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02/03/2023 | FRANCE | N°22/16346

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 02 mars 2023, 22/16346


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 02 MARS 2023



(n° , 9 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16346 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGNNO



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Septembre 2022 -Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 22/01219





APPELANTE



S.C.I. INES, RCS de Bobigny sous le n°405 188 830, prise en la pers

onne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 2]

[Localité 3]



Représentée par Me Yann DEBRAY, avocat au barreau de PARIS, toque : ...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 02 MARS 2023

(n° , 9 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/16346 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGNNO

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 07 Septembre 2022 -Président du TJ de BOBIGNY - RG n° 22/01219

APPELANTE

S.C.I. INES, RCS de Bobigny sous le n°405 188 830, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée par Me Yann DEBRAY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0888

Assistée à l'audience par Me Nathalie PELARDIS, avocat au barreau de PARIS, toque : E298

INTIMEE

S.A.R.L. HERKA, RCS de Bobigny sous le n°901 629 444, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentée et assistée par Me Véronique BAUDASSE de la SELARL CB Avocats, avocat au barreau de PARIS, toque : C0639

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Janvier 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 3 juin 202l, la SCI Inès a donné à bail à la SARL Herka des locaux à usage commercial dépendant d'un immeuble situé [Adresse 1]), pour une durée de 9 ans à compter du 1er juin 2021, moyennant un loyer annuel en principal de 48.000 euros HT et hors charges.

Faisant face à des impayés, la SCI Inès a fait signifier à la SARL Herka un commandement visant la clause résolutoire d'avoir à payer la somme de 20.827, 95 euros au titre des loyers et charges arrêtés au 1er décembre 2021 inclus, par un acte du 22 décembre 202l.

Par acte du 8 juin 2022, la SCI Inès a fait assigner la SARL Herka devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de, notamment :

- constater l'acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail ;

- ordonner l'expulsion de la société Herka et de tous occupants de son chef des locaux litigieux, avec l'assistance de la force publique si besoin est ;

- condamner la société Herka à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 76.788,71 euros au titre des loyers et charges impayés au 1er juin 2022, avec intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2021 sur la somme de 20.827,95 et à compter de l'assignation pour le surplus ;

- condamner la société Herka au paiement d'une indemnité d'occupation égale au double du montant du loyer courant indexable et des charges ;

- condamner la société Herka à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens en ce compris les frais de commandement.

En défense, la SARL Herka a sollicité des délais de paiement sur 24 mois avec suspension des effets de la clause résolutoire, la fixation de l'indemnité d'occupation d'un montant égal au loyer contractuel en cours, la condamnation de la SCI Inès à lui payer la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 7 septembre 2022, le juge des référés a :

- dit que les demandes formées par la SCI Inès à l'encontre de la SARL Herka se heurtent à des contestations sérieuses ;

- dit n'y avoir lieu à référé ;

- dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la SCI Inès aux dépens.

Par déclaration du 3 octobre 2022, la SCI Inès a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 23 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la SCI Inès demande à la cour, au visa des articles 4, 5 et 16, 114 et suivants et 649 du code de procédure civile, de l'article L. 145-41 du code de commerce, de :

à titre principal,

- annuler l'ordonnance rendue le 7 septembre 2022 par le président du tribunal judiciaire de Bobigny et évoquer le litige et, à titre subsidiaire et infirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance dont appel ;

et, dans les deux cas, statuant à nouveau,

- constater l'acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 23 janvier 2022 ;

- ordonner l'expulsion de la SARL Herka et de tout occupant de son chef des locaux commerciaux situés [Adresse 1]) avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique et d'un serrurier ;

- dire, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans le délai d'un mois non renouvelable à compter de la signification de l'acte, à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoient les articles L.433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d'exécution ;

- fixer à titre provisionnel l'indemnité d'occupation, à compter de la résiliation du bail et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au double du loyer contractuel, soit 9.600 euros TTC outre les taxes, charges et accessoires ;

- condamner la SARL Herka à payer à la SCI Inès la somme provisionnelle de 141.318,71 euros ou, subsidiairement, la somme de 87.635 euros, au titre des loyers, charges, taxes, accessoires et indemnités d'occupation au 1er janvier 2023 avec les intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 22 décembre 2021 à hauteur de 20.827,95 euros et à compter de l'assignation pour le surplus ainsi qu'au paiement des indemnités d'occupation postérieures ;

- déclarer irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande de la SARL Herka de voir confirmer l'ordonnance dont appel qui a constaté l'existence d'une contestation sérieuse et dit n'y avoir lieu à référé ;

- débouter la SARL Herka de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- si par extraordinaire la cour de céans faisait droit à la demande de délais de paiement formulée par la SARL Herka, il conviendra de prévoir la déchéance du terme dès le premier incident de paiement ;

- condamner la SARL Herka à payer à la SCI Inès la somme de 6.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la SARL Herka aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer du 22 décembre 2021.

La SCI Inès expose en substance :

- qu'en constatant l'existence d'une prétendue contestation sérieuse pour un motif soulevé d'office sans avoir invité les parties à formuler leurs observations, le juge des référés du tribunal judiciaire de Bobigny a statué extra petita et violé le principe du contradictoire ;

- que, contrairement à ce qu'a jugé le juge des référés, une simple lecture du commandement de payer du 22 décembre 2021 permet de constater qu'un décompte y figure ;

- qu'un décompte actualisé de la créance figurait dans l'assignation délivrée ;

- que le commandement de payer, non suivi d'effet, permet de constater l'acquisition de la clause résolutoire ;

- que les prétendues contestations sérieuses sont infondées et que surtout la demande de voir confirmer l'ordonnance en ce qu'elle a constaté une contestation sérieuse est irrecevable ;

- qu'au vu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, il est

demandé à la cour de débouter la société Herka de sa demande de délai de paiement.

Dans ses conclusions remises le 30 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la SARL Herka demande à la cour, au visa des articles 1343-5 du code civil et L. 145-41 du code de commerce, de :

- débouter la société Inès de son appel ;

- juger la société Inès irrecevable en ses demandes ;

- confirmer l'ordonnance rendue par le président du tribunal judiciaire de Bobigny en date du 7 septembre 2022 en toutes ses dispositions ;

à titre subsidiaire, dans l'éventuelle réformation de l'ordonnance entreprise,

- juger que la société Herka pourra se libérer de sa dette locative en 24 versements égaux ;

- suspendre les effets de la clause résolutoire pendant le cours de ces délais ;

- juger que la société Herka sera redevable d'une indemnité d'occupation provisionnelle d'un montant égal au loyer contractuel en cours, y compris les charges et taxes dues jusqu'à la libération effective des locaux et remise des clefs ;

- juger qu'en cas de paiement de la somme due, la clause résolutoire sera réputée n'avoir pas joué ;

- débouter la société Inès toutes ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner la société Inès à payer à la société Herka la somme de 3.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

La SARL Herka expose en substance :

- que l'appelante est bien incapable de justifier du fondement juridique de la prétendue nullité de l'ordonnance entreprise puisque l'article 16 du code de procédure civile ne prévoit pas que le non-respect du contradictoire soit sanctionné par la nullité ;

- que le moyen tiré de la violation de l'article 5 du code de procédure est irrecevable comme nouveau ;

- qu'aucun décompte de créance n'était joint au commandement de payer ;

- que la société Inès ne craint pas d'alourdir la dette de son locataire en procédant à une dénonciation à son locataire d'une saisie conservatoire pour un montant de 76.895,73 euros incluant une indemnité d'occupation égale au double du loyer contractuel ;

- que le premier juge a retenu à bon droit la contestation sérieuse portant sur le décompte, de sorte qu'elle peut solliciter la confirmation de l'ordonnance entreprise et des délais, sans former aucune autre demande ;

- qu'il apparaît clairement que la clause résolutoire a été mise en 'uvre de mauvaise foi par le bailleur qui n'a pas cherché à résoudre à l'amiable les difficultés rencontrées avec son locataire qui l'a tenu informé de manière régulière et qui a réalisé des investissements financiers très importants dans ce local commercial qui a été remis entièrement à neuf ;

- que la reprise des paiements courants justifie l'octroi de délais.

SUR CE LA COUR

L'article L. 145-41 du code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail commercial prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement de payer demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

L'expulsion d'un locataire commercial devenu occupant sans droit ni titre en vertu du jeu d'une clause résolutoire de plein droit peut être demandée au juge des référés du tribunal judiciaire en application des dispositions de l'article 835 du code de procédure civile, dès lors que le maintien dans les lieux de cet occupant constitue un trouble manifestement illicite ou qu'à tout le moins l'obligation de libérer les lieux correspond dans cette hypothèse à une obligation non sérieusement contestable.

Il sera rappelé à cet égard :

- qu'un commandement de payer visant la clause résolutoire délivré pour une somme supérieure à la dette véritable reste valable pour la partie des sommes réclamées effectivement due ;

- qu'il n'appartient pas à la cour, statuant comme juge des référés, de prononcer la nullité d'un commandement de payer, sachant qu'il n'entre pas dans les pouvoirs du magistrat des référés de prononcer une telle nullité ; que le juge des référés ne peut que déterminer si les éventuelles irrégularités, invoquées à l'encontre du commandement, sont susceptibles de constituer un moyen de contestation sérieuse l'empêchant de constater la résolution du bail.

En outre, aux termes des dispositions de l'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile, le président du tribunal peut, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, allouer une provision au créancier.

L'article 1343-5 du code civil précise que le juge peut, compte tenu de la situation du débiteur et en considération des besoins du créancier, reporter ou échelonner, dans la limite de deux années, le paiement des sommes dues.

Aux termes des dispositions de l'article L.145-41 du code de commerce, les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

En l'espèce, la SCI Inès sollicite d'abord l'annulation de l'ordonnance, au motif que le premier juge n'aurait pas respecté le principe de la contradiction et aurait statué extra petita en violation de l'article 5 du code de procédure civile.

Il sera d'abord observé que la demande d'annulation est recevable, comme ayant bien été soulevé dès ses premières écritures par l'appelante, conformément aux dispositions de l'article 910-4 du code de procédure civile.

L'appelante observe valablement à cet égard qu'il importe peu qu'elle n'ait soulevé la violation de l'article 5 du code de procédure civile que dans le deuxième jeu de ses écritures, les moyens pouvant en effet évoluer, ce à partir du moment où les prétentions ont été formulées dès les premières conclusions, ce qui est le cas de la demande d'annulation.

Reste que la demande d'annulation de l'ordonnance ne saurait prospérer, étant rappelé :

- que la SCI Inès n'explicite pas en quoi les violations alléguées du principe de la contradiction ou de l'article 5 du code de procédure civile seraient de nature à justifier, dans la présente procédure, non l'infirmation de la décision, mais son annulation, le premier juge ayant en toute hypothèse estimé que les demandes formées ne relevaient pas des pouvoirs du juge des référés ;

- qu'au surplus, l'acte introductif d'instance devant le premier juge est régulier, de même que la décision entreprise apparaît motivée en droit et en fait, la nullité de l'ordonnance ne pouvant donc dans ces conditions être constatée.

Par ailleurs, toujours à titre liminaire, la SCI Inès expose que la SARL Herka serait irrecevable à faire état en appel de contestations sérieuses eu égard à ses prétentions devant le premier juge, limitées à une demande de délais de paiement.

Cependant, force est de constater :

- qu'à la suite de l'appel de la bailleresse, la société preneuse sollicite la confirmation de la décision de première instance, de sorte qu'il ne saurait être considéré qu'elle forme une nouvelle demande au sens de l'article 564 du code de procédure civile ;

- que les contestations sérieuses visent en outre à écarter la demande d'expulsion de la bailleresse, ce qui caractérise à tout le moins une prétention visant à écarter les prétentions adverses, et comme telle recevable, en application de la disposition précitée.

Au fond du référé, il sera constaté :

- que le commandement de payer délivré le 22 décembre 2021 par la SCI Inès, visant la clause résolutoire, mentionne une somme à payer au principal de 20.620 euros ;

- que ce commandement (pièce 2 appelante) reproduit les dispositions des articles L. 145-41 et L. 145-17 du code de commerce, outre l'article 11 du contrat prévoyant la clause résolutoire ;

- qu'il comporte bien un décompte précis des sommes dues, à savoir, dans un tableau reproduit en page 1, les loyers et charges au titre des mois de septembre 2021, octobre 2021, novembre 2021, décembre 2021 ;

- que la circonstance que ce décompte soit dans le corps du commandement, et non dans un document annexé, importe peu, le commandement de payer étant suffisamment précis pour permettre au preneur de connaître la nature précise des sommes dues ;

- qu'à titre de contestation sérieuse, la SARL Herka expose aussi qu'elle aurait pris en charge des travaux incombant au bailleur, ce qui explique qu'elle n'a pas réglé les loyers dus ;

- qu'il faut toutefois relever, tout comme le fait valoir la SCI Inès, que la prise en charge de travaux n'est pas exclusive du règlement des loyers, étant précisé que l'unique stipulation relative à une éventuelle franchise de loyers se limitait à trois mois, à compter du 1er juin 2021, et que pour le reste, le preneur s'était bien engagé, aux termes de l'article 1er du bail, à prendre les locaux en l'état et à effectuer les travaux d'aménagement ;

- que les travaux en question, eu égard aux pièces produites, sont bien relatifs à l'aménagement des locaux, imputable au locataire en application de l'article 1er du bail, la contestation élevée sur ce point n'étant donc pas sérieuse pour s'opposer au paiement des loyers ;

- que, nonobstant les travaux entrepris, il ne saurait être considéré que le commandement ait été délivré de mauvaise foi, alors que la société preneuse n'avait réglé, au moment de sa délivrance, aucune somme pour les mois de septembre 2021, octobre 2021, novembre 2021 et décembre 2021 ;

- que le commandement est demeuré infructueux dans le délai d'un mois, ce qui n'est pas contesté par la SARL Herka ;

- que, dans ces circonstances, il y a lieu de constater, par infirmation de la décision entreprise, l'acquisition de la clause résolutoire au 23 janvier 2022, avec toutes conséquences de droit ;

- que, s'agissant des demandes en paiement, il sera rappelé que la société bailleresse sollicite au titre de l'indemnité d'occupation le doublement du loyer qui aurait été dû, outre la conservation du dépôt de garantie ;

- qu'il faut rappeler à cet égard qu'une clause pénale est une clause qui stipule que celui qui manquera d'exécuter le contrat paiera une certaine somme à titre de dommages et intérêts ; que constitue une telle clause toute stipulation qui évalue, de manière anticipée et forfaitaire, les conséquences de l'inexécution d'une obligation, ce qui inclut notamment, dans le cas d'un défaut de paiement, l'augmentation de l'indemnité d'occupation due, par rapport au loyer contractuel qui aurait été versé, ou encore la conservation du dépôt de garantie ; que le pouvoir du juge du fond de modérer la clause pénale ne prive pas le juge des référés du pouvoir d'allouer une provision, au titre de celle-ci ; que, cependant, le juge des référés peut retenir l'existence d'une contestation sérieuse empêchant son application, lorsque la clause pénale apparaît sérieusement susceptible d'être modérée par le juge du fond, compte tenu de son montant et de l'avantage manifestement excessif pour le créancier qui résulterait de son application ;

- qu'ici, le doublement de l'indemnité d'occupation est de nature à procurer un avantage manifestement excessif, de même que la conservation de l'intégralité du dépôt de garantie ;

- qu'aussi, l'indemnité d'occupation provisionnelle sera limitée à la somme de 4.800 euros TTC (et non à 9.600 euros TTC comme il est réclamé), outre les taxes, charges et accessoires, étant observé que le rejet de la demande de doublement de l'indemnité d'occupation doit conduire à une limitation des sommes dues sans pour autant empêcher de constater l'acquisition de la clause résolutoire, comme l'invoque en vain la société intimée ;

- qu'il ne sera pas fait droit, pour les mêmes motifs, à la demande de la société bailleresse de voir la société preneuse lui verser provisionnellement au titre de l'arriéré la somme de 141.318,71 euros, cette somme prenant en compte un doublement de l'indemnité d'occupation excédant l'obligation non sérieusement contestable de paiement de la SARL Herka ;

- que, subsidiairement, la SCI Inès réclame la somme provisionnelle de 87.635 euros, si jamais la cour ne devait pas faire droit à la demande de doublement de l'indemnité d'occupation ;

- que la SARL Herka indique qu'il conviendrait de déduire deux versements de 5.155 euros effectués le 12 décembre 2022, outre la saisie conservatoire de 18.419,83 euros effectuée le 2 juin 2022, ce que conteste la SCI Inès ;

- que, sur ces deux points, la SARL Herka verse aux débats un avis de virement de décembre 2022 (pièce 21), outre une copie d'écran de son compte bancaire (pièce 26) ;

- qu'il y a donc bien lieu de déduire la somme de deux fois 5.155 euros des sommes dues, au regard des éléments suffisants démontrant le paiement de cette somme ;

- qu'en revanche, concernant la saisie conservatoire, elle ne saurait être déduite des sommes dues comme l'expose la SCI Inès, une telle saisie n'étant pas une saisie-attribution emportant entrée des sommes dans le patrimoine du saisissant ;

- qu'au regard des sommes non versées au titre des loyers et charges et indemnités d'occupation, sont incontestablement dues les échéances des mois de septembre 2021 à janvier 2023 inclus (5.155 euros X 17, soit 87.635 euros), somme à laquelle il convient de déduire un paiement effectué le 5 octobre 2022 (5.155 euros, non contesté par l'appelante) et les deux règlements susvisés de 5.155 euros, soit un total de 72.170 euros ;

- que l'obligation non sérieusement contestable de paiement de la SCI Inès s'établit donc à 72.710 euros, avec paiement des intérêts légaux dans les conditions indiquées au dispositif, étant observé que le commandement de payer ne devant pas être pris en compte s'agissant du coût de l'acte et que le surplus des sommes dues, eu égard aux paiements intervenus, portera intérêts au taux légal à compter de la signification du présent arrêt.

Ainsi, la décision sera infirmée, la cour, statuant à nouveau, devant constater l'acquisition de la clause résolutoire et condamner la société preneuse à verser à titre provisionnel la somme indiquée ci-après au titre de l'arriéré. Il sera dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes de la société appelante.

S'agissant de la demande de délais de l'intimée, il faut constater qu'elle ne justifie toutefois pas des perspectives permettant d'envisager une meilleure santé financière.

En particulier, la SARL Herka ne verse ni bilan ni compte de résultats, ni même des éléments comptables relatives à ses perspectives de redressement.

Force est de constater aussi que la dette locative s'est encore aggravée par rapport à la somme indiquée dans le commandement de payer, les paiements n'ayant été que très partiels.

Aussi, la demande de délais sera rejetée.

La SARL Herka sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel et devra indemniser la SCI Inès pour ses frais non répétibles exposés, dans les conditions indiquées au dispositif de la présente décision.

PAR CES MOTIFS

Déclare recevable la demande d'annulation de l'ordonnance formée par la SCI Inès ;

Rejette la demande d'annulation formée par la SCI Inès ;

Déclare recevables les prétentions formées par la SARL Herka à hauteur d'appel ;

Infirme l'ordonnance entreprise ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Constate l'acquisition de la clause résolutoire du bail signé entre les parties à compter du 23 janvier 2022 ;

Ordonne, à défaut de libération volontaire des lieux, l'expulsion de la SARL Herka et de tout occupant de son chef, dans les quinze jours à compter de la signification du présent arrêt, au besoin avec le concours de la force publique et d'un serrurier, du local à usage commercial situé [Adresse 1]) ;

Dit qu'en cas de besoin, les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désignée par elle et qu'à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrit avec précision par l'huissier chargé de l'exécution, avec sommation à la personne expulsée d'avoir à les retirer dans le délai d'un mois non renouvelable à compter de la signification de l'acte, à l'expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l'exécution, ce conformément à ce que prévoit le code des procédures civiles d'exécution ;

Condamne la SARL Herka à payer à titre provisionnel à la SCI Inès une indemnité d'occupation mensuelle de 4.800 euros TTC, outre les taxes, charges et accessoires, ce à compter de l'acquisition de la clause résolutoire et jusqu'à la libération effective des lieux par la remise des clés ;

Condamne la SARL Herka à payer à titre provisionnel à la SCI Inès la somme de 72.710 euros correspondant à l'arriéré dû, somme arrêtée au mois de janvier 2023, avec les intérêts au taux légal à compter du commandement de payer du 22 décembre 2021 pour la somme de 20.620 euros et à compter de la signification du présent arrêt pour le surplus ;

Rejette la demande de délais formée par la SARL Herka ;

Dit n'y avoir lieu à référé sur les autres demandes ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne la SARL Herka à payer à la SCI Inès la somme de 3.000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non répétibles de première instance et d'appel ;

Condamne la SARL Herka aux dépens de première instance et d'appel, qui comprendront le coût du commandement de payer du 22 décembre 2021.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/16346
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;22.16346 ?
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