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08/03/2023 | FRANCE | N°19/15780

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 2, 08 mars 2023, 19/15780


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2



ARRET DU 08 MARS 2023



(n° , 10 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/15780 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAP4D



Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Juin 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 16/12377





APPELANT



SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 10] représenté par

son syndic la Société GESTION TRANSACTIONS IMMOBILIERES exerçant sous l'enseigne GTI, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 340 370 774

C/O Société GESTION TRANSACTIONS IMM...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 4 - Chambre 2

ARRET DU 08 MARS 2023

(n° , 10 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/15780 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAP4D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 Juin 2019 -Tribunal de Grande Instance de Paris - RG n° 16/12377

APPELANT

SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES [Adresse 10] représenté par son syndic la Société GESTION TRANSACTIONS IMMOBILIERES exerçant sous l'enseigne GTI, immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 340 370 774

C/O Société GESTION TRANSACTIONS IMMOBILIERES

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représenté par Me Christofer CLAUDE et plaidant par Me Axelle LASSERRE - SELAS REALYZE - avocat au barreau de PARIS, toque : R0175

INTIME

Monsieur [R] [N]

né le 07 décembre 1951 à [Localité 9] (45)

[Adresse 3]

[Adresse 1])

Représenté par Me Marie JANET de la SCP BLUMBERG & JANET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : G0249

ayant pour avocat plaidant : Me Jean Marc TALAU, avocat au barreau d'ORLEANS

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 05 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

M. Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre

Mme Muriel PAGE, Conseillère

Mme Nathalie BRET, Conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Dominique CARMENT

ARRET :

- CONTRADICTOIRE

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-Loup CARRIERE, Président de Chambre, et par Dominique CARMENT, Greffière présente lors du prononcé.

* * * * * * * * * *

FAITS & PROCÉDURE

M. [R] [N] est propriétaire depuis le 6 juillet 2006 des lots n° 124 (un appartement au rez de chaussé donnant sur une courette) et 151 (une cave en sous-sol) de l'état descriptif de division d'un immeuble régi par le statut de la copropriété des immeubles bâtis situé [Adresse 10].

Le syndic a convoqué l'assemblée générale des copropriétaires pour le 19 mai 2016, avec à l'ordre du jour le point n° 19 libellé de la façon suivante :

'19° Information sur les parties communes de l'immeuble à rez-de-chaussée (Sans vote)

PJ : Constat d'huissier du 14/03/2016 de la SCP Proust et Goury-Laffont

Le syndic indique le bon état de conservation et d'entretien par Mme [L] des parties communes ainsi que le respect du règlement de copropriété démontrant aucune occupation des parties communes à rez-de-chaussée de la copropriété'.

Le procès verbal de l'assemblée générale du 19 mai 2016 mentionne :

'19° Information sur les parties communes de l'immeuble à rez-de-chaussée (article 24)

Constat d'huissier par la SCP Proust et Goury-Laffont

Le syndic indique le bon état de conservation et d'entretien par Mme [L] des parties communes ainsi que le respect du règlement de copropriété démontrant aucune occupation des parties communes à rez-de-chaussée de la copropriété.

Ont voté pour : 7.596 /7.596 tantièmes

Ont voté contre : néant

Se sont abstenus : néant

En vertu de quoi cette résolution est adoptée à l'unanimité'.

Par acte du 1er août 2016, M. [R] [N] a assigné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 10] pour demander au tribunal, essentiellement, de :

- dire que la résolution n°19 de l'assemblé générale du 19 mai 2016 n'est pas une décision, et enjoindre en conséquence le syndicat des copropriétaires de supprimer toute mention d'un vote dans le procès-verbal et de l'affirmation de toute inoccupation de la courette accessible par l'appartement de rez-de-chaussée lui appartenant,

- subsidiairement, annuler ladite résolution n°19,

- juger que son lot bénéficie d'un droit de jouissance privatif de la courette attenante à

l'appartement, à raison d'une occupation privative de plus de trente ans, continue, paisible, publique et non équivoque,

- dire que le jugement à intervenir sera publié à la diligence du requérant au fichier immobilier du lieu de situation de l'immeuble,

- ordonner aux frais du syndicat la rectification du plan du rez-de chaussée du bâtiment B établi par M. [B] dans le cadre du rapport d'expertise judiciaire de Mme [U] [E] en date du 21 mars 2016, aux fins de rétablir le marquage de l'accès direct entre l'appartement et la courette attenante,

- condamner le syndicat des copropriétaires aux dépens, ainsi qu'à lui payer la somme de 6.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble du [Adresse 10] s'est opposé à ces prétentions et a demandé au tribunal, essentiellement, de :

sur la contestation de l'information contenue au point n° 19 du procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires :

- constater qu'il s'agissait d'une erreur de plume et qu'une fois informé le syndic a tout de suite réagi en écrivant à M. [N] qu'il s'agissait d'une erreur,

- rappeler que seules les résolutions peuvent faire l'objet d'une annulation,

- rappeler qu'un procès-verbal d'assemblée générale ne peut être rectifié une fois signé,

- débouter M. [N] de sa demande de rectification formulée à titre principal et de sa demande de nullité formulée à titre subsidiaire,

sur la demande d'octroi d'un droit de jouissance privatif sur la courette du bâtiment B :

- juger que M. [N] ne rapporte pas la preuve du caractère continu, paisible et non équivoque pendant trente ans du droit de jouissance allégué,

- juger que les conditions de la prescription abrégée de l'article 2272 du code civil ne sont pas réunies, M. [N] ne justifiant pas d'un juste titre,

- débouter M. [N] de sa demande à ce titre,

sur la demande de rectification du rapport de [A] :

- constater que M. [B] a établi son rapport à la demande de Mme [E], judiciairement nommée en tant qu'expert, dont les conclusions ont été inclues dans le

rapport d'expertise de cette dernière,

- constater que Mme [E] a déposé son rapport étant donc dessaisie,

- constater que M. [N] a saisi le tribunal par assignation du 31 août 2017 tendant à :

contester le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 27 juin 2017 ayant ratifié le rapport de Mme [E], ayant repris les rapports et plans de M. [G] et de M. [B],

annuler le rapport d'expertise de Mme [E],

ce qu'un nouvel expert soit désigné,

- débouter M. [N] de sa demande à ce titre,

- ordonner la publication du jugement à intervenir au Service de la Publicité Foncière En tout en tout état de cause,

- débouter M. [N] de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner M. [N] aux dépens, ainsi qu'à lui payer la sommme de 10.000 € par application de l'article 700 du code de procédure

Par jugement du 20 juin 2019, le tribunal de grande instance de Paris a :

- annulé la résolution n° 19 de l'assemblée générale du 19 mai 2016 de l'immeuble situé [Adresse 10],

- dit que le lot 124 de la copropriété, correspondant à l'appartement du rez de chaussée - Bâtiment B, propriété de M. [R] [N] bénéficie d'un droit de jouissance privatif de la courette attenante,

- ordonné, à la diligence de M. [R] [N], la publication du jugement au service de la publicité foncière du lieu de situation de l'immeuble cadastré [Cadastre 6] à [Localité 11],

- débouté le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 10] de l'intégralité de ses demandes,

- débouté les parties du surplus de leurs demandes,

- condamné le syndicat des copropriétaires de l'immeuble situé [Adresse 10] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à M. [R] [N] la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du même code,

-ordonné l'exécution provisoire.

Le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 10] a relevé appel de ce jugement par déclarations remises au greffe les 29 juillet et 16 septembre 2019.

La procédure devant la cour a été clôturée le 23 novembre 2022.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu les conclusions en date du 28 octobre 2021 par lesquelles le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 10], appelant, invite la cour, au visa des articles 42 de la loi du 10 juillet 1965, 6, 9 du code de procédure civile, 1165, 2258, 2261, 2265 et 2272 du code civil à :

- infirmer le jugement en ce qu'il :

a annulé la résolution n° 19 de l'assemblée générale du 19 mai 2016,

a dit que le lot 124 de la copropriété, correspondant à l'appartement du rez-de-chaussée ' [Adresse 5], propriété de M. [R] [N] bénéficie d'un droit de jouissance privatif de la courette attenante et ordonné subséquemment à la diligence de M. [R] [N] la publication du jugement au service de la publicité foncière

l'a débouté de sa demande formulée au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de sa demande de condamnation aux dépens de la première instance,

l'a débouté de sa demande de publication de la décision à intervenir au Service de la Publicité Foncière compétent,

l'a condamné aux dépens, ainsi qu'à payuer à M. [N] la somme de 3.000 € par application de l'article 700 du code de procédure

- confirmer le jugement entrepris pour le surplus,

sur la contestation de l'information contenue au point n° 19 du procès-verbal d'assemblée générale des copropriétaires,

- constater qu'il s'agissait d'une erreur de plume et qu'une fois informé le syndic a tout de suite réagi en écrivant à M. [N] qu'il s'agissait d'une erreur,

- rappeler que seules les résolutions peuvent faire l'objet d'une annulation,

- rappeler qu'un procès-verbal d'assemblée générale ne peut être rectifié une fois signé,

- débouter M. [N] de sa demande de rectification formulée à titre principal et de sa demande de nullité formulée à titre subsidiaire,

sur la contestation des résolutions n° 3, 7, 8, 9, 10, 11a, 11b, 11c,

- constater que M. [N] a renoncé à sa demande de nullité,

sur la demande d'octroi d'un droit de jouissance privatif sur la courette du bâtiment B,

- juger que M. [N] ne rapporte pas la preuve du caractère continu, paisible et non équivoque pendant trente ans du droit de jouissance allégué,

- juger que les conditions de la prescription abrégée de l'article 2272 du code civil ne sont pas réunies, M. [N] ne justifiant pas d'un juste titre,

- débouter M. [N] de sa demande à ce titre,

sur la demande de rectification du rapport de [A],

- constater que M. [B] a établi son rapport à la demande de Mme [E], judiciairement nommée en tant qu'expert, dont les conclusions ont été inclues dans le rapport d'expertise de cette dernière,

- constater que Mme [E] a déposé son rapport étant donc dessaisie,

-constater que M. [N] a saisi le tribunal de grande instance de Paris, devenu tribunal judiciaire de Paris, d'une assignation du 31 août 2017 tendant à :

contester le procès-verbal de l'assemblée générale extraordinaire du 27 juin 2017 ayant ratifié le rapport de Mme [E], ayant repris les rapports et plans de M. [G] et de M. [B] ;

annuler le rapport d'expertise de Mme [E] ;

ce qu'un nouvel expert soit désigné.

- débouter M. [N] de sa demande de rectification du rapport de M. [B],

sur la publication de l'arrêt à intervenir,

- ordonner la publication de l'arrêt à intervenir au Service de la Publicité Foncière compétent, étant rappelé que l'immeuble du [Adresse 10] est enregistré au cadastre sous la référence CP12,

en tout état de cause,

- débouter M. [N] de sa demande formulée au titre de l'article 700 du

code de procédure civile ;

- condamner M. [N] aux dépens de première instance et d'appel avec application de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à lui payer la somme de 10.000 € par application de l'article 700 du même code ;

Vu les conclusions en date du 4 octobre 2022 par lesquelles M. [R] [N], intimé ayant formé appel incident, demande à la cour, au visa des articles 2261, 2265 et 2272 du code civil de :

- confirmer le jugement,

en tout état de cause,

- décider que la résolution n°19 de l'assemblé générale du 19 mai 2016 n'est pas une décision,

- enjoindre en conséquence le syndicat des copropriétaires de supprimer toute mention d'un vote dans le procès-verbal et de l'affirmation de toute inoccupation de la courette accessible par l'appartement de rez-de-chauss ée de M. [N],

- subsidiairement, annuler ladite résolution n°19 en ses entières dispositions et affirmations,

- juger son lot bénéficie d'un droit de jouissance privatif de la courette attenante à l'appartement, à raison d'une occupation privative de plus de trente ans, continue, paisible, publique et non équivoque, comme du fait de la prescription décennale abrégée pour juste titre,

- ordonner que l'arrêt à intervenir, tout comme le jugement dont appel, sera publié à la diligence du requérant au fichier immobilier du lieu de situation de l'immeuble, étant rappelé pour les besoins des publications au fichier immobilier, que l'immeuble est cadastré [Cadastre 6] à [Adresse 10], et que les biens de M. [N] correspondent au lot d'appartement [Cadastre 7] et au lot de cave [Cadastre 8],

- débouter le syndicat des copropriétaires de ses entières prétentions, fins et conclusions plus amples ou contraires,

et ajouter au jugement entrepris ou le reformant sur ce seul point, dans le cadre de l'entier effet dévolutif de l'appel,

- ordonner aux frais du syndicat la rectification du plan du rez-de-chaussée du bâtiment B établi par M. [B] dans le cadre du rapport d'expertise judiciaire de Mme [U] [E] en date du 21 mars 2016, aux fins de rétablir le marquage de l'accès direct entre l'appartement et la courette attenante,

ajoutant en tous cas au jugement,

-condamner le syndicat des copropriétaires du [Adresse 10] aux dépens avec application de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à lui payer la somme de 6.000 € par application de l'article 700 du même code ;

SUR CE,

La cour se réfère, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens échangés et des prétentions des parties, à la décision déférée et aux dernières conclusions échangées en appel ;

En application de l'article 954 alinéa 2 du code de procédure civile, la cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions ;

Les moyens soutenus par l'appelant, ne font que réitérer sans justification complémentaire utile, ceux dont les premiers juges ont connu et auxquels ils ont répondu par des motifs pertinents et exacts que la cour adopte, sans qu'il soit nécessaire de suivre les parties dans le détail d'une discussion se situant au niveau d'une simple argumentation,

Il convient seulement de souligner et d'ajouter les points suivants :

Sur la nullité de la résolution n° 19 de l'assemblée générale du 19 mai 2016

Selon l'article 13 du décret du 17 mars 1967, l'assemblée générale ne prend de décision valide que sur les questions inscrites à l'ordre du jour et dans la mesure où les notifications ont été faites conformément aux dispositions des articles 9 à 11-I ;

Elle peut, en outre, examiner sans effet décisoire toutes questions non inscrites à l'ordre du jour ;

Pour qu'une contestation puisse être valablement élevée, il faut que l'assemblée générale ait pris une véritable décision ;

Le syndic a convoqué l'assemblée générale des copropriétaires pour le 19 mai 2016, avec à l'ordre du jour le point n° 19 libellé de la façon suivante :

'19° Information sur les parties communes de l'immeuble à rez-de-chaussée (Sans vote)

PJ : Constat d'huissier du 14/03/2016 de la SCP Proust et Goury-Laffont

Le syndic indique le bon état de conservation et d'entretien par Mme [L] des parties communes ainsi que le respect du règlement de copropriété démontrant aucune occupation des parties communes à rez-de-chaussée de la copropriété'.

Le procès verbal de l'assemblée générale du 19 mai 2016 mentionne :

'19° Information sur les parties communes de l'immeuble à rez-de-chaussée (article 24)

Constat d'huissier par la SCP Proust et Goury-Laffont

Le syndic indique le bon état de conservation et d'entretien par Mme [L] des parties communes ainsi que le respect du règlement de copropriété démontrant aucune occupation des parties communes à rez-de-chaussée de la copropriété.

Ont voté pour : 7.596 /7.596 tantièmes

Ont voté contre : néant

Se sont abstenus : néant

En vertu de quoi cette résolution est adoptée à l'unanimité' ;

Le syndicat des copropriétaires fait valoir qu'il s'agit d'une erreur dès lors que le point 19 ne peut être qualifié de 'décision', aucune position définitive sur l'occupation des parties communes au rez de chaussée de l'immeuble n'ayant été prise ;

Cependant, comme l'a dit le tribunal, un vote est intervenu sur cette question non prévue à l'ordre du jour de la convocation ;

Il convient d'ajouter que le refus par le syndicat de rectifier cette erreur (contrairement à ce que soutient le syndicat, une telle rectification est possible en rédigeant un erratum signé par le président de séance, le secrétaire et le ou les scrutateurs, puis en le notifiant aux copropriétaires comme le procès verbal de l'assemblée générale) confère à ce 'point n° 19' une valeur de décision puisqu'elle implique en réalité qu'une position définitive a été prise sur l'occupation des parties communes au rez-de-haussée ; cette décision encourt l'annulation parce qu'elle n'était pas prévue à l'ordre du jour qui ne faisait état que d'un point d'information sans vote ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a annulé la résolution 19 de l'assemblée générale du 19 mai 2016 ;

Sur la demande d'acquisition d'un droit de jouissance privatif sur la cour commune accessible par le lot de M. [N], par usucapion

Il résulte de l'article 2258 du code civil que 'la prescription acquisitive est un moyen d'acquérir un bien ou un droit par l'effet de la possession sans que celui qui l'allègue soit obligé d'en rapporter un titre ou qu'on puisse lui opposer l'exception déduite de la mauvaise foi' ;

Selon l'article 2272 du même code 'le délai de prescription requis pour acquérir la propriété immobilière est de trente ans.

Toutefois, celui qui acquiert de bonne foi et par juste titre un immeuble en prescrit la propriété par dix ans' ;

Au terme de l'article 2275 du même code, il suffit que la bonne foi ait existé au moment de l'acquisition ;

En application de l'article 2261 du code civil, pour pouvoir prescrire, il faut une possession continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire ;

Le juste titre, dont l'article 2272 précité fait une condition d'application de la prescription acquisitive de 10 ans, est celui qui, considéré en soi, serait de nature à transférer la propriété à la partie qui invoque la prescription ;

En l'occurrence, dans l'acte de vente du 6 juillet 2006 par Mme [J] [W] veuve [F], il n'est pas fait état de la jouissance privative d'une cour, partie commune, attachée au lot acquis ; à la page 4 de cet acte, il est stipulé que le vendeur a recueilli le bien dans les successions confondues de ses pères et mères décédées ;

M. [R] [N] soutient que la lettre concomitante à son acquisition du bien de Mme [F] par acte notarié du 6 juillet 2006, constitue, ensemble avec l'acte de transfert de propriété, le juste titre au regard de la prescription acquisitive décennale abrégée ;

Il produit le courrier établi le 9 avril 2006, lors de la vente à M. [R] [N], par la précédente propriétaire de ce lot, Mme [F], qui lui indique : 'depuis 1950 que ce bien a appartenu à ma famille, la cour a toujours eu la libre coutume de son utilisation par les personnes demeurant au rez de chaussée. Ma grand mère la parsemait de plantes et les 2 locataires suivants ont profité de celles-ci, y installant salon de jardin et parasol...' ;

Les premiers juges ont justement retenu que ce courrier n'est pas un juste titre au sens de l'article 2272 du code civil si bien que M. [R] [N] ne peut invoquer une prescription acquisitive décennale ;

A l'appui de sa demande d'acquisition par prescription trentenaire de la jouissance privative de la courette, M. [N] produit les éléments suivants :

- un constat d'huissier du 22 juin 2016 qui établit que : 'la courette est un espace clos, la porte-fenêtre à double battant de l'appartement de M. [N] est le seul accès à hauteur d'homme de la courette attenante, l'autre porte, donnant accès au milieu de la volée de l'escalier des caves, ne fait guère plus de 1,45 m de hauteur et est fermée à clé, des marques plus claires sur certaines dalles témoignent de la présence ancienne de jardinières et pots de fleurs' ;

- la fiche descriptive de l'agence immobilière qui a vendu l'appartement à M. [N] en 2006 mentionnant la courette privative comme argument de vente avec une photo de la porte fenêtre du salon ouverte sur la courette avec un paillasson extérieur ;

- le courrier établi le 9 avril 2006, lors de la vente à M. [N], par la précédente propriétaire de ce lot, Mme [F], qui lui indique : 'depuis 1950 que ce bien a appartenu à ma famille, la cour a toujours eu la libre coutume de son utilisation par les personnes demeurant au rez de chaussée. Ma grand mère la parsemait de plantes et les 2 locataires suivants ont profité de celles-ci, y installant salon de jardin et parasol...', étant rappelé qu'il est établi par l'acte d'acquisition de M. [N] du 6 juillet 2006, que l'appartement était détenu par la famille de sa venderesse depuis 2 générations, justifiant ainsi l'antériorité de la jouissance privative de cette cour ;

- le bail conclu entre Mme [F] et un locataire M. [O], le 11 juin 1998, qui vise la désignation de l'appartement loué de la manière suivante : un appartement au rez de chaussée droite 2ème bâtiment comprenant une entrée, un living, une chambre, une salle d'eau avec WC, une cuisine, une cour privative ;

- des courriers de M. [N] du 21 mai et 1er juillet 2008, à sa locataire de l'époque, lui rappelant que les plantes qu'elle a posées dans la courette nécessitent un entretien, que les copropriétaires se sont plaints auprès de lui du manque d'entretien de la courette dont elle est redevable ;

- un courrier du 26 avril 2007 de Mme [M], copropriétaire de cet immeuble depuis plus de 40 ans, indiquant 'avoir toujours vu les occupants de l'appartement de M. [N] au rez-de-chaussée, utiliser la courette de manière privative et y installer meubles, parasols ou jardinières' Cela contribue à rendre cette courette agréable à regarder pour tous' ;

Pour contredire cette attestation, le syndicat des copropriétaires produit une attestation de Mme [M] (née en septembre 1930), qui conteste, en septembre 2016, avoir rédigé un courrier le 26 avril 2007 à 'M. [N] qui revendique la propriété de la courette' ;

Les premiers juges ont exactement relevé que la signature de Mme [M] sur le document contesté apparaît conforme et que la présentation faite par son fils, président du conseil syndical moteur de la procédure initiée à l'encontre de M. [N], ne soit pas étranger à l'établissement de ce témoignage qui mentionne de manière erronée que M. [N] revendiquerait la propriété de la courette ;

Comme l'a dit le tribunal, les attestations de M. [D], copropriétaire en procès avec M. [N], de la gardienne, manifestement peu convaincante, dès lors qu'elle est dactylographiée et contresignée par ses employeurs mentionnant qu'elle entretient deux cours sans précision alors qu'il existe au terme du règlement de copropriété 'des cours et des courettes' ne permettent pas de contredire les preuves apportées par M. [N] que le lot 124 de la copropriété bénéficie d'une jouissance privative de cette courette depuis 1950 ;

Les premiers juges ont jsutement énoncé que c'est également de manière inopérante que le syndicat des copropriétaires tente depuis 2015 de s'opposer à la démonstration faite par M. [N] d'une jouissance privative de la courette en inscrivant à l'ordre du jour des assemblées des rappels sur la nécessité de ne pas encombrer les parties communes, ou par un constat d'huissier du 14 mars 2016, alors même que dans le même temps M. [N] se plaignait en 2016 auprès du syndic de la disparition de ses pots de fleurs installés dans la courette ;

Les premiers juges ont justement retenu que M. [N] justifie que la jouissance privative de cette courette lui est reconnue :

- par la configuration des lieux : il ressort des plans et photographies versés au débat que seul le lot de M. [N] donne sur cette courette, les fenêtres de la chambre et de la cuisine ainsi que la porte-fenêtre du séjour, même si cette courette est aussi accessible par un passage fermé donnant dans l'escalier des caves mais qui ne constitue qu'un accès pour permettre l'entretien de cette partie commune et un accès pour travaux, compte tenu de sa faible hauteur,

- par la mise en place de plantes et de mobilier de jardin,

- par l'obligation concomitante d'avoir à entretenir et nettoyer cette cour ;

Il établit également que l'usage privatif de cette cour lui vient des précédents propriétaires depuis 1950, en l'espèce la famille de Mme [F] qui a occupé cet appartement et bénéficié de la jouissance à titre privatif de cette courette soit depuis plus de 30 ans ;

L'usage privatif de cette courette est attestée par Mme [M] lorsqu'elle habitait dans l'immeuble ; de même, des habitants de l'immeuble, relayés par le syndic, ont demandé à M. [N] que l'entretien de la cour soit effectivement assumé par les locataires de son

lot ;

L'usage privatif de cette courette par les propriétaires successifs du lot de M. [N] n'est donc pas équivoque, il n'a jamais été contesté ou restreint, jusqu'alors ;

Il appartient au syndicat des copropriétaires d'établir la mauvaise foi de M. [N], lui permettant ainsi de s'opposer à la prescription acquisitive ;

Les premiers juges ont exactement relevé que la bonne foi de M. [N] ne peut être contestée dès lors que l'usage privatif de la courette lui a été confirmé par les baux établis par les anciens propriétaires ;

Pour tenter de démontrer la mauvaise foi de M. [N], le syndicat des copropriétaires verse au débat un état des lieux d'entrée du 15 mai 2009 dans le cadre d'un bail conclu entre M. [N] et une locataire, sur lequel l'usage de la courette ne serait pas mentionné ; comme l'a dit le tribunal, s'agissant d'un état des lieux de l'appartement et non de l'engagement de location qui seul, donne le descriptif des lieux loués, il est parfaitement normal que la courette n'y figure pas ;

De manière également inopérante, le syndicat des copropriétaires produit un courrier d'un avocat d'une locataire de M. [N] qui dénonce que sa cliente aurait été empêchée durant toute sa période de location de jouir de la courette alors que son usage privatif figurait dans son bail, sollicitant du syndic que lui soit précisé si la courette est bien une partie privative, pour lui permettre d'en tirer toutes conséquences de droit ; les premiers juges ont exactement énoncé que ce courrier, manifestement destiné à tenter une rétrocession a postériori de loyers, n'apporte aucun élément de preuve établissant que cette locataire n'a pas bénéficié de l'usage privatif de la courette mais justifie de l'usage privatif donné par bail aux locataires successifs de M. [N] ;

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu'il a :

- dit que le lot 124 de la copropriété, correspondant à l'appartement du rez de chaussée - Bâtiment B, propriété de M. [R] [N], bénéficie d'un droit de jouissance privatif de la courette attenante,

- ordonné, à la diligence de M. [R] [N], la publication du jugement au service de la publicité foncière du lieu de situation de l'immeuble cadastré [Cadastre 6] à [Localité 11] ;

Il convient d'ordonner la publication du présent arrêt confirmatif au service de la publicité foncière ;

Sur la demande de rectification du rapport de M. [B]

M. [N] sollicite la rectification du plan du rez de chaussée du bâtiment B établi par M. [B] et annexé au rapport d'expertise judiciaire de Mme [E] du 21 mars 2016 ;

La contestation du rapport de Mme [E] fait partie d'un autre contentieux initié par M. [N] par assignation du 31 août 2017, la procédure étant toujours pendante devant le tribunal, et elle est sans lien vec la présente procédure ;

Le jugement est confirmé en ce qu'il a débouté M. [N] de cette demande ;

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt conduit à confirmer le jugement sur les dépens et l'application qui y a été équitablement faite des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile .

Le syndicat des copropriétaires, partie perdante, doit être condamné aux dépens d'appel ainsi qu'à payer à M. [N] la somme supplémentaire de 4.000 € par application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Le sens du présent arrêt conduit à rejeter la demande par application de l'article 700 du code de procédure civile formulée par le syndicat des copropriétaires ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Statuant par mise à disposition au greffe, contradictoirement,

Confirme le jugement ;

Y ajoutant,

Ordonne, à la diligence de M. [R] [N], la publication de l'arrêt au service de la publicité foncière du lieu de situation de l'immeuble cadastré [Cadastre 6] à [Localité 11] ;

Condamne le syndicat des copropriétaires de l'immeuble sis [Adresse 10] aux dépens d'appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile, ainsi qu'à payer à M. [R] [N] la somme supplémentaire de 4.000 € par application de l'article 700 du même code en cause d'appel ;

Rejette toute autre demande.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 4 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 19/15780
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;19.15780 ?
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