er juin 2018 devait bénéficier de 21 jours de RTT et non 18 jours comme indiqué sur la feuille 'demande de congés 2017/2018" produite par la salariée, l'employeur s'étant dispensé de produire tout élément à cet égard.

Il s'ensuit que l'association n'établissant pas qu'elle a permis à sa salariée de prendre 21 jours les trois années précédant la rupture, par infirmation de la décision déférée, il convient de la condamner à verser à Mme [T] la somme de 1.566,81 euros outre la somme de 156,68 euros de congés payés afférents.

Sur la demande reconventionnelle de l'association [7]

Pour infirmation du jugement qui l'a déboutée de sa demande de remboursement des frais de déplacements au Canada, l'association soutient que la salariée a réalisé ce voyage d'agrément sans aucun lien avec elle.

Mme [T] ne conclut pas sur ce point.

La cour a retenu que les fautes reprochées à Mme [T] n'étaient pas établies. En conséquence, c'est à juste titre que les premiers juges ont débouté l'association de sa demande de paiement des frais afférents au voyage au Canada, autorisé en toute connaissance de cause par la direction. La décision sera confirmée de ce chef.

Sur les frais irrépétibles

L'association [7] sera condamnée aux entiers dépens et devra verser à Mme [T] la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

INFIRME partiellement le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant ;

JUGE le licenciement de Mme [G] [T] dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

CONDAMNE l'association pour la gestion du centre de formation [7] à verser à Mme [G] [T] les sommes suivantes :

- 25.000 euros d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

- 1.566,81 euros de rappel de salaire au titre des jours de RTT,

- 156,68 euros de congés payés afférents,

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de réception par l'employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil des prud'hommes, les autres sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les alloue ;

ORDONNE le remboursement par l'association pour la gestion du centre de formation [7] des indemnités chômage versées à Mme [G] [T] dans la limite de 6 mois ;

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

CONDAMNE l'association pour la gestion du centre de formation [7] aux entiers dépens ;

CONDAMNE l'association pour la gestion du centre de formation [7] à verser à Mme [G] [T] la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 11
Numéro d'arrêt : 20/00678
Date de la décision : 14/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-14;20.00678 ?
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