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08/03/2023 | FRANCE | N°21/02022

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 08 mars 2023, 21/02022


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 08 MARS 2023



(n° 2023/ , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02022 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDHYZ



Décision déférée à la Cour : Arrêt du 16 Novembre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/07323





APPELANT



Monsieur [M] [F]

[Adresse 4]

[Localité

5]



Représenté par Me Ghislain DADI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0257





INTIMÉE



S.A. L'HABITAT SOCIAL FRANÇAIS

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Thomas CH...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 08 MARS 2023

(n° 2023/ , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/02022 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDHYZ

Décision déférée à la Cour : Arrêt du 16 Novembre 2020 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° 19/07323

APPELANT

Monsieur [M] [F]

[Adresse 4]

[Localité 5]

Représenté par Me Ghislain DADI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0257

INTIMÉE

S.A. L'HABITAT SOCIAL FRANÇAIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Thomas CHEVALIER, avocat au barreau de PARIS, toque : B0864

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane THERME conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

M. [F] a été engagé par la société l'Habitat Social Français par contrat du 9 avril 2018 à compter du 20 avril suivant, en qualité de gardien d'immeuble logé. Il exerçait sur cinq sites différents.

M. [F] a été convoqué à un entretien préalable à un licenciement par courrier du 29 avril 2019.

Par courrier du 16 mai 2019, l'employeur lui a notifié son licenciement pour faute grave.

M. [F] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 05 août 2019 aux fins de contester son licenciement et demander une indemnité pour exécution déloyale du contrat de travail.

Par jugement du 16 novembre 2020, le conseil de prud'hommes a :

Requalifié le licenciement pour cause réelle et sérieuse,

Déclaré irrecevables les demandes de rappel de salaire et indemnités pour travail dissimulé,

Condamné la société l'Habitat Social Français à verser à M. [F] les sommes suivantes :

- 2 115,94 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 211,59 euros au titre des congés payés afférents,

- 525,43 euros à titre d'indemnité légale de licenciement,

- 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la société l'Habitat Social Français à remettre à M. [F] les documents suivants : reçu pour solde de tout compte, certificat de travail et attestation destinée à Pôle Emploi,

Débouté M. [F] du surplus de ses demandes,

Débouté la société l'Habitat Social Français de sa demande reconventionnelle,

Condamné la société l'Habitat Social Français aux dépens de l'instance.

M. [F] a formé appel par acte du 19 février 2021.

Par conclusions déposées au greffe le 17 mai 2021 et signifiées par huissier le 27 mai 2021, auxquelles la cour fait expressément référence, M. [F] demande à la cour de :

Infirmer le jugement entrepris, dire les demandes de rappel de rappel de salaire recevables,

Fixer le salaire mensuel brut moyen de référence à la somme de 2 661,70 euros ;

Sur l'exécution du contrat de travail :

Rejeter la demande de la société l'Habitat Social Français tendant à l'irrecevabilité des demandes additionnelles de M. [F],

Condamner la société l'Habitat Social Français au paiement à M. [F] de :

Rappel de salaires 6 731,04 euros

Indemnités pour travail dissimulé15 970,20 euros

Sur la rupture, infirmer le jugement entrepris, statuant à nouveau

Requalifier le licenciement pour faute grave en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

Condamner la société l'Habitat Social Français à régler à M. [F] [G] les sommes suivantes :

Indemnité de licenciement sans cause réelle ni sérieuse

A titre principal 15.970,20 euros

A titre subsidiaire 5 323,40 euros

Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat 6 000 euros

A titre subsidiaire :

Requalifier le licenciement pour faute grave en un licenciement pour faute simple,

En conséquence,

Condamner la société l'Habitat Social Français à régler à M. [F] les sommes suivantes :

Indemnité légale de licenciement 720,88 euros

Indemnité compensatrice de préavis 5 323,40 euros

Congés payés afférents 532,34 euros

Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat 6 000 euros

En tout état de cause,

Condamner la société l'Habitat Social Français à régler à M. [F] :

Article 700 code de procédure civile 2 500 euros

Indemnité pour violation de la vie privée 3 000 euros

Débouter la société l'Habitat Social Français de ses demandes, fins et conclusions,

Ordonner la remise des documents de fin de contrat (solde de tout compte, certificat de travail et attestation Pôle Emploi) conformes au jugement à intervenir sous astreinte de 250 euros par jour de retard et par document à compter du 6ème jour suivant la notification du jugement dans la limite de 365 jours et se réserver le pouvoir de la liquider,

Dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes tandis que les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, devenu l'article 1343-2

Condamner la société l'Habitat Social Français aux dépens de l'instance.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 18 juin 2021, auxquelles la cour fait expressément référence, la société l'Habitat Social Français demande à la cour de :

In limine litis, de :

Juger que l'appel de M. [F] ne vise pas expressément les chefs du jugement qu'il entend déférer à la cour d'appel de céans ;

- En conséquence, juger que la cour n'est pas saisie par l'appel de M. [F] qui est dépourvu d'effet dévolutif et qu'aucune décision n'est déférée à la cour qui ne peut pas statuer dès lors qu'elle n'est saisie d'aucune demande.

A titre principal, de :

- Juger mal fondé l'appel principal interjeté par M. [F] ;

- Juger que le licenciement de M. [F] repose sur une cause réelle et sérieuse ;

- Juger que M. [F] n'a jamais été victime d'agissements déloyaux au sein de la société HSF ;

- Juger que les demandes de M. [F] au titre des rappels de salaire et du travail dissimulé sont irrecevables ;

- En conséquence, confirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 16 novembre 2020 (RG N°19/07323) en ce qu'il a débouté M. [F] de ses demandes relatives au licenciement sans cause réelle et sérieuse et jugé irrecevable ses demandes de rappels de salaire et de travail dissimulé ;

- Débouter M. [F] de l'ensemble de ses demandes ;

En tout état de cause, de :

- Juger recevable et fondé l'appel incident interjeté par la société HSF ;

- En conséquence, infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 16 novembre 2020 (RG N°19/07323) en ce qu'il a condamné HSF au paiement des sommes suivantes :

o 2 115,94 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

o 211,59 euros au titre des congés payés afférents ;

o 525,43 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

o 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile

- En conséquence, infirmer le jugement du conseil de prud'hommes de Paris du 16 novembre 2020 (RG N°19/07323) en ce qu'il a débouté la société HSF de sa demande reconventionnelle et l'a condamnée aux dépens ;

Et statuant à nouveau de :

In limine litis, déclarer l'exception d'incompétence matérielle soulevée par la société HSF recevable, par application de l'article 74 du code de procédure civile et bien fondée, par application de l'article L.1411-1 du code du travail concernant la demande de M. [F] au titre d'une atteinte à sa vie privée ;

- En conséquence, renvoyer M. [F] à mieux se pourvoir à l'encontre de la société HSF devant le tribunal judiciaire de Paris ;

- Juger que le licenciement de M. [F] repose sur une faute grave ;

- En conséquence, débouter M. [F] de l'ensemble de ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail et notamment de :

o 720,88 euros à titre d'indemnité légale de licenciement ;

o 5 323,40 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis ;

o 532,34 euros à titre de congés payés afférents ;

o 15 970,20 euros à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle ni sérieuse ;

- En tout état de cause, réduire la demande de M. [F] au titre de l'indemnité légale de licenciement à la somme de 566,66 euros ;

- En tout état de cause, réduire la demande de M. [F] au titre de l'indemnité compensatrice de préavis à la somme de 2 115,94 euros et celle au titre des congés payés afférents à la somme de 211,59 euros ;

- En tout état de cause, réduire la demande de M. [F] au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse en limitant le montant à une somme n'excédant pas deux mois de salaire conformément à l'article L. 1235-3 du code du travail, soit 4 231,88 euros ;

- Ordonner la compensation, à due concurrence, avec la somme de 7 033,27 euros restant due par M. [F] en exécution du jugement du 29 novembre 2019 rendu par le tribunal d'instance de Paris ;

Condamner M. [F] à payer à la société Hsf la somme de 3 000 euros pour la procédure devant le conseil de prud'hommes, outre 3 000 euros au stade de l'appel, au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 22 novembre 2022.

Par message adressé par RPVA le 23 janvier 2023, il a été demandé à M. [F] de faire parvenir son dossier de plaidoiries sous huit jours ; la demande de dépôt de dossier au greffe a été renouvelée par message RPVA du 6 février. Le dossier de l'appelant n'est pas parvenu à la cour dans le délai imparti et aucune réponse n'a été apportée aux demandes.

MOTIFS

Sur l'effet dévolutif de l'appel

En vertu de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret N° 2017-891 du 6 mai 2017, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Seul l'acte d'appel opère la dévolution des chefs critiqués du jugement.

La société l'Habitat social français fait valoir que M. [F] n'a pas expressément critiqué les chefs de jugement, mais a repris les chefs de demande qu'il avait formés devant le conseil de prud'hommes, tant dans la déclaration d'appel que dans ses premières conclusions.

M. [F] n'a pas formulé d'observation sur la question de l'effet dévolutif de son acte d'appel.

L'acte d'appel du 19 février 2021 est ainsi rédigé :

'Objet/Portée de l'appel : Appel limité aux chefs de jugement expressément critiqués appel en ce que le conseil a débouté M. [F] des demandes suivantes : Fixer le salaire mensuel brut moyen de référence à la somme de 2 661,70 euros ; Sur l'exécution du contrat de travail : Rejeter la demande de la société l'Habitat Social Français tendant à l'irrecevabilité des demandes additionnelles de M. [F] Condamner la société l'Habitat Social Français au paiement à M. [F] de : Rappel de salaires 6 731,04 euros Indemnités pour travail dissimulé 15 970,20 euros Sur la rupture du contrat de travail : A titre principal : Requalifier le licenciement pour faute grave en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, En conséquence, Condamner la société l'Habitat Social Français à régler à M. [F] les sommes suivantes: Indemnité de licenciement sans cause réelle ni sérieuse A titre principal 15 970,20 euros A titre subsidiaire 5 323,40 euros Dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat 6 000 euros ' En tout état de cause, Condamner la société l'Habitat Social Français à régler à M. [F] : Article 700 code de procédure civile 2 500 euros Indemnité pour violation de la vie privée 3 000 euros Débouter la société l'Habitat Social Français de ses demandes, fins et conclusions Ordonner la remise des documents de fin de contrat (solde de tout compte, certificat de travail et attestation Pôle Emploi) conformes au jugement à intervenir sous astreinte de 250 euros par jour de retard et par document à compter du 6ème jour suivant la notification du jugement dans la limite de 365 jours et vous réserver le pouvoir de la liquider, Ordonner l'exécution provisoire en application de l'article 515 du code de procédure civile, Dire que les créances salariales porteront intérêts au taux légal à compter de la réception par l'employeur de sa convocation devant le conseil de prud'hommes tandis que les créances indemnitaires porteront intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant, la capitalisation des intérêts étant ordonnée conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, devenu l'article 1343-2 Condamner la société l'Habitat Social Français aux dépens d'instance.'

Alors que le dispositif du conseil de prud'hommes est constitué de plusieurs chefs différents, notamment une irrecevabilité, une requalification, une condamnation au paiement de différentes sommes et un débouté, M. [F] a seulement indiqué former appel en ce qu'il avait été débouté des demandes en reprenant le dispositif de ses conclusions de première instance, et cela alors qu'il ne correspond pas aux différents chefs du jugement rendu.

L'appelant n'a pas indiqué les chefs de jugement expressément critiqués et son acte d'appel est en conséquence dépourvu d'effet dévolutif.

La cour demeure saisie de l'appel incident de la société l'Habitat Social Français.

La cour n'étant pas saisie de l'appel de M. [F], l'exception d'incompétence matérielle soulevée par la société l'Habitat Social Français est sans objet, le conseil de prud'hommes ayant débouté le salarié.

Sur le licenciement

La faute grave résulte d'un fait ou d'un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d'une importance telle qu'elle rend impossible le maintien du salarié dans l'entreprise. Elle implique une réaction de l'employeur dans un délai bref à compter de la connaissance des faits reprochés au salarié.

En application des articles L1232-1 et L 1235-1 du code du travail dans leur rédaction applicable à l'espèce, l'administration de la preuve du caractère réel et donc existant des faits reprochés et de leur importance suffisante pour nuire au bon fonctionnement de l'entreprise et justifier le licenciement du salarié, n'incombe pas spécialement à l'une ou l'autre des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et, au besoin, après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles. Si un doute persiste, il profite au salarié.

En revanche la charge de la preuve de la qualification de faute grave des faits reprochés qui est celle correspondant à un fait ou un ensemble de faits s'analysant comme un manquement du salarié à ses obligations professionnelles rendant impossible le maintien du salarié dans

l'entreprise et le privant de tout droit au titre d'un préavis ou d'une indemnité de licenciement, pèse sur l'employeur.

En application des articles L1232-1 et L1235-3 du code du travail dans leur rédaction applicable à l'espèce, la cour, à qui il appartient de qualifier les faits invoqués et qui constate l'absence de faute grave, doit vérifier s'ils ne sont pas tout au moins constitutifs d'une faute de nature à conférer une cause réelle et sérieuse au licenciement.

La lettre de licenciement indique : 'En date du 1er avril 2019, Mme [B] vous a transmis par courrier électronique un message important à diffuser auprès de nos locataires du [Adresse 2]. L'objet de ce message était de les informer et de les rassurer au sujet de l'installation d'une antenne-relais FREE sur le toit de l'immeuble. Après avoir reçu le 23 avril un appel d'un locataire l'interrogeant sur cette installation, votre responsable vous a demandé si le message avait bien été diffusé. Vous avez alors indiqué l'avoir affiché le 18 avril 2019, soit plus de deux semaines après ses instructions. Ce manquement, constitutif d'un défaut d'information auprès de nos locataires est très préjudiciable dans la mesure où il nuit à l'image de la société et à nos relations avec la clientèle.

Depuis votre arrivée en 2018, vous n'avez jamais ouvert d'affaires sur ''[E]'', notre outil de gestion des réclamations, à l'exception d'une fois pour votre cas personnel qui n'était pas de surcroît de notre ressort. Pourtant, à de multiples reprises (réunions de gardiens, instructions de votre hiérarchie...), il vous a été rappelé qu'il fallait ouvrir un dossier dans l'outil à chaque réclamation de locataire. Suite à un rappel de votre responsable, vous avez prétendu avoir reçu l'ordre de ne rien faire alors que la consigne était de ne pas fermer d'affaire vous-même. Ne pas appliquer la procédure alourdit, complexifie la gestion et le suivi des réclamations par vos collègues et allonge les temps de traitements. De plus, elle est identique à la RIVP, notre maison-mère et votre ancien employeur, ce qui rend votre attitude d'autant plus incompréhensible. Ces manquements répétés nous mettent en difficulté au regard de notre politique d'amélioration de la qualité de services et nuisent également à notre image.

Enfin, l'état anormalement sale des parties communes a été constaté par huissier les 15 et 17

avril 2019 sur les sites ''[T]'', ''Capitaine [U]'' et ''Grenelle'' dont vous assurez l'entretien. En particulier sur le site ''[U]'' alors même que vous devez effectuer chaque mercredi, selon le planning établi par vous-même, le lavage des paliers, des escaliers extérieurs du bâtiment B et les parties communes du bâtiment, l'huissier a constaté entre autres lors de sa visite du 17 avril dernier : Hall de l'immeuble : porte en aluminium vitrée sale et poussiéreuse, carrelage au sol poussiéreux, tapis devant la porte d'entrée sale, 8 spots lumineux défectueux sur 22 (et ce malgré votre habilitation électrique) etc. - Cour extérieure : tapis sale devant la porte, la cours est sale, présence de nombreuses fientes de pigeons, déchets et mégots de cigarette etc. Bâtiment A : escalier extérieur sale, interrupteur sale et poussiéreux, main courante sale, porte d'accès au 1 er étage sale, nombreuses traces sur les murs etc. Bâtiment B : vitre et poignée de la porte en aluminium sales, carrelage du hall poussiéreux, sol et interrupteur sales, plinthes sales, vitres et rebordes des fenêtres sont sales et poussiéreux tout comme la grille d'aération etc.

Les observations sont également du même type sur les deux autres sites visités par l'huissier, constats à l'appui.

Nous tenons à vous informer que nous considérons ces griefs comme fautifs au regard de votre contrat de travail et que votre maintien dans l'entreprise s'avère impossible compte tenu de la gravité des faits reprochés.

En conséquence, nous sommes au regret de vous signifier, par la présente votre licenciement pour faute grave.'

La société l'Habitat Social Français produit l'échange de mails dans lequel le 1er avril 2019 il a été demandé à M. [F] d'afficher un message à l'attention des locataires, relatif à l'installation d'une antenne relais Free sur le toit d'un immeuble. Relancé sur cette tâche

le 23 avril, M. [F] a indiqué l'avoir fait le 18 avril. La demande initiale était explicite, cependant sans comporter d'indicateur d'urgence.

Le 1er avril 2019, il a été rappelé à M. [F] qu'il devait renseigner les demandes sur un logiciel [E], lui indiquant que le concernant aucune opération n'y avait été enregistrée. M. [F] a répondu le jour-même ne plus le faire en raison d'un ordre en ce sens qu'il aurait reçu. L'employeur démontre par plusieurs comptes rendu de réunion, auxquelles le salarié assistait, que la consigne existait et que la préconisation qui avait été faite était d'une nature différente : celle de ne pas fermer soi-même les dossiers des demandes d'intervention. Quelques jours plus tard, le 15 avril 2019, M. [F] a adressé une demande d'intervention par mail, et non par le logiciel [E], en méconnaissance de la consigne qui lui avait été rappelée.

L'état des parties communes des trois immeubles mentionnés dans la lettre de licenciement est établi par le procès-verbal de constat d'huissier du 15 avril et les deux procès-verbaux du 17 avril 2019.

La société l'Habitat Social Français établit la réalité des griefs mentionnés dans la lettre de licenciement. Ils démontrent les différents manquements professionnels reprochés à M. [F], qui ont persisté malgré rappel. Pour autant, le salarié n'avait pas fait l'objet d'une précédente sanction, l'employeur n'a pas réagi immédiatement et aucune mesure n'a été prise par l'employeur pendant le temps de la procédure disciplinaire. S'ils justifiaient la rupture du contrat de travail, ils n'étaient pas d'une gravité qui rendait impossible le maintien du salarié dans l'entreprise.

La faute grave n'est pas caractérisée et le licenciement doit être requalifié en licenciement pour cause réelle et sérieuse.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les conséquences financières

L'ancienneté de M. [F] étant inférieure à deux années, la durée du préavis de M. [F] était d'un mois. Selon les bulletins de paie produits, M. [F] aurait perçu un salaire de 2 115,94 euros s'il avait travaillé pendant le préavis. La société l'Habitat Social Français sera condamnée au paiement de cette somme et de celle de 211,59 euros au titre des congés payés afférents.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

L'ancienneté de M. [F] était d'une année révolue au moment du licenciement. Le salaire moyen des trois derniers mois, plus favorable, était de 2 115,94 euros. L'indemnité de licenciement doit être fixée à la somme de 528,98 euros.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la compensation

La société l'Habitat Social Français demande que la compensation soit ordonnée entre les sommes dues à M. [F] et celles auxquelles il a été condamné à son profit par le tribunal d'instance. Elle produit une ordonnance rendue en référé le 29 novembre 2019 par le tribunal d'instance de Paris condamnant M. [F] à lui verser la somme de 1 026 euros à titre d'indemnité d'occupation échue et à une indemnité mensuelle provisionnelle de 700 euros.

Cette décision est exécutoire de droit et il y a lieu d'ordonner la compensation des montants qui y sont indiqués avec les sommes dues au salarié, dans les limites de l'article L.3251-3 du code du travail.

Sur les dépens et frais irrépétibles

M. [F] supportera les dépens. Il n'y a pas lieu d'allouer d'indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile. Le jugement qui a alloué une somme à M. [F] à ce titre sera infirmé de ce chef, et il sera confirmé en ce qu'il a débouté la société l'Habitat Social Français de sa demande.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

CONSTATE que la déclaration d'appel formée par M. [F] n'a pas d'effet dévolutif,

Statuant sur l'appel incident,

CONFIRME le jugement du conseil de prud'hommes en ce qu'il a requalifié le licenciement pour faute grave en licenciement pour cause réelle et sérieuse, a rejeté la demande d'indemnité pour frais irrépétibles de la société l'Habitat Social Français et l'infirme pour le surplus des chefs contestés par l'intimée,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,

CONDAMNE la société l'Habitat Social Français à payer à M. [F] les sommes suivantes :

- 2 115,94 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis et 211,59 euros au titre des congés payés afférents,

- 528,98 euros au titre de l'indemnité de licenciement,

ORDONNE la compensation entre ces sommes et celles dues entre les parties en exécution de l'ordonnance de référé rendue par le tribunal d'instance de Paris le 29 novembre 2019 dans la limite de l'article L.3251-3 du code du travail,

CONDAMNE M. [F] aux dépens,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 21/02022
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;21.02022 ?
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