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23/02/2023 | FRANCE | N°22/07885

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 1 - chambre 10, 23 février 2023, 22/07885


RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS



COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10



ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2023

(n° , 3 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/07885 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFV5F



Décision déférée à la cour :

Arrêt du 24 Mars 2022 -Cour de cassation



APPELANTE



S.A. CRÉDIT FONCIER DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 5]



Représentée par Me Loren MAQUIN-JOFFRE de la SELARL A.K.P.R., av

ocat au barreau de VAL-DE-MARNE



INTIMÉS



Monsieur [I] [J]

[Adresse 3]

[Localité 6]



Madame [V] [Y] épouse [J]

[Adresse 3]

[Localité 6]



Représentés par Me Harry ORHON de la SELARL SEL...

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 1 - Chambre 10

ARRÊT DU 23 FÉVRIER 2023

(n° , 3 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général :

N° RG 22/07885 - N° Portalis 35L7-V-B7G-CFV5F

Décision déférée à la cour :

Arrêt du 24 Mars 2022 -Cour de cassation

APPELANTE

S.A. CRÉDIT FONCIER DE FRANCE

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Loren MAQUIN-JOFFRE de la SELARL A.K.P.R., avocat au barreau de VAL-DE-MARNE

INTIMÉS

Monsieur [I] [J]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Madame [V] [Y] épouse [J]

[Adresse 3]

[Localité 6]

Représentés par Me Harry ORHON de la SELARL SELARL MAKOSSO ORHON & FERNAND, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : PC 31

S.A.R.L. SOCIÉTÉ IMMOBILIÈRE ATHO

[Adresse 4]

[Localité 7]

Représentée par Me Pascale CAMPANA de la SELEURL SELARLU PASCALE CAMPANA, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE, toque : P0262

COMPOSITION DE LA COUR

L'affaire a été débattue le 25 janvier 2023, en audience publique, devant la cour composée de :

Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre

Madame Catherine LEFORT, conseiller

Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Monsieur Raphaël TRARIEUX, conseiller, dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER lors des débats : Monsieur Grégoire GROSPELLIER

ARRÊT

-contradictoire

-par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

-signé par Madame Bénédicte PRUVOST, président de chambre et par Monsieur Grégoire GROSPELLIER, greffier présent lors de la mise à disposition.

******

Par jugement en date du 14 juin 2011, le Tribunal de grande instance de Créteil a ordonné, sur la demande de la société Crédit Foncier de France, la licitation d'un bien sis [Adresse 3], au [Localité 6] (94), cadastré T n° [Cadastre 1], d'une superficie de 525 m², consistant en un pavillon élevé sur cave et le droit à jouissance privative sur un jardin de 387 m², appartenant à Mme [J]. Ce jugement sera confirmé par un arrêt de la Cour d'appel de Paris en date du 5 septembre 2012.

La SARL immobilière Atho a été déclarée adjudicataire du bien le 10 octobre 2013 pour la somme de 450 000 euros. Le prix n'ayant pas été réglé par l'intéressée, un certificat de non paiement a été émis, et signifié par la société Crédit Foncier de France à la SARL immobilière Atho le 22 janvier 2015.

Par jugement du 10 octobre 2013, M. et Mme [J] ont été déboutés de leurs contestations ; ledit jugement sera signifié le 9 janvier 2014.

Par jugement rendu sur incident en date du 16 avril 2015, le juge de l'exécution de Créteil a déclaré la contestation de M. et Mme [J] irrecevable, déclaré fondée celle de la SARL immobilière Atho, et ordonné un sursis à statuer sur la demande de réitération des enchères jusqu'à ce qu'une décision définitive soit rendue sur la demande d'annulation de l'adjudication formée par la SARL immobilière Atho.

Par jugement du 15 avril 2016, le Tribunal de grande instance de Créteil a déclaré la SARL immobilière Atho recevable en son action, prononcé la résolution de la vente, après avoir relevé que le bien objet de la licitation était grevé d'une servitude au bénéfice du jardin portant le n° de lot 258, dont l'existence ne lui avait pas été révélée, et a condamné la société Crédit Foncier de France à rembourser à la SARL immobilière Atho les frais de vente soit 7 397,94 euros et 3 218 euros.

Par arrêt du 9 février 2018, la Cour d'appel de Paris a infirmé ce jugement et dit que la SARL immobilière Atho est irrecevable en sa demande de résolution de la vente, et que celles des époux [J] sont sans objet. Pour statuer ainsi, elle a relevé que le jugement d'adjudication est résolu de plein droit pour défaut de paiement du prix. Cet arrêt sera signifié le 12 mars 2018. Par décision du 16 mai 2019, la Cour de cassation a prononcé la déchéance du pourvoi qui avait été formé à son encontre.

Par jugement du 7 avril 2015, le Tribunal de grande instance de Créteil a débouté la société Crédit Foncier de France de sa demande de licitation du lot n° 258 consistant en la jouissance d'un jardin de 26 m² qui avait été omis lors de la procédure de licitation. L'appel formé à l'encontre de ce jugement a été déclaré caduc par une ordonnance du conseiller de la mise en état de cette Cour en date du 11 février 2016.

Par jugement en date du 7 novembre 2019, le juge de l'exécution de Créteil a :

- déclaré irrecevables les contestations de Mme [J] portant sur la vente ;

- déclaré irrecevables celles de la SARL immobilière Atho ;

- rejeté la demande de la société Crédit Foncier de France à fin de réitération des enchères, et de fixation d'une date de vente, après avoir relevé que celle-ci ne pouvait intervenir sur le fondement du cahier des conditions de vente, lequel ne mentionnait pas l'existence de la servitude grevant le terrain cadastré T n° [Cadastre 1] au profit du lot n° 258 ;

- rejeté les demandes en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamné la société Crédit Foncier de France aux dépens.

Par arrêt en date du 10 décembre 2020, la Cour d'appel de Paris a déclaré irrecevable l'appel formé à l'encontre dudit jugement.

Par arrêt en date du 24 mars 2022, la Cour de cassation a cassé cet arrêt, après avoir relevé que lorsque le juge de l'exécution statue en dernier ressort sur la contestation d'un certificat de non paiement ainsi que sur d'autres chefs, il convient de vérifier si l'appel de ces derniers restait recevable.

Le 13 avril 2022, la société Crédit Foncier de France a saisi la présente Cour, autrement composée, en tant que cour de renvoi. Sa déclaration de saisine a été signifiée aux intimés les 17 et 20 juin 2022. Par acte en date du 5 juillet 2022, elle a asssigné M. et Mme [J] à jour fixe.

Selon conclusions notifiées le 30 juin 2022, elle a soutenu :

- qu'elle reconnaît ne pas avoir respecté le délai de l'article 1037-1 du code de procédure civile pour déposer ses écritures ;

- qu'elle s'en tient, en conséquence, aux moyens soumis à la Cour d'appel de Paris dans l'instance ayant abouti à l'arrêt cassé.

Il sera rappelé que dans ses conclusions notifiées le 6 mai 2020, la société Crédit Foncier de France avait soutenu :

- que le jugement du Tribunal de grande instance de Créteil en date du 14 juin 2011, ayant ordonné la licitation du bien, ne contenait aucune disposition relative au cahier des conditions de vente ; qu'il restait taisant sur l'existence d'une quelconque servitude ;

- que l'avocat du demandeur à la licitation, rédacteur du cahier des conditions de vente, a toute liberté pour informer les acquéreurs potentiels de l'existence d'une servitude, conventionnelle ou d'urbanisme ;

- qu'il n'incombe pas à la juridiction chargée de la vente aux enchères de s'occuper de cette question ;

- que la SARL immobilière Atho ne peut plus tirer argument de l'existence de cette servitude car sa demande d'annulation de l'adjudication est définitivement rejetée ; que l'intéressée cherche, en réalité, à échapper à la sanction édictée contre l'adjudicataire défaillant aux articles L 322-12 et R 322-72 du code des procédures civiles d'exécution ;

- que la servitude susvisée s'impose, étant rappelé qu'elle est antérieure au prononcé du jugement d'adjudication ;

- que M. et Mme [J] ne peuvent pas non plus former de contestations relatives à cette servitude, et ce d'autant plus qu'ils en connaissaient l'existence.

La société Crédit Foncier de France avait demandé à la Cour d'infirmer le jugement et de :

- fixer une date de vente sur réitération des enchères, comprise entre deux et quatre mois à compter du prononcé de la décision ;

- condamner solidairement M. et Mme [J] ainsi que la SARL immobilière Atho au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les condamner solidairement aux dépens de première instance et d'appel.

Dans leurs conclusions notifiées le 9 décembre 2022, M. et Mme [J] ont répliqué :

- que la décision du juge de l'exécution est insusceptible d'appel, conformément aux dispositions de l'article R 322-68 du code des procédures civiles d'exécution ; que dans son arrêt, la Cour de cassation n'a pas jugé cet appel recevable mais s'est contentée de reprocher à la Cour d'appel de Paris de ne pas avoir vérifié si les demandes de la société Crédit Foncier de France ne constituaient pas d'autres prétentions ouvrant l'appel de leurs chefs ;

- que le droit de solliciter la réitération des enchères n'est pas indépendant des contestations portant sur le certificat de non paiement ; qu'en effet, aucune vente sur réitération des enchères ne peut intervenir sans ledit certificat de non paiement ;

- que la société Crédit Foncier de France demande à la Cour de fixer une date de vente, mais il s'agit là d'une mesure d'administration judiciaire sur laquelle la présente juridiction ne peut statuer ;

- que l'appel est donc irrecevable ;

- que Mme [J] n'a pas la qualité de débitrice vis-à-vis de la société Crédit Foncier de France ;

- que la créance, constatée par un jugement rendu par le Tribunal de grande instance de Créteil le 14 juin 2011 et un autre jugement du 28 février 2006, est prescrite ;

- que seule Mme [J] est propriétaire de l'assiette foncière cadastrée T n° [Cadastre 1], alors que le lot n° 258 est en copropriété et qu'il existe une servitude de passage au bénéfice dudit lot ; que ce dernier, à l'état de jardin, n'est pas visé dans l'adjudication et n'est pas délimité ; que la demande de licitation de ce lot a été rejetée ;

- qu'il était pourtant nécessaire de mentionner cette servitude dans le cahier des conditions de vente comme il est dit à l'article R 322-10 du code des procédures civiles d'exécution ;

- que Mme [J] n'était titulaire que d'un droit de jouissance sur le lot n° 101, qui s'est éteint lorsqu'il a été intégré à la parcelle cadastrée T n° [Cadastre 1] ;

- qu'en outre le sol n'est pas compris dans l'assiette de la saisie immobilière, mais uniquement le bâti ;

- que toute modification du cahier des conditions de vente ou dire relatif à la servitude aurait dû intervenir avant la première vente ; qu'il n'est pas possible de procéder à des modifications avant la seconde vente, laquelle doit se faire aux mêmes conditions que la première ;

- que l'arrêt de cette Cour en date du 9 février 2018 ayant prononcé la résolution de la vente a été rendu au mépris des dispositions de l'article 1656 du code civil qui permet à l'acquéreur de payer le prix uniquement s'il a reçu une sommation ;

- que la signification du certificat de non paiement est dès lors sans effet, et la poursuite de la procédure par la société Crédit Foncier de France irrecevable.

M. et Mme [J] ont en conséquence demandé à la Cour de :

- déclarer l'appel irrecevable ;

- débouter la société Crédit Foncier de France de ses demandes ;

- la condamner au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens.

Dans ses conclusions notifiées le 28 juillet 2022, la SARL immobilière Atho a soutenu :

- que l'adjudication prononcée le 10 octobre 2013 a été annulée par le Tribunal de grande instance de Créteil le 15 avril 2016 ; qu'en effet, elle avait refusé de régler le prix en raison d'un vice rédhibitoire, à savoir l'existence d'une servitude, figurant dans l'acte notarié du 24 juillet 2008 qui avait été publié au service de la publicité foncière de [Localité 8] 4 le 7 octobre 2008, volume 2008 P n° 6617, ladite servitude n'étant pas mentionnée au cahier des conditions de vente ;

- que si elle avait eu connaissance de celle-ci, elle n'aurait pas enchéri ;

- que la société Crédit Foncier de France n'avait pas d'intérêt à agir eu égard à la prescription de l'action en recouvrement, étant rappelé que seul M. [J] avait la qualité de débiteur vis-à-vis de ladite société et non pas Mme [J] ;

- que le jugement n'est pas susceptible d'appel, car la demande relative à la réitération des enchères, qui n'est que la conséquence de l'irrecevabilité des contestations du certificat de non-paiement, eu égard au lien d'interdépendance entre les deux, est tranchée nécessairement en dernier ressort ;

- que la demande de fixation d'une nouvelle date d'audience de vente doit d'ailleurs se faire par requête, conformément à l'article R 322-69 alinéa 2 du code des procédures civiles d'exécution ;

- qu'en outre la réitération des enchères est impossible ;

- que la Cour d'appel de Paris a indiqué dans son arrêt du 9 février 2018 que la société Crédit Foncier de France peut seulement engager une nouvelle vente ou se prévaloir de la résolution de la précédente, mais ce point n'a pas été tranché dans le dispositif de cet arrêt, qui seul est pourvu de l'autorité de chose jugée ;

- que l'article 1638 du code civil permet à l'acquéreur, qui apprend que le bien acheté est grevé d'une servitude, de solliciter la résolution de la vente ;

- que de plus, en cas de réitération des enchères, la nouvelle vente ne peut avoir lieu qu'aux charges et conditions de la précédente, comme il est dit à l'article R 322-66 du code des procédures civiles d'exécution ;

- qu'en raison de l'existence de la servitude litigieuse, le bien ne pourra être revendu qu'à un prix inférieur et elle risque d'être tenue au paiement de la différence entre les deux prix, conformément à l'article L 322-12 du code des procédures civiles d'exécution ;

- qu'il incombe à la société Crédit Foncier de France de dresser un nouveau cahier des conditions de vente.

La SARL immobilière Atho a en conséquence demandé à la Cour de :

- déclarer la société Crédit Foncier de France irrecevable en ses demandes ;

- déclarer l'appel irrecevable ;

- confirmer le jugement en ce qu'il a rejeté la demande de réitération des enchères ;

- déclarer recevable sa demande de résolution de la vente ;

- condamner la société Crédit Foncier de France au paiement des sommes de 12 888,92 euros, 7 397,94 euros et 3 218 euros au titre des frais :

- la condamner au paiement de la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- la condamner aux dépens.

Par message RPVA en date du 25 janvier 2023, la Cour a invité les parties à présenter leurs observations sur :

- la fin de non-recevoir soulevée d'office, tirée de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 9 février 2018, s'agissant de la demande de la SARL immobilière Atho relative à la recevabilité de la demande de résolution de la vente ;

- l'irrecevabilité de la demande en paiement présentée par la SARL immobilière Atho au titre des frais, s'agissant d'une demande nouvelle.

Dans une note en délibéré en date du 26 janvier 2023, la société Crédit Foncier de France a indiqué :

- que dès lors que la SARL immobilière Atho n'a pas réglé le prix elle s'expose à une réitération des enchères et ne peut pas, en revance, solliciter la résolution de la vente, si bien que la demande relative à celle-ci est irrecevable ; que la présente Cour a statué en ce sens dans son arrêt du 9 février 2018 ;

- que la demande en paiement des frais présentée par la SARL immobilière Atho n'est pas nouvelle car elle avait été soumise au Tribunal de grande instance de Créteil, mais l'arrêt de cette Cour en date du 9 février 2018 ayant infirmé ledit jugement, la demande est désormais irrecevable.

La SARL immobilière Atho a fait valoir dans une note en délibéré du 27 janvier 2023 :

- que l'arrêt du 9 février 2018 n'a pas statué sur le sort de la demande d'annulation de la vente aux enchères ;

- que sa prétention au titre des frais n'est pas une demande nouvelle, n'ayant pas pu être formée dans le cadre de l'incident tranché dans le jugement dont appel, lequel ne statuait que sur une demande de réitération des enchères.

Les autres parties n'ont pas répondu avant l'expiration du délai à elles imparti (jusqu'au 30 janvier 2023 à 16 heures).

MOTIFS

L'arrêt de la Cour de cassation est ainsi rédigé : (...) Pour déclarer l'appel de la banque irrecevable, l'arrêt retient que le premier juge a bien été saisi par la Société immobilière Atho d'une contestation du certificat prévu à l'article R 322-67 du code des procédures civiles d'exécution et qu'il importe peu que le premier juge ait été saisi d'autres demandes, notamment par la banque aux fins de réitération des enchères, et ait statué sur celles-ci. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

La Cour de cassation n'a donc pas tranché la question de savoir si le jugement était susceptible d'appel en ce qu'il avait rejeté la demande de la société Crédit Foncier de France à fin de réitération des enchères, et de fixation d'une date de vente ; elle a seulement reproché à la Cour d'appel de Paris de s'être contentée de dire que dès lors que ledit jugement tranchait une contestation portant sur le certificat de non-paiement, il ne pouvait être frappé d'appel, sans rechercher si d'autres demandes n'avaient pas été examinées.

Il s'avère que le jugement en question a expressément tranché d'autres contestations que celles portant sur le certificat de non-paiement, puisqu'il a débouté la société Crédit Foncier de France de ses prétentions au titre de la réitération des enchères et de la fixation d'une date de vente, prétentions qu'elle reprend dans le cadre de la présente instance. Tant les époux [J] que la SARL immobilière Atho soutiennent qu'eu égard au lien nécessaire entre le certificat de non-paiement et la revente du bien sur réitération des enchères, lesdites prétentions ont été rejetées en dernier ressort.

Conformément à l'article R 322-67 du code des procédures civiles d'exécution, toute personne qui poursuit la réitération des enchères se fait délivrer par le greffe un certificat constatant que l'adjudicataire n'a pas justifié du versement du prix ou de sa consignation ou du paiement des frais taxés ou des droits de mutation.

La personne qui poursuit la réitération des enchères fait signifier le certificat au saisi, à l'adjudicataire et, le cas échéant, au créancier ayant sollicité la vente.

Outre les mentions prescrites pour les actes d'huissier de justice, la signification faite à l'acquéreur comporte, à peine de nullité :

1° La sommation d'avoir à payer le prix, les frais taxés et les droits de mutation dans un délai de huit jours ;

2° Le rappel des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 322-12 et des articles R 311-6, R 322-56, R 322-58, R 322-68, R 322-69 et R 322-72.

L'article R 322-68 du même code dispose que l'adjudicataire peut contester le certificat dans un délai de quinze jours suivant sa signification. La décision du juge de l'exécution statuant sur cette contestation n'est pas susceptible d'appel.

S'il est exact qu'une réitération des enchères ne peut intervenir qu'après délivrance d'un certificat de non-paiement et que le juge de l'exécution statue sur les contestations portant sur celui-ci en dernier ressort, il n'en demeure pas moins que d'autres contestations peuvent être formées par les parties, notamment sur la régularité de la signification dudit certificat, ou encore, comme ici, sur les conditions de la vente et la consistance des biens vendus. Et aucun texte ne prévoit que celles-ci sont tranchées en dernier ressort, y compris lorsqu'elles sont formées à l'occasion d'une procédure de réitération des enchères, alors que l'article R 311-7 alinéa 1er du code des procédures civiles d'exécution dispose que les jugements rendus en matière de saisie immobilière sont, sauf dispositions contraires, susceptibles d'appel.

Le présent appel est donc recevable.

Sur le fond, il convient de faire application de l'article 1037-1 alinéa 6 du code de procédure civile, et de considérer que l'appelante s'en tient aux moyens soumis à la Cour d'appel de Paris dans l'instance ayant abouti à l'arrêt cassé.

L'article R 322-69 du code des procédures civiles d'exécution prévoit que faute pour l'adjudicataire de satisfaire à la sommation qui lui a été faite, l'immeuble est remis en vente par la voie d'une nouvelle adjudication.

La nouvelle audience de vente est fixée par le juge de l'exécution sur requête de la partie qui poursuit la réitération des enchères, à une date comprise dans un délai de deux à quatre mois suivant la date de la signification du certificat du greffe à l'acquéreur.

L'article R 322-66 dispose que lorsque le bien est remis en vente à la demande du créancier poursuivant, il l'est aux conditions de la première vente forcée.

Or il est constant que le bien litigieux est grevé d'une servitude de passage au bénéfice du lot n° 258, lequel est en copropriété, à l'état de jardin, et qu'elle n'est pas visée dans l'adjudication ; la demande de licitation de ce lot a été rejetée par une décision définitive, à savoir le jugement du 7 avril 2015, rendu par le Tribunal de grande instance de Créteil.

L'existence de cette servitude a été tue lors de la première vente, et ce au mépris des dispositions de l'article R 322-10 du code des procédures civiles d'exécution, qui prévoient que le cahier des conditions de vente doit comporter notamment l'indication des servitudes grevant l'immeuble saisi. Force est de constater que lors de la première vente aux enchères, les acquéreurs éventuels, et surtout l'adjudicataire, la SARL immobilière Atho, n'ont pas été informés de l'existence de la servitude litigieuse qui déprécie le bien. Cela est d'autant plus regrettable que l'acte notarié du 24 juillet 2008 opérant retrait de la copropriété et attribution à Mme [J] du pavillon susvisé, et constitution d'une servitude pour piétons au bénéfice du bien sis [Adresse 3] [Adresse 3] et [Adresse 3], désigné comme fonds dominant, avait été régulièrement publié au service de la publicité foncière de [Localité 8] 4 le 7 octobre 2008, volume 2008 P n° 6617.

Dans ces conditions, le bien ne saurait être remis en vente dans le cadre d'une réitération des enchères dans de nouvelles conditions, à savoir avec l'information donnée aux éventuels acquéreurs de l'existence de la servitude. Il sera relevé qu'en tant qu'adjudicataire défaillant, la SARL immobilière Atho serait tenue au paiement de la différence entre les deux prix de vente, conformément à l'article L 322-12 du code des procédures civiles d'exécution, et celle-ci risque d'être importante car la valeur du bien grevé d'une servitude est nécessairement inférieure à celle qui serait la sienne si aucune servitude n'existait.

La nouvelle vente du bien ne pouvant intervenir en cet état, le jugement est confirmé.

La SARL immobilière Atho demande à la Cour de déclarer recevable la demande de résolution de la vente, mais cette demande se heurte à la fin de non-recevoir tirée de l'autorité de chose jugée attachée à l'arrêt rendu par cette Cour le 9 février 2018, ayant d'ores et déjà déclaré irrecevable ladite demande, en statuant comme suit : 'dit que la SARL immobilière Atho est irrecevable en sa demande (de résolution de la vente) '.

La SARL immobilière Atho a également réclamé la condamnation de la société Crédit Foncier de France au paiement des frais (soit 12 888,92 euros, 7 397,94 euros et 3 218 euros).

Selon l'article 564 du code de procédure civile, à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait. L'article 566 permet toutefois aux parties d'ajouter aux prétentions soumises au premier juge des demandes qui en sont l'accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

La demande susvisée n'a pas été présentée devant le juge de l'exécution alors qu'il incombait à l'adjudicataire de la former dans ce cadre, et ce, même si le juge de l'exécution statuait à l'occsaion d'une demande de réitération des enchères ; il importe peu que la SARL immobilière Atho l'ait formée à l'occasion d'une autre procédure devant le Tribunal de grande instance de Créteil. Cette demande doit en conséquence être déclarée irrecevable.

La société Crédit Foncier de France, qui succombe en ses prétentions, sera condamnée au paiement de la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, au bénéfice de la SARL immobilière Atho, la demande formée par les débiteurs étant rejetée, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

- DECLARE l'appel recevable ;

- CONFIRME le jugement en date du 7 novembre 2019 ;

- DECLARE irrecevable la demande de la SARL immobilière Atho relative à la recevabilité de sa demande de résolution de la première vente ;

- DECLARE irrecevable la demande de la SARL immobilière Atho en paiement des frais ;

- REJETTE la demande de M. [I] [J] et Mme [V] [J] en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE la société Crédit Foncier de France à payer à la SARL immobilière Atho la somme de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE la société Crédit Foncier de France aux dépens d'appel.

Le greffier, Le président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 1 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 22/07885
Date de la décision : 23/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-23;22.07885 ?
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