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20/02/2023 | FRANCE | N°21/09265

France | France, Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 10, 20 février 2023, 21/09265


REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS







COUR D'APPEL DE PARIS



Pôle 5 - Chambre 10



ARRÊT DU 20 FEVRIER 2023



(n° , 6 pages)



Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09265 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDVP3



Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2021 -TJ de PARIS RG n° 18/11192





APPELANT



Monsieur [M] [P]

Domicilié [Adresse 3]

[Localité 9]



Représenté par Me Maurice CASTEL de l

a SELEURL MC LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : C0054

Représenté par Me Alexandre RETAMAL de la SELEURL SELARL WILLING & ABLE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0239





INTIMEES



S.A. BPCE BAIL...

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D'APPEL DE PARIS

Pôle 5 - Chambre 10

ARRÊT DU 20 FEVRIER 2023

(n° , 6 pages)

Numéro d'inscription au répertoire général : N° RG 21/09265 - N° Portalis 35L7-V-B7F-CDVP3

Décision déférée à la Cour : Jugement du 25 Mars 2021 -TJ de PARIS RG n° 18/11192

APPELANT

Monsieur [M] [P]

Domicilié [Adresse 3]

[Localité 9]

Représenté par Me Maurice CASTEL de la SELEURL MC LEGAL, avocat au barreau de PARIS, toque : C0054

Représenté par Me Alexandre RETAMAL de la SELEURL SELARL WILLING & ABLE, avocat au barreau de PARIS, toque : C0239

INTIMEES

S.A. BPCE BAIL

ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE NATIXIS BAIL

RCS de PARIS sous le n°309 112 605,

Ayant son siége social

[Adresse 7]

[Localité 9]

Prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Représentée par Me Laurence TURPIN de la SCP SCP SENTEX - NOIRMONT- TURPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R036

S.A. BPIFRANCE FINANCEMENT ANCIENNEMENT DÉNOMMÉE OSEO

F INANCEMENT

RCS de Créteil sous le n°320 252

Ayant son siége social

[Adresse 2]

[Localité 10]

Prise en la personne de son représentant légal

Représentée par Me Laurence TURPIN de la SCP SCP SENTEX - NOIRMONT- TURPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : R036

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

COMPOSITION DE LA COUR :

L'affaire a été débattue le 21 Novembre 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Edouard LOOS, Président de chambre

Madame Christine SIMON-ROSSENTHAL, Présidente

Monsieur Jacques LE VAILLANT, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l'audience par Madame SIMON-ROSSENTHAL, Présidente dans les conditions prévues par l'article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie MOLLÉ

ARRÊT :

- contradictoire

- par mise à disposition de l'arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article 450 du code de procédure civile.

- signé par Edouard LOOS, Président et par Sonia JHALLI, Greffière présente lors du prononcé.

Faits et procédure

Suivant acte authentique reçu par Me [B], en date du 2 juillet 2010, la société Natixis Bail (devenue Bpce Bail) et la société Oseo Financement (devenue Bpifrance Financement), crédit-bailleurs, et la société civile immobilière Champs Cpi, crédit-preneur, ont conclu un contrat de crédit-bail portant sur un immeuble à usage de bureaux situé à [Adresse 11] et [Adresse 12], cadastré section am n°[Cadastre 1], pour un montant de 22 591 000 euros hors taxes.

L'article b13 du contrat de crédit-bail prévoyait la caution solidaire de M. [M] [P] pour garantir le paiement et le remboursement de toutes les sommes pouvant être dues en principal, intérêts, frais, indemnités, commissions et accessoires, à concurrence d'un montant maximum de 2 700 000 euros.

L'acte de crédit bail immobilier prévoyait également le nantissement, au profit du bailleur, des parts sociales détenues par les associés dans la Sci Champs Cpi.

L'acte précisait que M. [W] [T] représentait la Sci Champs Cpi en vertu d'une décision prise par l'assemblée générale de la société le 1er juillet 2010 et représentait également M. [P] en vertu d'une procuration donnée par acte authentique, reçu par Me [F], du 1er juillet 2010.

La Sci Champs Cpi a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire le 31 mars 2016, transformée en liquidation judiciaire le 22 mars 2018.

Les 17 mai 2016 et 23 avril 2018, les sociétés Natixis Bail et Oseo Financement ont déclaré leurs créances d'un montant de 3 435 120 euros et de 22 551 841,81 euros, cette dernière en suite de la résiliation du contrat de crédit bail intervenue le 6 avril 2018.

Par courrier du 28 mai 2018, les sociétés Natixis Bail et Oseo Financement ont mis en demeure M. [P] de payer la somme de 2 700 000 euros en exécution de son engagement de caution.

Par acte d'huissier de justice en date du 24 septembre 2018, les sociétés Natixis Bail et Oseo Financement ont fait assigner en paiement M. [P] devant le tribunal judiciaire de Paris.

Le 3 octobre 2018, elles ont inscrit une hypothèque judiciaire provisoire volume 2018 V2210 sur les

biens et droits immobiliers sis [Adresse 4] cadastrés DZ [Cadastre 5], lots 1, 8, 10, 12, 44, 47, 48, 49, et 50, et sur les biens et droits immobiliers sis [Adresse 8] cadastrés EA [Cadastre 6], lot 50 appartenant à Monsieur [M] [P]. L'inscription a été dénoncée au débiteur le 9 octobre 2018.

Monsieur [P] a saisi le juge de l'exécution aux fins d'obtenir la mainlevée de l'inscription d'hypothèque susvisée.

Par jugement du 18 février 2019, le juge de l'exécution a donné mainlevée de ladite inscription d'hypothèque.

Par ordonnance en date du 21 mai 2019, le Premier Président de la cour d'appel de Paris a suspendu l'exécution provisoire.

Par arrêt du 5 décembre 2019, devenu définitif, la cour d'appel de Paris a infirmé le jugement rendu par le juge de l'exécution du 18 février 2019 en toutes ses dispositions.

Par jugement rendu le 25 mars 2021, le tribunal judiciaire de Paris a statué comme suit :

- déclare recevable la demande en annulation de l'engagement de caution de M. [M] [P] par acte authentique du 2 juillet 2010 ;

- déboute M. [M] [P] de l'intégralité de ses demandes ;

- condamne M. [M] [P] à payer aux sociétés Bpce Bail et Bpifrance Financement la somme de 2 700 000 euros au titre de son engagement de caution, avec intérêts à compter du 24 septembre 2018 au taux moyen mensuel du marché monétaire (TMM) pratiqué le jour de l'échéance impayée, majorée de 4 % ;

- condamne M. [M] [P] à payer aux sociétés Bpce Bail et Bpifrance Financement la somme 2 000 euros, chacune, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamne M. [M] [P] aux entiers dépens ;

- ordonne l'exécution provisoire du présent jugement.

Par déclaration du 13 mai 2021, Monsieur [M] [P] a interjeté appel du jugement.

Par dernières conclusions signifiées le 12 novembre 2022, M. [M] [P] demande à la cour de :

- déclarer Monsieur [M] [G] [P] recevable et bien fondé en son appel,

- se déclarer incompétente pour statuer sur la demande d'irrecevabilité de l'appel formée par les sociétés Natixis Bail et Bpifrance Financement,

- déclarer les sociétés Natixis Bail et Bpifrance Financement mal fondées en leur prétention de faire constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel,

- infirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris, et, statuant à nouveau,

- constater la nullité des engagements de caution invoqués à l'encontre de Monsieur [M] [P] ;

en conséquence,

- débouter les sociétés Natixis Bail et Bpifrance Financement de l'ensemble de leurs demandes ;

- condamner les sociétés Natixis Bail et Bpifrance Financement à payer à Monsieur [M] [G] [P] les dépens de première instance et d'appel, ainsi qu'une indemnité d'un montant de 10 000 euros, solidairement entre elles, par application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions signifiées le 4 novembre 2022, les sociétés Bpce Bail anciennement dénommée Natixis Bail et BPI France Financement anciennement dénommée Oseo Financement demandent à la cur de les dire bien fondées en leurs conclusions,

à titre principal, débouter Monsieur [M] [P] en sa demande d'incompétence de la cour statuer sur l'absence d'effet dévolutif, en application des articles L. 311-1 du code de l'organisation judiciaire et 542 du code de procédure civile.

vu les dispositions des articles 901-4 et 562 du code de procédure civile,

- dire que la déclaration d'appel déposée le 13 mai 2021 par le conseil de l'appelant est privée de tout effet dévolutif,

- par conséquent, dire que la cour n'est saisie d'aucune demande de la part de l'appelant,

à titre subsidiaire, vu les dispositions des articles 954 et 542 du code de procédure civile,

- dire que dans ses conclusions signifiées le 13 août 2021, l'appelant ne demande pas l'infirmation du jugement critiqué,

- par conséquent, dire que la cour ne peut que confirmer le jugement.

- titre très subsidiaire, dans l'hypothèse où la cour se considérerait saisie d'une demande de la part de Monsieur [M] [P], confirmer le jugement en date du 25 mars 2021 en toutes ses dispositions.

débouter Monsieur [M] [P] de toutes ses demandes, fins et conclusions.

y ajoutant, condamner Monsieur [M] [P] à payer à chacune des sociétés concluantes la somme de 3 000 €, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens d'appel, conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.

SUR CE,

Sur l'absence d'effet dévolutif de l'appel

Les intimées soutiennent, au visa des articles 901-4 et 562 du code de procédure civile, que la déclaration d'appel déposée le 13 mai 2021 par le conseil de l'appelant est privée de tout effet dévolutif.

Elles font valoir que, dans sa déclaration d'appel, l'appelant n'a pas visé pas les chefs de jugement critiqués et et n'a pas demandé l'infirmation du jugement. Elle précisent qu'elles ne sollicitent pas la nullité de la déclaration d'appel adverse mais que la cour se déclare non saisie, en application des dispositions de l'article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, applicable en l'espèce aux termes duquel «L'appel défère a' la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent. La dévolution ne s'opère pour le tout que lorsque l'appel tend a' l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. »

Elles ajoutent qu'en application des articles L. 311-1 du code de l'organisation judiciaire et 542 du code de procédure civile, seule la cour d'appel, dans sa formation collégiale, a le pouvoir de statuer sur l'absence d'effet dévolutif, à l'exclusion du conseiller de la mise en état dont les pouvoirs sont strictement définis à l'article 914 du code de procédure civile.

Elles précisent, s'agissant de l'indivisibilité de l'appel invoqué par M. [P], que le litige n'oppose Monsieur [M] [P] qu'à une seule partie formée par le pool des crédit-bailleurs. Elle précise que le jugement entrepris contient une disposition favorable à M. [P] sur la recevabilité de la demande qu'elles avaient contestés, soulevant la prescription de l'action.

Elles font valoir que les conclusions de Monsieur [M] [P] signifiées le 13 août 2021 ne respectent pas les dispositions de l'article 954 du code de procédure civile puisqu'elles ne comportent aucun demande d'infirmation du jugement frappé d'appel ni l'énoncé des chefs de jugement critiqué ; que la demande d'infirmation du jugement, formulée ultérieurement dans ses conclusions n°2 signifiées en réalité le 22 septembre 2022, et non le 13 août 2021, comme cela est mentionné à tort sur les conclusions n°2 de l'appelant, est irrecevable en ce qu'elle ne respecte pas les dispositions de l'article 910-4 précité ; qu'il tente de tromper la cour en présentant cette demande dans le dispositif de ses conclusions du 22 septembre 2022 qu'il a datées de façon erronée sur la page de garde au 13 août 2021 ; que cette demande d'infirmation du jugement est irrecevable au regard de l'article 910-4 du code de procédure civile car c'est une demande nouvelle qu'il devait présenter dans ses premières conclusions.

L'appelant soutient que la cour est incompétente pour statuer sur la demande d'irrecevabilité de l'appel formée par les sociétés Natixis Bail et Bpifrance Financement puisqu'il s agit d'un indicent de procédure relevant de la compétence du conseiller de la mise en état et mal fondées en leur demande de faire constater l'absence d'effet dévolutif de l'appel.

Il fait valoir que l'article 901-4 du code de procédure civile ne vise que les chefs du jugement auxquels l'appel est limité et que le jugement entrepris ne concerne aucune disposition susceptible de lui bénéficier, ayant été débouté de toutes ses demandes de sorte qu'il n'était pas obligé de reproduire le dispositif du jugement rendu. Il soutient que les dispositions des articles 901-4 et 562 du code de procédure civile sont contradictoires en ce que l'article 901-4 n'invoque les chefs du jugement critiqués et que les intimés invoquent la très légère modification de l'article 562 en vigueur avant 2017 qui est rédigé comme suit : « L'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou ceux qui en dépendent. La dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. » Il fait valoir que l'obligation est indivisible car contractée au profit de plusieurs créancier dont chacun peut demander l'exécution.

Ceci étant exposé, depuis le décret n° 217-871 du 6 mai 2017, l'article 901 4° du code de procédure civile dispose que la déclaration d'appel doit contenir, à peine de nullité les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Antérieurement à ce décret, la dévolution totale était le principe dès lors que l'appel n'était pas limité. La réforme issue de ce décret a redéfini l'objet de l'appel qui est désormais circonscrit par l'acte d'appel.

L'article 562 du code de procédure civile dispose que l'appel ne défère à la cour que la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément ou ceux qui en dépendent. La dévolution s'opère pour le tout lorsque l'appel n'est pas limité à certains chefs, lorsqu'il tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. 

Lorsque la déclaration d'appel tend à la réformation du jugement sans mentionner les chefs de jugement critiqués, l'effet dévolutif n'opère pas et aucune régularisation de la déclaration d'appel de ne peut intervenir par conclusions.

L'effet dévolutif de l'appel est sans rapport avec la nullité de l'acte d'appel et relève de la compétence de la cour à l'exclusion de celle du conseiller de la mise en état dont les pouvoirs sont strictement définis à l'article 914 du code de procédure civile.

En l'espèce il est mentionné sur la déclaration d'appel « Appel en cas d'objet du litige indivisible ». N'y figure aucune annexe. L'appelant n'a pas mentionné les chefs de jugement critiqués. L'appel ne tend pas à l'annulation du jugement et la question de l'indivisibilité ne se pose pas dès lors que l'objet du litige est la condamnation de M. [P] en paiement au titre de son engagement de caution contesté par ce dernier.

Ainsi, la mention figurant à la déclaration d'appel « Appel en cas d'objet du litige indivisible » alors que cette déclaration n'a pas été rectifiée par une nouvelle déclaration d'appel ne peut être regardée comme comportant la critique des chefs de jugement ni être régularisée par les conclusions au fond de l'appelant prises dans le délai requis énonçant les chefs critiqués du jugement de sorte que l'effet dévolutif n'a pas eu lieu et que la cour n'est pas saisie d'aucun chef de demande.

Monsieur [P] sera condamné aux dépens d'appel et débouté de sa demande d'indemnité de procédure. Il sera condamné sur ce même fondement à payer aux intimées la somme de 2 000 euros chacune.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Vu les articles 901 4° et 562 du code de procédure civile,

Dit que la cour est compétente pour statuer sur l'absence d'effet dévolutif de l'appel ;

Constate que la cour n'est saisie d'aucun chef de demande ;

Condamne Monsieur [M] [P] aux dépens d'appel ;

Déboute Monsieur [M] [P] de sa demande d'indemnité de procédure ,

Condamne Monsieur [M] [P] à payer aux sociétés Bpce Bail et Bpifrance Financement la somme de 2 000 euros chacune en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Le greffier, Le Président,


Synthèse
Tribunal : Cour d'appel de Paris
Formation : Pôle 5 - chambre 10
Numéro d'arrêt : 21/09265
Date de la décision : 20/02/2023

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2024
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.appel;arret;2023-02-20;21.09265 ?
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