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23/02/2023 | FRANCE | N°22/14306

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 2, 23 février 2023, 22/14306


Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS





COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 1 - Chambre 2



ARRÊT DU 23 FEVRIER 2023



(n° , 15 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14306 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIDL



Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Juillet 2022 -Président du TJ de PARIS - RG n° 21/57269





APPELANTE



S.A.S.U. REM REAL ESTATE, RCS de Paris sous le n°813 59

4 967, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège



[Adresse 8]

[Localité 10]



Représentée par Me Audrey ...

Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 2

ARRÊT DU 23 FEVRIER 2023

(n° , 15 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 22/14306 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CGIDL

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 13 Juillet 2022 -Président du TJ de PARIS - RG n° 21/57269

APPELANTE

S.A.S.U. REM REAL ESTATE, RCS de Paris sous le n°813 594 967, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 8]

[Localité 10]

Représentée par Me Audrey SCHWAB de la SELARL SELARL 2H Avocats à la cour, avocat au barreau de PARIS, toque : L0056

Assistée à l'audience par Me Chantal TEBOUL-ASTRUC, avocat au barreau de PARIS, toque : A235

INTIMES

Mme [C] [I]

[Adresse 5]

[Localité 10]

M. [D] [P]

[Adresse 13]

[Localité 10]

M. [Y] [W]

[Adresse 5]

[Localité 10]

S.A.S. INFLUENCE, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 14]

[Localité 10]

S.D.C. [Adresse 5] représenté par son syndic bénévole, Monsieur [Y] [W], demeurant [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 10]

Représentés et assistés à l'audience par Me Eric MARGNOUX de l'ASSOCIATION MARGNOUX DELAS, avocat au barreau de PARIS, toque : J065

S.A. MMA IARD, agissant poursuites et diligences en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représentée par Me Guillaume AKSIL de la SCP LINCOLN AVOCATS CONSEIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0293

Assistée à l'audience par Me Elsa BENONIEL, avocat au barreau de PARIS, toque : P293

L'Association Syndicale Libre [Adresse 16], représentée par son Président, la Société CASTIN GILLES VILLARET (RCS de PARIS n°388 812 851)

[Adresse 3]

[Localité 10]

Représentée et assistée par Me Alain RAPAPORT, avocat au barreau de PARIS, toque : K0122

S.A. SADA ASSURANCES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 7]

[Localité 4]

Représentée par Me Anne-claire PICHEREAU de la SELEURL NERAUDAU AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : B0369

Assistée à l'audience par Me Alexandre PICAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : B369

S.A. SMACL, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 11]

Représentée et assistée par Me Olivia AMBAULT-SCHLEICHER de la SCP VELIOT FENET-GARDE AMBAULT, avocat au barreau de PARIS, toque : P0222

S.A. SMA SA, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 12]

[Localité 10]

Représentée par Me Sarra JOUGLA, avocat au barreau de PARIS, toque : A0200

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 19 Janvier 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre chargée du rapport

Thomas RONDEAU, Conseiller

Michèle CHOPIN, Conseillère

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Saveria MAUREL

ARRÊT :

- CONTRADICTOIRE

- rendu publiquement par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Marie-Hélène MASSERON, Présidente de chambre et par Saveria MAUREL, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

*****

EXPOSE DU LITIGE

Courant 2017, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] à [Localité 10] a constaté l'apparition de fissures en façade et à l'intérieur de son immeuble et mandaté pour effectuer un diagnostic M. [N], lequel a établi le 30 juin 2017 un rapport attribuant ces fissures à une défaillance du réseau d'évacuation des eaux en sous-sol de l'immeuble mitoyen situé [Adresse 6], propriété de l'indivision [E] puis de la société La Muette.

Par actes des 18 et 24 juillet 2017, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] a fait assigner devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris l'indivision [E] et son assureur, la société MMA IARD, aux fins d'expertise judiciaire.

Il a été fait droit à cette demande par ordonnance du 12 octobre 2017 qui a désigné M. [X] en qualité d'expert. Les opérations ont ensuite été rendues communes, notamment à la société SADA assurances, assureur du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à l'association syndicale libre (ASL) [Adresse 16], à la société SOGEBAT, assureur de l'ASL, à la société MMA IARD assureur de l'indivision [E] et à la société La Muette.

Par arrêté du 8 mars 2021, la ville de [Localité 15] a ordonné la mise en sécurité de l'immeuble du [Adresse 6] en raison de l'absence des garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité des occupants et des tiers.

L'expert judiciaire a déposé son rapport le 5 juillet 2021.

Par actes des 22, 24, 27 et 29 septembre 2021, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence, copropriétaires au sein de l'immeuble du [Adresse 5], ont fait assigner devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris la société SADA assurances, la société La Muette, la société MMA IARD, l'ASL [Adresse 16] et la société SAGEBAT, aux fins de versement de provisions à valoir sur les travaux réparatoires et leurs préjudices.

Par contrat du 20 septembre 2021, la société La Muette a cédé l'immeuble du [Adresse 6] à la société REM real estate.

Par actes des 2 novembre et 14 décembre 2021, les mêmes demandeurs ont fait assigner devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris la société REM real estate et son assureur la société SMACL.

Par ordonnance réputée contradictoire du 13 juillet 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a :

- déclaré recevables les demandes formées par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence à l'encontre de la société REM real estate ;

- condamné la société SADA assurances à payer à titre provisionnel :

au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] les sommes de :

* 40.569,05 euros TTC à valoir sur le coût des travaux et études engagés,

* 488.970 euros TTC à valoir sur le coût des travaux réparatoires,

* 22.219,53 euros TTC à valoir sur le coût des travaux de remise en état,

à Mme [I] et M. [P] la somme de 12.970,85 euros TTC à valoir sur les travaux de remise en état,

à la société Influence la sommes de :

* 16.142,99 euros TTC à valoir sur la remise en état de l'appartement du troisième étage,

* 10.222,78 euros TTC à valoir sur la remise en état de l'appartement du quatrième étage,

*65.000 euros à valoir sur la perte de loyers,

à M. [W] la somme de 12.196,60 euros TTC à valoir sur la remise en état de son appartement,

- rejeté l'ensemble des demandes formées à l'encontre de la société La muette ;

- condamné la société REM real estate à garantir la société SADA assurances de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, en ce compris les frais accessoires ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnelle de la société REM real estate ;

- donné acte au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] de ce que les travaux réparatoires lui incombant seront mis en oeuvre sans délai à réception des fonds nécessaires ;

- condamné la société SADA assurances à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 10.000 euros,

à Mme [I] et M. [P] la somme de 2.000 euros,

à la société Influence la somme de 2.000 euros,

à M. [W] la somme de 2.000 euros,

- condamné la société SADA assurances aux dépens de l'instance en ce compris les frais d'expertise ;

- dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes.

Par déclaration du 28 juillet 2022, la société REM real estate a interjeté appel de cette décision.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 5 décembre 2022, elle demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance de référé du 13 juillet 2022 en ce qu'elle a :

déclaré recevables les demandes formées par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence à son encontre,

condamné la société SADA assurances à payer à titre provisionnel :

* au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] les sommes de :

40.569,05 euros TTC à valoir sur le coût des travaux et études engagés,

488.970 euros TTC à valoir sur le coût des travaux réparatoires,

22.219,53 euros TTC à valoir sur le coût des travaux de remise en état,

* à Mme [I] et M. [P] la somme de 12.970,85 euros TTC à valoir sur les travaux de remise en état,

* à la société Influence la sommes de :

16.142,99 euros TTC à valoir sur la remise en état de l'appartement du troisième étage,

10.222,78 euros TTC à valoir sur la remise en état de l'appartement du quatrième étage,

65.000 euros à valoir sur la perte de loyers,

* à M. [W] la somme de 12.196,60 euros TTC à valoir sur la remise en état de son appartement,

condamné celle-ci à garantir la société SADA assurances de l'ensemble des condamnations prononcées à son encontre, en ce compris les frais accessoires,

dit n'y avoir lieu à référé sur sa demande reconventionnelle,

condamné la société SADA assurances à payer au titre de l'article 700 du code de procédure civile :

* au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 10.000 euros,

* à Mme [I] et M. [P] la somme de 2.000 euros,

* à la société Influence la somme de 2.000 euros,

* à M. [W] la somme de 2.000 euros,

débouté celle-ci de toutes autres demandes plus amples ou contraires lui faisant grief,

Statuant à nouveau sur les chefs qui lui sont déférés,

- déclarer l'action et les prétentions de la copropriété du [Adresse 5] et des copropriétaires y joints ainsi que de leur assureur SADA assurances irrecevables, subsidiairement non fondées ni justifiées à son égard ;

- les en débouter ;

Plus subsidiairement,

- juger que ces demandes se heurtent à des contestations extrêmement sérieuses que seul le juge du fond est apte à trancher ;

- les renvoyer à mieux se pourvoir au fond ;

- déclarer inopposable à la REM real estate les clauses de non garanties et d'exclusion de garantie invoquées par la MMA IARD ;

En conséquence, pour le cas où par extraordinaire, une quelconque provision serait mise à sa charge,

- condamner la MMA IARD à l'en relever et l'en garantir ;

En tout état de cause,

- débouter toutes autres parties de leurs demandes, fins et conclusions contraires dirigées à son encontre, et notamment de leur appel incident ;

- condamner la MMA IARD à garantir la prise en charge du coût des travaux de reprise en sous 'uvre et de structure de l'immeuble sis [Adresse 6] à [Localité 15], tels que résultant du devis OPUS pour 713.505 euros, et la condamner de ce chef au profit de la REM ;

- condamner toute partie succombante à lui payer la somme de 8.000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile en sus des dépens, dont distraction pour ceux la concernant au profit de la société 2H avocat et ce, en application de l'article 699 du code de procédure civile, pour ceux le concernant.

Par dernières conclusions remises et notifiées le 2 janvier 2023, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence demandent à la cour de :

- prononcer la radiation de l'appel incident de la société SADA à l'encontre du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à défaut d'exécution de la totalité des termes de l'ordonnance de référé rendue ;

- confirmer la décision du juge des référés du tribunal judiciaire de Paris en date du 12 juillet 2022 en ce qu'elle a :

condamné, à titre principal et provisionnel, la société SADA assurances à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], les sommes de :

40 569,05 € TTC : coût des travaux et études déjà engagés par le syndicat des copropriétaires ;

415 993,60 € TTC : coût des reprises en sous 'uvre : devis EIBTF actualisé (travaux de reprise en sous 'uvre correspondant à la solution C - TVA de 10%), correspondant à la solution C ;

18 502,00 € TTC : coût de reprises reprise de structures : devis EIBTF

- auquel il faut ajouter :

honoraires de maîtrise d''uvre (9%) : 39 104,60 €uros TTC

honoraires de bureau de contrôle CTC : 5 880,00 €uros TTC

assurance dommage-ouvrage : 9 490,24 €uros TTC

22 219,53 € TTC : travaux de reprise de ravalement, peintures et embellissements du [Adresse 5] ;

Subsidiairement, et pour le cas où certains postes de préjudice ne seraient pas retenus à l'encontre de l'assureur de l'immeuble,

- condamner, à titre provisionnel et in solidum, la société REM real estate venant aux droits de la SCI La muette propriétaire du [Adresse 6], venant aux droits des consorts [E] (selon leur convention dans l'acte de vente en date du 20 septembre 2021), la société MMA assurances, assureur de l'immeuble appartenant aux consorts [E] à l'époque du sinistre, l'ASL [Adresse 16] et son assureur, la société SAGEBAT devenue SMA et/ou la société MACSF, assureur de l'ASL à compter de 2015, à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], les sommes de :

40 569,05 € TTC : coût des travaux et études déjà engagés par le syndicat des copropriétaires ;

415 993, 60 € TTC : coût des reprises en sous 'uvre : devis EIBTF actualisé (travaux de reprise de structure en sous 'uvre correspondant à la solution C - TVA de 10%),

18 502,00 € TTC : coût de reprises reprise de structures : devis EIBTF

auquel il faut ajouter :

honoraires de maîtrise d''uvre (9%) : 39 104,60 € TTC

honoraires de bureau de contrôle CTC : 5 880,00 € TTC

assurance DO : 9 490,24 € TTC

22 219,53 € TTC : travaux de reprise des ravalement, peintures et embellissements du [Adresse 5],

- les condamner, en toute hypothèse, au visa de l'article 1244 du code civil, in solidum pour

toutes les sommes qui pourraient ne pas être prises en charge par l'assureur de l'immeuble,

et/ou de l'article 1242 du code civil pour l'ASL [Adresse 16] ;

- confirmer la décision du juge des référés en ce qu'elle a :

condamné, à titre principal et provisionnel, la société SADA à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] les sommes de :

* à Mme [I] et M. [P] la somme de 12 970,85 € TTC,

* à la société Influence les sommes de 16 142,99 € TTC pour le 3 ème étage et 10.222,78 € TTC pour le 4 ème étage,

* à M. [W] la somme de 12 196,60 € TTC ;

Infirmant la décision du juge des référés et statuant à nouveau,

- condamner à titre principal et provisionnel la société SADA à verser à la société

Influence la somme de 84 862,26 € (47 mois x 1 805,58 €) au titre des pertes de loyers;

Subsidiairement,

- condamner, à titre provisionnel et in solidum, les voisins responsables des désordres, selon les termes du rapport de l'expert judiciaire, au visa de l'article 1244 du code civil et/ou 1242 du code civil pour l'ASL [Adresse 16], soit la SCI La muette, propriétaire du [Adresse 6], venant aux droits des consorts [E], et/ou de la société REM real estate (selon leur convention dans l'acte de vente en date du 20 septembre 2021, in solidum avec la compagnie Mutuelle du Mans assurances, assureur de l'immeuble appartenant aux consorts [E] à l'époque du sinistre, avec l'ASL [Adresse 16] et son assureur, la compagnie SAGEBAT devenue SMA et/ou la compagnie MACSF, assureur de l'ASL à compter de 2015, à verser les sommes non prises en charge par l'assureur de l'immeuble, soit à Mme [I] et M. [P] la somme de 12 970,85 € TTC, à la société Influence les sommes de 16.142,99 € TTC pour le 3 ème étage et 10 222,78 € TTC pour le 4ème étage, la somme de 84.862,26 € (47 mois x 1 805,58 euros) au titre des pertes de loyers, à M. [W] la somme de 12 196,60 € TTC ;

- confirmer la décision du juge des référés en ce qu'elle a condamné, à titre principal et provisionnel, la société SADA à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], le coût des frais d'expertise de M. [X], avancés par lui à hauteur de 30 675,41 € TTC ;

A titre subsidiaire,

- condamner in solidum la SCI La Muette et/ou de la société REM real estate (selon leur convention dans l'acte de vente en date du 20 septembre 2021, avec la société Mutuelle du Mans assurances et l'ASL [Adresse 16] et son assureur, la société SAGEBAT devenue SMA, et/ou la société MACSF, assureur de l'ASL à compter de 2015, à verser au syndicat des copropriétaires, les mêmes sommes ;

Infirmant la décision du juge des référés et statuant à nouveau,

- condamner in solidum les mêmes parties, la SADA à titre principal, et les constructeurs responsables susvisés, à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], à titre provisionnel, la somme de 25 000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- confirmer la décision du juge des référés en ce qu'elle a accordé à Mme [I], à titre provisionnel, la somme de 2 000 €, à la société Influence, à titre provisionnel, la somme de 2 000 €, à M. [W], à titre provisionnel, la somme de 2 000 €.

Par dernières conclusions remises et notifiées le 2 décembre 2023, la société SADA assurances demande à la cour de :

- infirmer l'ordonnance du 13 juillet 2022, en ce qu'elle a condamné la société SADA à verser au profit du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] la somme de 22.219,53 euros au titre du coût des travaux de remise en état ;

Et statuant à nouveau, limiter l'indemnisation susceptible d'être versée au titre de ce poste de préjudice à hauteur de 7.828,77 euros ;

- infirmer l'ordonnance du 13 juillet 2022 en ce qu'elle a alloué à la société Influence la somme de 65.000,00 euros à valoir sur la perte de loyers ;

Et statuant à nouveau,

- débouter la société Influence de sa demande formée à ce titre ou subsidiairement, la réduire dans de très sérieuses proportions, sans que celle-ci ne dépasse le montant de [Adresse 5].500,44 euros ;

- infirmer l'ordonnance du 13 juillet 2022 en ce qu'elle a condamné la société SADA à verser au profit des demandeurs à l'instance de référé la somme de 16.000,00 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile mais également le montant correspondant aux dépens (dont les frais d'expertise) ;

Et, statuant à nouveau,

- condamner l'ASL [Adresse 16] et la société REM real estate à verser au profit du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et de ses copropriétaires les sommes sollicitées au titre des dépens et de l'article 700 du code de procédure civile ;

- confirmer l'ordonnance du 13 juillet 2022, en ce qu'elle a condamné la société REM real estate à garantir la société SADA de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre,

et subsidiairement,

- condamner la société REM real estate à rembourser à la société SADA, subrogée dans les droits de ses assurés, la somme de 717.345,60 euros qu'elle a d'ores et déjà versée au profit des demandeurs à la mesure de référé ;

- infirmer l'ordonnance en date du 13 juillet 2022 en ce qu'elle a rejeté l'appel en garantie

formée par la société SADA à l'encontre de l'ASL [Adresse 16] et de ses assureurs (SMA et SMACL assurances) mais également à l'encontre de la société MMA IARD, ès-qualités d'assureur de l'indivision [E] (anciennement propriétaire du [Adresse 6]) ;

et statuant à nouveau,

- condamner l'ASL [Adresse 16], les sociétés SMA, SMACL assurances et MMA IARD à relever et garantir la société SADA de l'intégralité des condamnations susceptibles d'être prononcées à son encontre ou subsidiairement, à rembourser la société SADA, subrogée dans les droits de ses assurés, la somme de 717.345,60 euros qu'elle a d'ores et déjà versée au profit de ces derniers ;

- condamner l'ASL [Adresse 16] ainsi que la société REM real estate (subrogée dans les droits de la SCI La muette), à verser à la société SADA la somme de 10.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens, dont distraction au profit de la SELARL Neraudau, avocat ;

- débouter le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et ses copropriétaires de leur demande tendant à ce que l'appel incident formé par la société SADA soit radié ;

- débouter le syndicat des copropriétaires et les copropriétaires du [Adresse 5] de leur demande d'allocation d'une somme de 25.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises et notifiées le 2 novembre 2022, l'ASL [Adresse 16] demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence de leurs demandes fondées sur le trouble anormal de voisinage et sur la faute de gestion à l'encontre de l'ASL [Adresse 16] ;

- constater, à tout le moins ,l'existence d'une contestation sérieuse quant à la prétendue faute au demeurant contestée qu'aurait pu commettre l'ASL [Adresse 16] ;

- condamner la ou les parties succombantes à verser à l'ASL [Adresse 16] la somme de 8.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la ou les parties succombantes aux entiers dépens dont le recouvrement s'opérera au profit de Me Alain Rapaport, avocat à la cour, dans les conditions de l'article

699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises et notifiées le 5 décembre 2022, la société SMA demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance attaquée en ce qu'elle a débouté le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence de leurs demandes fondées sur le trouble anormal de voisinage et sur la faute de gestion à l'encontre de l'ASL [Adresse 16] ;

- constater l'existence d'une contestation sérieuse quant à la prétendue faute au demeurant

contestée qu'aurait pu commettre l'ASL [Adresse 16] ;

- constater que les garanties de la SMA ne sont pas mobilisables en l'espèce au titre des dommages causés par le dégât des eaux ;

- débouter toutes parties de toutes demandes à l'encontre de la SMA ;

- condamner tout succombant à verser à la SMA la somme de 2.000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner tout succombant aux entiers dépens qui seront directement recouvrés par Me Sarra Jougla, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions remises et notifiées le 10 novembre 2022, la société SMACL assurances demande à la cour de :

- confirmer l'ordonnance de référé en ce qu'elle a :

dit n'y avoir lieu à référé sur les demandes du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], Mme [I], M. [P], M. [W] et la société Influence en raison de l'existence de contestation sérieuse sur la responsabilité de l'ASL,

dit en conséquence que les demandes en garantie formées à l'encontre des assureurs de l'ASL sont sans objet,

dit n'y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes,

- rejeter l'appel incident de la société SADA,

En tout état de cause,

- débouter toutes parties de toutes demandes dirigées à l'encontre de la SMACL en raison de l'existence de contestations sérieuses sur la mobilisation de ses garanties,

- condamner tout succombant à verser à la SMACL la somme de 5.000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

- condamner tout succombant aux entiers dépens qui seront recouvrés par Me Olivia Ambault, avocat associé, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

Pour l'exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières conclusions susvisées conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR

A titre liminaire, il doit être rappelé que le litige ne porte que sur des demandes de provisions, en sorte que ne sont applicables que les dispositions de l'article 835 alinéa 2 du procédure civile, aux termes desquelles le juge des référés peut accorder une provision au créancier dans les cas où l'existence de l'obligation n'est pas sérieusement contestable, étant aussi rappelé que :

- le montant de la provision en référé n'a d'autre limite que le montant non sérieusement contestable de la dette alléguée,

- une contestation sérieuse est caractérisée lorsque l'un des moyens de défense opposés aux prétentions du demandeur n'apparaît pas immédiatement vain et laisse subsister un doute sur le sens de la décision au fond qui pourrait éventuellement intervenir par la suite sur ce point si les parties entendaient saisir les juges du fond.

Les développements des parties sur l'absence d'urgence et/ou de trouble manifestement illicite sont donc inopérants, ces critères étant inapplicables.

Il doit en outre être précisé que la société SADA assurances a payé les condamnations mises à sa charge par l'ordonnance entreprise, si bien qu'est sans objet la demande tendant à la radiation de l'appel incident de cette partie intimée pour défaut d'exécution de la décision de première instance.

Sur la demande principale du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et des copropriétaires à l'encontre de la société SADA assurances, assureur dudit syndicat

La société SADA ne conteste pas devoir sa garantie au syndicat des copropriétaires et aux copriétaires de l'immeuble du [Adresse 5] en suite des désordres et ne conteste l'ordonnance entreprise que sur deux points (outre la charge de l'article 700 du code de procédure civile qui sera examinée in fine) :

- en ce qu'elle l'a condamnée à payer au syndicat des copropriétaires la somme de 22.219,53 euros au titre du coût des travaux de remise en état ;

- en ce qu'elle l'a condamnée à payer à la société Influence la somme de 65.000 euros à valoir sur la perte des loyers,

faisant valoir :

- sur le premier poste, qu'il n'est pas établi que le ravalement de la façade préconisé par l'expert judiciaire soit rendu nécessaire par les désordres plutôt que par l'absence d'entretien, le ravalement datant de plus de dix ans ;

- sur le second poste, que la preuve n'est pas faite par la société Influence de ce que le départ de son locataire est dû aux désordres, et que s'agissant d'une perte de chance il ne peut être fait droit à la totalité de la perte de loyers comme l'a fait le premier juge sur la base des conclusions de l'expert, la garantie d'assurance étant au surplus limitée à 36 mois.

Le syndicat des copropriétaires et la société Influence répliquent que l'expert n'a bien pris en compte que la reprise des fissures en réduisant considérablement le montant de la réclamation, et que la perte de loyers est bien réelle sur le long terme puisque le locataire est parti en raison des fissures et que l'appartement ne peut être reloué tant que les travaux de reprise n'ont pas été effectués, alors par ailleurs que ceux-ci n'ont pu encore être réalisés, la SADA n'ayant exécuté l'ordonnance que récemment.

L'expert judiciaire a retenu la somme totale de 22.219,53 euros au titre de la reprise du ravalement, de la peinture et de la porte côté rue, dont la somme (seule critiquée) de 14.390,76 euros au titre du ravalement. Il résulte de son rapport (page 46) qu'il n'a bien pris en compte que le coût de la reprise des fissures consécutives aux désordres (en ne retenant que 40 % de la surface). S'il a relevé que le ravalement est ancien et que les parties ne lui ont pas communiqué la date du précédent ravalement, il convient de relever qu'un ravalement de plus de dix ans tel qu'allégué n'est pas très ancien et ne justifie pas un abattement pour vétusté. La contestation n'apparaît donc pas suffisamment sérieuse pour faire obstacle au coût de la reprise tel qu'il a été retenu par l'expert judiciaire.

S'agissant de la perte de loyers subie par la société Influence, la cour constate, comme le premier juge, que la preuve d'un lien de causalité n'est pas faite entre le départ du locataire et les désordres (la lettre de congé n'est pas produite), mais qu'en revanche la valeur locative de 1.805,58 euros n'est pas contestée et que l'impossibilité de louer l'appartement tant que les travaux de reprise n'ont pu être effectués n'est pas discutable compte tenu de la nature des désordres et de leur importance, en sorte que la perte de loyers n'est pas contestable. C'est aussi à raison que le premier l'a limitée à la durée de garantie offerte par la police souscrite auprès de la SADA, soit 36 mois. Par contre, l'assureur est bien fondé à voir qualifier le préjudice de perte de chance dès lors qu'indépendamment de désordres une location continue n'est jamais acquise, en sorte qu'il convient par infrmation de l'ordonnance sur ce point de limiter l'indemnité allouée à hauteur de 65.000 euros à 50.000 euros, montant non sérieusement contestable de l'obligation indemnitaire de l'assureur.

La demande principale de provision du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et des copropriétaires à l'encontre de la société SADA sera donc satisfaite à hauteur des montants retenus par le premier juge, comme il sera précisé au dispositif ci-après, sauf pour ce qui est de la perte de loyers de la société Influence que la cour réduit à 50.000 euros, montant du préjudice non sérieusement contestable.

La demande formée subsidiairement par le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et les copropriétaires à l'encontre de la société REM et son assureur et de l'ASL et son assureur est sans objet (ce qui n'entraîne pas son irrecevabilité contrairement à ce que soutient la société REM) dès lors que leur action principale est satisfaite, étant observé que la demande au titre de la perte de loyers ne peut être réclamée pleinement à ces parties pas plus qu'à la SADA.

Sur les recours en garantie de la société SADA assurances contre la société REM real estate et contre l'ASL [Adresse 16]

L'expert judiciaire a clairement déterminé la cause des désordres occasionnés à l'immeuble du [Adresse 5], à savoir l'affaissement du mur mitoyen situé entre les bâtiments du n°[Adresse 5] et du n°[Adresse 6] qui a provoqué des déformations des murs de facades des deux immeubles et l'inclinaison des planchers vers ce mur, avec des déformations et donc des fissures sur les cloisons et les sols, la cause de ces désordres étant liée à d'importantes fuites sur les réseaux d'évacuation des eaux circulant dans le sous-sol du n°[Adresse 6], lesquelles ont déstabilisé le terrain et provoqué l'affaissement du mur mitoyen. L'expert précise que deux réseaux sont fuyards, celui de l'immeuble du [Adresse 6] et celui du [Adresse 16] situé entre le n°[Adresse 5] et le n°[Adresse 6]. Il considère ainsi que les désordres sont imputables tant au propriétaire de l'immeuble du [Adresse 6] qu'à l'ASL gérant le [Adresse 16], apportant toutefois une réserve à la responsabilité de cette dernière en ce sens que son réseau n'est accessible que depuis l'immeuble du n°34 et que le propriétaire de cet immeuble aurait dû la prévenir des désordres affectant les réseaux.

C'est par des motifs exacts et pertinents, que la cour approuve, que sur la base de ces conclusions expertales, non contestées d'un point de vue technique, le premier juge a dit que la société REM, en tant que propriétaire de l'immeuble du n°[Adresse 6], engage sa responsabilité de plein droit envers le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et les copropriétaires sur le fondement du trouble anormal de voisinage. C'est tout aussi pertinemment qu'il a considéré non sérieuse la contestation élevée par la société REM sur l'imputabilité des désordres en raison du caractère mitoyen du mur, dès lors que l'affaissement de ce mur n'est pas à l'origine du trouble mais sa conséquence, le trouble, qui trouve son origine dans les défaillances du réseau de canalisations du [Adresse 6] et du [Adresse 16], étant donc bien imputable au seul fonds voisin et non à celui du n°[Adresse 5] du fait de la mitoyenneté du mur.

Si en première instance la société SADA, assureur du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5], a fondé sa demande de condamnation de la société REM sur le seul article L 121-12 du code ses assurances (recours subrogatoire) et qu'en appel elle la fonde aussi sur l'article 334 du code de procédure civile (recours en garantie), sa demande reste la même, à savoir une demande de remboursement des indemnités payées à l'assuré, seul son fondement juridique ayant varié, en sorte qu'il n'est pas valablement soutenu par la société REM que la demande de garantie de la SADA en cause d'appel est irrecevable, étant d'ailleurs observé que la demande de la SADA n'est pas sérieusement discutable sur aucun des deux fondements juridiques, alors que la responsabilité de plein droit de la société REM est acquise et que l'assureur a payé les indemnités au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires depuis que l'ordonnance entreprise a été rendue.

S'agissant du recours en garantie contre l'ASL [Adresse 16], le premier juge a considéré que la responsabilité de plein droit de celle-ci est sérieusement contestable alors qu'il n'est pas allégué qu'elle serait propriétaire du [Adresse 16] et des canalisations situées en-dessous, et qu'il n'est pas démontré d'évidence qu'elle a la charge de l'administration et de la gestion des réseaux enterrés sous le passage et qu'elle puisse à ce titre revêtir la qualité de voisin.

Il convient cependant de relever, au vu des pièces produites et notamment des statuts de l'ASL, que le [Adresse 16] est un ensemble immobilier constitué de l'ensemble des immeubles riverains du [Adresse 16] à [Localité 15] deuxième arrondissement et cadastrés section AN sous 50 numéros de lots de parcelles ; que 'l'association des propriétaires riverains des galeries du [Adresse 16]' a pour but l'administration du passage ; que selon son article 15, elle a notamment la charge des réparations ou de la réfection des descentes des eaux pluviales amenant les eaux au collecteur principal d'égouts, si elles y sont branchées et ce jusqu'à ce dernier, même dans leur partie en sous-sol ou enterrée.

Il n'apparaît donc pas sérieusement contestable qu'à l'instar du propriétaire de l'immeuble du [Adresse 6], ou d'ailleurs de son syndicat des copropriétaires si cet immeuble était organisé en copropriété, l'ASL revêt elle aussi la qualité de voisin responsable de plein droit des troubles causés par son réseau enterré d'évacuation des eaux, à tout le moins en sa qualité d'administrateur du passage et de son sous-sol, étant rappelé que l'action fondée sur un trouble anormal de voisinage constitue, non une action réelle immobilière, mais une action en responsabilité extra-contractuelle qui peut être dirigée contre tout voisin auteur des nuisances, quel que soit son titre d'occupation.

S'agissant de la réserve émise par l'expert judiciaire sur l'accès par l'ASL à son réseau de canalisations via l'immeuble du [Adresse 6], elle n'affecte pas la responsabilité de plein droit de l'ASL sur le fondement du trouble anormal de voisinage, s'agissant d'une responsabilité sans faute.

Il s'ensuit que la société REM et l'ASL engagent in solidum leur responsabilité envers le syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et des copropriétaires, et que l'assureur de ces derniers, la société SADA assurances, est bien fondée à se voir garantie in solidum par la société REM et par l'ASL des condamnations prononcées contre elle et payées à ses assurés au titre de la réparation des désordres.

Sur le quantum de la réparation, c'est par des motifs exacts et pertinents, que la cour approuve, que le premier juge a retenu et chiffré les différents chefs de préjudice du syndicat des copropriétaires et des copropriétaires tels qu'ils ont été arbitrés par l'expert judiciaire, après avoir écarté les contestations non sérieuses élevées par la société REM, sous réserve toutefois de l'indemnisation de la perte de loyers de la société Influence que la cour réduit à 50.000 euros pour les motifs précédemment énoncés.

Sur la garantie des assureurs

La garantie de la MMA IARD, assureur de la société REM real estate

Il est constant que la société REM est assurée dans le cadre d'un contrat d'assurance multirisque au titre d'une garantie responsabilité civile et au titre d'une garantie dégât des eaux, toutes deux susceptibles d'être mobilisées.

L'assureur sollicite la confirmation de l'ordonnance dont appel en ce qu'elle a retenu que ses garanties se heurtent à contestation sérieuse en ce qu'elles contiennent des clauses d'exclusion qu'il ne revient pas au juge des référés d'interpréter.

La société REM estime pour sa part que ces clauses d'exclusion ne lui sont pas opposables dès lors que d'évidence, elles ne sont pas valides au sens de l'article L 113-1 du code des assurances, n'étant pas formelles et limitées.

Il convient ici de rappeler que selon l'article L 113-1 du code des assurances,

'Les pertes et les dommages occasionnés par des cas fortuits ou causés par la faute de l'assuré sont à la charge de l'assureur, sauf exclusion formelle et limitée contenue dans la police.

Toutefois, l'assureur ne répond pas des pertes et dommages provenant d'une faute intentionnelle ou dolosive de l'assuré.'

Il en résulte que par principe, l'assurance couvre la faute de l'assuré, sauf évidemment si elle est intentionnelle ou dolosive, et que quelle que soit la nature et la gravité de cette faute, l'assurance doit jouer. Il s'en suit qu'il ne peut être fait exception au principe de la garantie des pertes et dommages consécutifs à une faute que s'il existe une exclusion formelle et limitée.

Au sens de ce texte, une clause d'exclusion n'est pas formelle lorsqu'elle ne se réfère pas à des critères précis et à des hypothèses limitativement énumérées, nécessitant une interprétation.

Une clause d'exclusion n'est pas limitée lorsqu'elle vide la garantie de sa substance en ce qu'après son application elle ne laisse subsister qu'une garantie dérisoire.

En l'espèce, la police dégât des eaux stipule que son garantis 'les dommages causés par les fuites d'eau accidentelles provenant exclusivement de canalisations autres que des canalisations enterrées.' Elle stipule en outre, au titre des exclusions, 'les dommages causés par les infiltrations, refoulements, débordements de canalisations ou d'égouts résultant d'un défaut permanent d'entretien, d'un manque de réparation indispensable, de l'usure ou de l'insuffisance notoire du réseau ou des installations auxquels il n'a pas été remédié dans le délai d'un mois à compter du jour où l'assuré en a eu connaissance, sauf cas fortuit ou de force majeure.'

La condition de garantie relative aux 'canalisations autres que des canalisations enterrées' s'analyse en réalité en une exclusion indirecte de la garantie des canalisations enterrées, laquelle cependant ne figure pas parmi les cas d'exclusion ensuite énumérés, en sorte qu'à l'évidence, cette clause d'exclusion n'est pas formelle et limitée, étant sujette à interprétation faute de mention expresse des canalisations enterrées parmi les exclusions.

La clause d'exclusion relative au défaut d'entretien des canalisations n'est pas non plus formelle et limitée dès lors qu'elle est susceptible d'interprétation par l'assuré du fait de la mention 'auxquels il n'a pas été remédié dans le délai d'un mois à compter du jour où l'assuré en a eu connaissance', laquelle ne se rattache pas clairement aux dommages eux-mêmes ou à ses causes (défaut permanent d'entretien, manque de réparation indispensable, usure ou insuffisance notoire du réseau). L'assureur interprète cette clause comme excluant de la garantie le défaut permanent d'entretien, le manque de réparation indispensable, l'usure ou l'insuffisance notoire du réseau en tant que tels, alors que l'assuré peut comprendre que ces défauts et manquements ne sont exclus que s'il en avait eu connaissance et qu'il n'y a pas remédié.

La garantie responsabilité civile du propriétaire d'immeuble prévoit quant à elle que sont exclus de la garantie 'les dommages qui résultent du mauvais état, de l'insuffisance ou de la défectuosité de l'entretien des installations', 'les dommages résultant de défauts d'entretien dont l'assuré a connaissance.'

Sans qu'il soit nécessaire de l'interpréter, cette clause d'exclusion manque en précision, ses deux chefs d'exclusion relatifs à l'entretien étant contradictoires, l'insuffisance ou la défectuosité de l'entretien étant exclus d'une part alors que, d'autre part, le défaut d'entretien n'est exclu que si l'assuré en a connaissance. Des hypothèses limitativement énumérées ne viennent pas éclaircir cette apparente contradiction.

Il s'en suit que d'évidence, la garantie de la société MMA se trouve acquise à la société REM tant au titre de la responsabilité civile du propriétaire de l'immeuble pour les dommages qu'elle a causés au syndicat des copropriétaires et aux copropriétaires du [Adresse 5] que pour les dommages subis par son propre immeuble et dont elle justifie le montant de 713.505, 61 euros TTC par la production en pièce 5 d'un devis OPUS, ce montant n'excédant pas l'évaluation de l'expert judiciaire.

La société REM sera donc garantie par la MMA IARD à hauteur de cette somme de 713.505 euros pour ses propres dommages.

La société REM et la société SADA assurances seront garanties par la MMA IARD des condamnations provisionnelles mises à leur charge au profit du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et des copropriétaires.

L'ordonnance sera infirmée de ces chefs.

La garantie des sociétés SMA et SMACL, assureurs de l'ASL [Adresse 16]

La garantie 'dégât des eaux' des polices souscrites auprès de la SMA et de la SMACL incluent chacune la même clause, aux termes de laquelle sont exclus de la garantie 'les dommages ayant pour cause manifeste la vétusté, l'incurie dans les réparations et l'entretien, sauf cas fortuit ou force majeure'.

Cette clause contient des termes imprécis que sont la vétusté et l'incurie dans les réparations et l'entretien, non définis à la police, et elle ne se réfère pas à des hypothèses précises et limitativement énumérées.

La SMACL soutient en outre qu'elle n'a jamais été attraite aux opérations d'expertise et que la garantie n'a été souscrite qu'à compter du 1er juillet 2015 alors que le sinistre est apparu en 2014.

Toutefois, la SMACL ayant pu discuter du rapport d'expertise qui lui a été communiqué dans le cadre des instances, il lui est devenu contradictoire et opposable.

Sur le second moyen, il convient de rappeler que 'dans les assurances dégâts des eaux, l'assureur est tenu à garantie dès lors que le sinistre est survenu pendant la période de validité du contrat d'assurance.' (Civ. 3e, 16 mars 2022, n°1823954).

Or il résulte des écritures du syndicat des copropriétaires et du rapport d'expertise que les fissures de l'immeuble du [Adresse 5] ont été constatées en début d'année 2017, le sinistre, qui est à distinguer du fait dommageable (en l'occurrence les fuites sur le réseau de canalisations), étant ainsi survenu après la prise d'effet du contrat d'assurance le 1er juillet 2015.

Il s'en suit que d'évidence, la garantie des sociétés SMA et SMACL est acquise à l'ASL [Adresse 16].

L'ordonnance entreprise sera infirmée de ce chef et il sera fait droit à l'action en garantie de la SADA assurances contre les assureurs de l'ASL.

Sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile

Le sens du présent arrêt commande de condamner la société SADA assurances, partie perdante, aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, et à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et aux copropriétaires, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes globales de 12.000 euros pour la première instance et de 8000 euros pour l'instance d'appel, mais de la garantir de ces condamnations par la société REM real estate et l'ASL [Adresse 16] in solidum.

Il n'apparaît pas inéquitable de laisser à la charge de la société SADA assurances et des autres parties leurs frais irrépétibles de première instance et d'appel.

PAR CES MOTIFS

Infirme l'ordonnance entreprise en ce qu'elle a :

- alloué à la société Influence la somme provisionnelle de 65.000 euros au titre de sa perte de loyers,

- condamné la seule société REM real estate à garantir la société SADA assurances de l'ensemble des condamnations provisionnelles prononcées à son encontre,

- écarté la responsabilité de plein droit de l'ASL [Adresse 16],

- écarté la garantie des sociétés MMA IARD, SMA SA et SMACL,

et en ses dispositions relatives à l'application de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens ;

Confirme l'ordonnance pour le surplus,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Limite à 50.000 euros l'indemnité provisionnelle due à la société Influence au titre de sa perte de loyers,

Condamne in solidum la société REM real estate et la société MMA IARD, l'ASL [Adresse 16] et les sociétés SMA SA et SMACL, à garantir la société SADA assurances de l'ensemble des condamnations provisionnelles prononcées à son encontre,

Condamne la société MMA IARD à garantir son assurée, la société REM real estate,

- de la somme provisionnelle de 713.505 euros au titre des travaux de reprise des désordres de son immeuble du [Adresse 6],

- des condamnations provisionnelles mises à sa charge au profit du syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et des copropriétaires,

Condamne la société SADA assurances aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris le coût de l'expertise judiciaire, et à payer au syndicat des copropriétaires du [Adresse 5] et aux copropriétaires, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, les sommes globales de 12.000 euros pour la première instance et de 8.000 euros pour l'instance d'appel,

Condamne in solidum la société REM real estate et la société MMA IARD, l'ASL [Adresse 16] et les sociétés SMA SA et SMACL à garantir la société SADA assurances de ces condamnations,

Dit n'y avoir lieu à référé sur toute demande plus ample ou contraire.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 2
Numéro d'arrêt : 22/14306
Date de la décision : 23/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-23;22.14306 ?
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