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08/03/2023 | FRANCE | N°21/02068

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 08 mars 2023, 21/02068


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 08 MARS 2023



(n° 2023/ , 5 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02068 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDIIJ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/09907





APPELANTE



Madame [N] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]
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Représentée par Me Abdoulaye CISSE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 191





INTIMÉE



ASSOCIATION AMBROISE CROIZAT

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée par M...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 08 MARS 2023

(n° 2023/ , 5 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02068 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDIIJ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 14 Janvier 2021 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/09907

APPELANTE

Madame [N] [C]

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Abdoulaye CISSE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, toque : 191

INTIMÉE

ASSOCIATION AMBROISE CROIZAT

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Emmanuel GAYAT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0028

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane THERME conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Mme [C] a été engagée par l'association Ambroise Croisat en qualité d'aide soignante, par contrat en date du 1er octobre 2004, au sein de l'établissement situé [Adresse 3] à [Localité 6]. Un contrat de travail en qualité d'infirmière-salle de réveil a ensuite été signé le 29 novembre 2004.

L'association emploie plus de dix salariés.

La convention collective de la fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés solidaires du 31 octobre 1951 est applicable.

Une sanction disciplinaire a été prononcée à l'encontre de Mme [C] le 26 décembre 2018, consistant en une mise à pied de deux jours et un changement d'affectation.

Mme [C] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 06 novembre 2019.

Par jugement du 14 janvier 2021, le conseil de prud'hommes a :

Débouté Mme [C] de ses demandes,

Débouté l'association Ambroise Croizat de sa demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Mme [C] a formé appel par acte du 19 février 2021.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 08 novembre 2022, auxquelles la cour fait expressément référence, Mme [C] demande à la cour de :

Déclarer Mme [C] recevable et bien fondée en ses demandes

En conséquence,

Infirmer le jugement en date du 14 janvier 2021 rendu par le conseil des prud'hommes de Paris,

Statuant à nouveau,

Annuler la sanction disciplinaire prononcée le 10 janvier 2019 contre Mme [C]

Condamner l'association Ambroise Croizat à verser à Mme [C] la somme de 16 690,81 euros au titre des rappels de salaires du 10 juillet 2019 à juillet 2020,

Condamner l'association Ambroise Croizat à verser à Mme [C] la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice moral

Ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir,

Condamner l'association Ambroise Croizat aux entiers dépens, ainsi qu'au paiement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 16 novembre 2022, auxquelles la cour fait expressément référence, l'association Ambroise Croizat demande à la cour de :

Confirmer le jugement entrepris,

Condamner Mme [C] à payer à l'association Ambroise Croizat la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamner aux dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 novembre 2022.

MOTIFS

Sur la sanction disciplinaire

L'article L1331-1 du code du travail dispose que constitue une sanction toute mesure, autre que les observations verbales, prise par l'employeur à la suite d'un agissement du salarié

considéré par lui comme fautif, que cette mesure soit de nature à affecter immédiatement ou non la présence du salarié dans l'entreprise, sa fonction, sa carrière ou sa rémunération.

L'article L. 1333-1 du code du travail dispose qu'en cas de litige, le conseil de prud'hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. L'employeur fournit au conseil de prud'hommes les éléments retenus pour prendre la sanction. Au vu de ces éléments et de ceux qui sont fournis par le salarié à l'appui de ses allégations, le conseil de prud'hommes forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.

L'article L.1333-2 du code du travail dispose quant à lui que le conseil de prud'hommes peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

Le lettre de sanction, en date du 26 décembre 2018, indique que Mme [C] a été sanctionnée pour plusieurs griefs :

- une insubordination caractérisée depuis de nombreux mois pour avoir refusé à plusieurs reprises d'effectuer des actes entrant dans les attributions d'un infirmière diplômée d'Etat à savoir : les tests de Guthrie, les dextros, la surveillance clinique des nouveau-nés, la surveillance des patientes accouchées, et ce malgré un rappel antérieur dans un courrier qui lui avait été remis ;

- de ne pas avoir examiné, le 19 novembre 2018, une patiente à risque hémorragique au cours des premières 24 heures malgré la demande de la cadre sage-femme d'hospitalisation ;

- le langage inacceptable et l'attitude inappropriés vis-à-vis des supérieurs hiérarchiques ou fonctionnels et des collègues, pour tenir, de manière très fréquente, des propos menaçants de représailles judiciaires envers les collègues, ou le supérieur hiérarchique ; de n'accepter aucune contradiction ou remise en cause des pratiques professionnelles ou du comportement ; placée devant des manquements professionnels et le refus persistant d'exécuter les missions, d'agresser les interlocuteurs en élevant la voix ou en hurlant dans les couloirs, parfois en présence de patientes ;

- de s'exprimer de manière grossière et inappropriée en parlant des patientes.

L'association Ambroise Croizat produit de nombreux mails adressés par différents membres du personnel soignant de l'établissement notamment les 15, 21, 24 et 25 novembre 2018. Ils font part des refus de Mme [C] de pratiquer les soins, de se conformer aux consignes données et rapportent des propos qu'elle a tenus, et établissent la réalité du comportement qui lui est reproché dans le courrier de sanction disciplinaire.

Par mail du 6 décembre 2018, le médecin du travail a été alerté des conséquences du comportement de Mme [C], le secrétaire de CE relayant que deux sages-femmes de l'établissement lui avaient signalé le danger grave et imminent de travailler à ses côtés, et ce de façon circonstanciée.

Mme [C] explique que les actes qui lui étaient demandés doivent être dispensés par une infirmière diplômée d'Etat de puéricultrice, ou par un personnel en cours de formation de ce diplôme, ce qui n'était pas son cas.

L'association Ambroise Croizat fait utilement valoir que l'article R. 4311-13 du code de la santé publique prescrit que ces soins sont dispensés en priorité par une infirmière ayant cette formation, ou qui y est inscrite, mais qu'ils peuvent également être pratiqués par une infirmière diplômée d'Etat. En outre, les consignes médicales qui n'ont pas été respectées ne se limitent pas aux seuls tests en cause, mais concernent également le suivi des patientes qui avaient accouché ainsi que le comportement général dans le service.

La sanction d'une mise à pied de deux jours sans maintien de salaire et du changement d'affectation, sur un poste d'infirmière de nuit en salle de naissances à compter du 10 janvier 2019, était justifiée par le comportement de Mme [C].

Mme [C] conteste le changement d'affectation qui a été décidé par l'employeur, faisant valoir que s'agissant d'une modification de son contrat de travail il nécessitait son accord.

L'association Ambroise Croizat explique qu'il ne s'agit pas d'une modification de son contrat de travail.

Le poste sur lequel l'employeur avait prévu d'affecter Mme [C] était un poste de nuit, ce qui nécessitait effectivement l'accord de Mme [C].

La salariée a expliqué que son état de santé n'était pas compatible avec un poste de nuit, et a ensuite été affectée sur un poste d'infirmière dont le coefficient était de 293, c'est à dire inférieur à celui de 477 dont elle bénéficiait et alors qu'elle était auparavant infirmière spécialisée.

Dans le mail du 7 janvier 2019, dans lequel Mme [C] indiquait que son état de santé ne lui permettait pas de travailler la nuit, elle n'a pas contesté le changement d'affectation et a demandé à être affecté sur un poste de jour en service ambulatoire qui était disponible. Dans son courrier réponse du 9 janvier suivant la directrice a affecté Mme [C] sur le poste d'infirmière de jour, conformément à sa demande.

C'est ainsi avec l'accord de la salariée qu'elle a été affectée sur ce poste.

La demande d'annulation de la sanction du 26 décembre 2018 doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur le rappel de salaire

Mme [C] formule une demande de rappel de salaire sur la période du 10 juillet 2019 au mois de juillet 2020.

Sur la période concernée Mme [C] était en arrêt maladie, depuis le mois de janvier 2019, et l'employeur justifie qu'il n'était tenu qu'au financement du régime de prévoyance et non au versement des prestations.

Il résulte en outre des bulletins de salaire, produits par l'employeur, que le salaire indiciaire de Mme [C] a été modifié pour être recalculé en fonction d'un coefficient 477, avec rappels des indemnités de la prévoyance sur la période revendiquée effectués aux mois d'avril et août 2020.

La demande de rappel de salaires doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts

Mme [C] fait valoir qu'elle a été changée d'affectation sans avenant, que l'employeur a essayé de la licencier, ne lui a pas versé la rémunération due et qu'elle aurait subi un harcèlement.

C'est vainement que l'association Ambroise Croizat soutient que la demande est irrecevable au motif qu'elle serait une demande nouvelle, cette demande étant mentionnée dans le jugement du conseil de prud'hommes.

Le changement d'affectation était conforme à la demande de la salariée et l'employeur a respecté ses obligations en matière de prévoyance.

L'employeur a initié une procédure de licenciement qui a abouti à une autre sanction disciplinaire en raison du résultat des votes du conseil consulté.

Mme [C] n'articule pas de fait de harcèlement subi. Elle a adressé un mail à la responsable de la structure le 25 novembre 2018 dans lequel elle fait état de difficultés à l'égard de plusieurs autres salariées, alors que dans le même temps l'employeur a été saisi par plusieurs personnes de nombreuses difficultés la concernant, qui avaient par ailleurs été relayées par les institutions du personnel.

En l'absence de faute caractérisée, la demande de dommages et intérêts doit être rejetée.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Mme [C] qui succombe supportera les dépens et sera condamnée à verser à l'association Ambroise Croizat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes en toutes ses dispositions,

CONDAMNE Mme [C] aux dépens,

CONDAMNE Mme [C] à payer à l'association Ambroise Croizat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/02068
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;21.02068 ?
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