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09/03/2023 | FRANCE | N°19/07438

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 7, 09 mars 2023, 19/07438


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7



ARRET DU 09 MARS 2023



(n° , 1 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07438 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAICZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/06065



APPELANTE



SA GECODIS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Re

présentée par Me Paola PEREZ ZARUR, avocat au barreau de PARIS



INTIME



Monsieur [N] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Myriam DUMONTANT, avocat au barreau d...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 7

ARRET DU 09 MARS 2023

(n° , 1 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07438 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAICZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/06065

APPELANTE

SA GECODIS

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Paola PEREZ ZARUR, avocat au barreau de PARIS

INTIME

Monsieur [N] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représenté par Me Myriam DUMONTANT, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 14 Décembre 2022, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Madame Bérénice HUMBOURG, Présidente de chambre

Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre

Monsieur Laurent ROULAUD, Conseiller

Greffier, lors des débats : Madame Joanna FABBY

ARRET :

- CONTRADICTOIRE,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Madame Guillemette MEUNIER, Présidente de chambre, et par Madame Marie-Charlotte BEHR, Greffière à laquelle la minute a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROC''DURE ET PR''TENTIONS DES PARTIES

M. [N] [C] de nationalité chinoise était inscrit en mastère spécialisé en marketing direct et commerce électronique au sein de l'école de commerce Skema pour la période du 2 janvier 2018 au 30 avril 2019.

Dans le cadre de cette formation, M. [C] a d'abord été engagé par la société Odaya Holding par contrat de professionalisation à durée déterminée et à temps plein, du 22 janvier 2018 au 31 janvier 2019. Ce contrat n'a pas été mis à exécution.

M. [C] a ensuite été engagé par contrat de professionalisation à durée déterminée et à temps plein, du 9 février 2018 au 31 janvier 2019, par la société Gecodis, filiale de la société Odaya Holding.

M. [D] est dirigeant des sociétés Odaya Holding et Gecodis.

Les relations contractuelles étaient soumises à la convention collective de la publicité.

La société Gecodis employait à titre habituel au moins onze salariés.

En juin 2018, M. [C] a informé son école que M. [D], dirigeant de la société Gecodis, faisant pression sur lui afin qu'il paye une partie de ses frais de scolarité, normalement à la charge de l'entreprise.

Par courrier du 16 juin 2018, la société Gecodis a notifié une mise à pied conservatoire à M. [C] pour avoir émis des courriers électronique portant de graves accusation à l'encontre de la direction de l'entreprise. Elle a également indiqué qu'une résiliation judiciaire de son contrat de professionnalisation pour faute grave était envisagée.

M. [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris aux fins d'obtenir la condamnation de la société Gecodis au paiement de diverses sommes de nature salariale et indemnitaire.

Concomitamment, la société Gecodis a saisi le conseil de prud'hommes aux fins de résiliation judiciaire du contrat de professionnalisation.

Par jugement du 20 mai 2019, le conseil de prud'hommes a :

Donné acte à la société Gecodis de ce qu'elle reconnaît devoir à M. [C] les sommes suivantes et en a ordonné le paiement en tant que de besoin :

- 8.890,92 euros à titre de salaires et rappels de salaires dus jusqu'à la fin du contrat,

- 889,09 euros à titre de congés payés afférents,

- 478,33 euros à titre de droits à congés payés acquis à la date de la rupture,

Condamné la société Gecodis à verser à M. [C] les sommes suivantes :

- 100 euros bruts à titre de rappel de salaire complémentaire de juin 2018 à janvier 2019,

- 10 euros bruts de congés payés afférents,

- 9.000 euros à titre de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

- 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonné à la société Gecodis de remettre à M. [C] les documents sociaux conformes à la décision,

Débouté M. [C] du surplus de ses demandes,

Condamné la société Gecodis aux dépens.

Le 25 juin 2019, la société Gecodis a interjeté appel du jugement.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 24 octobre 2019, la société Gecodis demande à la cour de :

La recevoir en son appel et le dire recevable,

Infirmer le jugement entrepris en son entier et statuant à nouveau de confirmer le jugement en ce qu'il l'a condamnée à verser à Monsieur [C] les sommes suivantes :

- 8.890,92 euros à titre de salaires et rappels de salaires dus jusqu'à la fin du contrat,

- 889,09 euros à titre de congés payés afférents,

- 478,33 euros à titre de droits à congés payés acquis à la date de la rupture,

- 100 euros bruts à titre de rappel de salaire complémentaire de juin 2018 à janvier 2019,

- 10 euros bruts de congés payés afférents,

Débouter M. [C] du surplus de ses demandes.

Selon ses conclusions transmises par la voie électronique le 8 janvier 2020, M. [C] demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société Gecodis au paiement des sommes suivantes :

- 8 890,92 euros à titre de salaires et rappels de salaire dus jusqu'à la fin du contrat,

- 889,09 euros au titre des congés payés afférents,

- 478,33 euros à titre de droits à congés payés acquis au jour de la rupture,

- 100 euros à titre de rappel de salaire complémentaire,

- 10 euros au titre des congés payés afférents,

Infirmer le jugement sur le surplus,

Et, statuant à nouveau,

Condamner la société Gecodis au paiement des sommes suivantes :

- 20.000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement de l'employeur à son

obligation de loyauté,

- à titre principal, 7 192,74 euros d'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé,

- à titre subsidiaire, 3 596,37 euros d'indemnité pour absence d'autorisation de travail,

En tout état de cause,

- 5 000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention des documents sociaux,

- 3 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Ordonner la remise des documents de fin de contrat conformes à la décision à intervenir, sous

astreinte de 100 euros par jour de retard et par document,

Ordonner la remise des bulletins de salaire des mois courant jusqu'à la date de la décision et conforme à la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document,

Ordonner le versement des intérêts au taux légal sur les salaires et sommes afférentes sollicités

sur le fondement des dispositions de l'article 1231-6 du Code civil à compter de la saisine de la

juridiction de céans et pour les dommages et intérêts sur le fondement des dispositions de l'article 1231-7 du Code civil à compter du jugement à intervenir,

Condamner la société aux éventuels dépens sur le fondement de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour un exposé des moyens des parties, la cour se réfère expressément aux conclusions transmises par la voie électronique.

L'instruction a été déclarée close le 8 décembre 2021.

MOTIFS :

Sur l'étendue du litige :

Au préalable, il est rappelé que les parties demandent la confirmation du jugement en ce qu'il a condamné la société Gecodis à verser à M. [C] les sommes suivantes :

- 8.890,92 euros à titre de salaires et rappels de salaires dus jusqu'à la fin du contrat,

- 889,09 euros à titre de congés payés afférents,

- 478,33 euros à titre de droits à congés payés acquis à la date de la rupture,

- 100 euros bruts à titre de rappel de salaire complémentaire de juin 2018 à janvier 2019,

- 10 euros bruts de congés payés afférents.

Par suite, le jugement est définitif de ces chefs.

En revanche, il ressort du dispositif des conclusions de la société Gecodis qu'elle sollicite l'infirmation du jugement en ce qu'il lui a ordonné de remettre à M. [C] des documents sociaux conformes.

Toutefois, la société Gecodis ne produit aucun argumentaire à cet fin. Elle sera donc déboutée de sa demande.

Sur l'exécution déloyale du contrat de travail :

M. [C] soutient que la société Gecodis a exécuté de manière déloyale son contrat de travail en :

- faisant pression sur lui afin qu'il paye une partie de ses frais de scolarité qui sont normalement à la charge de l'entreprise,

- ne payant pas les factures émises par l'école Skema au titre des frais de scolarité,

- en lui faisant débuter sa formation le 9 février 2018 alors que le contrat initial conclu avec la société Odaya Holding stipulait un début de formation le 21 janvier 2018,

- ne lui délivrant pas une formation conforme à ses engagements.

Pour l'ensemble de ces manquements, M. [C] sollicite la somme de 20.000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi et, par voie de conséquence, l'infirmation du jugement en ce qu'il ne lui a alloué que la somme de 9.000 euros à ce titre.

En défense, la société Gecodis conteste les manquements qui lui sont reprochés par le salarié et reproche à M. [C] d'avoir fait croire aux cadres de son école que M. [D], son dirigeant, avait fait pression sur lui pour obtenir le paiement d'une partie des frais de scolarité à la charge de l'entreprise. Elle indique que ces accusations sont diffamatoires et ont justifié la saisine du conseil de prud'hommes en résiliation judiciaire du contrat de travail. Elle indique également que le salarié ne démontre pas l'existence d'un préjudice à l'origine des manquements allégués.

La société Gecodis conclut ainsi au débouté de la demande indemnitaire du salarié et, par voie de conséquence, à l'infirmation du jugement entrepris sur ce point.

***

Selon l'article L. 1222-1 du code du travail, le contrat de travail est exécuté de bonne foi.

***

Au préalable, les parties s'accordent sur le fait qu'une partie des frais de scolarité de M. [C] était à la charge de la société Gecodis et que l'école Skema a ainsi émis à ce titre deux factures à l'égard de l'appelante, qui sont versées aux débats:

- l'une du 1er juin 2018 par laquelle l'école Skema a demandé à la société Gecodis de lui règler les coûts de formation de M. [C] pour la période du 19 février au 31 juillet 2018 pour un montant de 3.990 euros,

- l'autre du 19 février 2019 par laquelle l'école Skema a demandé à la société Gecodis de lui règler les coûts de formation de M. [C] pour la période du 1er août 2018 au 31 janvier 2019 pour un montant de 3.990 euros.

En premier lieu, M. [C] soutient que la société Gecodis lui a demandé de manière abusive de payer une partie de ses frais de scolarité (5.700 euros) au sein de l'école Skema d'un montant total de 14.730 euros.

Toutefois, l'intimé n'entend établir ces faits, qui sont contestés par l'employeur, que par courriers et courriels dans lesquels il les a dénoncés à son école et à l'unité territoriale de [Localité 5] et par des attestations de M. [H], responsable des achats au sein de la société Gecodis entre octobre 2017 et juin 2018 et de Mme [X], assistante d'achats au sein de la société Gecodis entre septembre 2017 et septembre 2018 dans lesquelles ceux-ci ont indiqué que M. [C] leur avait fait part des pressions de M. [D], mais sans préciser les avoir personnellement constatées.

Par suite, M. [C] n'entend établir le manquement invoqué que par des écrits reprenant ses propres déclarations, ce qui est insuffisant pour prouver la matérialité des faits reprochés à la société Gecodis qui sont contestés par celle-ci et qui ont donné lieu de la part de cette dernière à une décision de mise à pied conservatoire du 16 juin 2018 à l'encontre de M. [C] en raison de propos jugés par elle diffamatoires.

Par suite, ce premier manquement n'est pas établi.

En deuxième lieu, M. [C] expose que les deux factures émises à l'encontre de la société Gecodis par l'école Skema sont demeurées à sa charge et produit à cette fin :

- les deux factures susmentionnées précisant qu'à défaut de paiement par la société, les sommes seront dues par M. [C],

- deux courriels des 17 janvier et 19 mars 2019 par lesquels l'école Skema a notifié les factures à M. [C] en indiquant qu'elles demeuraient impayées par la société malgré relance,

- le contrat d'inscription de M. [C] au sein de l'école Skema stipulant, d'une part, qu'à défaut de prise en charge des frais de scolarité par l'entreprise ceux-ci demeuraient à la charge de l'élève et, d'autre part, qu'en cas de non-paiement total ou partiel des sommes dues à l'école Skema, celle-ci se réservait le droit de retenir le diplôme de l'élève.

Si comme l'affirme la société Gecodis, il ne ressort d'aucun élément versé aux débats que M. [C] a effectivement payé ces deux factures ou que l'école Skema a retenu son diplôme, il n'en demeure pas moins que l'intimé établit que l'école a mis à sa charge les factures non payées par la société Gecodis et que celle-ci n'allègue ni ne justifie les avoir effectivement payées.

Par suite, la cour considère que les sommes facturées à la société Gecodis ont été laissées à la charge de M. [C] alors qu'il est constant que ces sommes auraient dû être réglées par l'appelante.

Dès lors, le deuxième manquement invoqué par M. [C] est établi et son préjudice est égal au montant des deux factures demeurées impayées, soit la somme de 7.800 euros.

En troisième lieu, M. [C] reproche à la société Gecodis de ne lui avoir fait débuter sa formation que le 9 février 2018 alors que le contrat initial conclu avec la société Odaya Holding stipulait un début de formation le 21 janvier 2018.

S'il est vrai que M. [C] produit un contrat de professionalisation prenant effet le 21 janvier 2018 conclu avec la société mère de la société Gecodis, il ne ressort d'aucun élément produit que ce contrat a été transféré à cette dernière ou que l'appelante se soit engagée à l'exécuter au lieu et place de la société Odayo Holding. Par suite, compte tenu de l'effet relatif des conventions, la société Gecodis, qui n'était pas partie au contrat initial du 21 janvier 2018, n'est pas juridiquement tenue par celui-ci. Il ne peut donc lui être reproché de ne pas l'avoir exécuté.

En outre, il ressort du contrat de professionalisation conclu entre M. [C] et la société Gecodis que la date de prise d'effet de ce contrat est prévu à compter du 9 février 2018 et non du 21 janvier 2018.

Il se déduit de ce qui précède que ce troisième manquement n'est pas établi.

En quatrième et dernier lieu, M. [C] soutient que les tâches à effectuer selon le contrat de professionalisation étaient les suivantes : veille concurrentielle, analyse de marché, gestion marketplace et mise à jour de fiches produits. Il reproche à l'employeur de ne pas lui avoir confié des missions entrant dans ces domaines, puisqu'il se bornait à procéder à l'envoi manuel de commandes, au traitement du service après-vente, au traitement des retards d'expédition et des réclamations sur les 'marketplaces'.

La société Gecodis ne produit aucune défense sur ce point.

En l'espèce, contrairement aux allégations du salarié, le contrat de professionalisation conclu avec la société Gecodis ne stipule nullement les missions dévolues à M. [C] au sein de l'entreprise. En réalité, ce dernier se fonde uniquement pour les justifier sur une demande d'autorisation de travail émise par la société Odayo Holding et non par la société Gecodis, qui

mentionnent ces missions.

Par suite, M. [C] n'établit pas que les tâches à effectuer au sein la société Gecodis étaient contractuellement celles qu'il énonce dans ses conclusions. Par suite, il ne peut être reproché à l'appelante de lui avoir confié des tâches différentes de celles mentionnées dans la demande d'autorisation de travail émise par la société Odayo Holding.

Ce quatrième manquement n'est donc pas établi.

***

Il résulte de ce qui précède que seul le deuxième manquement susmentionné est établi. Celui-ci ayant causé un préjudice de 7.800 euros comme il a été dit précédemment, le jugement sera infirmé en conséquence sur le quantum, le conseil de prud'hommes ayant condamné la société Gecodis à réparer un préjudice de 9.000 euros.

Sur l'absence d'autorisation de travail :

Il est constant qu'une autorisation de travail de M. [C] de nationalité chinoise a été sollicitée et obtenue par la société Odayo Holding pour la période du 22 janvier 2018 au 31 janvier 2019 mais pas par sa filiale la société Gecodis.

M. [C] sollicite pour ces faits :

- à titre principal, une indemnité forfaitaire pour travail dissimulée d'un montant de 7.192,74 euros,

- à titre subsidiaire, une indemnité pour absence d'autorisation de travail.

En défense, la société Gecodis s'oppose à ces demandes en indiquant que M. [C] a été régulièrement déclaré par elle dans le cadre de la déclaration unique d'embauche et que les charges sociales ont également été réglées par elle.

***

En l'espèce et en premier lieu, selon l'article L. 8223-1 du code du travail, en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l'article L. 8221-3 (dissimulation d'activité) ou en commettant les faits prévus à l'article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

L'article L. 8221-5 du code du travail dispose qu'est réputé travail dissimulé par dissimulation d'emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 1221-10, relatif à la déclaration préalable à l'embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l'accomplissement de la formalité prévue à l'article L. 3243-2, relatif à la délivrance d'un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d'une convention ou d'un accord collectif d'aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie ;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l'administration fiscale en vertu des dispositions légales.

Il est constant que la dissimulation d'emploi salarié est constituée dès lors que l'employeur se soustrait intentionnellement à la déclaration préalable d'embauche ou à la remise de bulletins de salaire ou encore lorsqu'il omet sur le bulletin de paie un nombre d'heures de travail inférieur à celui réellement effectué.

Toutefois, la dissimulation d'emploi salarié prévue par ces textes n'est caractérisée que s'il est établi que l'employeur a agi de manière intentionnelle.

Il résulte de ce qui précède que l'absence d'autorisation de travail ne constitue pas un manquement justifiant le versement de l'indemnité forfaitaire pour travail dissimulé. En outre, il ressort des éléments produits que la société Gecodis a établi une déclaration préalable à l'embauche à l'égard du salarié étranger et lui a délivré des bulletins de paye. De même, il n'est pas contesté que la société Gecodis s'est acquittée de ses obligations à l'égard des organismes sociaux et fiscaux.

Par suite, la demande indemnitaire de M. [C] au titre du travail dissimulé ne peut qu'être rejetée. Le jugement sera confirmé sur ce point.

En second lieu, s'il est vrai que la demande d'autorisation de travail de M. [C] a été sollicitée par M. [D] au titre de la société Odayo Holding et non au titre de la société Gecodis, il n'en demeure pas moins que l'intimé était autorisé à travailler sur le territoire national pour la période du contrat de professionalisation conclu avec la société Gecodis, soit du 9 février 2018 au 31 janvier 2019.

De même, il n'est ni allégué ni justifié d'un éventuel préjudice lié au manquement invoqué par M. [C] à titre subsidiaire. Par suite, M. [C] sera débouté de sa demande indemnitaire. Le jugement sera confirmé en conséquence.

Sur les dommages-intérêts pour remise tardive des documents de fin de contrat :

M. [C] expose que la société Gecodis n'a pas exécuté le jugement en ce qu'il a ordonné à l'employeur de lui remettre des documents sociaux conformes à la décision. Il sollicite ainsi la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts pour remise tardive de documents.

La société Gecodis ne produit aucune défense sur ce point et n'allègue ni ne justifie avoir exécuté le jugement attaqué.

M. [C] ne justifie d'aucun préjudice résultant du retard apporté à la délivrance des documents de fin de contrat.

Par suite, M. [C] sera débouté de sa demande indemnitaire.

Toutefois, il sera fait droit à la demande de M. [C] tenant à ce qu'il soit ordonné à la société Gecodis de remettre une attestation destinée à Pôle emploi, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et des bulletins de paye conformes à l'arrêt dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document sur une période de deux mois.

Sur les demandes accessoires :

La société Gecodis qui succombe dans la présente instance, doit supporter les dépens d'appel et être condamnée à payer à M. [C] la somme de 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire et rendu en dernier ressort, mis à disposition au greffe,

INFIRME le jugement sur le quantum des dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

CONFIRME le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau du chef infirmé et y ajoutant :

CONDAMNE la société Gecodis à payer à M. [N] [C] les sommes suivantes :

- 7.800 euros de dommages-intérêts pour manquement à l'obligation d'exécution de bonne foi du contrat de travail,

- 1.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel,

ORDONNE la remise par la société Gecodis au profit M. [N] [C] d'une attestation destinée à Pôle emploi, un certificat de travail, un reçu pour solde de tout compte et des bulletins de paye conformes à l'arrêt dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document sur une période de deux mois,

DEBOUTE les parties de leurs autres demandes,

CONDAMNE la société Gecodis aux dépens d'appel,

AUTORISE Maître Myriam Dumontant à recouvrer directement les dépens d'appel, conformément à l'article 699 du code de procédure civile.

La greffière, La présidente.


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 7
Numéro d'arrêt : 19/07438
Date de la décision : 09/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-09;19.07438 ?
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