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03/03/2023 | FRANCE | N°18/02127

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 13, 03 mars 2023, 18/02127


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS







COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13



ARRÊT DU 03 Mars 2023

(n° , 4 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/02127 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5AZ3



Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Décembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 16-02258





APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SEINE SAINT DENIS

[Adresse 1]

[

Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901





INTIMEE

SA [5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Xavier BONTOUX, avocat a...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 6 - Chambre 13

ARRÊT DU 03 Mars 2023

(n° , 4 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : S N° RG 18/02127 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B5AZ3

Décision déférée à la Cour : jugement rendu le 18 Décembre 2017 par le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale de BOBIGNY RG n° 16-02258

APPELANTE

CAISSE PRIMAIRE D'ASSURANCE MALADIE DE SEINE SAINT DENIS

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Florence KATO, avocat au barreau de PARIS, toque : D1901

INTIMEE

SA [5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Xavier BONTOUX, avocat au barreau de LYON, toque : 1134 substitué par Me Ariane SOFIANOS, avocat au barreau de PARIS, toque : D0903

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 05 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre

Monsieur Gilles REVELLES, Conseiller

Madame Natacha PINOY, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier : MadameAlice BLOYET, lors des débats

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- prononcé

par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Laurence LE QUELLEC, Présidente de chambre et Madame Fatma DEVECI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCEDURE, PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Les circonstances de la cause ayant été correctement rapportées par le tribunal dans son jugement au contenu duquel la cour entend se référer pour un plus ample exposé, il suffit de rappeler que la caisse, le 5 janvier 2016, a pris en charge d'emblée au titre de la législation professionnelle l'accident concernant M. [G] [H], salarié de la société, survenu le 28 novembre 2015 et déclaré le 3 décembre 2015 par l'employeur qui avait émis des réserves le même jour ; qu'après une vaine contestation en inopposabilité devant la commission de recours amiable ayant rejeté le recours par une décision du 14 septembre 2016, la société [5] a, le 3 novembre 2016, porté le litige devant le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny.

Par jugement du 18 septembre 2017, le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny a :

-dit recevable le recours de la société [5] ;

-dit n'y avoir lieu à statuer sur le moyen tiré du défaut d'intérêt à agir de la société [5];

-déclaré inopposable à la société [5] la décision du 5 janvier 2016 par laquelle la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis a pris en charge l'accident de travail de M. [G] [H] ;

-débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.

Le jugement lui ayant été notifié le 2 janvier 2018, la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint-Denis en a interjeté appel le 2 février 2018.

Par conclusions écrites régulièrement déposées et visées à l'audience par son avocat, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Seine-Saint-Denis demande à la cour de :

-infirmer le jugement du 18 décembre 2017 en toutes ses dispositions ;

En conséquence,

-déclarer la décision de prise en charge de l'accident dont M. [H] a été victime le 28 novembre 2015 opposable à la société [5] ;

-condamner la société [5] aux entiers dépens.

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis fait valoir essentiellement que les réserves émises par la société [5] ne sont pas motivées, la société se contentant de décrire les circonstances dans lesquelles la déclaration d'accident du travail a été établie, sans remettre en cause les circonstances de temps et de lieu de l'accident ; qu'ainsi, la caisse n'avait aucune obligation de diligenter des mesures d'instruction et n'était tenue à aucune obligation d'information à l'égard de la société [5]. Elle relève également que la matérialité de l'accident était établie ; que l'employeur ne conteste pas la chute dont a été victime M. [G] [H] au temps et au lieu du travail, n'expliquant pas comment une prétendue fissure du ménisque aurait pu être à l'origine d'une entorse du genou et soulignant que même en présence de l'existence d'un état antérieur, il doit faire l'objet d'une prise en charge au titre de la législation professionnelle s'il a été révélé ou aggravé par l'accident et bénéficie de la présomption d'imputabilité ; que c'est donc à bon droit que la caisse a décidé de prendre en charge d'emblée l'accident dont M. [G] [H] a été victime et que la décision de prise en charge est opposable à la société [5].

En réplique, par conclusions écrites régulièrement déposées et soutenues oralement à l'audience par son avocat, la société [5] demande à la cour de :

A titre principal,

-confirmer le jugement rendu par le tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny du 18 décembre 2017 ;

A titre subsidiaire,

-juger que la CPAM ne démontre pas la réalité d'un fait accidentel ;

-dire et juger inopposable à la société [5] la décision de prise en charge du 5 janvier 2016,

En tout état de cause,

-condamner la CPAM de la Seine-Saint-Denis aux entiers dépens.

La société [5] fait valoir essentiellement qu'elle a régulièrement émis des réserves qui sont motivées en ce qu'elles permettaient de mettre en doute le fait que l'accident se soit déroulé au temps et au lieu du travail et relevant que le simple fait d'évoquer une pathologie antérieure à l'accident permet de considérer les réserves comme motivées, l'employeur n'ayant pas à ce stade de la procédure, l'obligation de démontrer l'absence de lien avec le travail. Elle explique qu'elle a donc bien émis des réserves sur une cause étrangère au travail, ainsi que sur les circonstances de temps et de lieu et que la CPAM aurait dû mener une instruction. La société soutient que la matérialité de l'accident n'est pas établie, l'état pathologique du salarié constituant une cause totalement étrangère au travail, M. [G] [H] s'étant plaint, antérieurement à sa chute, de douleurs au genou qui, après radio, avaient fait apparaitre une fissure au ménisque, de sorte que sa chute du 28 novembre 2015 en est la conséquence directe. Elle soutient que la décision de prise en charge de la CPAM de la Seine-Saint-Denis en date du 5 janvier 2016 lui est inopposable.

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé aux conclusions déposées et visées le 5 janvier 2023, qu'elles ont soutenues oralement.

SUR CE :

Aux termes de l'article L.411-1 du code de la sécurité sociale, « Est considéré comme accident du travail, quelle qu'en soit la cause, l'accident survenu par le fait ou à l'occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d'entreprise ».

Il résulte des dispositions de l'article R 441-11 III du code de la sécurité sociale, dans sa version applicable au litige, que : « En cas de réserves motivées de la part de l'employeur ou si elle l'estime nécessaire, la caisse envoie avant décision à l'employeur et à la victime d'un accident du travail ou d'une maladie professionnelle un questionnaire portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou de la maladie ou procède à une enquête auprès des intéressés. Une enquête est obligatoire en cas de décès ».

Les réserves motivées visées par ce texte, s'entendant de la contestation du caractère professionnel de l'accident par l'employeur, ne peuvent porter que sur les circonstances de temps et de lieu de celui-ci ou sur l'existence d'une cause totalement étrangère au travail.

Dès lors que l'employeur a formulé en temps utile de telles réserves, la caisse ne peut prendre sa décision sans procéder à une instruction préalable. Dès lors que les réserves se conforment à leur objet, elles s'analysent comme des réserves motivées, peu important la pertinence ou la qualité de la motivation. Il est toutefois nécessaire que les éléments de fait allégués par l'employeur soient précis et circonstanciés.

En l'espèce, la déclaration d'accident du travail de M.[G] [H] en date du 3 décembre 2015, salarié de la société [5], mentionne le fait qu'il aurait raté la marche du camion et serait tombé sur son pied gauche le 28 novembre 2015 à 9h. Cet accident a été déclaré « connu » et « décrit par la victime » le 2 décembre 2015 à 14h30. L'employeur a joint à la déclaration, le 3 décembre 2015 une lettre recommandée avec accusé de réception indiquant qu'il « émettait des réserves sur le caractère professionnel et sur le bien-fondé de la déclaration de M. [G] [H] », précisant que « M. [G] [H] s'était plaint à plusieurs reprises courant octobre d'une douleur au genou gauche, qu'il aurait passé une radio et aurait eu le ménisque fissuré ; que le 28 novembre 2015, lors d'une permanence, il a déclaré à son responsable M. [I] [Y] avoir raté la marche de son camion et avoir mal au genou gauche. Le lundi 30 novembre 2015, il a fait déposer par un de ses collègues un arrêt de travail initial d'accident ».

Ainsi, l'employeur conteste dans sa lettre du 3 décembre 2018 la matérialité de l'accident. Il évoque clairement une cause totalement étrangère au travail de M.[G] [H], relevant l'existence d'un diagnostic antérieur à la survenance de l'accident et émettant des doutes quant aux circonstances de temps et de lieu de l'accident. Il importe peu que l'employeur apporte les preuves de ses allégations au stade des réserves.

Il résulte des termes employés par la société [5] qu'elle formule expressément des réserves motivées portant sur les circonstances de temps et de lieu de l'accident et sur la matérialité même du fait accidentel, de sorte que la caisse primaire d'assurance maladie de Seine Saint-Denis avait donc pour obligation d'avoir recours à une mesure d'instruction préalablement à la prise en charge de l'accident déclaré par M.[G] [H] à son employeur au titre de la législation sur les risques professionnels.

Or, il ne résulte d'aucun élément de la procédure que la caisse ait adressé un questionnaire à la société [5] ou au salarié portant sur les circonstances ou la cause de l'accident ou qu'elle ait procédé à une enquête.

Ainsi, le tribunal a à bon droit jugé de l'inopposabilité à la société [5] de la décision du 5 janvier 2016 par laquelle la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis a pris en charge l'accident du travail de M. [G] [H].

En conséquence, le jugement déféré sera confirmé.

Sur les dépens

La caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis, succombant en cette instance, devra en supporter les dépens engagés.

PAR CES MOTIFS :

LA COUR,

DÉCLARE l'appel recevable ;

CONFIRME le jugement du tribunal des affaires de sécurité sociale de Bobigny du 18 décembre 2017 ;

CONDAMNE la caisse primaire d'assurance maladie de Seine-Saint-Denis aux dépens d'appel.

La greffière La présidente


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 6 - chambre 13
Numéro d'arrêt : 18/02127
Date de la décision : 03/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-03;18.02127 ?
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