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08/03/2023 | FRANCE | N°19/07886

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 4, 08 mars 2023, 19/07886


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4



ARRET DU 08 MARS 2023



(n° , 7 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07886 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAKVO



Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/03547



APPELANTE



SCP BTSG prise en la personne de Me [Y] [R] - Mandataire judiciaire de SociÃ

©té UJA CREATION PRODUCTION

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Laurence CHREBOR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107



Me [Z] [H] - Mandataire ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 4

ARRET DU 08 MARS 2023

(n° , 7 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 19/07886 - N° Portalis 35L7-V-B7D-CAKVO

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 Mai 2019 -Conseil de Prud'hommes - Formation paritaire de PARIS - RG n° F 18/03547

APPELANTE

SCP BTSG prise en la personne de Me [Y] [R] - Mandataire judiciaire de Société UJA CREATION PRODUCTION

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représenté par Me Laurence CHREBOR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

Me [Z] [H] - Mandataire judiciaire de Société UJA CREATION PRODUCTION

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représenté par Me Laurence CHREBOR, avocat au barreau de PARIS, toque : P0107

INTIMEE

Madame [M] [N]

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me Véronique GARCIA ORDONEZ, avocat au barreau de PARIS

PARTIE INTERVENANTE :

Association AGS CGEA IDF OUEST

[Adresse 2]

[Localité 7]

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 09 Janvier 2023, en audience publique, les avocats ne s'y étant pas opposés, devant Madame Florence MARQUES, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Jean-François DE CHANVILLE, président de chambre

Madame Anne-Ga'l BLANC, conseillère

Madame Florence MARQUES, conseillère

Greffier, lors des débats : Mme Victoria RENARD

ARRET :

- Réputé contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Jean-François DE CHANVILLE, Président de chambre et par Justine FOURNIER, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

***

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES

Mme [M] [N] a été engagée par la société Un Jour Ailleurs Promotion, suivant contrat de travail à durée indéterminée à compter du 12 janvier 2004 en qualité de chef de produit maille.

Par convention en date du 25 juillet 2016, son contrat de travail a été transféré au sein de la société Un Jour Ailleurs Création Production à effet du 01 juillet 2016, en occupant les mêmes fonctions et la même classification avec une reprise d'ancienneté au 12 janvier 2004.

Par lettre datée du 11 octobre 2017, Mme [M] [N] a été convoquée à un entretien préalable en vue d'une sanction pouvant aller jusqu'au licenciement, fixé au 19 octobre 2017.

Par courrier en date du 24 octobre 2017, Mme [M] [N] a ensuite été licenciée, avec dispense d'exécution du préavis de trois mois, pour motif disciplinaire pour faute simple.

Par courrier en date du 30 octobre 2017, la salariée a contesté, par courrier recommandé avec accusé de réception, les griefs énoncés à son encontre.

Contestant la légitimité de son licenciement, Mme [M] [N] a saisi le 14 mai 2018, le conseil de prud'hommes de Paris, aux fins de voir juger son licenciement sans cause réelle et sérieuse et la condamner société à lui payer la somme de 46.708 euros net au titre d'une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, outre celle de 3000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

A titre reconventionnel, la société Un Jour Ailleurs Création Production a sollicité la condamnation de Mme [N] à lui verser la somme de 3.000 euros en vertu des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 13 mai 2019, auquel la cour se réfère pour l'exposé de la procédure antérieure et des prétentions initiales des parties, le conseil de prud'hommes de Paris a :

- condamné la société UJA Création Production à payer à Mme [M] [N] les sommes suivantes :

* 46.708 euros à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du jugement, jusqu'au jour du paiement,

* 1.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- débouté Mme [N] du surplus de ses demandes,

- débouté la société UJA Création Production de sa demande reconventionnelle et l'a condamné au paiement des entiers dépens.

Par déclaration du 10 juillet 2019, la société Un Jour Ailleurs Création Production a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par jugement en date du 29 mai 2020, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société Un Jour Ailleurs Création Production, avec une période d'observation de deux mois, soit jusqu'au 29 juillet 2020.

Par jugement en date du 14 août 2020, la société UJACréation Production a été placée en liquidation judiciaire par le tribunal de commerce de Paris. La SCP BTSG, prise en la personne de Me [R] [Y], et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [H] [Z] ont été désignés en qualité de liquidateurs judiciaires.

La salariée a assigné en intervention forcé l'AGS par acte d'huissier en date du 18 septembre 2020.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 18 août 2021, Mme [M] [N] demande à la cour de :

- Confirmer le jugement du Conseil de Prud'hommes de Paris du 13 mai 2019, en ce qu'il a dit le licenciement de Madame [M] [N] sans cause réelle ni sérieuse. Y Ajoutant

- Fixer la créance de Madame [M] [N] sur la liquidation judiciaire de la SNC UJA Création Production à la somme de 46 708 € au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse

- Dire la décision à intervenir opposable à l'AGS CGEA IDF OUEST

- Dire que les dépens de la présente instance seront supportés par la liquidation judiciaire.

Dans ses dernières conclusions adressées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 janvier 2023, la SCP BTSG, prise en la personne de Me [R] [Y], et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [H] [Z], en qualité de liquidateurs judiciaires de la société UJA Création Production, demandent à la cour de :

Infirmer dans toutes ses dispositions le jugement rendu par le Conseil de Prud'hommes de PARIS le 13 Mai 2019,

-Juger bien-fondé le licenciement de Madame [N].

En conséquence :

-Débouter Madame [N] de l'ensemble de ses demandes ;

-la condamner au versement de la somme de 3.000 € au titre des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile.

L'AGS CGEA IDF OUEST ne s'est pas constituée.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 27 septembre 2022 et l'affaire a été fixée à l'audience du 09 janvier 2023. A cette audience, avec l'accord des parties présentes, la révocation de l'ordonnance de clôture est intervenue pour notification par RPVA des conclusions précédemment notifiées par le conseil de la société reprises par les liquidateurs. Cette notification est intervenue le jour même.

La nouvelle clôture est intervenue le 9 janvier 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, la cour se réfère à leurs conclusions écrites conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DECISION

1-Sur la rupture du contrat de travail

L'article L.1231-1 du code du travail dispose que le contrat à durée indéterminée peut être rompu à l'initiative de l'employeur ou du salarié. Aux termes de l'article L.1232-1 du même code, le licenciement par l'employeur pour motif personnel est justifié par une cause réelle et sérieuse.

Selon l'article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d'apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l'employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d'instruction qu'il estime utiles ; si un doute subsiste, il profite au salarié.

Au cas d'espèce, aux termes de la lettre de licenciement en date du 24 octobre 2017, il est reproché à la salariée de n'avoir pas modifié son comportement après avoir reçu, le 10 octobre 2017, de sa responsable hiérarchique un courriel faisant état de faits fautifs, à savoir:

1-un manque d'anticipation dans la collection maille ayant entraîné des validations tardives et de ce fait des commandes par avion ou auprès de fournisseurs italiens plus coûteux,

2-le non-respect des dates butoirs,

3-le refus de recevoir un fournisseur maille,

4-le refus de corriger les erreurs sur les noms et couleurs d'articles,

2 - le dénigrement de sa responsable, critiquant son expérience dans la maille.

Il est également reproché à la salariée de s'en être prise à la responsable de la coordination studio, quelques minutes après ce courriel, et ce en présence de collaborateurs, en l'agressant verbalement et en la menaçant de la sorte 'fais attention à ce que tu répètes... tu ne donnes pas le contexte' (grief n°6).

La lettre de licenciement fait également état de rappels à l'ordre antérieurs, ignorés par la salariée.

Mme [M] [N] nie l'ensemble des griefs qui lui sont adressés. Elle indique qu'elle a subi une modification de ses fonctions à partir de mi-juillet 2017 et qu'elle n'avait aucune autonomie dans son poste, ses tâches étant soit controlées soit validées par sa resonsable, madame [P].

Elle soutient que les stylistes sont en charge des modéles de la collection et qu'elle ne peut pas anticiper si les stylistes ne font pas leur travail dans les délais si bien que le grief n° 1 ne peut lui être fait. Elle indique que sa responsable a été informée de la livraison par avion et de son coût.

La salariée soutient qu'une autre personne ( madame [S]) entrait les dates butoirs dans le logiciel.

Concernant le grief n°3, la salariée fait valoir que d'une part, elle n'avait plus , dans les faits, de responsabilités dans le choix des fournisseurs et d'aure part, qu'au cas d'espèce, le fournisseur n'était pas référencé si bien qu'elle n'avait pas à le rencontrer.

Concernant le grief n° 4, la salariée indique que les erreurs sur les noms et les couleurs d'articles ne lui sont pas imputables, une collaboratrice lui ayant fourni deux fiches produits comportants des erreurs, reprises par le nouveau logiciel 'PRIOS'.

Enfin, la salarié nie avoir dénigré sa responsable hiérarchique et avoir menacé quiconque.

La cour constate qu'il n'est aucunement établi que la salariée a vu ses attributions être modifiées après que 'sa' stagiaire, Mme [T] [O] a rejoint le service styliste. Elle a simplement 'récupéré' les attributions de cette dernière.

Pour autant, il résulte des pièces soumis à l'appréciation de la cour que l'employeur n'établit pas les griefs faits à la salariée à l'exception du grief n° 5, la production aux débats des entretiens d'évaluation de mars 2016 et mars 2017 où il est noté que la salariée doit améliorer sa capacité à travailler en équipe , sa capacité d'écoute et de bienveillance à l'égard des autres fonctions et ou sa capacité à mettre en place des plans d'action, à s'organiser et à planifier son action, notamment, est qualifiée d'insuffisante, ne pouvant rapporter le preuve des fautes prétendument survenues plus tard.

En ce qui concerne le grief n° 6, alors que l'altercation a été publique, il est étonnant qu'aucune attestation de collaborateur y ayant assisté ne soit produite.

Le seul grief n° 5, compte tenu de l'ancienneté de la salariée au sein de l'entreprise et de l'absence de passé disciplinaire, ne peut fonder un licenciement pour cause réelle et sérieuse, cette sanction apparaissant comme excessive.

Le jugement est confirmé de ce chef.

3 -Sur l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

Selon l'article L 1235-3 du code du travail dans sa version applicable au litige, si le licenciement d'un salarié survient pour une cause qui n'est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.

Si l'une ou l'autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Le montant de cette indemnité, à la charge de l'employeur, est compris entre les montants minimaux et maximaux fixés par avance au dit article.

Au cas d'espèce, M. [M] [N] ayant 13 années années d'ancienneté,

l'indemnité est comprise entre 3 et 11,5 mois.

En considération notamment de l'effectif de l'entreprise, des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée à Mme [N] de son âge au jour de son licenciement ( 47 ans), de son ancienneté à cette même date ( 13 années), de sa capacité à trouver un nouvel emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard, tels que ces éléments résultent des pièces et des explications fournies à la cour, il y a lieu de lui allouer la somme de 32492,52 euros ( 8 mois de salaires) à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, laquelle sera fixée au passif de la société liquidée.

Le jugement est infirmé de ce chef.

4 -Sur les demandes accessoires

Le jugement est confirmé sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile.

Les dépens d'appel, suivant le principal, seront supportés par la SCP BTSG, prise en la personne de Me [R] [Y], et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [H] [Z], en qualité de liquidateurs judiciaires de la société UJA Création Production.

L'équité commande de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit de Mme [M] [N] ainsi qu'il sera dit au dispositif.

L'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel au profit des liquidateurs judiciaires de la société UJA Création Production

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Infirme le jugement déféré en ce qu'il a alloué une somme de 46708 euros à Mme [M] [N] à titre d'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Le confirme pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Fixe la créance de Mme [M] [N] au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse au passif de la société UJA Création Production à la somme de 32492,52 euros ,

Condamne la SCP BTSG, prise en la personne de Me [R] [Y], et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [H] [Z], en qualité de liquidateurs judiciaires de la société UJA Création Production à payer à Mme [M] [N] la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Déboute la SCP BTSG, prise en la personne de Me [R] [Y], et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [H] [Z], en qualité de liquidateurs judiciaires de la société UJA Création Production de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile, en cause d'appel,

Condamne la SCP BTSG, prise en la personne de Me [R] [Y], et la SELAFA MJA, prise en la personne de Me [H] [Z], en qualité de liquidateurs judiciaires de la société UJA Création Production aux dépens d'appel.

La greffière Le président


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 4
Numéro d'arrêt : 19/07886
Date de la décision : 08/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-08;19.07886 ?
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