La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

02/03/2023 | FRANCE | N°22/11930

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 02 mars 2023, 22/11930


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 02 MARS 2023



(n° , 8 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/11930 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGA7C



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Juin 2022 -Tribunal de proximité du RAINCY - RG n° 12-21-1626





APPELANTS



M. [N] [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]
r>

Mme [F] [K] épouse [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]



Ayant pour avocat postulant Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représent...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 02 MARS 2023

(n° , 8 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/11930 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGA7C

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Juin 2022 -Tribunal de proximité du RAINCY - RG n° 12-21-1626

APPELANTS

M. [N] [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Mme [F] [K] épouse [D]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Ayant pour avocat postulant Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477

Représentés à l'audience par Me Gaspard LUNDWALL, avocat au barreau de PARIS, toque : T06

INTIME

M. [S] [C]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Ayant pour avocat postulant Me Elise ORTOLLAND de la SEP ORTOLLAND, avocat au barreau de PARIS, toque : R231

Représenté à l'audience par Me Alkan LALOUM, avocat au barreau de TOURS

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 26 janvier 2023, en audience publique, Michèle CHOPIN, Conseillère, ayant été entendue en son rapport dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile, devant la cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre

Thomas RONDEAU, Conseiller,

Michèle CHOPIN, Conseillère,

Qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

M. [S] [C] est propriétaire d'un immeuble situé [Adresse 1].

Depuis le mois de septembre 2016, M. [D] et Mme [K], épouse [D], occupent ledit bien.

Par acte notarié du 6 octobre 2021, M. [C] s'est engagé à vendre ce bien à M. [I] et Mme [G], épouse [I], moyennant le prix de 750.000 euros.

Par exploit du 28 octobre 2021, M. [C] a fait délivrer à M et Mme [D] une sommation de quitter les lieux au 15 décembre 2021.

 Par exploit du 16 décembre 2021, M. [C] a fait assigner M et Mme [D] devant le juge des référés du tribunal de proximité du Raincy aux fins de voir :

- juger que M. [D] et Mme [K] épouse [D] et tous les occupants de leur chef sont occupants sans droit ni titre ;

- ordonner leur expulsion, avec l'assistance de la force publique si besoin est, et sous astreinte de 300 euros par jour de retard à compter de la signification de la décision ;

- condamner solidairement M. [D] et Mme [K] épouse [D] à payer la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens dont le coût de la sommation de quitter les lieux.

Par ordonnance du 13 juin 2022, le juge des référés du tribunal de proximité du Raincy a :

- débouté M. [C] de sa demande visant à écarter des débats la pièce n°6-1 produite par M. [D] et Mme [K] épouse [D] ;

- dit que M. [D] et Mme [K] épouse [D] sont occupants sans droit ni titre des locaux situés [Adresse 1]), depuis le 16 décembre 2021 ;

- ordonné, à défaut de départ volontaire des lieux, l'expulsion de M. [D] et Mme [K] épouse [D] ainsi que de tout occupant de leur chef, dans un délai de deux mois de la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est ;

- dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution ;

- condamné solidairement M. [D] et Mme [K] épouse [D] à verser à M. [C] une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle à hauteur de 3.520 euros pour la période courant du 16 décembre 2021 jusqu'à la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la remise des clés à la demandereresse ou le procès-verbal d'expulsion ;

- dit que les sommes d'ores et déjà versées par M. [D] et Mme [K] épouse [D] pour la période d'occupation postérieure au 16 décembre 2021 viendront en déduction des sommes provisionnelles dues par eux ;

- débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leurs demandes au titre de l'exercice et de la purge du droit de préemption ;

- débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leur demande de condamnation de M. [C] à leur céder, sous astreinte, le bien sis [Adresse 1]) ;

- débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leur demande de dommages et intérêts ;

- condamné in solidum M. [D] et Mme [K] épouse [D] à payer à M. [C] la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné in solidum M. [D] et Mme [K] épouse [D] aux entiers dépens de l'instance ;

- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires ;

- rappelé que la présente ordonnance est exécutoire à titre provisoire.

Par déclaration du 24 juin 2022, M et Mme [D] ont interjeté appel de cette décision.

Dans leurs dernières conclusions remises et notifiées le 10 janvier 2023, M. et Mme [D] demandent à la cour de :

- les déclarer recevables et bien fondés en leur appel ;

- infirmer la décision entreprise en ce qu'elle a :

' dit qu'ils sont occupants sans droit ni titre des locaux situés [Adresse 1]), depuis le 16 décembre 2021,

' ordonné, à défaut de départ volontaire des lieux, leur expulsion ainsi que celle de tout occupant de leur chef, dans un délai de deux mois de la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est,

' dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,

' condamné solidairement ceux-ci à verser à M. [C] une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle à hauteur de 3.520 euros pour la période courant du 16 décembre 2021 jusqu'à la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la remise des clés à la demandereresse ou le procès-verbal d'expulsion,

' dit que les sommes d'ores et déjà versées par eux pour la période d'occupation postérieure au 16 décembre 2021 viendront en déduction des sommes provisionnelels dues par eux,

' débouté ceux-ci de leurs demandes au titre de l'exercice et de la purge du droit de préemption,

' débouté ceux-ci de leur demande de condamnation de M. [C] à leur céder, sous astreinte, le bien sis [Adresse 1],

' débouté ceux-ci de leur demande de dommages et intérêts,

' condamné in solidum ceux-ci à payer à M. [C] la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouté ceux-ci de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné in solidum ceux-ci aux entiers dépens de l'instance,

' débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

' rappelé que la présente ordonnance est exécutoire à titre provisoire,

Statuant à nouveau,

A titre principal,

- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- prononcer le séquestre de la maison située [Adresse 1] jusqu'à l'obtention d'une décision définitive au fond se prononçant sur la propriété de ladite maison ;

A titre subsidiaire,

- réduire le montant de l'indemnité d'occupation à 2.000 euros par mois, le surplus jusque là s'imputant sur les versements à venir ;

En tout état de cause,

- débouter M. [C] de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

- condamner M. [C] à leur payer la somme de 10.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile et ;

- condamner M. [C] aux entiers dépens de première instance et d'appel.

M. et Mme [D] soutiennent en substance que :

- en présence d'une contestation sérieuse, le juge des référés n'a pas le pouvoir de prononcer l'expulsion,

- en l'espèce, ils ont demandé à louer la maison de M. [C] mais en aucun cas à titre gratuit, comme en témoigne le contrat de bail mentionnant un loyer mensuel de 2.000 euros proposé par M. [C] tandis qu'il n'a jamais été question pour ce dernier de récupérer des "échantillons", mais bien des enveloppes contenant les loyers en espèces,

- en présence des décomptes qu'il produit lui-même, ce dernier ne peut contester l'existence d'un loyer reçu par lui et dont le paiement est inventorié dans des tableaux, alors que les parties ont régulièrement échangé par écrit à ce sujet,

- l'attitude de M. [C] a pour seul objectif de dissimuler à l'administration fiscale les revenus locatifs qu'il a perçus et de bénéficier d'une exonération d'imposition de la plus value consécutive à la vente, dès lors qu'il a déclaré dans le compromis de vente que la maison litigieuse était sa résidence principale,

- M. [D] leur a en outre communiqué la liste des réparations locatives en vertu de la loi du 6 juillet 1989 régissant les baux à loyer d'habitation et ce , dans le cadre d'une discussion portant sur la prise en charge de l'entretien du jardin,

- à titre subsidiaire, la maison est en réalité en très mauvais état en raison de sérieux problèmes d'humidité et d'affaissement du parquet du premier étage, et dès lors qu'ils ne sont pas occupants sans droit ni titre, aucune provision ne peut être envisagée en ce qui concerne une quelconque indemnité d'occupation, étant précisé qu'ils ont toujours réglé un loyer de seulement 2.000 euros,

- une mesure de séquestre est justifiée par l'existence d'un litige sérieux sur la propriété de la maison de façon à prévenir un dommage imminent ; ils sollicitent judiciairement leur substitution aux époux [I] dans le compromis du 6 octobre 2021 signé en fraude de leurs droits.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 06 janvier 2023, M. [C] demande à la cour, de :

- confirmer l'ordonnance du 13 juin 2022 en ce qu'elle a :

' dit que M. [D] et Mme [K] épouse [D] sont occupants sans droit ni titre des locaux situés [Adresse 1]), depuis le 16 décembre 2021,

' ordonné, à défaut de départ volontaire des lieux, l'expulsion de M. [D] et Mme [K] épouse [D] ainsi que de tout occupant de leur chef, dans un délai de deux mois de la signification d'un commandement d'avoir à libérer les lieux, avec l'assistance de la force publique et d'un serrurier si besoin est,

' dit que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L. 433-1 et L. 433-2 du code des procédures civiles d'exécution,

' condamné solidairement M. [D] et Mme [K] épouse [D] à lui verser une indemnité mensuelle d'occupation provisionnelle à hauteur de 3.520 euros pour la période courant du 16 décembre 2021 jusqu'à la libération effective et définitive des lieux, caractérisée par la remise des clés à la demandereresse ou le procès-verbal d'expulsion,

' dit que les sommes d'ores et déjà versées par M. [D] et Mme [K] épouse [D] pour la période d'occupation postérieure au 16 décembre 2021 viendront en déduction des sommes provisionnelels dues par eux,

' débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leurs demandes au titre de l'exercice et de la purge du droit de préemption,

' débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leur demande de condamnation de celui-ci à leur céder, sous astreinte, le bien sis [Adresse 1],

' débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leur demande de dommages et intérêts,

' condamné in solidum M. [D] et Mme [K] épouse [D] à lui payer la somme de 1.200 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' débouté M. [D] et Mme [K] épouse [D] de leur demande au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

' condamné in solidum M. [D] et Mme [K] épouse [D] aux entiers dépens de l'instance,

- dire et juger M. et Mme [D] mal fondés en leur appel ;

- débouter M. et Mme [D] de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;

- condamner solidairement M. et Mme [D] à lui verser la somme de 3.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile eu égard aux frais engagés en appel ;

- condamner solidairement M. et Mme [D] aux dépens d'appel.

M. [C] soutient en substance que :

- son action est bien fondée et les parties sont convenues en réalité d'un prêt à usage,

- ils ont été informés de la mise en vente de la maison et avaient accepté de quitter les lieux,

- l'intention des parties de conclure un commodat et non un bail d'habitation est démontrée par leurs échanges, les époux [D] ayant eux mêmes adressé à M. [C] un modèle de prêt à usage en juin 2021, lequel a pris fin le 15 décembre 2021, conformément à la sommation délivrée aux appelants, de sorte qu'il est bien fondé à solliciter leur expulsion et le paiement d'une indemnité d'occupation de 3.520 euros mensuelle à compter du 16 décembre 2021,

- il ressort avec évidence du dossier que les parties sont convenues d'un commodat de sorte que le juge des référés dispose du pouvoir de statuer,

- l'existence d'un bail d'habitation n'est pas démontrée alors que M. [C] notamment refacturait les charges aux époux [D] d'où les paiements intervenus, et que le terme "échantillons" était relatif à des échantillons de dentifrice ou brosses à dents régulièrement envoyés par M [D],

- la valeur locative de la maison a été estimée par deux agences immobilières,

- l'état actuel de la maison résulte d'un défaut d'entretien et d'une dégradation pendant six années d'occupation par les époux [D], étant précisé que lui même est très affecté par leur malhonnêteté et souffre d'un trouble anxio-dépressif,

- ils n'avaient pas la possibilité d'acheter la maison en 2016 et se sont occupés des visites, de sorte qu'ils n'ont pas l'intention de l'acquérir, et qu'aucune préemption ou substitution n'est envisageable en droit.

Pour un plus ample exposé des moyens des parties, il est renvoyé à leurs conclusions susvisées conformément à l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE,

Selon l'article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection peuvent toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L'alinéa 2 précise que, dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, ils peuvent accorder une provision au créancier, ou ordonner l'exécution de l'obligation même s'il s'agit d'une obligation de faire.

L'article 1875 du code civil dispose que le prêt à usage ou commodat est un contrat par lequel l'une des parties livre une chose à l'autre pour s'en servir, à la charge par le preneur de la rendre après s'en être servi tandis que l'article 1709 du code civil décrit le louage de choses comme le contrat par lequel l'une des parties s'oblige à faire jouir l'autre partie d'une chose pendant un certain temps et moyennant un certain prix que celle-ci s'oblige à payer.

Le trouble manifestement illicite ici visé s'entend de toute perturbation résultant d'un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit.

L'occupation sans droit ni titre d'un immeuble est ainsi de nature à constituer un trouble manifestement illicite, ou, à tout le moins, l'obligation de quitter les lieux est non sérieusement contestable.

Le juge des référés, juge du provisoire et de l'évidence, ne dispose pas du pouvoir de qualifier ou interpréter un contrat sauf avec l'évidence requise en référé mais il peut examiner si un locataire est occupant sans droit ni titre, à la condition que les contestations élevées ne le conduisent pas à constater l'existence de contestations sérieuses ou d'un trouble qui ne serait pas "manifestement illicite".

Il incombe à la partie qui sollicite une mesure d'expulsion afin de faire cesser un trouble manifestement illicite résultant d'une occupation d'un local sans droit ni titre, de caractériser une telle occupation.

En l'espèce, il y a lieu de relever que :

- les époux [D] sont entrés dans les lieux le 7 septembre 2016, ce qui ne fait pas débat,

- le 24 août 2021, M. [C] leur a adressé un sms dans les termes suivants : "Suite à notre entretien de ce jour, je vous confirme la mise en vente de la maison. Je ne souhaite pas la louer. J'attends votre offre et je vous tiens au courant",

- une promesse de vente a été signée entre M. [C] et les époux [I] le 6 octobre 2021, et une sommation de quitter les lieux le 15 décembre 2021s'en est suivie par exploit du 28 octobre 2021 délivré à l'initiative de M [C] aux époux [D],

- or, il résulte des pièces produites notamment que le 5 septembre 2016, M. [D] a écrit à M. [C] en ces termes: "suite à la visite de votre maison au [Adresse 1], nous vous informons qu'il nous est impossible d'acquérir votre propriété pour l'instant. D'autre part, comme nos enfants sont scolarisés à [Localité 2] (tout proche de chez vous), nous vous demandons si vous pouvez mettre à disposition votre maison, le temps nécessaire pour trouver autre chose. Cela évitera les voyages quotidiens et fatigants pour mon épouse qui est enceinte et mes enfants. Bien entendu nous vous rembourserons votre consommation EDF, GAZ, EAU, TELEPHONE ". Les époux [D] ont adressé à M. [C] au mois de juin 2021 un modèle de prêt à usage, vierge, précisant lors d'un message retranscrit en date du 4 août 2021 qu'ils n'étaient pas dans une "location normale" et ajoutant: "si vous souhaitiez que je quitte la maison, je la quitte dans deux mois le temps de faire mes affaires sans problèmes", M. [C] n'ayant pas donné suite au projet de prêt à usage qui lui a été soumis,

- il est également produit par les époux [D] un "projet de bail", que M. [C] conteste avoir fait établir, et qui est en réalité un formulaire vierge,

- les époux [D] établissent avoir fait de la maison leur résidence principale au sens fiscal, au cours de l'année 2021, ce qui est toutefois sans incidence sur la nature des liens existants entre les parties, cette maison étant au surplus également la résidence fiscale de M. [C], et produisent une attestation d'assurance cependant datée du 23 mars 2022, et qui, compte tenu de cette date, est sans incidence sur le litige aussi,

- peu importe dans ces conditions que M. [C] réside à une autre adresse ([Localité 3]), alors qu'il ne conteste pas l'occupation de sa maison de [Localité 2] par les époux [D],

- force est de constater d'ailleurs que les époux [D] ne produisent aucun abonnement à leur nom relatifs à l'électricité, le gaz, ou internet, restés manifestement au nom de M. [C], ce qui discrédite leur thèse selon laquelle ils seraient titulaires d'un bail,

- en outre, s'agissant des règlements allégués entre les parties, par le biais d'enveloppes et de la plate-forme Revolut, les décomptes produits ne permettent pas de vérifier le règlement d'une somme de 2.000 euros par mois et revèlent en réalité des règlements irréguliers, qui, en l'état, pourraient être rattachés au remboursement de charges,

- dans ces conditions, les époux [D] ne démontrent pas l'existence d'un bail verbal, faute d'accord des parties sur les conditions essentielles de ce bail,

- toutefois, M. [C] ne démontre pas plus l'existence d'un commodat, faute également d'accord entre les parties sur les conditions essentielles de ce contrat et notamment sur le terme de ce contrat,

- ainsi, alors que les parties ne sont en effet jamais parvenues à un accord formalisé et en l'absence de tout bail, même verbal, ainsi que de commodat, voire de prêt à titre gratuit, les époux [D] ne disposent à l'évidence d'aucun titre pour se maintenir dans les lieux, de sorte que ce maintien dans les lieux constitue un trouble manifestement illicite pour le propriétaire, M. [C], et que l'obligation de libérer les lieux n'est pas sérieusement contestable, le juge des référés ayant le pouvoir de prendre toute mesure conservatoire ou provisoire, dans les conditions prévues par les textes précités.

L'ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a ordonné l'expulsion des appelants, avec toutes conséquences de droit, leur obligation de paiement d'une somme au titre de l'occupation des lieux n'étant pas sérieusement contestable.

S'agissant de la mesure de séquestre sollicitée par les époux [D], force est de constater qu'elle ne repose sur aucun texte et que, déboutés de leurs demandes tendant à voir qualifier le contrat qui le lie à M. [C] de contrat de bail, ils doivent être déboutés de leur demande de condamnation de M. [C] à leur céder le bien litigieux.

Faute de bail, ils ne peuvent invoquer un défaut de délivrance et d'entretien de leur bailleur sur le fondement de l'article 1719 du code civil.

Sur l'indemnité d'occupation, dans leurs conclusions, les époux [D] précisent à titre subsidiaire également que le loyer était fixé à 2.000 euros par mois, et ne peuvent donc contester devoir une somme provisionnelle au titre de l'occupation des lieux.

Toutefois, ainsi qu'il est évoqué plus haut, les décomptes et pièces produites qui font état sur la période 2016 à 2021 de règlements irréguliers ne permettent pas de fixer la provision au titre de l'indemnité d'occupation à hauteur de 2.000 euros alors que M. [C] pour sa part produit des estimations immobilières qui, compte tenu de la nature du bien occupé, permettent de fixer la valeur locative du bien à la somme de 3.520 euros, ainsi que l'a justement estimé le premier juge.

Il convient en conséquence de condamner les époux [D] au paiement d'une indemnité d'occupation mensuelle provisionnelle de 3.520 euros par mois, à compter du 16 décembre 2021, date de l'expiration du délai mentionné et prévu dans la sommation de quitter les lieux, l'ordonnance étant confirmée de ce chef.

Les époux [D], parties perdantes, seront tenus in solidum aux dépens d'appel et condamnés in solidum également à payer à M. [C] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Confirme l'ordonnance entreprise en toutes ses dispositions ;

Condamne M. [D] et Mme [K], épouse [D], in solidum, aux dépens d'appel ;

Condamne M. [D] et Mme [K], épouse [D], in solidum à payer à M. [C] la somme de 3.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/11930
Date de la décision : 02/03/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 26/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-03-02;22.11930 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award