REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D'APPEL DE PARIS
Pôle 5 - Chambre 9
ARRET DU 23 FEVRIER 2023
(n° , 4 pages)
Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 18/28760 - N° Portalis 35L7-V-B7C-B67IF
Décision déférée à la Cour : Jugement du 27 Novembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de PARIS - RG n° 15/08205
APPELANT
Monsieur [H] [Y]
né le [Date naissance 1] 1935 à [Localité 8] (93)
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représenté par Me Anne-marie MAUPAS OUDINOT, avocat au barreau de PARIS, toque : B0653
INTIMEES
Madame [B] [C]
[Adresse 5]
[Localité 7]
défaillante
SARL LES GOURMANDISES DE CHINE
N° SIRET : 483 201 927
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Luc JEANNIN, avocat au barreau de PARIS, toque : A0347
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions de l'article 804 et suivants du code de procédure civile, l'affaire a été débattue le 19 janvier 2023, en audience publique, les parties ne s'y étant pas opposées, devant :
Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Isabelle ROHART, Conseillère
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de: Madame Sophie MOLLAT, Présidente
Madame Isabelle ROHART, Conseillère
Madame Déborah CORICON, Conseillère
GREFFIERE : Madame FOULON, lors des débats
ARRET :
- par défaut
- rendu par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.
- signé par Madame Sophie MOLLAT, Présidente et par Madame FOULON, Greffière.
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M. [H] [Y], aujourd'hui retraité, a exercé la profession d'expert-comptable jusqu'au mois de février 2011, date a laquelle il a cédé son cabinet à la société CMLG. Mme [B] [C], qui avait été embauchée par le cabinet de M. [Y] en qualité de comptable, a poursuivi ses fonctions auprès de la société CMLG en en devenant associée à hauteur de 10%.
La société Les gourmandises de Chine, qui exerce une activité de restauration depuis 2005, a confié au cabinet [Y] la mission de tenir sa comptabilité, établir ses déclarations fiscales et sociales et établir les bulletins de paie du personnel.
A l'occasion d'une absence de Mme [C] étaient découverts des détournements commis au préjudice de la société Les gourmandises de Chine sur les années 2009, 2010, 2011, 2012, 2013 et 2014.
La société Les gourmandises de Chine déposait plainte avec constitution de partie civile et Mme [C] était condamnée par jugement du tribunal correctionnel de Paris du 23 juin 2017 du chef d'abus de confiance à 6 mois d'emprisonnement avec sursis et à payer à la société Les gourmandises de Chine la somme de 249 770, 40 euros à titre de dommages et intérêts, et 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article 475-1 du code de procédure pénale.
La société Les gourmandises de Chine assignait M. [Y] devant le tribunal de grande instance de Paris sur le fondement des dispositions de l'article 1384 du code civil. Par jugement du 27 novembre 2018, M. [Y] était condamné in solidum avec Mme [C] à payer à la société Les gourmandises de Chine les sommes de 56 709, 81 euros et 193 060, 59 euros à titre de dommages et intérêts.
Par déclaration du 24 décembre 2018, M. [Y] a interjeté appel de ce jugement.
Une médiation a été ordonnée le 6 février 2020. Elle n'a pas permis aux parties de trouver un accord.
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Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 19 septembre 2019, M. [H] [Y] demande à la cour de :
Le Déclarer tant recevable que bien fonde en son appel,
Y faisant droit,
Infirmer le jugement entrepris et statuant a nouveau :
Débouter la sociéte LES GOURMANDISES DE CHINE de l'ensemble de ses demandes, fins et conclusions,
Constater le caractère intentionnel des faits reproches à Mme [C] en réparation desquels la sociéte LES GOURMANDISES DE CHINE demande la condamnation solidaire de Monsieur [H] [Y] et le détachement des fonctions habituelles de la salariée
Subsidiairement, Condamner Mme [C] à le garantir des condamnations qui pourraient être prononcées a son encontre et à rembourser à celui-ci toutes sommes qu'il serait amené a verser a la société LES GOURMANDISES DE CHINE en exécution de l'arrêt a intervenir,
Condamner la société LES GOURMANDISES à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, outre les entiers dépens.
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Dans ses conclusions notifiées par voie électronique le 19 juin 2019, la société Les gourmandises de Chine demande à la cour de :
Confirmer le jugement du 27 novembre 2018 en ce qu'il a condamné M. [H] [Y], in solidum avec Mme [B] [C], à lui payer la somme de 56 709, 81 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice né du détournement de fonds opéré par Mme [C].
Condamner solidairement Mme [B] [C], M. [H] [Y] et la société CMLG à lui payer une somme de 5000 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Les condamner en tous les dépens.
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Mme [B] [C], bien que régulièrement intimée, n'a pas constitué avocat.
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M. [Y] fait valoir que les faits reprochés à Mme [C] ont un caractère intentionnel, ont été commis hors de ses fonctions, à des fins étrangères à ses attributions et sans son autorisation, de sorte que les dispositions de l'article 1384 ancien du code civil ne peuvent s'appliquer.
Il fait valoir que la société Les gourmandises de Chine a volontairement remis à Mme [C] des chèques signés non libellés, en raison de relations de confiance et d'amitié liant Mme [C] à la famille [D], propriétaire de la société victime, que celle-ci les a détournés en masquant ses actes par des manoeuvres frauduleuses, de sorte qu'il ne peut lui être reproché un quelconque manquement à son devoir de contrôle de sa préposée.
Il ajoute que la société a demandé à sa préposée un travail supplémentaire en établissant ses chèques, non prévu par la lettre de mission et non rémunéré, qu'elles s'est ainsi conduite en donneur d'ordre à son insu.
Il demande donc l'infirmation du jugement et à tout le moins que Mme [C] soit condamnée à le garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre.
La société Les gourmandises de Chine confirme qu'une confiance absolue était accordée à Mme [C] par la famille [D], mais que celle-ci en tant que salariée du cabinet [Y] puis de la société CMLG, a agi sur son lieu et pendant son temps de travail, avec les moyens mis à sa disposition par son employeur pour la réalisation de sa mission et pour le compte de ce dernier ; qu'il est dès lors indifférent qu'elle ait agi sans autorisation de son employeur et ait excédé les limites de sa mission (motivation du tribunal).
Aux termes des dispositions de l'article 1384 du code civil dans sa version applicable aux faits de l'espèce : 'On est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde (...) Les maîtres et commettants, du dommage causé par leurs domestiques et préposés dans les fonctions auxquelles ils les ont employés'.
Le commettant ne s'exonère de sa responsabilité que si son préposé a agi hors des fonctions auxquelles il était employé, sans autorisation, et à des fins étrangères à ses attributions.
En l'espèce, Mme [C] tenait la comptabilité de la société Les gourmandises de Chine dans le cadre de ses fonctions salariées au sein du cabinet d'expertise comptable [Y] jusqu'en février 2011, avec autorisation de son employeur.
En utilisant les moyens de paiements de la société Les gourmandises de Chine à des fins frauduleuses, Mme [C] a incontestablement commis une faute intentionnelle pour laquelle elle a été reconnue coupable sous la qualification d'abus de confiance par le tribunal correctionnel de Paris le 23 juin 2017.
Cependant, ces moyens de paiement lui avaient été remis dans le cadre de l'exercice normal de ses fonctions, à savoir sur son lieu et temps de travail, pour le compte de son employeur, et afin de lui permettre de réaliser la mission comptable que la société Les gourmandises de Chine avait confiée au cabinet [Y]. Il en résulte que Mme [C] ne s'est pas placée hors de l'exercice de ses fonctions pour commettre les faits pour lesquels elle a été pénalement condamné.
La circonstance que la société Les gourmandises de Chine ait confié des chèques signés mais non remplis à Mme [C] en raison de l'existence d'un lien d'amitié ne saurait exonérer son employeur, M. [Y], de sa responsabilité sur le fondement des dispositions précitées de l'article 1384 du code civil dans sa version applicable aux faits de l'espèce.
Il y a donc lieu de confirmer le jugement qui a condamné in solidum M. [Y] avec Mme [C] à réparer le dommage ainsi causé à la société Les gourmandises de Chine, et condamné Mme [C] à garantir M. [Y] de cette condamnation dans la mesure où celle-ci a commis une infraction pénale intentionnelle.
M. [Y], qui succombe, sera condamné à payer la somme de 1 000 euros à la société Les gourmandises de Chine sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Confirme le jugement attaqué,
Y ajoutant,
Condamne M. [H] [Y] à payer la somme de 1 000 euros à la société Les gourmandises de Chine sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne M. [H] [Y] aux dépens de l'instance.
La greffière La présidente