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08/03/2023 | FRANCE | N°20/04031

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 08 mars 2023, 20/04031


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6



ARRET DU 08 MARS 2023



(n° 2023/ , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04031 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB7RZ



Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F18/08817





APPELANTE



SA MASTRAD

[Adresse 1]

[Localité 3]



Représentée par Me Olga OBERSON, avocat au barreau de PARIS, toque : B0348





INTIMÉE



Madame [S] [E]

[Adresse 2]

[Localité 4]



Représentée par Me François VACCARO, avocat au...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 6

ARRET DU 08 MARS 2023

(n° 2023/ , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 20/04031 - N° Portalis 35L7-V-B7E-CB7RZ

Décision déférée à la Cour : Jugement du 07 Novembre 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F18/08817

APPELANTE

SA MASTRAD

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Olga OBERSON, avocat au barreau de PARIS, toque : B0348

INTIMÉE

Madame [S] [E]

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me François VACCARO, avocat au barreau de TOURS, toque : 54

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 23 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant Monsieur Stéphane THERME conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats

ARRÊT :

- contradictoire,

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du Code de procédure civile,

- signé par Madame Christine DA LUZ, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :

Mme [E] a exercé pour la société Mastrad SA et pour sa filiale, la société Mastrad Hong Kong Ltd, ci après Mastrad HK, dans le cadre de plusieurs contrats. Le 21 avril 2009, elle a démissionné du contrat de travail à durée indéterminée conclu avec la société Mastrad SA le 21 septembre 2007.

Elle a démissionné le 13 juillet 2012 du contrat de travail conclu le 30 juin 2011 avec la société Mastrad HK.

Mme [E] a été engagée par la société Mastrad SA le 3 septembre 2012, dans le cadre d'un contrat à durée indéterminée, au poste de responsable administration des ventes export.

Mme [E] a démissionné de son poste par courrier du 22 mai 2017.

La société Mastrad SA a pris acte de la démission de Mme [E] par mail du 22 mai 2017 et a accepté la réduction de la durée de son préavis au 30 juin 2017.

Mme [E] a ensuite exercé pour la société Mastrad HK à compter du 1er juillet 2017.

Le 20 juin 2018, la société Mastrad HK a mis fin au contrat de travail de Mme [E].

Mme [E] a saisi le conseil de prud'hommes de Paris le 21 novembre 2018.

Par jugement du 7 novembre 2019, le conseil de prud'hommes a :

- dit la prescription non recevable,

- condamné la société Mastrad SA à payer à Mme [E] les sommes suivantes :

. au titre du préavis 10 602 euros

. au titre des congés payés afférents 299,40 euros

. indemnité légale de licenciement 6 931,53 euros

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la partie défenderesse de la convocation devant le bureau de conciliation,

. au titre du travail dissimulé 21 206,40 euros

. indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 21 206,40 euros

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de prononcé du jugement,

. article 700 du code de procédure civile 1 000 euros

- Ordonné à la société Mastrad SA la remise des documents sociaux conformes à la décision et les bulletins de salaire,

- Débouté Mme [E] du surplus de ses demandes

- Débouté la société Mastrad SA de sa demande reconventionnelle,

- Condamné la société Mastrad SA aux dépens.

La société Mastrad SA a formé un appel partiel par acte du 06 juillet 2020, portant sur les chefs de condamnation à son encontre.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 18 mars 2021, auxquelles la cour fait expressément référence, la société Mastrad SA demande à la cour de :

Infirmer le jugement en ce qu'il a « dit la prescription non recevable »,

Déclarer irrecevable l'action de Mme [E] et ses demandes tendant à faire constater la poursuite du contrat à durée indéterminée Mastrad SA, conséquence de la nullité ou l'inexistence de la démission,

Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a condamné la société Mastrad SA à payer à Mme [E] :

- 10 602 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis,

- 299,40 euros de congés payés afférents,

- 6 931,53 euros d'indemnité légale de licenciement

- 21 206,40 euros d'indemnité de travail dissimulé

- 21 206,40 euros d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse

- 1 000 euros d'article 700 du code de procédure civile,

Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a ordonné la remise des documents sociaux conformes à la décision et les bulletins de salaire,

Infirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté la société Mastrad SA de sa demande reconventionnelle,

Confirmer le jugement dont appel en ce qu'il a débouté Mme [E] de ses demandes d'indemnité de requalification de la poursuite du contrat de travail, de dommages intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, de préjudice financier pour absence de prise en charge assurance maladie, de remboursement des billets d'avion,

Débouter Mme [E] de l'intégralité de ses demandes,

Déclarer irrecevable la demande nouvelle de Mme [E] au titre des « congés payés pendant le séjour à Hong Kong »,

Condamner Mme [E] à payer à la société Mastrad SA la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

La condamner aux entiers dépens.

Par conclusions déposées au greffe et notifiées le 17 juin 2021, auxquelles la cour fait expressément référence, la société Mastrad SA demande à la cour de :

Confirmer le jugement en ce qu'il a :

Constaté la poursuite du contrat de travail à durée indéterminée de Mme [E] avec la société Mastrad SA ;

Condamné la société Mastrad SA pour travail dissimulé ;

Condamné la société Mastrad SA pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Condamné la société Mastrad SA à verser à Mme [E] les sommes suivantes :

- 6 931,53 euros au titre de l'indemnité légale de licenciement ;

- 10 602 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis ;

- 1 060,20 euros de congés payés afférents ;

Avec intérêts au taux légal à compter de la date de réception par la société de la convocation devant le bureau de conciliation ;

- 21 206,4 euros de dommages intérêts pour travail dissimulé ;

Le réformer sur le quantum au titre des congés payés en ce qu'il a condamné la société à la somme de 299, 40 euros au titre des congés payés

En conséquence

Condamner la société à la somme de 3 647,60 euros au titre des congés payés ;

Ordonner que les intérêts capitalisés courent à compter de la saisine du conseil de prud'hommes ;

Réformer le jugement sur le quantum au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

En conséquence,

Condamner la société à 28 272 euros bruts à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Confirmer le jugement en ce qu'il a condamné la société à 1 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

Y ajouter,

Condamner la société Mastrad SA à payer la somme de 500 euros au titre d'un aller-retour [Localité 5] Hong Kong.

Condamner la société Mastrad SA à verser à Mme [E] 2 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens,

Confirmer le jugement en ce qu'il a ordonné les documents sociaux conformes à la décision et les bulletins de salaire.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 28 juin 2022.

Par arrêt du 19 octobre 2022, la cour a ordonné une médiation, avec rappel de l'affaire à l'audience du 23 janvier 2023.

Le médiateur a indiqué par message du 29 novembre 2022 que les parties n'étaient pas parvenues à un accord.

A l'audience du 23 janvier 2023, l'affaire a été mise en délibéré au 08 mars 2023.

MOTIFS

Sur la prescription de l'action en reconnaissance de l'existence d'un contrat de travail

La société Mastrad SA fait valoir que Mme [E] n'est plus recevable à agir, la rupture du contrat de travail ayant eu lieu le 22 mai 2017.

Si dans la discussion de ses conclusions Mme [E] expose un moyen de nullité de sa démission, elle ne formule pas de demande à ce titre dans son dispositif. Elle soutient que son contrat de travail s'est en réalité poursuivi avec la société Mastrad SA et que la rupture est du 20 juin 2018.

L'article L. 1471-1 du code du travail dispose que toute action portant sur la rupture du contrat de travail se prescrit dans le délai de douze mois à compter de la notification de la rupture.

L'action de Mme [E] est fondée sur l'existence même du contrat de travail avec la société Mastrad SA, qui n'est pas soumise à ce délai de prescription. Elle a été intentée avant l'expiration du délai d'une année après la rupture du dernier contrat de travail avec Mastrad HK, de sorte qu'elle n'est pas atteinte par la prescription et son action est recevable.

Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur la recevabilité de la demande au titre des congés payés pendant le séjour à Hong Kong

La société Mastrad SA fait valoir que cette demande est irrecevable pour être nouvelle en appel.

Mme [E] expose que la demande n'est pas nouvelle, étant la modification du quantum de la somme de 299,40 euros qui a été allouée par le conseil de prud'hommes, qu'elle tend aux mêmes fins que celle qui était présentée en première instance dont le montant a été modifié.

La demande formée à hauteur d'appel porte sur les congés payés au cours de la totalité de la période de travail à Hong Kong, alors que la demande formée devant le conseil de prud'hommes ne concernait expressément que les congés payés afférents au préavis, prétention à laquelle il a été intégralement fait droit.

La demande à hauteur d'appel ne tend pas aux mêmes fins que celle formée en première instance et est en conséquence irrecevable, pour être nouvelle en appel.

Il sera ajouté au jugement entrepris.

Sur la poursuite du contrat de travail

Mme [E] fait valoir qu'elle a continué à travailler pour la société Mastrad SA postérieurement à sa démission.

Il incombe à celui qui invoque l'existence d'un contrat de travail d'en rapporter la preuve.

Mme [E] a démissionné le 22 mai 2017, mettant fin à son contrat de travail le 30 juin 2017.

La société Mastrad SA a adressé à Mme [E] son certificat de travail en date du 30 juin 2017, mentionnant une fin de contrat à cette date, et un reçu pour solde de tout compte du 10 juillet 2017 signé par l'intimée.

Mme [E] ne produit pas de contrat de travail conclu avec la société Mastrad SA pour la période postérieure.

Préalablement à sa démission, le 31 mars 2017, Mme [E] a adressé un mail à M. [Y], directeur général délégué de la société Mastrad SA, dans lequel elle formule différentes demandes pour son 'transfert dans le bureau de HK'. Le responsable y répond favorablement, tout en précisant les modalités de celles-ci, et indique qu'il n'y aurait pas d'ancienneté à HK, que l'ancienneté serait reprise en cas de retour en France avec cumul de l'ancienneté à HK. Il ajoute 'vous serez sur un contrat SA jusqu'à fin juin... au 1er juillet vous passerez sur un nouveau contrat à HG et serez basée localement.'

Ces éléments ne démontrent pas la poursuite d'un contrat de travail, mais bien une rupture de celui existant avec la société Mastrad SA, suivie d'une nouvelle relation débutant avec la filiale.

La poursuite des relations a été envisagée, sans engagement des parties en ce sens, et le projet de convention tripartite élaboré au début de l'année 2018 avec Mme [E] n'a pas été signé.

Les bulletins de paie à compter du mois de juillet 2017 ont été établis au nom de la société Mastrad HK, de même que les documents de rupture, notamment la lettre du 20 juin 2018 mettant fin au contrat de travail.

Mme [E] expose qu'elle a continué à recevoir des ordres de la société Mastrad SA et qu'elle est demeurée dans un lien de subordination. Elle produit plusieurs mails échangés avec M. [Y] concernant des consignes et une demande de congés.

L'appelante fait utilement valoir que M. [Y] était également directeur de la société Mastrad HK, ce dont elle justifie par la production des statuts. Il avait signé en cette qualité les documents relatifs à la précédente relation de travail de Mme [E] avec la filiale ; son nom est également indiqué en cette qualité sur les documents concernant Mme [E], les bulletin de paie et la lettre de rupture. Les échanges avec cette personne ne démontrent pas un lien de subordination avec la société Mastrad SA.

L'appelante justifie en outre que les autorisations d'absence étaient accordées par Mastrad HK, et non par la société Mastrad SA qui demandait à être informée de celles-ci pour la prise en compte dans l'établissement des documents.

Mme [E] ne rapporte pas la preuve qu'elle exerçait sous la subordination de la société Mastrad SA et qu'elle était ainsi demeurée salariée de cette société.

Mme [E] doit être déboutée de l'intégralité de ses demandes formées à l'encontre de la société Mastrad SA.

Le jugement sera infirmé de ces chefs.

Sur les dépens et frais irrépétibles

Mme [E] qui succombe supportera les dépens et sera condamnée à verser à la société Mastrad la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

INFIRME le jugement du conseil de prud'hommes, sauf en ce qu'il dit l'action de Mme [E] recevable et l'a déboutée du surplus de ses demandes,

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

DIT irrecevable la demande formée par Mme [E] au titre des congés payés,

DÉBOUTE Mme [E] de ses demandes,

CONDAMNE Mme [E] aux dépens,

CONDAMNE Mme [E] à payer à la société Mastrad la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 6
Numéro d'arrêt : 20/04031
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;20.04031 ?
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