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02/03/2023 | FRANCE | N°22/15000

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 02 mars 2023, 22/15000


Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS





COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2



ARRET DU 02 MARS 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15000 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGJXF



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2022 -Président du TJ de MEAUX - RG n° 22/00261





APPELANTE



S.A.R.L. TÔ PATRIMOINE, RCS de Créteil sous le n°B479 810 111, prise en

la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 3]

[Adresse 3]



Représentée par Me Blandine VERGER de la SELEURL VIRIDIS AVOCAT,...

Copies exécutoires REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRET DU 02 MARS 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/15000 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGJXF

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 29 Juin 2022 -Président du TJ de MEAUX - RG n° 22/00261

APPELANTE

S.A.R.L. TÔ PATRIMOINE, RCS de Créteil sous le n°B479 810 111, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Blandine VERGER de la SELEURL VIRIDIS AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, toque : C1989

Assistée à l'audience par Me Marion ROMME, avocat au barreau de CAEN

INTIMEE

S.A.S.U. SGLM TORCY, RCS de Paris sous le n°B514 181 270, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée et assistée par Me Jérôme DE FREMINVILLE, avocat au barreau de PARIS, toque : W15

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 804, 805 et 905 du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 25 Janvier 2023, en audience publique, les avocats des parties ne s'y étant pas opposés, devant Thomas RONDEAU, Conseiller, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSÉ DU LITIGE

La société Tô Patrimoine a, suivant acte du 31 décembre 2004, acquis sept lots de copropriété n°1028 à 1035 dans une résidence étudiante avec services sise [Adresse 1].

Elle a par la suite conclu, le 6 octobre 2009, un bail commercial avec la société SGLM Torcy aux fins de location meublée des logements, pour une durée de douze ans.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 31 mars 2021, la société SGLM Torcy a donné congé à la société Tô Patrimoine, pour le 30 octobre 2021.

Le congé a été réitéré par la société SGLM Torcy suivant acte d'huissier du 22 avril 2021 à la société Tô Patrimoine.

Le 27 mai 2021, la société Tô Patrimoine a indiqué sa volonté de poursuivre la location mais sans les services para-hôteliers.

SGLM Torcy a écrit le 19 mai 2021 aux locataires dont le bail prenait fin entre le 18 août et le 31 octobre 2021 pour mettre fin à leur contrat de location.

Les baux consentis aux locataires des appartements 1029 et 1035 expirant respectivement les 10 et 24 juillet 2021, il est toutefois apparu qu'il était trop tard pour leur délivrer un congé respectant un préavis de 3 mois.

Selon la société Tô Patrimoine, la société SGLM Torcy aurait dû donner congé aux locataires des deux derniers lots de copropriété dont elle est titulaire.

Par acte du 4 mars 2022, la société Tô Patrimoine a fait assigner la société SGLM Torcy devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Meaux, sollicitant à l'audience de plaidoiries de voir :

- condamner la société SGLM Torcy à lui verser à la somme de 2.654 euros à titre de provision sur les indemnités d'occupation ;

- condamner la société SGLM Torcy à lui restituer l'appartement n°1029 dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir libre de toute occupation sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

- dire que cette restitution ne sera réalisée qu'après l'établissement d'un état des lieux de sortie et la remise des clés de l'appartement à la société Tô Patrimoine ;

- condamner la société SGLM Torcy à lui verser la somme de 5.691,80 euros ;

- condamner la société SGLM Torcy à lui verser la somme de 5.000 euros en raison de la résistance abusive ;

- condamner la société SGLM Torcy à lui verser la somme de 4.000 euros au titre des dispositions de l'article, 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

En défense, la société SGLM Torcy a demandé au juge de dire n'y avoir lieu à référé et de voir condamner la société demanderesse à lui verser 3.500 en application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par ordonnance contradictoire du 29 juin 2022, le juge des référés a :

- dit n'y avoir lieu à référé ;

- condamné la société Tô Patrimoine à payer à la société SGLM Torcy la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Tô Patrimoine aux dépens.

Par déclaration du 9 août 2022, la société Tô Patrimoine a interjeté appel de la décision.

Dans ses conclusions remises le 23 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société Tô Patrimoine demande à la cour, au visa des articles 834 et 835 du code de procédure civile, des articles 544, 1240, 1241 et 1709 du code civil, de l'article L. 145-4 du code du commerce, de :

- infirmer l'ordonnance du 29 juin 2022 rendue par le président du tribunal judiciaire de Meaux en ce qu'elle a :

* dit n'y avoir lieu à référé ;

* condamné la société Tô Patrimoine à payer à la société SGLM Torcy la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

* condamné la société Tô Patrimoine aux dépens ;

statuant à nouveau,

- condamner la société SGLM Torcy à restituer l'appartement n° 1029 dans un délai de 15 jours à compter de la décision à intervenir libre de toute occupation sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

- dire que cette restitution ne sera réalisée qu'après l'établissement d'un état des lieux de sortie et la remise des clés de l'appartement à la société Tô Patrimoine ;

- condamner la société SGLM Torcy à verser à la société Tô Patrimoine la somme de 2.104 euros à titre de provision sur l'indemnité d'occupation due au titre de l'occupation du logement n°1035 ;

- condamner la société SGLM Torcy à verser à la société Tô Patrimoine la somme de 5.500 euros à titre de provision sur l'indemnité d'occupation due pour la période de novembre 2021 à septembre 2022, outre 550 euros par mois jusqu'à restitution de l'appartement du logement n°1029 ;

- débouter la société SGLM Torcy de l'ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;

- condamner la société SGLM Torcy à verser à la société Tô Patrimoine la somme de 5.000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société SGLM Torcy aux entiers dépens de première instance et d'appel.

La société Tô Patrimoine expose en substance :

- qu'il n'existe pas de contestation de l'obligation de la SGLM Torcy de quitter les lieux au 1er novembre 2021 et de lui restituer les lieux ;

- qu'au 1er novembre 2021, la SGLM Torcy n'a pas quitté les lieux, manquant ainsi à son obligation de restitution, les lots 1029 et 1035 n'ayant pas été remis à leur propriétaire Tô Patrimoine ;

- que, dès lors que certains baux meublés avec services étaient encore en cours d'exécution, il lui appartenait de pourvoir au relogement des locataires afin de remplir son obligation de restituer les lieux ;

- qu'à hauteur d'appel, la SGLM Torcy sera condamnée à restituer l'appartement 1029 libre de toute occupation dans un délai de 15 jours à compter de la signification de la décision à intervenir, sous astreinte de 200 euros par jour de retard ;

- que le préjudice lié à l'occupation des deux logements doit donner lieu à condamnation provisionnelle.

Dans ses conclusions remises le 19 décembre 2022, auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé de ses prétentions et moyens, la société SGLM Torcy demande à la cour, au visa de l'article 839 du code de procédure civile, de :

- confirmer l'ordonnance de référé du 29 juin 2022 ;

- débouter la société Tô Patrimoine de l'ensemble de ses demandes ;

subsidiairement,

- dire n'y avoir lieu à référé et rejeter l'ensemble des demandes de la société Tô Patrimoine ;

en tout état de cause,

- condamner la société Tô Patrimoine au paiement de la somme de 2.500 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Tô Patrimoine aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me de Freminville, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

La société SGLM Torcy expose en substance :

- que s'agissant en l'espèce de logements loués en meublés avec au demeurant des prestations secondaires de services dans le cadre d'une copropriété qui impose d'exploiter les logements avec services, les occupants avaient un droit acquis à la reconduction de leur bail par l'effet de l'article L. 632-2 du code de la construction et de l'habitation ;

- que la société SGLM Torcy n'a pas commis de faute pour n'avoir pas délivré de congé les 11 et 24 avril 2021 ; que la société appelante ne justifie pas d'un préjudice ;

- que la société appelante est la seule créancière des locataires occupants, la société SGLM Torcy ne pouvant plus engager une action.

SUR CE LA COUR

L'article 834 du code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d'urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l'existence d'un différend.

Une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposé aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Selon l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

Le dommage imminent s'entend du dommage qui n'est pas encore réalisé, mais qui se produira sûrement si la situation présente doit se perpétuer. Le trouble manifestement illicite découle de toute perturbation résultant d'un fait qui directement ou indirectement constitue une violation évidente de la règle de droit.

L'article 835 alinéa 2 du code de procédure civile dispose que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours accorder en référé une provision au créancier ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

Le montant de la provision en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée.

En l'espèce, il sera rappelé que la société appelante sollicite la condamnation provisionnelle de la société intimée pour le lot 1305, au titre des indemnités d'occupation pour la période du 1er novembre 2021 au 4 mars 2022, au motif que SGLM Torcy n'a pas fait libérer les lieux jusqu'à cette date.

S'agissant du lot 1029, il est sollicité de la SGLM Torcy qu'elle soit condamnée à restituer les locaux, outre le paiement d'une indemnité d'occupation du 31 octobre 2021 jusqu'à ce jour.

Il faut par ailleurs indiquer à titre liminaire que le type de location en cause est soumis notamment aux dispositions de l'article L. 632-2 du code de la construction et de l'habitation.

Selon cet article, lorsque le bailleur, propriétaire ou gérant du fonds doit, pour quelque motif que ce soit, cesser son activité, il en informe les locataires titulaires du contrat mentionné à l'article L. 632-1 trois mois au moins avant la date à laquelle la cessation d'activité est prévue. Sauf cas de force majeure ou de mise en oeuvre des procédures de sauvegarde ou de redressement judiciaire prévues par le code de commerce, la cessation d'activité ne peut avoir lieu avant l'expiration des contrats en cours de validité ou avant le relogement des locataires titulaires desdits contrats. Si, en dépit de la cessation d'activité du bailleur, les locaux gardent leur destination première, le contrat de bail est tacitement reconduit. Si, en revanche, la cessation d'activité est due à une opération d'urbanisme ou d'aménagement, les occupants doivent être relogés aux frais de l'opérateur dans les conditions prévues aux articles L. 314-1 et L. 314-2 du code de l'urbanisme.

Force est alors de constater :

- que, selon le bail commercial signé entre les parties le 6 octobre 2009, la société Tô Patrimoine a donné à bail les appartements à la société SGLM Torcy, afin que celle-ci les mette en location dans le cadre d'une résidence en meublés avec services ;

- que le bail a pris effet au 1er novembre 2009 pour une durée de douze ans, pouvant donc être résilié le 31 octobre 2021, ce qu'a choisi finalement de faire la société Tô Patrimoine ;

- qu'interrogée par la société intimée à la suite de la fin du contrat de bail commercial, la société appelante a indiqué (courriel des 11 mai et 27 mai 2021) explicitement vouloir "poursuivre la location", "sans les services para-hôteliers" ;

- qu'à la suite de la cessation du bail commercial, la société Tô Patrimoine a conservé le dépôt de garantie des deux lots en cause, ce que cette dernière ne conteste pas même si elle indique que ces fonds auraient été virés sans son accord ;

- que, dans ces circonstances, la société SGLM Torcy élève bien une contestation sérieuse aux demandes formées par la société Tô Patrimoine, dans la mesure où, nonobstant la nécessité d'attendre l'expiration des contrats ou de procéder au relogement, que suppose la première partie de l'article L. 632-2 en cas de cessation d'activité, la poursuite de l'activité de location a aussi pu avoir pour effet - conformément à la suite de cet article qui ne limite pas explicitement cette hypothèse aux cas de force majeure ou de mise en oeuvre d'une procédure collective - la reconduction tacite des contrats au profit de la société Tô Patrimoine, étant observé que cette dernière a bien indiqué vouloir "poursuivre les locations" et que, comme l'expose l'intimée, le règlement de copropriété prévoit toujours que l'immeuble est destiné à l'usage de résidence d'habitation avec services, de sorte que les locaux pourraient à tout le moins avoir conservé leur destination première au sens de l'article précité, peu important les contrats signés par la suite ;

- que, dès lors, si les contrats ont pu être reconduits tacitement, nécessairement avec la société Tô Patrimoine, au profit des occupants, cette dernière société ne peut, avec l'évidence requise en référé, solliciter de SGLM Torcy le paiement d'indemnités d'occupation provisionnelles après le 31 octobre 2021 ou la restitution d'un logement sous astreinte, le trouble manifestement illicite au sens de l'article 835 alinéa 1er du code de procédure civile n'étant pas établi ou, à tout le moins, de sérieuses contestations sérieuses s'opposant aux demandes formées par l'appelante sur le fondement des articles 834 et 835 alinéa 2 du code de procédure civile.

Aussi, au regard de l'ensemble de ces éléments, nonobstant les autres moyens soulevés, en l'absence d'obligation de restitution établie avec l'évidence requise en référé, il y a lieu de confirmer l'ordonnance entreprise, en ce compris le sort des frais et dépens de première instance exactement réglé par le premier juge.

A hauteur d'appel, l'appelante devra indemniser l'intimée pour ses frais non répétibles exposés et sera condamnée aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes de la SARL Tô Patrimoine ;

Condamne la société Tô Patrimoine à verser à la société SGLM Torcy la somme de 2.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à hauteur d'appel ;

Condamne la société Tô Patrimoine aux dépens d'appel, qui seront recouvrés par Me de Freminville, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.0

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/15000
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;22.15000 ?
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